9

Ce samedi matin, les aboiements frénétiques d’Angus me tirèrent du sommeil. Il griffait, grattait contre la porte comme s’il cherchait à récupérer un steak qui aurait glissé de l’autre côté.

— Quoi ? Quoi ? haletai-je, me réveillant en sursaut, l’esprit encore endormi.

Je jetai un coup d’œil à l’horloge. Il n’était que 7 heures du matin.

— Angus ! Il vaudrait mieux pour toi qu’il y ait le feu à la maison, ou tu risques fort d’avoir de gros problèmes !

Que lui arrivait-il ? Mon chien adoré était plutôt du genre à roupiller profondément, ses sept kilos et demi occupant les deux tiers de mon lit.

Je jetai distraitement un regard au miroir… Bon sang ! Je me fis l’effet d’une Cendrillon partie en carrosse et revenue en citrouille. Mon nouveau produit capillaire (qui coûtait quand même cinquante dollars le flacon) arrêtait de toute évidence de faire effet après 1 heure du matin, heure à laquelle je m’étais couchée la veille. A ne pas oublier, à l’avenir ! Si Angus était réellement en train de me sauver la vie et que notre photo devait figurer en première page du journal, il valait mieux que je prenne le temps d’arranger mes cheveux, avant de me précipiter dans les flammes. J’attrapai un élastique et me fis une queue-de-cheval, puis avançai lentement vers la porte. Elle n’était pas brûlante. Je l’entrouvris. Pas d’odeur âcre ni d’épaisses fumées noires piquant les yeux et brûlant les poumons. Bon, c’était plutôt le plan du pompier sexy — qui m’aurait portée comme si j’étais en sucre filé pour franchir le rideau de feu — qui sentait le cramé. Enfin, je devais m’estimer heureuse, puisque ma maison n’était pas menacée de tomber en cendres…

Angus descendit comme une flèche l’escalier, puis exécuta sa danse du visiteur devant la porte d’entrée. Bon sang, j’avais presque oublié que c’était aujourd’hui, la reconstitution de Bull Run ! A l’évidence, Margaret, qui avait prévu de nous accompagner, avait ressenti le besoin de se lever aux aurores… Mais moi, j’avais besoin de café avant de penser à tuer le premier sudiste… ou un soldat de l’Union… Est-ce que je devais tuer des ventres bleus, aujourd’hui ?

J’attrapai Angus, une vraie puce sauteuse, et ouvris la porte.

— Salut, Margaret, marmonnai-je en plissant les yeux à cause de la lumière du jour.

Callahan O’Shea se tenait devant moi.

— Ne me faites pas de mal, ironisa-t-il.

Mon cerveau enregistra en mode décousu, comme les pièces d’un puzzle, le T-shirt d’un rouge délavé, le jean, l’hématome autour de son œil qui avait viré au brun. Ses yeux étaient bleus, et légèrement tombants au coin, ce qui lui donnait un petit air… mélancolique. Très sexy, aussi. Zut, il était encore là, ce petit pincement de cœur ! C’était agaçant, à la fin.

— Vous êtes là pour me dire que vous m’intentez un procès ? bredouillai-je.

Dans mes bras, Angus aboya une fois. Ouaf !

Il sourit. On ne pouvait plus parler de pincement : mon cœur exécuta carrément un salto arrière.

— Non, je suis ici pour remplacer vos fenêtres. Joli pyjama, soit dit en passant !

Je baissai les yeux sur mon pyjama où s’étalait en grand Bob l’éponge. Julian avait fait fort, au dernier Noël. C’était un concours entre nous : parvenir à dénicher le cadeau le plus moche ou le plus tarte. Moi, je lui avais offert un « monsieur tête de gazon ».

— Pardon ? repris-je, tandis que ses derniers mots se frayaient avec retard un chemin dans mon esprit. Qu’est-ce que vous venez de dire à propos de mes fenêtres ? Vous allez les remplacer ?

— Ouais… C’est ce que j’ai dit…

Il avança la tête, laissant courir son regard sur le salon.

— Votre père m’a engagé, l’autre jour. Vous ne le savez pas ?

— Non. Ça date de quand ?

— Jeudi. Vous n’étiez pas là. C’est une jolie maison que vous avez là. Un cadeau de papa ?

— Euh…, balbutiai-je, ne trouvant rien d’autre à dire.

— Alors… est-ce que vous allez me laisser planté là, ou vous écarter et me laisser entrer ?

Je serrai mon Angus un peu plus fort contre moi.

— Non. Ecoutez, monsieur O’Shea, je ne crois pas que…

— Que quoi ? Vous ne voulez pas donner sa chance à un ancien repris de justice ?

— Eh bien, en réalité… je…

Ma bouche se ferma dans un clappement. Je ne me voyais vraiment pas dire à haute voix le fond de ma pensée. Trop grossier. Ce n’était pas politiquement correct.

— Non, ce n’est pas possible.

Je plaquai un sourire sur mes lèvres, me sentant aussi sincère qu’un candidat à la présidentielle promettant la Lune.

— Je pensais m’adresser à un artisan… euh… quelqu’un qui a déjà travaillé pour moi.

— J’ai été engagé. Votre père m’a déjà donné la moitié de la somme.

Il me regarda, les yeux à demi fermés, sourcils froncés.

— Eh bien, j’avoue que c’est un peu gênant comme situation, mais vous devrez la lui rendre.

Angus, toujours dans mes bras, aboya comme pour m’apporter son soutien. Ça, c’était un bon chien.

— Non.

J’en restai bouche bée.

— Eh bien, je suis désolée, monsieur O’Shea, je ne veux pas que vous travailliez ici.

Qu’il me voie en pyjama… Qu’il crée des problèmes… Qu’il me vole même, peut-être…

Il pencha la tête sur le côté et me dévisagea avec intensité.

— Que c’est désagréable, mademoiselle Emerson, de penser que vous ne m’aimez pas ; c’est même un comble, parce que s’il y a une personne ici qui aurait des raisons d’en vouloir à l’autre, je crois que c’est moi, vous ne pensez pas ?

— Il n’y a pas de raisons qui tiennent ! Je ne vous ai rien demandé…

— Mais comme j’ai de meilleures manières que vous, coupa-t-il, je réserverai mon jugement… sans m’étendre sur votre propension à l’agressivité. J’ai accepté l’argent de votre père et, comme il faut faire venir les nouvelles fenêtres du Kansas, on doit les commander sans perdre de temps, si vous voulez les avoir avant qu’il ne gèle en enfer. Et puis, pour être honnête, j’ai besoin de travailler. D’accord ? Alors, laissez tomber vos airs outragés, oubliez que je vous ai vue dans cette…

Il s’interrompit. Ses yeux glissèrent sur ma silhouette, me détaillant des pieds à la tête.

— Mettons-nous au travail, reprit-il. Je dois prendre les mesures de vos fenêtres. Je commence par le haut ou par le bas ?

Au même moment, la BMW de Natalie s’arrêta dans mon allée. Je tentai de maintenir fermement Angus contre moi, son petit corps secoué de tremblements, tandis qu’il essayait de se libérer à grands coups de reins. Ses cris me perçaient les tympans, résonnant désagréablement dans ma boîte crânienne.

— Vous n’avez vraiment aucune autorité sur ce cabot ! s’exclama-t-il.

— On ne vous a pas demandé votre avis ! Non, je ne te parle pas à toi, mon Angus, repris-je, ma bouche contre son petit crâne. Et puis, tu n’es pas un cabot, mon trésor…

— Salut, lança ma sœur, en montant les marches d’un pas léger.

Elle s’immobilisa, jetant un regard empreint de curiosité à mon voisin.

— Bonjour. Je suis Natalie Emerson, la sœur de Grace.

Ce dernier prit sa main, et je remarquai son air charmé. Oh ! que je le détestais !

— Callahan O’Shea, murmura-t-il. Le menuisier de Grace.

— Ce n’est pas mon menuisier. Qu’est-ce qui t’amène ici, Nat ?

— Je pensais que nous pourrions prendre un café, dit-elle, avec un large sourire. Je mourais d’impatience que tu me parles de Wyatt. On n’a pas eu l’occasion de le faire depuis l’exposition de maman, et je me suis dit que si je ne venais pas…

— Un petit ami ? s’enquit mon voisin. Qui aime la brutalité, je suppose ?

Natalie, les yeux posés sur le coquard, haussa les sourcils et sourit.

— Allez, Grace, on se prend un café ? Callahan… c’est ça ? Est-ce que ça vous dit ?

— Beaucoup, répondit-il à ma sœur, magnifique et soudainement irritante.

Cinq minutes plus tard, je fixais d’un regard morne la cafetière pendant que ma sœur et mon voisin discutaient, s’entendant comme larrons en foire !

— Alors, comme ça, Grace vous a frappé ? Vraiment ? Avec une crosse de hockey ? Oh ! non, Gracie… dis-moi que tu n’as pas fait ça !

Elle lâcha ce petit rire rauque qui ne laissait aucun homme insensible.

— C’était de l’autodéfense, ripostai-je, tout en sortant trois tasses de mon placard.

— Elle avait bu, expliqua Cal. Enfin, la première fois, elle avait bu. La seconde fois, avec le râteau, c’était plus de l’inconséquence.

— Non, absolument pas ! m’emportai-je, tout en posant la cafetière sur la table.

J’ouvris d’un geste sec le réfrigérateur pour y prendre la crème, que je posai sur la table avec un peu trop de force.

— Ça n’a rien à voir avec de l’inconséquence.

— Je ne sais pas, poursuivit-il, en inclinant la tête. Qu’en dites-vous, Natalie ? N’est-ce pas une preuve d’inconséquence de se faire surprendre dans cette tenue ?

Il laissa glisser une nouvelle fois son regard sur mon Bob l’éponge.

— Ça suffit, l’Irlandais. Je vous renvoie. Vous êtes viré, voilà ! Une fois pour toutes !

— Allez, Gracie, dit Natalie, laissant échapper un rire mélodieux. Il n’a pas tout à fait tort. J’espère que Wyatt ne t’a pas vue là-dedans.

— Wyatt aime mon Bob l’éponge, rétorquai-je.

Ma sœur versa une tasse de café à Callahan, évitant avec application mes yeux qui lançaient des éclairs.

— Cal, avez-vous rencontré le petit ami de ma sœur ? demanda-t-elle.

« Cal » ? Parce que c’était Cal, maintenant ?

— En fait, non, répondit-il, avec un sourire moqueur.

J’essayai de l’ignorer. Pas facile. « Cal » semblait si… — juste ciel ! — merveilleux… assis là dans ma cuisine accueillante, buvant son café dans ma tasse Fiestaware couleur bleuet — une édition limitée —, avec, à ses pieds, Angus qui mâchonnait les lacets de ses bottes. Un rayon de soleil éclairait ses cheveux en bataille, d’un châtain profond, faisant ressortir les mèches dorées. Il dégageait une telle virilité, avec ses épaules larges et musclées ! Et il était sur le point de faire des réparations dans ma maison ! Bon sang… Quelle femme n’en ressentirait pas de l’excitation ?

— Alors, à quoi ressemble-t-il ? lança Natalie.

Un bref instant, je crus qu’elle parlait de Callahan.

— Quoi ? Oh ! tu parles de Wyatt ? Eh bien, il est très… beau.

— Très bien… et comment s’est passé ton rendez-vous de l’autre soir ? poursuivit-elle, d’une voix aussi sucrée que le café dans lequel elle était en train de tourner distraitement sa petite cuillère.

Piégée dans la souricière que j’avais moi-même mise en place ! Nat avait appelé, l’autre nuit, et en entendant la voix d’Andrew en arrière-plan, j’avais coupé court à la communication, prétextant que je devais retrouver Wyatt à Hartford. Comment me tirer de cet embrouillamini ? L’air moqueur, mon voisin dardait sur moi son regard bleu.

— C’était bien… très agréable. Vraiment sympa. Nous avons mangé. Bu…

Bravo l’éloquence, Grace ! Je ne fus pas sans noter le froncement de sourcils de mon voisin.

— Allez, Gracie ! insista celle qui avait été ma sœur bien-aimée. Comment est-il ? Je sais que c’est un chirurgien pédiatrique ; il ne peut qu’être merveilleux, mais je veux des détails.

— Adorable ! Il a un caractère en or, dis-je, la voix un peu trop haut perchée. Il est très…

Je m’interrompis, coulant un regard de biais vers Callahan.

— Il est respectueux, amical, incroyablement généreux. Il donne de l’argent aux sans-abri… et… euh… il recueille… les chats.

Lourd soupir de ma petite voix intérieure, navrée devant mes piètres performances de menteuse.

— Il semble parfait, dit Natalie d’une voix où perçait la satisfaction. Il a de l’humour ?

— Oh, oui ! acquiesçai-je, il est très drôle. Mais sans se moquer. Jamais sarcastique ni trop lourd.

— Les opposés s’attirent donc vraiment ! s’esclaffa mon voisin.

— Je croyais que je vous avais viré, vous !

Il me sourit, l’œil malicieux, et mes genoux me trahirent… Je me sentis chanceler.

— C’est merveilleux, dit Natalie.

Un instant, je fus tentée de lui parler d’Andrew, mais avec le repris de justice dont la présence semblait occuper tout l’espace, je choisis de m’abstenir.

— C’est aujourd’hui qu’a lieu la bataille ? me demanda ma sœur, en prenant une gorgée de café.

Je la regardai, admirative. Comment faisait-elle pour rendre chacun de ses gestes si gracieux, équilibré et magnifique ? Il se dégageait d’elle une beauté cinématographique.

— Quelle bataille ? demanda-t-il.

— Ne lui dis rien, intimai-je à ma sœur. Et, oui, j’y vais.

— Ce n’est pas le tout, mais il faut que je rentre à New Haven, dit Natalie avec regret, en repoussant sa tasse. Je suis très heureuse de vous avoir rencontré, Cal.

— Tout le plaisir a été pour moi, répliqua-t-il en se levant.

En plus, le repris de justice avait de bonnes manières… quand Natalie était dans les parages, tout du moins.

Je la raccompagnai jusqu’à la porte.

— Tout va bien avec Andrew ? demandai-je, d’une voix aussi légère que possible.

Son visage s’éclaira aussitôt : c’était comme d’assister à un magnifique lever de soleil.

— Oh ! Grace… oui.

— Tant mieux, dis-je, en ramenant une de ses mèches de cheveux derrière son oreille. C’est tout ce que je veux, ma puce.

— Merci, murmura-t-elle. Je suis tellement ravie pour toi aussi ! Wyatt semble si parfait !

Elle me serra fort dans ses bras.

— On se voit bientôt ?

— Absolument.

Je la serrai à mon tour, mon cœur débordant d’amour, et la regardai rejoindre d’un pas aérien son petit bolide. Elle m’adressa un signe de la main, tout en faisant marche arrière dans mon allée. Quand elle disparut au bout de la rue, j’arrêtai de sourire. Margaret avait immédiatement su que Wyatt Dunn était une invention, et mon voisin, un quasi-étranger, semblait l’avoir deviné aussi. Mais pas Natalie. Elle voulait tellement me voir avec quelqu’un ! Me savoir heureuse et amoureuse lui aurait enlevé un poids sur la conscience. Je n’avais pas besoin d’un dessin !

Avec un soupir, je retournai dans la cuisine.

En me voyant, Callahan s’adossa à sa chaise, les mains croisées derrière la tête.

— Alors, comme ça, votre petit ami est un « sauveur » de chats…

Je lui décochai mon plus beau sourire.

— En effet. Il y a beaucoup de chats abandonnés dans son quartier. Très triste, vraiment. Il les recueille et les garde le temps de leur trouver des familles d’adoption. Ça vous dirait d’en prendre un ?

— Un chat ?

— On dit qu’on choisit un animal selon sa personnalité.

Il eut un petit rire sec, amusé, et je sentis une nouvelle fois mes jambes se dérober sous moi — traîtresses ! —, comme la fois où j’avais vu Bruce Springsteen en concert.

— Non, merci, Grace.

— Alors, dites-moi, monsieur O’Shea, repris-je très vite. Combien avez-vous détourné, et à qui ?

Il serra imperceptiblement les lèvres.

— Plus d’un million de dollars. A mon estimé employeur.

— Un million… Fichtre !

Mes yeux se posèrent sur le plan de travail, près du frigo, où se trouvait mon chéquier, en évidence. Je devrais peut-être le mettre à l’abri… En même temps, je n’avais pas non plus un million sur mon compte… Interceptant mon regard, il leva un sourcil sarcastique — celui qui n’était pas marqué par le coquard.

— C’est tentant, mais c’est fini pour moi, j’ai tourné la page. Cela dit, il faut parfois faire preuve d’une grande force intérieure pour résister, ironisa-t-il, en faisant un mouvement de la tête vers l’étagère contenant ma collection de chiens anciens en métal.

Il se leva sans crier gare.

— Puis-je aller à l’étage pour prendre les mesures des fenêtres, Grace ?

J’ouvris la bouche pour protester, et me ravisai. A quoi bon ? Combien de temps est-ce que ça allait lui prendre, pour changer les fenêtres ? Deux jours ?

— Euh… Oui, bien sûr. Attendez une seconde, laissez-moi m’assurer que… euh…

— Et si vous m’accompagniez ? De cette façon, si je cède à la tentation de fouiller dans votre boîte à bijoux, vous m’arrêterez.

— Je voulais m’assurer que mon lit était fait, c’est tout, mentis-je. C’est par là.

Pendant les longues minutes où Callahan déroula son mètre, mesura le cadre de la fenêtre de ma chambre, notant les dimensions sur un petit calepin, je luttai contre les vagues de désir et d’irritation qui me chahutaient. Il entra ensuite dans la chambre d’amis et répéta les mêmes gestes, précis, efficaces. Je m’appuyai contre le chambranle de la porte, le regard fixé sur son dos (enfin, un peu plus bas, pour être honnête), alors qu’il ouvrait une fenêtre et jetait un coup d’œil au rebord extérieur.

— Il se pourrait que j’aie besoin de remplacer les moulures, dit-il, quand je mettrai les nouvelles fenêtres. Mais ça, je ne le saurai qu’au moment où je vais les enlever. Elles sont plutôt anciennes.

Je levai les yeux vers son visage.

— D’accord. Bien sûr. Ça me paraît bien.

Il s’avança vers moi et je retins mon souffle. Seigneur… il se tenait à quelques centimètres. A la chaleur que dégageait son corps, je sentis le mien se ramollir comme de la guimauve. Je chancelai imperceptiblement. Mon cœur se contracta vivement, dur comme une pierre, avant de s’ouvrir comme un tournesol au soleil. Le mètre dans la main, il effleura le dos de la mienne et je repris brutalement mon souffle par la bouche.

— Grace ?

— Oui ? soufflai-je.

Il était si près que je distinguais la veine gonflée dans son cou. Que ressentirais-je si je posais mes lèvres à cet endroit, glissais les doigts dans ses cheveux en bataille, si…

— Vous pouvez vous écarter ? demanda-t-il.

— Bien sûr ! Bien sûr, je… pardon, je crois que j’avais l’esprit ailleurs.

Ses yeux se plissèrent et un sourire éclaira son visage.

Il était déjà dans l’escalier.

— Je vais passer la commande et je vous tiens au courant.

— Super.

— A bientôt. Bonne chance pour la bataille.

— Merci, dis-je en rougissant sans raison.

— Oh ! et verrouillez bien en partant… Je reste chez moi toute la journée.

— Très drôle. Allez, ouste ! dis-je. J’ai des yankees à tuer, moi !