UN DON DE LA TERRE

SAVE OURSELVES

Si ton voisin a faim, au lieu de lui donner du poisson,

apprends-lui à pêcher. (Proverbe baoulé)

Vous avez un projet ?

Nous pouvons vous aider.

<SOS.org>

Ceux qui peuvent pour ceux qui veulent.

De : Fatimata Konaté <f.konate@gov.bf>

À : Markus Schumacher <markus@sos-europe.org>

Date : 25/10/2030 - 15:53 GMT

Niveau de sécurité : confidentiel

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Cher Markus,

Peut-être ne vous souvenez-vous pas de moi, accaparé que vous êtes en permanence par les victimes de catastrophes et les déshérités de la terre. Pourtant votre organisation est déjà intervenue plusieurs fois au Burkina, lors de mon mandat de Premier ministre ou sollicitée par les services de mon prédécesseur, le président Adama Diallo ; notamment en 24, pour nous aider à relancer la production rizicole de Hiéna-Djonkélé. J’ai eu le plaisir de faire votre connaissance à cette époque, et d’apprécier « sur le terrain » votre compétence et votre efficacité. Hélas, la sécheresse a eu raison des rizicultures… Nous tentons de reconvertir la région au sorgho, moins productif mais moins gourmand en eau.

Ce n’est pas pour dresser le bilan des réalisations passées que je vous écris, mais plutôt pour évoquer une possible collaboration future. J’ai découvert sur votre site l’image-satellite d’une nappe phréatique insoupçonnée, située près de Kongoussi (au nord de Ouagadougou), à l’emplacement du lac Bam asséché depuis dix ans. Mon Premier ministre Issa Coulibaly estime que cette réserve souterraine pourrait alimenter en eau l’ensemble du Burkina pendant une cinquantaine d’années.

Vous n’ignorez certainement pas, cher Markus, la situation dramatique que vit actuellement mon pays, du fait d’un déficit chronique en eau qui réduit à néant tous nos efforts de survie économique, voire de survie tout court. Chaque jour on ramasse les morts dans les rues par dizaines ; un quart de la population est dans l’incapacité de travailler, trop faible ou terrassée par les maladies ; notre agriculture satisfait à peine 20 % de nos besoins les plus élémentaires ; l’« exode de la soif » draine des populations décharnées vers le sud où elles se heurtent à l’hostilité des autochtones guère mieux lotis qu’elles. Des heurts souvent violents aux frontières et une tension croissante avec la Côte-d’Ivoire qui s’estime « envahie » font planer le spectre de la guerre de 2002-2003, et je crains le pire. Présentement c’est le Ghana qui nous fournit en eau du lac Volta (à un prix exorbitant), mais le niveau du lac baisse et ce pays connaît aussi des problèmes de pénurie : il pourrait décider de fermer les vannes. Qu’avons-nous comme alternative ? Qu’avons-nous à échanger contre de l’eau ? Que du sable, du vent et des larmes.

Je ne cherche pas ici à me plaindre, seulement à vous exposer un bref aperçu de la situation. Si j’étais croyante, je dirais que cette nappe phréatique est un don du Ciel. (Ma mère, animiste, dirait plutôt que c’est un don de la terre…) Il ne reste qu’à l’exploiter… Or elle est située à plus de 200 m de profondeur. Nous ne possédons pas, dans le pays, le matériel adéquat pour réaliser de tels forages, ni n’avons les moyens de l’acquérir. Nous pourrions faire appel à une entreprise étrangère, mais cela grèverait les coûts de production qui doivent nécessairement être le plus bas possible.

Vous avez déjà compris où je voulais en venir : j’ai vu sur votre site que SOS-Europe offrait des programmes « clés en main » de forages et d’irrigation raisonnée aux pays victimes de sécheresses récurrentes. Dans la mesure, bien sûr, où l’eau existe et peut être captée… C’est le cas ici. Vous nous avez montré que cette eau existait, il faut maintenant faire un pas de plus : nous aider à la capter.

Je me doute, cher Markus, que toute votre énergie doit être sollicitée par les terribles inondations qui frappent les Pays-Bas, et je compatis de tout mon cœur au sort des malheureuses victimes. Mais ici aussi c’est par milliers que les gens meurent, tombent en silence dans la poussière.

En espérant que cet e-mail retiendra votre attention,

votre dévouée,

Fatimata Konaté

Présidente du Burkina-Faso

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