HARSH

… Je rappelle que ce prix est assorti d’un chèque d’un million d’euros, et d’un financement garanti par la banque Rothschild ou l’une de ses filiales. Il récompense une entreprise qui, cette année, a opéré une avancée significative dans le domaine des technologies non polluantes ou de dépollution, ou dont la politique globale a été exemplaire concernant la préservation ou la restauration du patrimoine naturel. Comme vous pouvez le constater, le champ d’application de ce prix est vaste, et le choix du lauréat a été, une fois de plus, très épineux. Néanmoins, parmi la centaine d’entreprises retenues au départ et les dix parvenues à la sélection finale, l’une d’entre elles a fini par emporter la décision du jury. Mes chers amis, je suis heureux et fier de vous annoncer que l’entreprise responsable de l’année 2030 est…

Extrait du discours de Franklin Rothschild.

De son côté, Fuller fait tout son possible pour éviter Fatimata. Il ne sort pratiquement pas de l’enceinte de l’Ocean Club où il est logé avec l’élite de l’élite. Il a annulé sa participation à tous les débats, conférences et cérémonies où la présidente du Burkina risque d’être présente. Il n’a maintenu que les ateliers et think tanks privés où elle ne peut s’introduire, ainsi que les déjeuners ou dîners en petit comité dans l’un ou l’autre des restaurants d’Atlantis, ou (mieux) sous les palmiers du Courtyard Terrace ou au Dune, le restaurant gastronomique de l’Ocean Club qui donne sur une belle plage de sable blanc. Loin de la foule, du bruit et des attractions d’Atlantis, on reste entre gens distingués, on peut parler tranquillement d’affaires qui ne regardent personne. Pour le reste, Anthony fait dire qu’il est souffrant.

En fait il profite de la mer, de la piscine, du tennis et du centre de fitness de l’hôtel pour se refaire une santé. Il ne touche pratiquement plus à ses médicaments, sauf circonstance exceptionnelle telle qu’une négociation délicate. Après des mois de nourriture hâtive avalée sans appétit, il apprécie la bonne chère de l’hôtel, les petits-déjeuners au bord de l’océan, les dîners aux chandelles qui s’éternisent dans la douceur du soir. Après des semaines d’abstinence sexuelle forcée, il retrouve la forme (sans Erectyl) avec Samantha, une call-girl offerte par le forum, une belle et joyeuse Caraïbe prête à tout, spirituelle et tout à fait sortable en soirée. Après des mois de cauchemars et d’insomnies, il dort comme un loir et se réveille reposé, heureux de la journée qui l’attend. Castoriadis avait raison : Anthony avait vraiment besoin de vacances, il glissait sur une très mauvaise pente. Il se sent même tellement bien qu’il envisage de prolonger son séjour après le forum : après tout, il pourrait traiter ses affaires d’ici… (Oui, mais il y a Pamela et le divorce ; il y a Junior à placer ; il y a la Divine Légion… Non, Anthony, ne pense pas à toutes ces merdes. Tu es en vacances. Jouis du présent, pour une fois !)

L’unique point noir, le seul nuage dans l’azur de son bien-être, c’est cette présidente du Burkina qui hante le forum à sa recherche, affublée d’une espèce de Viking à la moustache farouche, sûrement son garde du corps. Quelle foutue idée il a eue, cet enfoiré de Cromwell, de l’amener ici ! O.K., il fallait l’éloigner de son pays pour mieux réussir le coup d’État – la phase 2 de l’opération Aqua™, selon le jargon de la NSA –, mais bon Dieu, on pouvait l’expédier ailleurs, non ? Chez ses amis chinois par exemple : là-bas, il ne manque pas de symposiums destinés à compatir à la misère des PPP. Belle connerie de l’inviter au sein de l’élite ! Cromwell aurait voulu faire un coup en vache à Fuller qu’il n’aurait pas agi autrement. « Pour mieux combattre ton ennemi, apprends d’abord à le connaître », a dit Sun Tzu. D’accord, mais Anthony doute que le directeur de la NSA ait jamais entendu parler de Sun Tzu : il a l’air fin comme un rhinocéros et aussi cultivé qu’un chou.

Quoi qu’il en soit, Fuller n’a aucune envie de rencontrer Fatimata Konaté, d’autant plus qu’elle est désormais has been : la phase 2 a réussi, lui a annoncé Cromwell ; la NSA est maître du terrain via un homme de paille local. Dans quelques jours, Fuller pourra engager la phase 3 : l’envoi sur place de ses équipes pour exploiter le forage. Dans ces conditions, que peut lui apporter une entrevue avec l’ex-présidente ? Juste de l’énervement : soit elle est au courant de ce qui se passe chez elle et va l’abreuver d’injures, soit elle l’ignore et va se gargariser de sa petite victoire judiciaire au TCI. Dans les deux cas, Anthony aura le mauvais rôle… Déjà fusent dans son dos des plaisanteries douteuses à son sujet : « Elle a niqué Fuller une fois, ça lui a plu, elle veut remettre ça », « Chassez la misère, elle revient vous coller », « Elle veut lui piquer la Kansas Water Union maintenant », « Fuller baise les femmes de gouverneur, mais se couche devant une mama black »… et autres vannes du même tonneau. C’est aussi à cause de ça qu’il évite autant que possible de se montrer au forum : par sa seule présence, cette dinde en boubou lui pourrit la vie, l’empêche de jouir pleinement de ses vacances.

Il y a toutefois une cérémonie officielle à laquelle Fuller ne peut déroger car il est plus ou moins directement concerné : la remise du prix de l’« entreprise responsable de l’année ». C’est l’ONG Deep Forest, une de ses filiales, qui l’a décroché pour avoir replanté dix mille hectares d’okoumés dans le désert d’Amazonie : un bois de construction qui pousse vite et bien, demande peu d’eau et d’entretien, bref, rentable à assez court terme. La fondation Rothschild y a vu « une action exemplaire de reboisement, de lutte contre la désertification, de restauration du poumon de la planète et de création d’emplois locaux ». Tant mieux pour Deep Forest. Fuller y voit surtout un investissement peu onéreux (une ONG ne paie ni taxes ni impôts au Brésil) aux bénéfices garantis, ainsi qu’une façon détournée de reposer un pied américain dans ce territoire affidé à l’Asie qu’est l’Amérique du Sud.

C’est contraint et contrit qu’il monte sur la scène du Grand Ballroom des Royal Towers, sous le feu des projecteurs, pour serrer la main de Franklin Rothschild et donner l’accolade à Ramón Ramirez, le président de Deep Forest. Après l’introduction d’usage du directeur du forum, une splendide créature vêtue du minimum décent remet le prix à Ramirez : le chèque dans une enveloppe en papier bouffant, et une statuette en or massif représentant un globe terrestre entre deux mains en coupe. Embrassades, puis Fuller entoure fraternellement l’épaule du lauréat qui brandit triomphalement son prix sous un déluge de son et de lumières. Pendant le discours de Ramirez, Fuller s’efforce de ne pas observer l’assistance or son regard se porte malgré lui pile au bon endroit : à quelques rangs devant la scène, Fatimata a les yeux fixés sur lui, arbore une expression indéchiffrable. À ses côtés, le Viking susmentionné, en blouson de cuir noir, la moustache tombante, les cheveux raides, la mine sombre. Fuller détourne les yeux, peine à ne pas les ramener sur ce couple disparate.

C’est à lui. Il a préparé son discours à l’avance et a essayé de l’apprendre par cœur, mais impossible, sa mémoire est trop détériorée par des années d’addiction au Neuroprofen. Il sort donc ses notes et ânonne son speech, dans lequel il vante les qualités de Deep Forest, son dévouement à la cause de l’environnement, son dur combat au quotidien, ses succès éclatants de par le monde, à quel point il est fier de soutenir cette ONG méritoire, etc.

Applaudissements, puis Franklin Rothschild reprend le micro pour annoncer que le buffet est ouvert au fond de la salle, ainsi que dans les annexes Orion & Zeus, à gauche après la rotonde, pour ceux qui auraient « quelque difficulté à supporter » ce qui va suivre sur la scène :

— À savoir le groupe de « harsh » Kill Them All, idoles de nos enfants et terreur des parents que nous sommes, dit-il avec un sourire équivoque. Ils appliquent à la lettre ce genre musical qu’ils ont inventé1, dérivé de ce qu’on appelait autrefois la musique industrielle. Ceux d’entre vous qui travaillent dans l’acier ou ont visité des usines d’emboutissage ont déjà une vague idée de ce qu’ils vont entendre. Pourquoi, me direz-vous, avoir programmé ces terroristes sonores et non quelque chose de plus anodin et convivial ? Parce que, justement, ils n’ont rien d’anodin : qui d’entre vous peut se targuer d’avoir vu son chiffre d’affaires progresser de 400 % cette année ? Eh bien, c’est le cas de HellTrax, leur propre label. Et si j’ajoute qu’ils ont décidé, profitant de leur présence au forum, de verser 5 % des recettes de leur dernier album à l’ONG SOS, vous admettrez que leur présence parmi nous est tout à fait justifiée. Voilà, je me tais maintenant. Place au déluge sonore de Kill Them All, et au déluge de cocktails dans vos gorges assoiffées !

En vérité, Kill Them All n’a rien décidé du tout, c’était la condition sine qua non de leur prestation au forum et du confortable cachet qui va avec. Leur manager a accepté au prétexte que c’est toujours ça de moins qu’ils dépenseront en beuveries et drogues diverses, et que c’est déduit de l’impôt sur les sociétés. De plus, il a trouvé assez ironique qu’un groupe nommé Kill Them All subventionne une ONG nommée Save OurSelves2

Sitôt Franklin Rothschild éclipsé, tandis qu’une bonne partie du public va s’agglutiner devant les longs comptoirs situés à l’autre extrémité de la salle, la scène est plongée dans les ténèbres et le silence.

Peu à peu la rumeur de la foule est dominée par un vague brouhaha, comme le vrombissement lointain de turbines géantes. Celui-ci s’amplifie, assorti d’un sifflement ululé qui provient de partout à la fois. Les gens tournent des yeux froncés vers la scène toujours plongée dans le noir. Mais ce son gigantesque ne semble pas provenir des micro-enceintes disséminées sur le pourtour du haut plafond… desquelles jaillit une voix féminine suave et synthétique : « Nous informons l’aimable assistance qu’un cyclone déferle actuellement sur les Bahamas. Nous vous recommandons vivement de ne pas tenter de sortir de l’enclave. Le dôme est sécurisé et vous n’avez absolument rien à craindre. Merci de votre attention. »

Des rires nerveux et des remarques acerbes fusent çà et là : « Quand même, ils exagèrent ! », « On ne devrait pas plaisanter avec ça », « Comme entrée en scène, c’est plutôt réussi »… Les sifflements/vrombissements se sont fondus en un long hurlement accompagné d’une grave vibration sous-jacente. Quelques-uns se décident à sortir de la salle pour aller voir aux fenêtres des couloirs, en reviennent pâles et anxieux : c’est l’enfer qui se déchaîne dehors, le ciel est noir et boursouflé, des vagues énormes explosent au loin contre le dôme, va-t-il résister ?

C’est à ce moment de tension maximale que Kill Them All entre en scène : deux gyrophares rouges se mettent à pulser dans les portiques tandis que des sirènes vrillantes tournoient dans la salle. Au rythme des pulsations, de blêmes hologrammes envahissent le podium et se répandent parmi le public – des séquences de guerre et de dévastations : bombardements, tsunamis, éruptions volcaniques, cyclones (justement), avalanches, incendies… Des populations paniquées fuyant les fléaux, des bâtiments qui brûlent ou s’écroulent, des morts filmés en gros plan, la terreur figée dans leurs regards vitreux, des gens piétinés, des blessés se traînant parmi les décombres… Au milieu de ces images morbides surgissent soudain deux zombies au teint verdâtre, au corps glaireux, vêtus de hardes effilochées. L’un tient un micro en forme de phallus, l’autre une remote figurant un bras coupé aux doigts pendants : Destroïd, le chanteur, et Killing Machine, l’homme des sons. Tandis que le ululement des sirènes se noie dans un bombardement intensif, les deux zombies exécutent une danse grotesque parmi des monceaux de cadavres holographiques. Puis Destroïd se met à hurler dans son micro – on dirait un porc qu’on égorge, enrichi d’échos et très saturé ; Killing Machine tripote son bras mort qui produit des bruits et rythmes assez indistincts, à divers degrés d’atrocité : réacteurs, scierie métallique, emboutissage, plusieurs variétés d’explosion, turbines, cataractes, halètement de pistons (c’est le beat), mix de hurlements d’agonie, crashs de voitures et autres vacarmes industriels bidouillés pour être encore plus insupportables… La violence du cyclone à l’extérieur s’incorpore à ces stridences, forme un bruit de fond qui ne nuit en rien à l’« harmonie » de l’ensemble.

Les trois quarts du public ont fui. Beaucoup sont allés s’entasser dans les annexes Orion & Zeus, trop petites pour contenir tout le monde. Certains errent dans les couloirs, verre et petit four à la main ; d’autres sont retournés à leur hôtel ou se sont égaillés dans les restaurants alentour ; quelques-uns, scotchés aux fenêtres, observent l’apocalypse lointaine, déréalisée par les parois du dôme dégoulinantes et percutées par maints débris volants. Reste un quart qui demeure, fasciné par ce « terrorisme sonore », oreilles et cerveau vrillés par le capharnaüm cadencé à 180 bpm. Pour ce quart, Kill Them All crache du feu, égorge des poulets, tronçonne des machines, lasérise des mannequins à l’effigie des puissants, s’ouvre les veines (pour de faux) et vomit sur les premiers rangs (pour de vrai)…

Fuller, lui, n’a pas résisté : il a fui dès les premières stridences et scènes de carnage. Il a quitté non seulement le Grand Ballroom, mais le cocktail en général, pour ne pas tomber sur la mère Konaté, son boubou et son chien de garde.

Les quelques centaines de mètres de marche entre les Royal Towers d’Atlantis et l’Ocean Club constituent une expérience surréaliste : comme s’il se mouvait à l’intérieur d’un dôme iMax sur lequel serait projeté un ouragan en 3D et grandeur réelle. Il voit les vagues gigantesques exploser contre le dôme en gerbes d’écume hautes comme des buildings, les nuages grands comme des montagnes se ruer en se télescopant, des objets divers se fracasser sur la paroi d’altuglass qui vibre (c’est ce grondement sourd qui résonne au creux de son ventre) ; il entend le hurlement du vent qui se déchaîne… Tandis que sous le dôme tout est calme, les lumières brillent et se reflètent dans les piscines, les lagons sont à peine frémissants de friselis, les néons et holos des enseignes dansent et clignotent comme à l’accoutumée, les passants vaquent comme si de rien n’était. En fait, c’est plutôt l’enclave qui est le film, et la réalité qui est repoussée à l’extérieur. Étrange impression.

À la réception de l’hôtel, Anthony tombe sur Franklin Rothschild, ses proches collaborateurs et Ramón Ramirez, le lauréat, tous en habits de soirée.

— Nous allons dîner au Dune, lui annonce Ramirez. Vous nous rejoignez ?

— Le temps de me changer et j’arrive. Chambre 156, dit-il à la réceptionniste qui lui remet sa carte d’entrée.

Accaparé par Rothschild et sa suite, Fuller n’a pas vu l’homme enfoncé dans un fauteuil du hall, en train d’étudier attentivement un dépliant de l’hôtel.

À peine a-t-il rejoint sa chambre et jeté veste et chemise pour aller se rafraîchir qu’on frappe à sa porte.

— Qu’est-ce que c’est ?

— Room service, monsieur. On a un cadeau pour vous, qu’on a oublié de vous remettre à la réception.

— Un cadeau ? De la part de qui ?

— Heu… de monsieur Franklin Rothschild, monsieur.

— Une seconde.

Anthony se rhabille, un brin étonné : un cadeau de Rothschild ? Ça alors… Il ouvre la porte, plus excité qu’intrigué. Tombe sur le Viking, le garde du corps de Fatimata Konaté, qui s’empresse de glisser un pied dans l’embrasure.

— Vous ! sursaute Fuller. Qu’est-ce que vous voulez ?

— Je vous l’ai dit, j’ai un cadeau pour vous. Je peux entrer ?

— Je n’en veux pas. Je n’ai rien à dire à votre patronne.

— Allons, monsieur Fuller, sourit Rudy avec aménité. Cessez donc de vous méfier et de vous défiler ainsi. Ma patronne, comme vous dites, ne désire rien d’autre que faire la paix avec vous. Ce cadeau est un gage de bonne volonté.

Il lui montre un paquet assez volumineux, emballé dans du papier de soie et entouré d’un ruban doré.

— Qu’est-ce que c’est ? Une bombe ?

Rudy prend un air navré.

— Monsieur Fuller, vous croyez que j’aurais pu parvenir jusqu’ici avec une bombe ? Les gens sont parfois bienveillants, vous savez. C’est précisément le cas de madame Konaté, qui espère vraiment vous rencontrer. (Rudy s’immisce par la porte entrouverte.) Jetez-y au moins un coup d’œil. S’il ne vous plaît pas, vous me le rendez et on en reste là. D’accord ?

— Bon, mais faites vite. J’ai rendez-vous.

Fuller s’efface à contrecœur. Rudy dépose le cadeau sur la table du salon, garnie d’un gros bouquet de fleurs exotiques au lourd parfum. Puis s’écarte.

Anthony lui jette un regard soupçonneux, ne trouve pas d’argument à lui opposer. Il ôte le ruban, déchire le papier de soie – il y en a plusieurs couches…

Le masque d’hyène le fixe de ses yeux vides et fous.

Un étrange malaise envahit Fuller. Une boule d’angoisse prend naissance dans ses tripes, comme s’il se trouvait au bord instable d’un précipice vertigineux. En même temps, il perçoit nettement, au creux de son oreille, une espèce de ricanement évoquant celui qu’émet parfois Tony Junior. Il tourne la tête vers Rudy qui lui sourit benoîtement. Revient au masque, fasciné par sa hideur.

— Prenez-le, suggère Rudy. Touchez la patine extraordinaire de ce bois. Ce masque est très ancien : plus de cinq siècles… C’est un cadeau inestimable.

Malgré lui, Anthony obéit, empoigne le masque… Il ne peut plus en détacher son regard. Le ricanement retentit de nouveau, plus fort. Non, ce n’est pas un ricanement : c’est un cri, un cri animal. Un cri d’hyène ! Une terreur viscérale s’empare de lui. Il voudrait lâcher cette horreur, fuir hors de la chambre, mais il est paralysé, cloué sur place. Ses yeux exorbités fixent la figure peinte de motifs noirs, rouges et jaunes… qui se mettent à danser devant lui, brouillent la forme du masque… lequel a maintenant le visage de Wilbur. C’est la tête coupée de son fils décédé qu’il tient entre ses mains. Livide, exsangue, les traits tirés, comme il était au jour de sa mort. Ses paupières fripées se soulèvent sur des yeux jaunes injectés de sang. L’épouvante se répand dans l’esprit d’Anthony comme une lave brûlante, annihilant toute pensée, toute volonté.

Le masque Wilbur ricane de nouveau – une hyène ? Non : c’est Tony Junior, qui lui dit d’une voix sans timbre :

— Tu vas mourir, papa.

1- Harsh : rude, rêche, strident, désagréable…

2- Kill Them All : Tuez-les tous ; Save OurSelves : Sauvons-nous nous-mêmes.