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Le navire était propulsé par la voile, nommé de Galician. Quand ils embarquèrent et partirent, Bárbara dit à Vidal qu'elle ne se sentait pas bien avec l’oscillation du bateau et s'excusa. Elle voulait se coucher un peu dans la cabine.
«Souhaitez-vous que je vous accompagne?
-Non, ce n'est pas nécessaire. Je vais essayer de me reposer un peu. Peut-être que l’oscillation aidera et me guérira de mes nausées malgré le fait que ça en est la cause.
-Je vais seulement vous y accompagner, alors. Puis je ferais un tour sur le bateau.»
Quand elle se trouva seule dans la cabine, Bárbara ferma la porte à clé. Elle ne supportait pas l'excitation, elle avait besoin de lire la lettre de sa mère.
«Ma chère fille. J'espère que vous allez bien. Quand vous lirez cette carte, je serais enterrée. C'est le destin, on ne peut rien faire contre lui.
J'aimerais seulement que vous sachiez que je vous ai aimé dès que j'ai vu vos yeux s'ouvrir. Si j'ai fait ce que j'ai fait, ce fut pour que vous ayez une vie que je ne pouvais pas vous donner.
Jonas a déjà dû vous raconter que j'ai été séquestrée par un groupe de Gitans quand j’étais encore enfant. Je me souviens vaguement de ma famille, de ma mère, un homme que je pense être mon père et deux enfants avec lesquels je jouais. Peut-être mes frères. J'ai ces figures dans ma mémoire, mais elles semblent plus être des rêves.
Nous errions à travers toute l'Europe. Je ne sais pas d'où je suis venue. On a commencé à m’appeler Dalila et je me suis habituée à mon nom, le vrai je ne m'en souviens pas.
La vie était très dure. Nous déménagions toujours quand les gens commençaient à découvrir nos vols. Quand nous arrivions dans une nouvelle ville, ils me mettaient à moi et à d'autres enfants en train de mendier. Les plus vieilles mendiaient aussi et lisaient les paumes des mains en échange de monnaies. Ce n'était pas rare qu'on ait faim.
Déjà adulte, je fus prise par l'un des chefs de notre communauté en une nuit de saoulerie. Je me suis laissé faire pour ne pas me faire battre. Quand j'ai compris que j'étais enceinte, j'ai essayé de fuir d'eux. Je ne voulais pas ce destin pour vous.
Quand Jonas m'approcha et me convainquit de vous donner à monsieur Leonardo, je pensais que je faisais ce qui était le mieux pour vous. Mais je me suis trompée. Avec le temps, j'ai découvert que Leonardo ne servait à rien. Leonardo menaçait constamment de révéler la vraie nature de Jonas à tous. C'est la raison de la loyauté canine de Jonas envers lui et la raison de la haine que je sens envers votre père adoptif.
Pardonnez Jonas pour ce qu'il vienne à vous faire qui ne soit pas de votre gré. Il est dans la paume des mains de ce malheureux. Il l'a toujours été. Je ne l'ai pas su à temps. Si je l'aurai su avant, j'aurai fui de nouveau avec vous.
Mais grâce à Dieu au moins j'ai pu vous voir grandir un peu. Pas comme je le souhaitais. J'aurais aimé être plus proche, mais ce n'était pas possible. Et maintenant cette maladie. Il ne reste pas grand temps, mes doigts sont déjà noirs.
Je veux seulement que vous gardiez pour vous les mots suivants: si la vie vous donne du jus de citron, faites de la limonade.
Soyez heureuse, Bárbara. Soyez ce que je n'ai pas réussi à être.
Je vous ai toujours aimé, mon enfant.
Votre mère, Dalila.»
Bárbara essaie de contenir ses larmes mais elle n'y arrive pas. Elle lit la carte de nouveau. Elle l'embrasse. Une larme coule et tombe sur la feuille, tâchant une partie de l'écriture. Elle approche la partie tachée de la chandelle qu'elle avait allumée et découvre ce qui était occulté. Des lettres surgissent là où la chandelle s'approche du papier. Il existe une lettre occulte sur celle-ci.
Maintenant elle comprend la référence étrange aux citrons. Le dicton fait allusion aux citrons, mais pas à leur jus. Dalila avait écrit une lettre occulte avec du jus de citron. L'écriture n’apparaîtrait que quand elle serait réchauffer et disparaît de nouveau quand elle revient à la température ambiante.
Bárbara cherche un papier et un crayon dans ses choses. Elle chauffe partie par partie du papier et copie les mots de Dalila.
"Mon enfant, ces informations sont seulement pour vous. Je sais que Jonas lira la lettre quand je serais partie. Il existe des choses qu'il ne sait pas, et qu'il ne doit pas savoir.
Après une nuit de célébration, j'ai attendu que tous dorment. J'ai pris une dague et j'ai cherché votre père. Quand je l'ai trouvé couché dans un coin, j'ai mis ma main sur sa bouche et j'ai enterré la dague dans son cœur. Le porc n'a même pas ouvert les yeux. Après ça, j'ai fui. Pour cette raison n'essayez pas de trouver votre père, il ne marche plus entre les vivants. Mais je sais que nous deux avons dû être maudites par ces gens répugnants.
Quand vous êtes née, j'ai lu vos cartes dans la Tarot. Si vous choisissez le chemin de gauche vous n'amènerez que la malchance et la mort à tous ceux qui vous entourent et à vous-même. Vous ouvrirez un abîme dans votre vie qui vous tirera toujours vers le bas. Choisissez le chemin de droite, pardonnez et soyez pieuse. Peut-être sauverez-vous votre âme en agissant ainsi.
Dalila, votre mère qui vous aime avant toute autre chose.»
Bárbara plia la lettre originale et la garda. Elle déchire la copie qu'elle a faite. Elle trouve drôle et attachant que Dalila soit devenu une gitane qui lisait le futur. Ça ne lui dérangeait pas que ce soit vrai ou non, ça ne lui importe pas. Elle sort et va faire un tour sur le pont. Elle veut prendre un peu de soleil.
––––––––
Quelques jours après, Bárbara décide de raconter quelques choses à Vidal. Il est son mari maintenant et il doit savoir de tout pour pouvoir l'aider. Elle doit le convaincre à suivre ses pas, peu importe la direction.
Après une nuit d'amour Bárbara le réveille.
«Vidal, nous devons parler.
-Maintenant? Laissez-moi dormir encore un peu.
-Non, ça doit être maintenant. Nous sommes presque arrivés à Southampton. Je dois vous raconter certaines choses.»
Vidal baille, se frotte les yeux et s’assoit dans le lit.
«D'accord alors, déjà que vous êtes décidée à ne pas me laisser dormir, vous pouvez commencer. Ne préférez-vous pas manger quelque chose avant?
-Non, je suis décidée.
-Commencez alors.»
Bárbara raconte son histoire à Vidal. Que quand elle était bébé elle fut mené à Leonardo. Les abus qu'elle a soufferts dans ses mains. Qui était sa vraie mère. Et qu'elle souhaite fuir de Leonardo.
Vidal entre en état de choc. Bárbara pleure. Vidal la prend dans ses bras et essaie de la réconforter mais ne parle pas. Il sait qu'elle doit pleurer pour alléger la douleur qu'elle porte.
Ils restent enlacés jusqu'à ce que Bárbara reprenne son discours.
«Vidal, je dois savoir ce que vous pensez. Ce que vous sentez pour moi. Ce que vous serez capable de faire pour moi.»
Vidal l'embrasse.
«Bárbara, je suis amoureux de vous. Ce par quoi vous avec passé et ce que vous avez fait ne me dérange pas. Mais vous pouvez être sûre que je ferais tout ce que je peux pour vous rendre heureuse. Et vous, que sentez-vous envers moi?»
Bárbara demeure silencieuse pendant un moment. Malgré sa tendance pour le mensonge, elle freine cette envie. Elle pense que ce serait trop forcé de lui dire qu'elle l'aime.
«Je ne suis pas amoureuse de vous Vidal. Je ne vais pas mentir. Je ne le suis pas encore. J'espère qu'avec le temps cette situation change. Mais avec tout ce que j'ai passé dans ma vie jusqu'à maintenant, je ne sais pas si je suis capable d'aimer. Pas maintenant.
-Je serais patient, Bárbara.»
Vidal l'enlace, il l'embrasse. Ils font l'amour de nouveau. Après Bárbara s'endort, mais pas Vidal. Il pense à tout ce qu'il a entendu, tout ce qu'elle lui a raconté. Il se rappelle de son père. Il n'arrive pas à croire qu'un père puisse faire ce que le père de Bárbara lui a fait, c'est dégoûtant et inacceptable. Même n'étant pas son père biologique. Il sent de la peine pour elle. Non, plus que ça. De la compassion.
Quand Bárbara se réveille finalement, Vidal la prend dans ses bras et l'embrasse de nouveau.
«Vidal, m'aiderez-vous?
-Oui, dites-moi ce que vous pensez faire. Je vous aiderais pour tout ce dont vous aurez besoin. Je ne peux concevoir que quelqu'un puisse faire à son enfant, même si adopté, ce qui a été fait avec vous», dit Vidal. Il a les poings serrés, il n'arrive pas à traduire en mots le dégoût et le début de haine qu'il a commencé à sentir envers Leonardo.
«Après tout ce que je vous ai raconté Vidal, je ne vous blâmerais pas si vous me laissez. Vous devez penser que je suis une salope, une prostitué!
-Bárbara, Bárbara. Ce n'est pas de votre faute.
-Que me dites-vous maintenant? Que ferez-vous ? M'abandonnerez-vous?»
Vidal reste silencieux pendant quelques moments. Oui, elle est une prostituée. Si elle se couche avec lui sans la moindre pudeur sans l'aimer. Mais quelle épouse aime son mari? La plupart des mariages sont arrangés, ce sont des unions qui se forment entre familles pour leur bien mutuel. Si Bárbara est une prostituée, toutes les épouses le sont.
«Bárbara, j'honorerais les vœux que nous avons faits dans l'Église. Je serais à vos côtés. Mais une chose me dérange.
-Quoi?
-Comment pensez-vous fuir de votre père?»
Elle lui raconte le plan qui a été tramé contre Leonardo, la lettre envoyée à l'archevêque, la participation de Jonas. Aucune de ces questions ne restent sans réponse. Mais dans son esprit naissait une inquiétude.
«Bárbara, si l'archevêque arrête et accuse votre père d'être franc-maçon, peut-être que Teodoro et Alicio se retrouveront dans une situation de laquelle ils ne peuvent sortir. Y avez-vous pensé?
-Maintenant il est trop tard pour ce type de pensées. La roue du destin a commencé à tourner. De plus, ils paieront pour un crime qu'ils ont commis. Que vous avez aussi commis.
-Oui, mais ce qui vous est arrivé n'est pas de leur faute! Ils ne font qu'aider leur confrère!
-Quant à ça, je n'y peux rien. Nous verrons ce qui arrivera. Une dernière chose Vidal, s'il vous plaît, n'envoyez aucune correspondance vers le Portugal. Je ne peux pas le risquer. Je ne veux que personne ne me poursuive. Je ne veux plus de noirceur dans ma vie.»
Vidal est d'accord avec Bárbara.
«C'est dommage, je n'aurais pas aimé perdre contact avec Alicio. Mais je ferais ce que vous me dites. Mais encore une chose me perturbe. Si votre père abusait de vous, comment espérait-il continuer son abus sur la Nouvelle Terre après que nous soyons mariés?
-Vidal, mon père est un fou. Il prétend se livrer de vous. Ainsi il serait libre de se faire passer pour mon mari. Il continuerait ses abus et je serais son esclave sexuelle jusqu'à la fin de ma vie. Ou de la sienne.»
Vidal comprend alors la situation dans laquelle il se trouve. Une situation qui, en toute certitude, lui coûtera la vie.
«Et que pensez-vous maintenant Bárbara? Souhaitez-vous vous livrer de moi quand vous aurez ce que vous voulez?
-Vidal, ne me prenez pas pour une folle comme mon père. Je n'ai même pas le même sang que cette crapule. Je ne serai jamais capable de faire une de ces choses. Vous avez été attiré dans cette situation, mais je vois en vous mon sauveur. Je n'ai pas d'illusions et je pense que nous pourrons vivre ensemble comme un couple. Ne vous ai-je pas déjà prouvé tout ça en vous racontant tout?
Vidal raconte alors à Bárbara le récit que Fátima a fait à Alicio du temps où elles étudiaient ensemble. Et il lui demande si elle a eu ou non une relation amoureuse avec l'archevêque. Il veut tout savoir.
«Vidal, j'ai cherché de l'aide en ce prêtre. Je me suis confessée à lui. Je me torturais en pensant que les abus étaient de ma faute. Il m'a aidé à comprendre que dans cette histoire il n'y avait qu'un coupable, le dément de mon père. J'espérais qu'il ferait quelque chose pour m'aider à sortir de cette situation. Et il l'a fait. Il a commencé à poursuivre mon père en disant à travers la ville qu'il appartenait à une fraternité occulte. Il a trouvé mieux de procéder de cette façon pour que je ne sois pas exposée. L'archevêque a eu l'idée de le mener à la Sainte Inquisition, pour que je me livre de lui. Ça a été la manière qu'il a trouvée de m'aider, seulement par charité chrétienne. Mais mon père est au courant des intentions de l'archevêque. Pour ça a-t-il planifié la fuite, mais ça vous le savez déjà. Peut-être que ma proximité avec le prêtre a donné une idée erronée à Fátima. Je ne peux pas croire qu'elle ait imaginé ces folies. J'espère que vous n'y avez pas cru.
-Bárbara, je vais être honnête avec vous. J'y ai cru, mais je suis en faillite. J'ai accepté ce mariage seulement pour l'argent. Tout du moins au début. Mais quand je vous ai connu, l'argent a arrêté d'être important. Me comprenez-vous?»
Bárbara fait signe que oui de la tête et se niche contre la poitrine de Vidal. Il se rappelle des suspicions d'Alicio envers Fátima et le demande à Bárbara.
«C'est vrai, elle n'aime pas les hommes. Des fois je jouais avec elle, je lui caressais les cuisses pour voir ses réactions. Elle se délectait. Je ne doute pas qu'elle m'aime et qu'elle me veuille non comme amie, mais comme autre chose!
-Ne le prenez pas mal, Bárbara. Mais, et quant à l'argent de votre père? Comment nous débrouillerons-nous sans ça?
-Ne vous inquiétez pas. La plus grande partie est avec moi.»
Vidal reste plus tranquille. Si l'argent est avec elle, avec lui aussi.
«Bárbara, allons manger quelque chose? Je ne supporte plus d'être enfermé ici.
-Vous ne supportez plus d'être à mes côtés, demande Bárbara, baissant la tête comme une enfant taquine prit en flagrant délit.»
Vidal la prend dans ses bras et commence à l'embrasser et la caresser. Le petit déjeuner attendra.