Fabian n’avait pas bougé du guichet numéro 1, prenant simplement l’air d’attendre que Lilja ait entré les informations sur son ordinateur, alors qu’en réalité, il guettait le feu vert de Tuvesson. Plus les minutes passaient, plus il était convaincu que quelque chose n’allait pas.
– On en est où ? retentit la voix de Molander dans son oreillette.
– Aucune idée, la porte est toujours fermée, répondit Tuvesson d’un ton qui trahissait son angoisse.
– Ce ne sont que quelques papiers à signer, ça ne devrait pas prendre autant de temps, fit remarquer Molander. Si ça continue, je propose qu’on lance l’assaut.
– Personne ne fait rien avant mon signal.
Le silence qui régnait dans la salle de réunion était de plus en plus étouffant, tandis que le criminel regardait d’un œil impassible les documents. Le banquier, lui, avait du mal à garder son calme. D’ici peu, la sueur dégoulinerait sur son front.
– Il y a quelque chose qui ne va pas ? demanda-t-il en desserrant son nœud de cravate. C’est à moi d’aller chercher les enfants à l’école, ce soir. Vous savez ce qu’ils disent quand on est en retard…
– Donc vous avez des enfants ?
– Oui, une fille et un garçon de trois et cinq ans. Vous avez trouvé une erreur ? Si c’est le cas, sachez qu’on peut la corriger tout de suite.
Le criminel leva les yeux sur le banquier.
– Moi aussi, j’ai des enfants. Deux comme vous. Il n’y a rien de mieux, n’est-ce pas ?
– En effet. Ce que je voulais dire c’est qu’on aura beau relire, une ou deux fautes peuvent toujours venir se glisser par là.
– Et ça ne fait pas sérieux, répondit l’homme sans le lâcher du regard. Mais non, je n’ai rien vu de tel.
Il sortit la mine de son stylo et signa les documents les uns après les autres. Puis il le rangea dans sa poche intérieure et se leva.
– Bien, je vous remercie pour votre aide.
– Il n’y a pas de quoi, le plaisir était pour moi, répondit le banquier avec un grand sourire, acceptant la main que le criminel lui tendait. Tout devrait être prêt d’ici le début de la semaine prochaine, reprit-il. Transférer de telles sommes prend nécessairement quelques jours ouvrés.
L’homme opina et sortit de la pièce, accompagné du conseiller. À l’instant où il vit les deux techniciens de surface brandir leurs armes, il s’empara de ce dernier, le plaqua contre lui comme un bouclier et pressa son pistolet sur sa tempe.
– J’en connais un qui va devoir m’accompagner jusqu’à la sortie, siffla-t-il d’une voix aiguë comme s’il s’adressait à un enfant.
– Lâchez-le ! s’écria Tuvesson, tenant son arme des deux mains. J’ai dit : lâchez-le !
– Un pas de plus et personne n’ira chercher les enfants à l’école, rétorqua-t-il de la même voix haut perchée.
– La banque est encerclée, toutes les sorties sont condamnées. Appel à toutes les unités : le suspect est armé et a pris en otage Mattias Ryborn, annonça Tuvesson. Vous avez tout intérêt à vous rendre, vous n’avez pas la moindre chance. Votre petit jeu est terminé. Lâchez-le et couchez-vous ! s’écria-t-elle en s’approchant encore.
La détonation du petit pistolet ne fit guère plus de bruit que le chien d’un jouet en plastique. Mais la balle qui pénétra dans la peau, fusa à travers le cerveau et ressortit par l’oreille était bien réelle et causa la mort instantanément.
Lorsque le banquier s’effondra, tête la première sur le carrelage, il était déjà parti depuis un moment.
Telle une impulsion électromagnétique brouillant tous les signaux électriques, le choc se répandit et les paralysa tous sauf le criminel qui, en un éclair, s’empara du badge accroché à la ceinture de l’homme gisant par terre, avant d’attraper Tuvesson et d’appuyer la bouche du pistolet encore chaude contre sa tempe.
– Regardez ce que vous avez fait, murmura-t-il. Qui va aller chercher les gamins, maintenant ?