APPENDICE III

PREMIERES IMAGES

 

(Voir la quatre pages d'illustrations hors texte)

À l'article FEGFEUER (Purgatoire) de l'excellent Lexicon der christlichen Ikonographie, éd. E. Kirschbaum, vol. II, 1970, col. 17, W. BRAUNFELS écrit : « Dans le monde figuré du paléochristianisme comme du Moyen Âge jusqu'à la fin du XIVe siècle on ne trouve aucune représentation du Purgatoire. »

S'il semble vrai que l'iconographie du Purgatoire ne se répand qu'à partir de la fin du XIVe siècle on rencontre toutefois des représentations du Purgatoire pendant le siècle qui précède et une enquête iconographique attentive révélerait sans doute une plus riche moisson d'images du Purgatoire, antérieures à la fin du XIVe siècle.

Je présente ici trois de ces représentations :

1) La plus ancienne, sur laquelle le Père Gy a attiré mon attention, est une miniature qui se trouve au feuillet 49 du Bréviaire de Paris, dit Bréviaire de Philippe le Bel (Paris, Bibliothèque nationale, manuscrit latin 1023). Ce manuscrit qui date de la période 1253-1296 et qui, d'après des critères formels, doit être situé près de 1296 est très probablement le bréviaire, dont l'illustration a été commandée par Philippe le Bel à un célèbre peintre parisien, maître Honoré, en 1296, comme en témoigne le compte du trésor du Louvre pour cette année-là.

La miniature de petite dimension (3,5 cm × 4 cm) du feuillet 49 représente probablement un jugement d'âmes pour Dieu. Le Christ en majesté et deux séraphins qui l'entourent occupent environ les deux tiers de la hauteur de la miniature. On voit dans la partie inférieure quatre âmes du purgatoire, deux encore immergées dans le feu, deux tirées du feu par deux anges qui ont crevé le plafond des nuages. La figure comprend quatre lieux étagés : un ciel doré, une zone de nuages, une zone sublunaire quadrillée, le feu. (Cf. V. LEROQUAIS, Les Bréviaires manuscrits des bibliothèques publiques de France, t. II, Paris, 1934, no 487, pp. 465 485.)

2) Une miniature offrant à la fois des ressemblances et des différences avec l'image précédente se trouve dans le Bréviaire parisien, dit Bréviaire de Charles V qui a été exécuté probablement pour une femme de la famille royale française, entre 1347 et 1380, date où il se trouve dans la Bibliothèque de Charles V (Paris, Bibliothèque nationale, manuscrit latin 1052. feuillet 556 verso, cf. LEROQUAIS, t. III, pp. 49-56). La miniature, également de petite dimension, est placée « en la commémoration des morts », c'est-à-dire du 2 novembre alors que la précédente illustre le Psaume CXIV, Psaume Dilexi où le psalmiste remercie Yahvé de l'avoir délivré des filets du Shéol. Le Christ ne figure pas sur cette miniature au contraire de la précédente. Deux grands anges attirent vers le ciel deux âmes qui n'ont plus que les pieds dans le feu. Onze têtes d'âmes représentant une multitude de ces âmes du Purgatoire et les différentes conditions sociales (on y reconnaît pape, évêque, etc.) sont plongées dans le feu. Il y a trois lieux étagés : un ciel bleu très mince (environ un dixième de la hauteur), une zone intermédiaire quadrillée tenant plus de la moitié de la hauteur, un monde infernal fait de roches gaizes avec un grand trou plein de feu. Je dois la connaissance de cette miniature et sa reproduction à l'amabilité de M. François Avril.

3) La troisième représentation du Purgatoire se trouve sur une fresque de la vieille cathédrale de Salamanque qui représente tout le système de l'au-delà au début du XIVe siècle selon la conception de quatre lieux. A gauche (pour qui regarde) le Ciel et à droite l'Enfer. Au centre des réceptacles avec des âmes représentant à gauche le Purgatoire, à droite les limbes. Dans le réceptacle supérieur du Purgatoire un ange vient chercher une âme pour la conduire au ciel. Une inscription date cette peinture de l'an 1300 de l'ère espagnole, ce qui donnerait 1262, mais M. François Avril pense que, pour des raisons stylistiques, cette fresque ne peut être antérieure à la première moitié du XIVe siècle. Je dois la reproduction de cette peinture à l'amabilité du professeur Luis Cortes. Cf. José GUDIOL RICART, Ars Hispanica, vol. 9, Pintura Gótica, Madrid, 1955, p. 47.