29

Pour Shan, le deuil n’était pas une occasion personnelle. C’était une obligation professionnelle, une technique. Comment annoncer une mauvaise nouvelle à la famille de la façon la plus économique possible ?

La première fois, ç’avait été horrible. Elle se rappelait le visage incrédule d’une épouse qui avait embrassé son mari le matin, sans se dire qu’elle ne le reverrait peut-être jamais. Après ça, c’était devenu de plus en plus facile. À la fin, elle faisait ça comme une pro, aussi détachée qu’un acteur qui dit son texte. Les larmes finissaient par vous ronger. La colère poussait à commettre des erreurs s’il y avait une enquête à mener. Le plus raisonnable, c’était de se renfermer. S’isoler des émotions.

Malgré ça, son tout petit monde venait de perdre un deuxième enfant en moins d’un an. Le premier avait confirmé que les humains et les wess’har allaient s’affronter. Le deuxième était un conflit personnel, même si Lindsay ne l’apprit jamais.

— Je pourrai y arriver toute seule, dit Shan.

— Je ne peux pas courir ce risque. Tu aurais dû rester sur Wess’ej.

— Je ne peux pas l’abandonner sans explication. Attends ici.

Shan trouva Lindsay dans le réfectoire. Elle avait une mine affreuse, mais elle travaillait sur les inventaires, les yeux rivés sur le bloc posé sur ses genoux. À chaque item, un coup de stylet, puis un bip de confirmation de la base de données.

— Lin ?

— Coucou, répondit l’intéressée en levant les yeux.

— Je suis désolée.

— Ça va. Moi. Kris m’a fait une piqûre. Je ne vais pas m’écrouler.

— J’aurais aimé pouvoir t’aider.

— Tu ne pouvais pas faire de miracles. Mais merci.

— Tu ne veux pas te reposer ?

— Vraiment pas. On retourne à bord du Thétis dans moins d’une semaine. Amusant, non ? Retour à la case départ, comme s’il ne s’était rien passé du tout.

Shan pensa lui dire qu’elle pouvait toujours venir lui parler. Mais cette idée la dégoûtait. Comment pourrait-elle lui offrir son réconfort après avoir laissé faire sans agir ? Le bien et le mal n’auraient pas grand poids auprès de Lindsay, pour le moment ; Shan devait reconnaître qu’elle ne pourrait sans doute pas lui mentir.

Il ne faut pas pleurer avec eux. On ne servait plus à rien, dans ce cas, disait son vieux sergent. Elle avait pris une décision d’EnHaz, et elle l’assumerait en officier. On ne mélange pas les émotions et les événements. Comme ça, on pouvait gérer tout ce qui s’ensuivait.

— Lin, j’ai décidé de rester.

— Tu reviendras quand ?

— Non, définitivement.

Lin eut un regard vide. Peut-être l’injection de Hugel.

— Je te comprends. Okurt a très envie de te parler.

— Alors le problème est réglé. Je travaille pour le gouvernement wess’har.

— Quoi ?

— Ne pose pas de question, et ne dis à personne que tu m’as revue.

Shan se demanda comment quitter une personne qu’elle avait presque comptée comme une amie proche, dans cette intimité forcée du camp. Autant partir tout de suite.

Lin leva les yeux.

— Shan, j’aimerais que David soit enterré ici. Tu connais Josh mieux que personne ici. Tu pourrais le lui demander ?

— Bien sûr. (Hypocrite, hypocrite, hypocrite.) Je suis sûre que ça ne posera pas de problème.

— Enterré, Shan. Pas abandonné aux velourocs.

— Non, c’est promis.

Shan voulait demander pourquoi. Mais ça n’avait pas d’importance. De retour dans sa cabine, elle sortit sa veste d’uniforme et en retira les peluches de poussière. Elle ouvrit les scratchs bleus. Un son de crécelle.

Les graines. Bien sûr. Elle avait ouvert le paquet scellé de graines de tomates qu’elle avait volées sur Terre, mais ne les avait jamais plantées. Cela lui avait paru trop fort. Un lien définitif avec un monde qu’il lui faudrait quitter. À présent, elle pourrait avoir au moins un peu de son rêve. Une partie, seulement. Elle ne prendrait jamais sa retraite.

Elle fit un effort conscient pour se désinvestir. L’EnHaz n’existait probablement plus sur Terre, vu le poids que les corporations avaient pris. Mais, sur cette planète, il survivrait à travers elle. À jamais.

Elle se demanda où planter ses graines. Tout en réfléchissant, elle fut surprise par ses propres mains, pour la première fois.

Elle aurait pu jurer que des griffes commençaient à se dessiner.

Aras était fier de sa dextérité avec le verre. Puisque c’était une matière nécessaire, pourquoi ne pas la faire belle ? Il mit tout son art dans la pierre tombale de David Neville.

Il parcourut les fragments de verre rose et or et posa les meilleurs morceaux sur un torchon, pour former une image. Josh avait dit que des fleurs seraient appropriées.

Avec leur habituelle délicatesse, en silence, les colons avaient laissé Aras seul dans l’atelier où ils réparaient ou recyclaient généralement leurs objets. Il en était heureux. La succession des décès ne l’endurcissait toujours pas. Simplement, il devenait un peu plus expert, il reconnaissait les étapes du deuil. Comme la douleur, il savait que la peine culminait, puis refluait.

Mais, cette fois, il y avait une autre sensation en lui. Il tourna et retourna l’outil de découpage entre ses mains, essayant de préciser sa pensée.

De la culpabilité. De nouveau.

À présent, il pouvait se mesurer à l’aune des gethes. Il avait défié l’ordre naturel en un moment unique, parce qu’il le voulait. Les gethes qui arrivaient n’auraient pas hésité à répandre la c’naatat pour faire survivre l’enfant. Mais Shan avait refusé. Aras ne comprenait pas pourquoi, et cela le dévorait.

Il acheva son travail juste après les premiers rayons du matin, et porta ce monument au bord du périmètre de Constantine. Josh avait creusé un trou profond, et un emplacement pour la pierre tombale. Elle s’y inscrivit comme prévu. Il se recula, et la remarqua plus qu’il l’admira. Les jours de beau temps, le soleil la traverserait comme un vitrail désincarné et projetterait des couleurs vives sur la tombe. De vraies fleurs auraient fait un pauvre substitut à ce déluge.

Assis sur ses talons, Aras se demanda combien de ses convictions inébranlables s’écrouleraient dans les années à venir. Il n’était plus sûr de se connaître.

— C’est magnifique.

Shan l’avait suivi. À moins qu’ils soient suffisamment familiers pour qu’elle sache où il irait, ce qu’il ferait. Quoi qu’il en soit, il était heureux qu’elle soit là. Quand elle s’agenouilla à côté de lui, il lui posa la main sur l’épaule. Comme si elle était un frère de maison qu’il saluait.

— Je voulais que tout soit comme il faut avant que le capitaine Neville arrive, expliqua-t-il. Ceci allégera-t-il sa peine ?

— C’est… Eh bien, tu es quelqu’un de merveilleux, Aras. (Elle paraissait résignée. Il ne sentait rien.) C’était ce qu’il fallait faire.

— Shan, Josh a-t-il raison ? Y a-t-il une vie après celle-ci ?

— La partie rationnelle en moi te dira non, à moins que ce soit la forme que prend la physique quantique. Et l’autre moi ? (Elle regarda le paysage comme s’il pouvait lui donner une réponse.) Je ne veux pas qu’il y ait un au-delà. Il y a des gens que je ne supporterais pas de revoir.

— Pourtant, presque toutes les cultures humaines en parlent.

— Mais pas vous. Ni les isenj, n’est-ce pas ?

— Non. Je n’ai jamais rencontré d’autres gens qui l’évoquaient.

— Tous les miracles ont une explication ordinaire. Votre ville de perle est en fait couverte de merde d’insecte. La vie éternelle est un parasite. Les bulles de champagne sont les pets de colonies de levure. Même cette merveilleuse odeur qui monte du sol après la pluie d’été est une bactérie, l’actinomycetes. Ainsi va l’univers. À toi de choisir – regarde la surface fabuleuse, ou la croûte en dessous. Crois-moi, je meurs d’envie de voir le merveilleux. Mais je sais qu’il disparaîtra si j’y regarde d’un peu plus près.

— La mort de David Neville te déprime-t-elle ?

— Cela aussi, j’aimerais que ce soit le cas… Mais celle du bezeri m’attriste bien plus. Elle n’avait aucun sens.

— As-tu été tentée de sauver l’enfant, comme moi je t’ai sauvée ?

— Seulement le temps de savoir que je pourrais, et que je n’allais pas le faire. Ce n’était pas un moment réjouissant.

— Je suis impressionné de savoir que tu as plus de volonté que moi.

— La question est mauvaise. Je n’ai jamais connu David. Le vrai test aurait été de savoir ce que j’aurais fait si toi, tu avais été mourant. Si tu t’en veux encore de m’avoir infectée contre toutes les règles, laisse tomber. J’ai déjà oublié.

Aras eut un dernier regard critique pour le tombeau, déterminé à atteindre la perfection. Un autre humain disparu. Des centaines, au fil des ans, et des milliers de wess’har. Pourtant, c’était le premier qui le touchait à ce point. Était-ce la biochimie de Shan qui l’avait contaminé ? Ou simplement le produit des événements et du temps ?

Il voulait y voir plus de sens qu’un cycle d’atomes essentiels qui s’aggloméraient puis se dispersaient dans l’univers.

Pour une fois, il aurait voulu que Shan Frankland se trompe.

Les changements s’accéléraient, et les matinées de Shan commençaient à se ressembler. En se réveillant, à l’abri dans Constantine, elle avait à peu près trois secondes d’oubli avant que la réalité la rattrape. Ses premières pensées étaient pour les changements que la c’naatat avait pu opérer dans son corps.

Elle voyait la colonie comme un essaim de créatures. Pour les bactéries ou les virus, elle n’avait jamais eu cette approche. Pas de personnalité, rien qu’une entité collective nommée maladie – une relation réciproque, cause et effet, offre et demande. Mais elle savait qu’il n’y avait aucun remède à son antimaladie. La c’naatat continuerait ses améliorations incessantes pour l’éternité.

On la terraformait. Sa survie serait celle de la c’naatat. Elle prenait parfois conscience de la différence fondamentale entre les humains et son parasite : elle était une ressource qu’on préservait au lieu de l’exploiter.

Elle se lava le visage avec vigueur et commença à se brosser les dents. Le Suisse bipa dans sa commode.

— Eddie, tu arrives toujours aux meilleurs moments.

La voix d’Eddie était différente. Moins intime, moins chaleureuse.

— Où étiez-vous ?

— Dans la lune, dit-elle. Vraiment. On m’a convoquée sur F’nar. Je veux rester ici, et les matriarches aiment rencontrer les réfugiés avant de les accepter.

— Oh !

— Enfin, que puis-je pour vous ?

— C’est comme ça que vous vous voyez ? Une réfugiée ?

— Je n’ai pas envie de rentrer tout de suite. Un problème ?

— Je ne pense simplement pas que vous fassiez ça pour éviter l’enquête concernant Parekh, c’est tout.

— Je vous écoute, dit Shan en crachant dans le lavabo et en se rinçant la bouche.

— Je peux vous demander ce qu’il y avait dans votre Briefing refoulé ?

— Rien que vous ne sachiez déjà. M’assurer que la banque génétique était en sécurité pour la postérité.

— Alors, qui vous paie ?

— Pardon ?

— Qui vous paie pour le biotech wess’har ? J’ai du mal à imaginer que ce soit une corpo, même si vous seriez la personne idéale pour dissimuler ça. Donc, je me dis que c’est le gouvernement.

Shan était abasourdie. Déjà, qu’il ait compris le lien avec les wess’har. Mais surtout, qu’il imagine qu’elle marchandait du biotech pour son compte personnel ! Elle n’avait rien gagné en lui parlant de Green Rage. Il ne comprenait pas. Elle aurait dû s’en douter.

— Qu’est-ce qui vous fait dire ça ?

— Aras prend un obus au cul et repart à pied. Vous revenez fraîche comme un gardon des portes de la mort. Et j’ai parlé au ministre des Affaires étrangères isenj à propos de Mjat. C’naatat ? BA. BA.

Merde. Merde. Mais Eddie était là-bas, et elle ici. Ils ne pouvaient pas la prendre, Aras ou elle. Malgré cela… elle avait espéré que cela ne se saurait pas.

Tout finit par se savoir. Plus cela met longtemps, plus ça ressemble à une conspiration.

— Alors vous êtes planté, Eddie. Vous faites fausse route.

— J’aurais aimé que ce soit vrai, Shan. Vraiment.

— Vous n’avez pas idée de ce qui se passe. Je comprends ce que vous vous êtes dit, mais vous êtes à côté de la plaque.

— Une réponse directe m’aiderait bien. Pour qui faites-vous de la contrebande ?

— Vous avez idée du potentiel d’un article pareil ?

— Alors j’ai raison !

— Ce n’est pas à vendre. Quel que soit le prix. Je sais que vous ne m’écouterez pas, mais arrêtez de chercher.

La ligne retomba dans un mutisme entrecoupé de parasites. Arrêtez de chercher. On ne pouvait rien dire de pire à un journaliste.

Si. Elle aurait pu dire la vérité.

Les tayberries lui arrivaient à hauteur de poitrine, tenues par des tuteurs dans de petits dômes dispersés dans les champs. Shan prit les sécateurs et commença à couper les longues pousses, tenant délicatement le bout entre ses doigts et lâchant les pousses dans la brouette derrière elle. Répétitive comme elle l’était, la tâche l’apaisait.

De temps en temps, elle mangeait une baie oubliée pendant la récolte, la faisait éclater contre son palais, sucrée et veloutée. Elle ne voyait pas de façon plus agréable de passer la journée. Elle était prise dans le rythme. Quand Kristina Hugel arriva derrière elle, elle ne l’avait même pas entendue approcher.

— Alors, on gagne son pain ?

— Le jardinage, ça vide la tête.

— Vous devriez porter des gants. Regardez dans quel état vous êtes.

Shan regarda ses mains et ses bras. Une longue estafilade sur son avant-bras droit, qui suintait de sang. Le genre d’égratignure qu’on se faisait sur des ronces, et qu’on arrêtait de remarquer quand il faisait assez froid. Elle frotta la plaie.

— Vous devriez me laisser vous examiner, dit Hugel.

Shan baissa ses manches. Eddie avait parlé à Hugel. Elle savait. Il avait demandé confirmation des faits et lui avait soumis l’idée. Ou alors elle avait l’air très différente, sans qu’elle l’ait remarqué.

Si Hugel était au courant, ce n’était pas la fin du monde. Il faudrait qu’ils prélèvent des échantillons avant de pouvoir utiliser la c’naatat. Shan reprit sa taille.

— Non. Ce n’est rien. Enfin, vous vouliez me voir ?

— Eh bien… Vous ne rentrez pas avec nous.

— Je me plais bien, ici.

— Je ne me suis jamais souciée de savoir quels pouvaient être vos objectifs ici, mais on raconte des trucs assez incroyables.

Shan recula d’un pas, instinctivement, et leva les bras de la brouette entre Hugel et elle, pour en faire une barière. Pourraient-ils récupérer un parasite à partir du sang sur les tailles ? Elle les brûlerait. Elle ne pouvait pas courir de risque.

— Je ne vous aurais jamais crue du genre à écouter les rumeurs, Kris.

— Vous savez de quoi je parle ?

— À vous de me le dire. Les fables de tabloïds d’Eddie sur des extraterrestres indestructibles ? J’en ai entendu parler. (Elle s’en voulut aussitôt. Ce n’était pas juste de discréditer Eddie. Il avait fait son travail, trop bien.) Et, s’il a raison, serez-vous celle qui ira leur demander quelques sujets de vivisection ?

— Ce ne sera peut-être pas nécessaire. Et s’il y avait une source moins éloignée ?

Shan commença à s’éloigner. Elle était préparée à lâcher la brouette pour se mettre à courir, si besoin était. Elle pouvait courir, dans cet environnement. Bien plus vite que n’importe qui, à présent que les gènes d’Aras et de tous les autres avaient commencé à réorganiser les siens.

— Si ça existe, vous ne pourrez pas l’approcher, dit-elle en s’éloignant vers la colonie.

— C’est comme ça que vous avez réussi ? cria Hugel tout en la suivant d’un bon pas. Vous avez obtenu leur technologie à la dure, hein ? Qui vous paie ? Les Amériques ? Les Sinostates ?

Shan entendit les pas de Hugel se transformer en petite foulée de temps en temps.

— Vous ne me connaissez pas, Kris. Ne me jugez pas.

— Vous le portez. Vous avez en vous le fondement de toute une économie, et vous le savez.

Shan s’arrêta et se retourna. Son pistolet était dégainé avant même qu’elle décide de le sortir, et elle le tenait à deux mains. En mire, Hugel. Elles se figèrent toutes les deux. L’horreur et la surprise paraissaient mutuelles.

— Ne m’approchez pas, dit Shan. Je ne rentre pas, je n’ai rien vendu à personne, et je ne vous donnerai pas d’échantillon. Maintenant, allez vous faire voir.

— Pensez à ce que vous portez, insista Hugel.

— Une épidémie. Rien d’autre.

— Et vous allez laisser passer la chance de le développer, n’est-ce pas ?

— Par pitié, Kris, ne m’obligez pas à tirer. Je ne bluffe pas. Partez.

Hugel hésita un moment, puis se retourna pour s’éloigner d’un bon pas. Elle finit même par courir. Shan baissa son arme. Pour une fois, elle ne tremblait pas après coup. Apparemment, la c’naatat adoucissait la dégringolade de l’adrénaline. Ou alors elle était moins stressée et hésitait moins à tuer. À présent, tout le monde allait être au courant. Il lui suffirait de rester à l’écart et de faire repartir la mission dès que possible. Il lui restait une dernière carte, celle qui leur dirait où trouver le parasite ; c’était la carte qu’elle devrait conserver à tout prix.

Elle ne s’était jamais considérée comme une personne à principes. Trop souvent ces temps-ci, son sommeil était troublé par les souvenirs des règles qu’elle avait enfreintes et des vies qu’elle avait encore plus perturbées. Sans doute le sillage du Briefing refoulé. Ou bien, elle prenait lentement conscience qu’elle était allée trop loin.

Mais c’était cette capacité à aller trop loin – ou l’incapacité de s’arrêter au bord du gouffre – qui l’avait amenée là où elle se trouvait. Elle aurait pu être comme les autres. Bien agir par glorification personnelle, et non par sens du devoir. Non. C’était ça, la vraie corruption de l’âme. Le mal, ce n’était pas de détourner les lois pour satisfaire la justice. Le mal, c’était l’acte poussé par le gain personnel. Sans considération pour l’image d’ensemble, qu’on finissait par perdre de vue tout à fait à force de l’ignorer.

Pérault, se dit-elle. Pérault me connaissait encore mieux qu’elle le pensait.

Shan regarda ses mains. Ses nouveaux ongles rétractiles, à peine différents en apparence, n’en étaient pas moins des griffes. Ils étaient rouges de jus de tayberry, mais aussi de sang. Le sien.

Qui disparaîtrait au fur et à mesure. Comme tout le reste.