Une heure passa.
Roger avait récupéré, et comme un grizzly géant, il faisait le tour de la cour à pas lourds en compagnie d’Yvonne.
Toujours sur les lieux, Glinda planait ici et là. Elle avait attaché ses cheveux blonds en une élégante queue de cheval, et sous la lumière de fin de matinée, ses yeux bleu clair avaient une allure angélique.
Je m’occupai en mettant de l’ordre dans le fouillis sur la pelouse.
Après avoir interrogé tout le monde, Nick était venu me retrouver. Il était à côté de moi depuis à peine quelques secondes lorsque Glinda s’approcha.
— Chef ? demanda-t-elle. Nous avons terminé ici ?
— Vous pouvez partir, dit-il en hochant la tête.
— Quoi ? dit Roger, qui avait entendu. Vous ne déposez pas d’accusation contre elle ?
J’ignorais s’il faisait référence à Glinda, à cause du pistolet Taser, ou à Elodie pour avoir provoqué le chahut.
— La fille est devenue folle.
Ah, ce devait être Elodie, puisque Glinda avait simplement fait son travail.
Je supposai qu’en principe, Nick aurait pu accuser Elodie d’avoir troublé la paix, et je lui étais reconnaissante de ne pas l’avoir fait. Elle avait suffisamment de choses à gérer.
Roger hocha la tête.
— La fille est devenue complètement folle.
Yvonne lui donna un coup de coude dans le ventre.
— Arrête ça. Elle est en deuil, c’est tout.
Il ne semblait pas convaincu. Il leva un sourcil hérissé et il se gratta la barbe. Il ne semblait pas trop amoché d’avoir reçu une décharge de pistolet Taser. Dans cette situation, sa forte taille lui donnait un avantage.
— Je dis que c’est une bonne chose que Connor n’ait pas encore épousé cette fille. Il doit laisser cette relation pendant qu’il est encore temps.
Yvonne lui lança un regard meurtrier, émit un « tss-tss » d’un air dégoûté et marcha d’un pas lourd vers la maison de Patrice.
J’aurais voulu la suivre. Roger me donnait la frousse. Je fis plutôt un pas pour me rapprocher de Nick, que ça ne sembla pas du tout déranger. Je vis sa lèvre tressauter alors qu’il réprimait un sourire, et j’aurais juré que lui aussi se rapprochait de moi. Nos coudes se cognèrent, puis s’appuyèrent l’un contre l’autre.
Je résistai à l’envie de me blottir contre lui. C’était plus difficile qu’il n’y paraissait.
— Qu’est-ce que j’ai dit ? demanda Roger, perplexe, pendant qu’il regardait sa femme partir.
Nick ignora la question de Roger et répliqua avec sa propre question.
— Est-ce la première fois qu’Elodie fait une crise ?
Roger croisa les bras sur sa poitrine massive et haussa les épaules.
Intéressant. Roger avait apparemment adoré Patrice, mais pas sa fille ?
Nick griffonna dans son carnet.
— A-t-elle déjà démontré de l’agressivité envers sa mère ?
— Bien sûr, tout cet encombrement la rendait folle.
« Ne serait-ce pas la réaction d’une personne normale ? », me demandai-je.
— Se disputaient-elles ? demanda Nick.
— Un jour, elles ont eu une grosse querelle, grommela Roger. Elles ne se sont pas parlé pendant des mois.
— Pourquoi s’étaient-elles disputées ? demanda Nick.
— Je ne sais pas. Il faut que j’aille voir ce que fait Yvonne, dit-il, et il partit d’un pas lourd.
Nick regarda autour de lui.
— Hansel ? Vous êtes toujours ici ? Je croyais que vous étiez partie.
Glinda s’approcha rapidement.
— Je vous attendais ?
Je ne pus m’empêcher de remarquer comment elle le regardait. J’avais l’impression que je le regardais de la même manière.
Elle l’aimait beaucoup.
Je jetai un coup d’œil du côté de Nick. Il ne sembla pas l’avoir remarqué.
— Pourquoi ? demanda-t-il.
— Je…
Elle cligna des yeux aux longs cils.
— Je pensais que nous avions terminé ?
Il fit un coup de tête affirmatif.
— Nous avons terminé. Je vous verrai au poste.
Elle restait toujours là.
— Vous pouvez y aller maintenant, dit-il doucement.
— Oh. D’accord.
Elle se retourna et partit précipitamment.
J’attendais qu’il commente son évidente adoration. Mais il ne le fit pas.
Et s’il n’allait pas en parler, je ne le ferais pas non plus.
— Étiez-vous au courant de la raison de la querelle entre Elodie et sa mère ? dis-je, cherchant à parler d’autre chose que de ma jalousie croissante.
Nick sourit.
— Je ne peux discuter de l’affaire avec vous non plus, Darcy.
Il y avait un cas dont il pouvait parler avec moi — étant donné que j’étais quelque peu impliquée.
— Des pistes avec le voyeur ?
— Pas encore.
« Beaucoup de bonnes nouvelles aujourd’hui », me dis-je sarcastiquement.
La porte grillagée claqua. Connor descendit les marches et se dirigea vers nous.
— Comment va Elodie ? demandai-je.
— Mal à l’aise, dit-il. Je vais la ramener chez nous pour qu’elle puisse se coucher. Elle a passé la matinée à travailler sur les arrangements de services funéraires, et je pense que ça l’a affectée.
Compréhensible.
— Darcy, vous serait-il possible de rester pour rapporter toutes ces choses dans la maison ? ajouta-t-il.
— J’ai quelques petites courses à faire. Je pourrais m’en occuper ensuite. Vous me donnez 15 minutes ?
— Prenez votre temps, dit-il en jetant un coup d’œil à la pile sur la pelouse. Je ne pense pas que ces trucs s’en aillent où que ce soit.
Comme je me dirigeais vers le bureau de Sylar, je ne pus m’empêcher de penser à ces opales luisantes au soleil et de me demander ce qui pouvait encore se cacher dans tout ce fouillis. Y avait-il d’autres trésors ? D’autres secrets ? Ou peut-être des indices qui révélaient l’identité de la personne qui avait tué Patrice.