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32 . James

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Dès qu'ils débarquent, ils sont reçus par un mulâtre.

«Bienvenu, monsieur capitaine! Comment a été le voyage? Tranquille?

-Comment allez-vous, James? Cette fois-ci la mer était calme.» James regarde Bárbara. « Laissez-moi vous présenter mes compagnons de voyage. Voici monsieur Vidal... désolé monsieur, je ne me souviens pas de votre nom de famille.»

Vidal donne un pas en direction de James et le salut.

«Bueno, Vidal Bueno. Et voici mon épouse, Bárbara Bueno.»

James serre la main de Vidal et prend la main de Bárbara pour lui donner un baiser. Quand ils se touchent, Bárbara sent un frisson lui parcourir l'épine. Elle rougit en présence de James.

«Enchanté de vous connaître, madame.

-Le plaisir est tout à moi... James n'est-ce pas?

-Oui, James Heliantus à votre disposition.» Et il fait une révérence. Elle sent une chaleur lui monter au ventre. Les yeux noirs se fixent sur les siens. Elle l'observe de haut en bas, un homme très bel homme, des cheveux noirs comme ses yeux, des bras et des jambes forts, des ombres larges et musclés. Les deux semblent ne pas s'apercevoir du monde qui les entoure, comme si le temps s'était arrêté. Vidal ne se sent pas bien avec cette situation, inconfortable comme tout homme se sent en présence d'un mâle alpha. Il s'incline vers Bárbara comme s'il souhaitait la protéger d'une menace potentielle, pour protéger son territoire. Le capitaine s’aperçoit du malaise de la situation et prend la décision de l'interrompre. Il s'approche de James et le prend pas le bras.

«Et alors James, quelles sont les nouveautés? Sommes-nous bien en termes de quantité?»

James échappe au regard de Bárbara un peu gêné et commence à marcher à côté du capitaine. Vidal lance un regard féroce à Bárbara qui sourit puis regarde le sol. Le capitaine se tourne vers eux.

«Venez, vous deux, et ne vous inquiétez pas avec vos bagages, ils seront amenés quand ils seront déchargés.» Le couple les suit jusqu'à un carrosse.

«Montez s'il vous plaît, elle est à nous, dit James.

-Alors on est déjà comme ça James? Qui vous a donné l'ordre d'acheter un carrosse, dit le capitaine sur un ton de plaisanterie. Mais je connais ce carrosse! N'est-ce pas celle de nos voisins, la famille Chermont?

-Oui, mais le vieux est mort!

-Ne me le dites pas James! Quand  a eu lieu ce malheur?

-Dès que vous êtes partis, monsieur capitaine. Le vieux cœur a arrêté de battre pendant qu'il dormait. C'est triste. Son épouse est entrée en désespoir, ils étaient toujours ensemble. Elle a décidé de vendre tout, le magasin de vêtements, la maison, la carrosse... C'est pour ça que c'est à nous.

-Mais pourquoi vend-elle tout?

-Elle a pris la décision de retourner en France. Elle m'a dit qu'elle allait mourir par là-bas, près de ses sœurs.

-Mais et ses enfants? Vont-ils l'accompagner?

-Non, non, ils ont décidé de rester. C'est triste n'est-ce pas? Une famille divisée de cette façon.

-Êtes-vous marié, monsieur James, demande Bárbara en s'approchant des deux hommes à l'avant et laissant Vidal derrière.

-Non madame. Personne ne m'a encore volé mon cœur, lui dit-il en lui souriant, tandis qu'elle tourne ses yeux au sol pour encore une fois cacher le rougissement qui lui teint le visage.

-Et la maison? A-t-elle été vendue? Ou l'un de ses enfants va y emménager?» Le capitaine intervient encore une fois en notant la furie sur le visage de Vidal qui les avait rattrapés.

«Non monsieur, elle est en vente à la responsabilité de monsieur Jean. Pourquoi? Ça vous intéresse? Si vous voulez, il peut vous faire une proposition.

-Pour moi non, mais pour ces deux-ci, peut-être que ça va les intéresser. Ils sont chanceux. Pauvre monsieur Jacques. Nos conversations et nos parties d'échecs me manqueront, malgré le fait que le vieux détestait perdre. Une fois il a lancé l'échiquier au loin et les pièces ont atteint l'autre côté de la rue. Ses manières un peu folles me manqueront. Mais allons, montons. Apprécions notre nouvelle acquisition.»

Vidal aide Bárbara à monter. Puis montent le capitaine et James. Ils donnent ordre pour que le conducteur parte.

«Racontez-moi James, comment vos les affaires? Avons-nous des nouveaux clients?

-Oui, encore trois fermiers utilisent l'unité d'exploitation.

-Désolé de me mettre dans le sujet, mais vous louez l'unité à d'autres personnes? Ça ne vous cause pas des problèmes, demande Vidal.

-Nous ne plantons pas la canne à sucre, nous en bénéficions en échange d'une partie de la marchandise. Et voilà où se trouve le plus grand gain que nous pouvons faire avec une petite unité d'exploitation, ou nous achetons la matière-prime. Mais comme je vous l'ai dit, nous avons une extension de terre pour faire notre propre plantation, mais James ici ne pourra pas se charger des deux affaires en même temps. Pour ça, je devrais l'aider par ici. Pour le moment, ce n'est pas possible. Mais la situation peut changer.

-Comment ça? Avez-vous réussi à convaincre votre dame à s'installer dans ce coin, monsieur capitaine?

-Non James. Malheureusement je n'ai pas encore réussi à effectuer ce miracle. Mais laissons ce sujet pour le souper. Vous soupez avec nous ce soir, ou avez-vous d'autres plans?

-J'avais d'autres plans mais je les ai annulés. Quand on m'a prévenu qu'on avait vu un navire entrant dans le port, je me suis préparé pour que nous passions ce temps ensemble. Combien de temps resterez-vous cette fois-ci?

-Seulement le temps de décharger et recharger le navire à nouveau. Nous ne pouvons pas perdre de temps, n'est pas James? À peu près trois jours et je serais de retour à ma deuxième épouse, la mer!

-Monsieur capitaine, monsieur capitaine. Venez vous établir ici. Les dangers de ces voyages sont énormes.

-Ne vous inquiétez pas jeune homme! Les cieux nous protègent. Et ça ne vaut pas la peine qu'on s'attarde à penser à ci ou à ça, nous avons notre travail et nous devons le faire. N'êtes-vous pas d'accord monsieur Vidal?»

Vidal est à moitié absorbé dans ses pensées tandis qu'il observe les maisons et les commerces par lesquels ils passent. Il se tourne vers le capitaine et lui dit que oui sans bien comprendre ce qui avait été dit et retourne à ses pensées. Bárbara n'arrive pas à détourner ses yeux de James, de ses mains, de son nez, de ses lèvres charnues. Ses narines se forcent pour sentir son odeur forte, il est un peu sué. Elle le cache de temps en temps, en tournant son visage  vers la rue et le regarde de côté, devenant presque borgne. Ses pensées sont toutes tournées vers l'homme devant elle. Elle commence à imaginer ses mains le touchant. Sa respiration change de rythme et elle se bat pour se contrôler. Mais quelque chose comme ça n'est pas contrôlable, n'est-ce pas?

«Combien avez-vous payez pour ce carrosse, James? J'espère que vous n'avez pas gaspillé nos fonds.

-Ne vous inquiétez pas, monsieur capitaine. Elle est en bon état, presque neuve. Et le prix nous est revenu à presque la moitié!

-Bon garçon, dit le capitaine en souriant. Bien, nous somme arrivés. Voici mon humble maison. Descendons.»

Quand ils descendent, ils se trouvent devant une construction bien raffinée. Une maison d'un étage. Sur la partie du sol, quatre colonnes du style romain. Sur la partie supérieure, quatre de plus. Entre les colonnes on voit d'énormes fenêtres en vitre avec des rideaux de couleur claire. Sur la partie inférieure, la porte à gauche et des fenêtres à droite. À côté de la porte, plus ou moins à la moitié de la maison, se voit l'autre partie de la maison. Elle a été construit en forme de L.

Tout le terrain est muré et devant, un portail en fer tout travaillé. Le toit suit en ligne droite et bien devant se trouve un arbre feuillu, dont la cime arrive au premier étage, lui donnant de l'ombre. Une maison assez confortable est l'impression générale.

«Monsieur capitaine, quelle belle maison! Et énorme, dit Bárbara.

-C'est vrai. Ne vous ai-je pas dit que vous ne nous dérangeriez pas? Il est possible que nous ne nous rencontrions même pas à l'intérieur, dit le capitaine en riant. La vérité est que je l'ai construit pour toute ma famille. Il y a des pièces complètement séparées, comme si c'étaient deux maisons. Mon intention est que quand ma fille se marie, elle habite avec nous. Ainsi, elle ne sortira pas de ma vue!

-Bien pensé, monsieur capitaine, dit Vidal.

-Cette partie de la maison est utilisée par James. Vous resterez dans la partie de devant avec moi, quand je serais par ici. Nous avons deux chambres devant et une de plus sur le côté, comme vous pouvez le voir. Mais entrons, je pense que vous souhaite prendre un bain t vous reposer avant de dîner. Et quand à vous, James, nous donnerez-vous le plaisir de votre présence au dîner aussi?

-Je ne peux pas, monsieur capitaine. Je vais vous laisser maintenant. Je dois retourner à l'unité d'exploitation. En ce moment, il y a une livraison de canne et j'ai besoin d'organiser la production.

-Quel dommage! Nous vous attendons pour le souper!

-Avez-vous amené ma commande, demande James s'inclinant vers le capitaine comme s'il lui racontait un secret.

-Oui, mais profitez en bien! Ce sont les dernières bouteilles de Pallister que vous allez boire!

-Comment ça?

-Je vous raconterais au souper. Traitez de commande d'une autre marque!»

James balance la tête. L'un de ses plaisirs est le porto, mais sans excès. Il sait déjà que beaucoup de vin de porto avec de la viande donne la goutte. Il sait bien, il se souvient de ce qu'il a souffert dans le passé avec ses excès. Son gros orteil avec une sensibilité absurde. Le moindre courant d'air, pour aussi petit que soit, lui amenait une douleur insupportable. Et il ne pouvait pas couvrir ses pieds, le simple poids d'une couverture semblait lui enfiler des aiguilles entre la chair et l'ongle. Après qu'on lui ait raconté que le coupable était la consommation de vin de porto avec de la viande en excès, il a diminué les doses. Des fois, il maudit le capitaine pour lui avoir donné une bouteille. Il se souvient de l'histoire de l'épidémie de la goutte qui a eu lieu en Angleterre. Une chose horrible. Après avoir dit au revoir au trio, il se dirige vers le carrosse. Soudainement, il se tourne et marche vers la position géographique du capitaine.

-Serait-il possible que nous puissions produire ce vin par ici, sur nos terres, monsieur capitaine?

-Nous en parlerons ce soir, James, dit le capitaine avec un sourire.» Dès qu'il avait connu James il avait compris que quelques choses passaient de sa tête directement vers la sienne. Ils avaient une complicité hors du commun, une chose de jumeaux. Il ne comprenait pas pourquoi, mais ça arrivait. Pour cela il sut sans devoir demander qu'il s'intéresserait à Bárbara. Mais il devra avoir une conversation réservée avec lui. S'ils vont être associés, la proximité entre les deux devra être limitée.

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Après le dîner, Bárbara s'excuse et va se coucher un peu. Elle dit qu'elle était un peu fatiguée, car ça avait été un jour mouvementé.

«Quel dommage madame! J'aurai pensé que vous aimeriez faire un tour dans la ville. Aujourd'hui, comme vous le savez, est samedi. Tout le monde fait le tour des magasins. Ne souhaiteriez-vous pas connaître nos commerces?

-Pas aujourd'hui, monsieur capitaine. Je suis très fatiguée. Puis-je vous laisser?»

Vidal se lève et va jusqu'à elle. Il tire sa chaise pour qu'elle puisse se lever.

«Allez vous reposer alors. Moi et monsieur le capitaine pourrons jouer aux échecs. Qu'en pensez-vous, monsieur capitaine?

-Allons alors. Je demanderai qu'on mette l'échiquier dehors. Il fait un peu chaud ici. Et buvons un peu de vin Pallister. J'ai acheté quelques bouteilles pour mon utilisation personnelle.

-Allons-y, monsieur capitaine. À plus tard, Bárbara.» Vidal s'approche et lui donne un baiser.

«Marie, venez ici, appelle le capitaine.

-Que souhaitez-vous, monsieur?

-Accompagnez madame Bueno à sa chambre. Je crois qu'elle ne connaît pas la géométrie de la maison. Faites-moi cette faveur, oui?

-Oui, monsieur. Par ici, madame.»

Quand ils arrivent à la chambre, Marie demande si Bárbara  a besoin de quelque chose de plus. Suite à la réponse négative, elle se retire et ferme la porte. Bárbara s'assoit sur le lit et enlève ses souliers. Elle s'élance vers l'arrière et fixe son regard sur le toit.

«Mais que s'est-il passé aujourd'hui? Pourquoi me suis-je comporté comme une enfant dans la présence de cet homme?»

Elle revoit dans sa tête tout ce qui s'est passé depuis le débarquement. La première vision qu'elle a eue de James. Elle a eu envie de s'approcher, mais elle s'est retenue. Juste le fait de ce souvenir de cet homme, de se rappeler de ses traits, de sa voix, de son odeur, de son toucher sur sa main, du baiser sur la main donner avec tant de respect qu'elle le sent encore sur la peau, ces pensées la font rougir. Elle commence à suer. Elle se lève, va jusqu'à la fenêtre et l'ouvre. Elle observe la vue sur la rue, les enfants courant devant la maison, des couples perdus dans les rues sans destination, seulement par le plaisir de sortir de chez eux. Elle ferme les yeux pour sentir avec plus de force la douce brise qui envahit la chambre. Mais elle a encore chaud. Elle va jusqu'à la porte et voit qu'il y a une clé dans la serrure. Elle la tourne et va jusqu'à la garde-robe. Elle se dévêtit et se couche complètement nue sur le lit.

Elle s'endort mais son sommeil est envahi par la figure de James. Elle est dans la même chambre, la porte s'ouvre et il entre. Il marche jusqu'à elle et la prend dans ses bras. Elle essaie de s'éloigner de lui mais n'y arrive pas. Il déchire ses vêtements et la lance sur le lit. Soudainement, il est nu sur elle. Tandis qu'elle rêve, la sueur descend contre sa peau. Elle se réveille effrayée et à sa recherche. Le rêve a été trop réel. Elle le cherche dans toute la chambre et se couche de nouveau. Elle ferme les yeux et se souvient de son rêve. Elle étire le bras et prend l'oreiller à côté d'elle, et le met entre ses jambes, les fermants. Elle se tourne sur le côté et commence à faire un mouvement de la hanche. Ses mains tiennent une partie de l'oreiller tandis que ses cuisses bougent. Elle commence à gémir et à imaginer le corps de James sur le sien, ses baisers, ses mains caressant ses seins et son coup. Un baiser sur l'épaule, une morsure à l'oreille. Sa respiration est à un rythme accéléré, ainsi comme son cœur. Une chaleur qui lui monte au ventre ne peut être satisfait qu'avec sa main. Elle gémit plus fort, ce tort comme un serpent se glissant sur le sable. Elle sent une pulsation entre ses jambes et perd ses sens. Cette fois-ci elle s'endort et ne rêve pas.

Elle est réveillée par des forts cognements à la porte et reconnaît la voir de Vidal. Elle se lève rapidement et s'enroule dans une couverture.

«Calmez-vous Vidal, je suis réveillée. Attendez un moment s'il vous plaît.

Elle va jusqu'à la porte et l'ouvre. Vidal entre à moitié en furie.

«Que s'est-il passé? Je pensais que vous étiez évanouie! J'étais prêt à enfoncer la porte!»

Elle laisse tomber la couverture au sol. Les balles des armes de Vidal fondent. Il ferme la porte et la prend dans ses bras. Il l’amène au lit avec la bouche collée à la sienne. Ils auront le temps suffisant de se donner l'un à l'autre avant le souper. Mais Bárbara fantasme que qui la possède est James. Elle laisse ses yeux à moitié fermés pour ne voir que des ombres, pour que son esprit remplisse avec les images qu'elle veut. Vidal s’aperçoit qu'elle est plus fougueuse que d'habitude, qu'elle bouge plus, qu'elle gémit plus haut, qu'elle se donne avec furie. Mais il ne passe pas par son esprit le plus léger soupçon de ce qui a provoqué ce changement. Et ça ne le dérange pas sur le moment.