par Élodie Mondelice
Élodie Mondelice, artiste-peintre née à Paris le 27 janvier 1983, est inspirée par l’Inde et l’hindouisme.
Mon premier contact avec la peinture s’est fait juchée sur les bras de mon père, j’avais quatre ans et je découvrais une exposition du douanier Rousseau au Grand Palais à Paris.
Beaucoup d’autres expos jalonnèrent ma petite enfance (Gauguin, Matisse, Watteau, Poussin, Van Gogh). Mon père m’offrait toutes sortes de livres qui parlaient de tableaux, de couleurs, de peintres et je m’amusais à dessiner des soleils, des maisons avec jardin, des canards…
Un jour mon père m’a apporté l’épopée du Râmayana en bande dessinée, sorte de petit journal illustré en couleur. J’ai été fascinée par cette histoire et ces personnages et inlassablement, je regardais les images.
Aux grandes vacances, je quittais Paris pour passer l’été en Guadeloupe, dans la famille de ma mère (d’origine indienne) je trouvais là une culture riche des Antilles, de l’Europe et de l’Inde. J’aimais les saris colorés que sortaient mes tantes pour les grands événements. J’aimais manger le colombo avec mes doigts sur les feuilles de bananier lors des cérémonies en l’honneur de Kali ou de Maliémin, même si j’allais à la messe le dimanche…
Adolescente, j’ai été éblouie par le cinéma de Bollywood avec ses actrices sublimes, ses costumes flamboyants, sa symphonie de couleurs tourbillonnantes. Ces richesses emmagasinées au fils du temps ont nourri l’inspiration de l’artiste-peintre que je suis devenue.
Après des études dans une école d’architecture, j’ai abandonné définitivement l’idée d’être architecte pour me consacrer à ma passion, la peinture. Ma première exposition en 2010 au Lamentin en Guadeloupe fut cependant consacrée à l’œuvre d’Ali Tur (architecte des colonies dans les années 30).
Mes pinceaux ont alors paré de couleurs les bâtiments publics qui font l’originalité de la Guadeloupe, mettant ainsi en lumière la richesse d’un patrimoine qui sommeillait. Aujourd’hui, je prépare ma prochaine exposition que j’ai intitulée : My Desi Girl, titre d’une des chansons du film Dostana, qui peut se traduire par « mon indienne ».
Je crée sur la toile des visages de femmes, inspirées des héroïnes de ces films d’amour à l’indienne, dont je raffole. De ces scénarios, où l’amour semble impossible à cause des traditions ancestrales (mais où les amoureux triomphent toujours !), je retiens la beauté des femmes, la force de leur regard où passent toutes les émotions.
Le festival de couleurs, le faste des bijoux et des décors, les broderies du sari, et les fleurs omniprésentes sont autant d’éléments de l’univers bollywoodien que j’utilise au gré de ma fantaisie pour essayer de rendre un peu du mystère de ces femmes.
Ce travail sur le thème de la femme indienne est aussi un moyen, pour moi, de rendre hommage à mes grands-parents et à tous ces vieux Indiens de Guadeloupe qui n’ont jamais cessé d’aimer l’Inde et qui ont bataillé durement pour faire vivre les bribes de la culture indienne que leurs propres grands-parents avaient apportées de l’Inde en 1854, date de l’arrivée des premiers migrants indiens en Guadeloupe.
Ce que j’aimerais traduire dans ma peinture, ce n’est pas une représentation, proche du réel, de ces visages de femmes, la photographie s’en charge déjà, mais c’est surtout essayer d’exprimer les impressions et les émotions qu’ils dégagent. Je cherche à capturer et à mettre sur la toile la grâce des mouvements, l’expression des yeux qui racontent, aiment, souffrent, rient (un peu comme dans le Bharatha Natyam).
À ces traits fins et expressifs, j’associe des couleurs chaudes et vives qui sont, selon moi, si représentatives de l’Inde. Le rose indien, l’orange, le vert, le rouge sont des couleurs qui traduisent bien la violence des passions de « mes personnages ». Des couleurs pastel éteindraient ou pâliraient leurs sentiments !
En fait, dans mes tableaux, j’aimerais pouvoir dire par l’association des formes, des couleurs, des expressions, des motifs, toutes les émotions que m’inspire l’Inde tout entière.
D’une certaine façon, on pourrait comprendre que mon intérêt pour les visages d’Indiennes vient du fait que le premier visage qui se soit penché sur mon berceau est... celui d’une femme indienne ! Qui sait ?
Issue d’un métissage qui réunit l’Inde, l’Europe, l’Afrique et les Antilles, c’est peut-être aussi pour moi une manière d’asseoir mon identité.
elodiemondelice.com