L’HINDOUISME

par Swami Jayramdas

Pour moi, l’hindouisme a toujours été une science spirituelle octroyée par une lignée de gurus parfaits qui peuvent nous aider à traverser l’océan de cette existence insignifiante.

 

C’est, pour résumer, la science de la réalisation du Soi et l’art de reconnaître sa véritable identité, comme le déclarent les Tantras, la philosophie du Védânta et le shivaïsme du Cachemire. Cette science ne peut être révélée et enseignée que par un guru parfait ; ainsi le guru est-il la clé de voûte des enseignements de l’hindouisme. Sans le guru, aucune réelle compréhension ne peut naître et aucun progrès notable être enregistré.

 

Si vous demandez à l’homme ordinaire de la rue indienne en quoi consiste l’hindouisme, il vous répondra sans hésiter : « L’adoration et les prières dans les temples, l’étude et l’écoute des légendes du Râmâyana et du Mahâbhârata, quelques pûjâs et âratis, et voilà tout. »

 

J’ai suffisamment vécu dans des villages pour comprendre et témoigner de la façon dont l’homme commun traite et pratique l’hindouisme et le sanâtana dharma ; une approche bien étroite en vérité, rien de bien inspirant ni de très stimulant. Et c’est certainement le résultat d’enseignements erronés, ou du moins limités, donnés par des brahmanes, des saints et des sadhus ; c’est en définitive l’exact contraire de ce qui est offert dans le Jñâna Kanda, la partie du Védânta qui traite de la connaissance, disponible dans les Yogas Sutras de Patañjali, les Shiva Sutras et les Tantras en général.

 

L’hindou ordinaire ne connaît rien des trésors contenus dans les Écritures de sa propre religion – pas plus que le chrétien qui va tous les dimanches à la messe ne se pose de questions quant à ses propres Écritures. Les deux visages de l’hindouisme sont extrêmes, radicalement opposés ; le meilleur y jouxte le pire ; l’adoration, la foi sans discernement y côtoient l’éveil intérieur et la libération.

 

L’hindouisme, pour l’esprit occidental, est une matière difficile à appréhender et encore plus à digérer. Ici, je me dois d’intervenir comme avocat de notre foi, qui est, selon mon entendement, la foi la plus élevée disponible en ce monde, à condition d’être correctement représentée par d’authentiques maîtres illuminés.

 

Les enseignements ésotériques de l’hindouisme sont secrets, bien gardés et bien scellés ; ils ne sont pas faciles d’accès pour l’homme ordinaire. Remplir, dès le début, certaines conditions est un plus. Si votre parcours individuel vous a bien préparé, si votre soif pour la plus haute compréhension est intense, vous en viendrez automatiquement à rencontrer un bon guide qui, pas à pas, vous dévoilera les enseignements et la pratique de certaines règles et régulations que Patañjali nomme yâma et niyama, et en lesquelles Swami Vivekananda voit les pratiques fondamentales du yoga. Ces pratiques sont auto-purificatrices et ouvrent la porte d’une évolution ultérieure plus profonde.

 

La foi hindoue reconnaît l’existence de trois différents corps : le corps physique, le corps subtil et le corps causal. Ces trois enveloppes nous sont offertes comme résultante de nos karmas passés. Cet instrument corps-esprit est en lui-même un asservissement ; mais c’est aussi un outil qui nous offre une possibilité de libération, à condition de pratiquer les techniques appropriées et de mener une existence pure.

 

La science des Tantras et du yoga met également l’accent sur l’alimentation ; seul un régime pur peut contribuer à notre purification rapide ; une alimentation simple et végétarienne est donc recommandée. Cette science nous enseigne que nous ne sommes ni ce corps et tous ses éléments, ni ces différentes sensations, ni ces modifications de la pensée ; nous sommes déjà Shiva ; nous sommes Dieu sous la forme de l’existence, de la supra-conscience (la réalisation divine) et de la béatitude.

 

Cet instrument corps-esprit est censé être aussi bien la cause de l’asservissement que celle de la libération. La science des Tantras et du yoga nous apprend ensuite la manière de purifier ce complexe corps-esprit par le processus que les Tantras appellent : bhûta shuddi, et qui signifie « la purification des cinq éléments de base », éléments constituant aussi bien notre corps que l’univers entier, ce complexe corps-esprit n’étant en lui-même rien d’autre qu’un univers miniature.

 

Ces cinq éléments sont : la Terre, tout ce qui est solide, tel le squelette ; l’Eau, tous les liquides et les fluides du corps ; le Feu, qui se rapporte surtout au feu de la digestion ; l’Air, qui est le prâna, la force de vie qui active les fonctions du corps ; et enfin l’Éther, un aspect encore plus pur du prâna, relié aux fonctions mentales qui tendent graduellement vers la conscience et les différents niveaux de la connaissance.

 

Ainsi, le processus du bhûta shuddi est supposé hâter la purification des cinq éléments de base. On le pratique sous la forme de certains prânâyâmas, joints à la récitation de mantras avancés et spéciaux qui nous mènent à nâdi shuddi, la purification des canaux subtils du corps physique et du corps subtil.

 

À moins que ce corps ne soit libéré de toutes ses toxines et ses négativités, l’esprit ne peut jamais connaître la paix. Le sang doit être purifié, chaque cellule du sang ; le système endocrinien doit également fonctionner de manière adéquate pour permettre un fonctionnement optimal des chakras subtils.

 

Le bhûta shuddi est donc la pratique clé ; pas de purification, pas de progrès. En accompagnement du bhûta shuddi, on peut de plus envisager la récitation de différents mantras et la pratique de méditations quotidiennes. Beaucoup d’autres pratiques tantriques existent, qui visent à hâter ce processus de purification, mais je ne m’étendrai pas plus, aujourd’hui, sur le sujet.

 

Cette science part du niveau grossier pour aller vers le subtil, et du subtil vers le plus subtil encore, jusqu’à toucher la connaissance du Soi. C’est un long processus, la sâdhana de toute une vie ; mais elle ouvre à la fin les portes de l’éternité ; elle va de bandhan (l’asservissement) à moksha (la libération). Notre ignorance est notre asservissement ; notre juste compréhension ainsi que notre connaissance, notre libération.

 

Voici, brossés à grands traits, les enseignements disponibles dans la science ésotérique de l’hindouisme – rien à voir avec les temples, la mythologie et les histoires anciennes – enseignements qui pourraient attirer l’esprit moderne occidental et être pratiqués dans un esprit d’abandon de soi et de foi totale.

 

Si les hindous, eux-mêmes, pouvaient l’appréhender avec le bon état d’esprit comme l’essence de leur propre culture, de nombreuses vies auraient pu être épargnées dans ce massacre himalayen.

 

Dieu est à l’intérieur, pourquoi courir après des temples, ce qui nous mène finalement à la détresse et à la mort ?

 

Sarve bhavantu sukhinah.

Sarve shântu nirâmayâh.

Sarve bhadrâni pashyantu

Mâ kashcid duhkhabhâg bhavet

Om,

Shânti, Shânti, Shântih.

 

Que la joie soit en chacun,

Que la santé parfaite soit avec chacun,

Que chacun voit ce qui est bon,

Et que tous échappent à la souffrance.

Om,

Que la paix, la paix, la paix soit partout.

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