L’attitude de Stead sur le Titanic est l’objet de différents témoignages qui ne coïncident pas tous. Il semble qu’il ait été de bonne humeur pendant la plus grande partie du voyage, comme s’il acceptait avec philosophie que sa vie vienne coïncider avec ce qu’il avait écrit.
Je ne peux m’empêcher d’imaginer un certain nombre de ses rencontres, en particulier avec les écrivains qui ont pris place à bord, comme Jacques Futrelle, l’auteur de nouvelles policières, ou Archibald Gracie, l’historien de la guerre de Sécession. Mais je ne peux surtout m’empêcher de penser qu’il y croisa à un moment ou à un autre un personnage qui m’a toujours fasciné, Violet Jessop.
Cette jeune femme au visage d’ange était infirmière sur le Titanic. Mais elle connaissait bien les autres navires de la White Star Line, puisqu’elle se trouvait à bord de l’Olympic en septembre 1911 lorsque celui-ci heurta le croiseur britannique HMS Hawke, accident qui le contraignit à annuler sa traversée. Et, rescapée du naufrage du Titanic, elle fera partie du personnel du Britannic lorsque celui-ci, victime d’une explosion, sombrera en novembre 1916, catastrophe dont elle sortira à nouveau indemne.
Violet Jessop est-elle une allégorie de la chance ou de la malchance ? Et de quoi peut-on bien parler, accoudé à ses côtés au bastingage alors que la température commence à faiblir, à une femme qui a échappé à une première catastrophe maritime et en connaîtra deux autres, quand on est soi-même spécialiste de parapsychologie et que l’on a raconté l’événement en cours, comme l’indique à tribord, tel que l’a si bien décrit Robertson, le bruit du flanc de l’iceberg déchirant la coque ?