« Article 4.
Prêcher la chasteté est une incitation publique à la contre-nature.
Mépriser la vie sexuelle, la souiller par la notion d’“impureté”, tel est le vrai péché contre l’esprit saint de la vie. »
Nietzsche, L’Antéchrist
Notaire (cravate de)
La cravate de notaire est une pratique sexuelle privilégiée des mammophiles. Elle consiste à masturber le pénis entre les seins, offrant ainsi un simulacre de pénétration qui a l’avantage, en sus de l’excitation visuelle, de ne présenter aucun risque de transmission d’infection sexuellement transmissible. Connue en Angleterre sous l’expression French fuck, cette pratique est parfois désignée en France par les mots « branlette espagnole ». Dans un souci de réciprocité diplomatique, les Espagnols nomment la fellation un francés.
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NSFW
Il y a quinze ans, lorsque les messageries électroniques ont commencé à envahir les entreprises, il n’était pas rare que les salariés profitent de cet outil pour s’échanger des diaporamas dénudés, voire quelques courts extraits vidéo interdits aux moins de dix-huit ans. Pour éviter que ses collègues ne soient surpris en plein visionnage par leur supérieur, l’expéditeur titrait généralement l’e-mail : « À l’abri des regards », ou encore : « Soyez discrets ».
L’ère des sigles devait forcément nous apporter un nom de code pour ce genre de contenus, utilisé aujourd’hui principalement pour qualifier les liens hypertextes sur lesquels il serait de bon ton de ne pas cliquer au travail. Ce sigle, c’est NSFW, pour not safe for work – « pas sûr pour le travail ». Son contraire est SFW, c’est-à-dire : « Vas-y, tu peux cliquer, ça craint rien. » Exemple en situation : « Dis-moi, ton site Pointp.com, c’est SFW ? » Réponse : « Oui, c’est un site de clous. »
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Emmanuel Pierrat, avocat, explique dans son livre Le Sexe et la Loi que « les spectacles de nus ont laissé longtemps perplexes certains tribunaux qui décidèrent de les distinguer entre spectacles artistiques et spectacles impudiques : on se livrait alors dans les prétoires à de savantes arguties byzantines pour savoir s’il s’agissait d’une référence à la statuaire antique ou d’un vulgaire striptease ».
Parce que l’interdiction de la nudité dans l’espace public est sujette à controverse, la crise financière a occasionné en 2008 une explosion de l’exhibition, joli moyen d’attirer l’attention. En politique, les Femen, groupe de féministes ukrainiennes fondé à Kiev en 2008, font beaucoup parler d’elles. Ce mouvement a considéré qu’un moyen pacifique d’obtenir la parole et d’être écouté était de montrer ses seins, ce que ses adhérentes font donc régulièrement lors de happenings pour la démocratie en général et les droits des femmes en particulier. Depuis le film The Full Monty dans lequel des hommes réalisent un striptease pour s’en sortir financièrement, l’habitude a été prise de se déshabiller en cas de coup dur. Ainsi des femmes « plutôt à poil qu’en fourrure » militent-elles pour l’association Peta de lutte contre l’exploitation des fourrures des animaux ; on a vu des Spice Girls soutenant, en tenue d’Ève, une association qui combat le trafic d’êtres humains ; puis des stars diverses et variées ont choisi de montrer leur anatomie pour médiatiser un sujet leur tenant à cœur. Il y a eu aussi des anonymes, en groupe souvent, qui se sont dénudés pour des causes écologiques, par exemple pour mettre en exergue la fragilité des cyclistes face aux automobilistes agressifs et pollueurs.
La méthode s’est généralisée. Pour soutenir les Belges, plongés dans une crise politique inextricable (et détenteurs du record du pays resté le plus longtemps en temps de paix sans gouvernement de plein exercice), des citoyens voyeurs ont imaginé en 2008 un nouveau type de pétition, dont ils espéraient qu’elle serait plus regardée que d’ordinaire, en lançant l’opération « Boobs for Belgium ». Il s’agissait, comme l’indique le titre, d’envoyer des photos de seins pour soutenir le rapprochement des communautés wallonnes et flamandes, leur apporter un peu de réconfort et faire plaisir aux responsables du site Internet. Le credo ? Très simple et très belge : « Des manifestations, pétitions, manœuvres politiques… tout cela ne change pas grand-chose. Ceci non plus, mais c’est vachement plus marrant ! »
Tania et ses amis (des Belges côté flamand) sont allés encore plus loin. Toujours en 2008, ils ouvraient un site, Don’t Stay a Virgin, et tournaient un petit film pour défendre la neutralité sur Internet. Tania, une très belle jeune femme, y proposait à tous les hommes majeurs vierges qui pourraient apporter la preuve de leur engagement pour sa cause des services sexuels protégés de moins d’une demi-heure, incluant éventuellement un rapport anal (le contrat est extrêmement précis). Son raisonnement est le suivant : « J’utilise le sexe dans un sens positif pour propager la bonne parole. La liberté sur le net est nécessaire, et un nombre inhabituel d’utilisateurs d’Internet est vierge. C’est le problème que j’entends résoudre. Dans l’histoire, l’homme s’est toujours battu par les armes pour la liberté. Il est temps que les armes soient l’amour. Le sexe est partout sur le net et, pourtant, c’est encore un gros tabou. Utiliser le sexe pour ouvrir les consciences sera encore un gros pas pour la liberté sexuelle. C’est également un exemple de ce qui est rendu possible par la liberté de la Toile. »
Lorsqu’un journaliste téléphonait pour savoir si cette histoire était vraie ou fausse, le petit ami de Tania répondait : « Si je vous dis que c’est faux, le buzz pourrait s’arrêter. » Puis il promettait, non sans humour, à ceux qui écriraient des articles favorables qu’ils pourraient rencontrer Tania… De quoi alimenter la rumeur ! Ce qui est certain, c’est que le forum a fonctionné et que plus de vingt mille hommes ont publié des preuves qu’ils avaient agi pour la neutralité et la libre expression sur Internet, dans l’espoir d’une récompense. La vidéo a été visionnée par plus d’un million de personnes en quelques mois.
L’équipe de Tania est heureuse de la couverture médiatique dont a bénéficié sa proposition autour d’un sujet aussi obscur et peu sexy, qui nécessitait selon eux un traitement décalé et plein d’humour. Ils ont professionnalisé le concept et en vivent aujourd’hui partiellement au travers d’un partenariat avec YouTube (qui a engendré l’opération « 40 000 fellations aux 40 000 premiers hommes majeurs » pour un parti politique belge). Si les Femen se cantonnent à la nudité, certains ont élargi le concept qui continue de démontrer que l’humour, le sexe et le corps sont des moyens d’expression politique pacifiques et plutôt efficaces.
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