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UN SOIR DE PRINTEMPS

Un homme seul dans son appartement regarde son téléphone et hésite. Après un quart d’heure de réflexion, il compose le numéro.

— Allo ? dit une voix féminine.

— Bonsoir. Tu vas bien Géraldine ? demanda Paul.

— Euh… oui. Qui est-ce ?

— C’est Paul, Paul Tournier. Tu te souviens de moi ?

— Paul ? Attends… Tu ne serais pas le petit-fils des anciens voisins de mes parents ?

— Gagné. Comment vas-tu ?

— Ça va bien. Mais comment as-tu eu mon numéro ?

— Par tes parents. Ils habitent toujours au même endroit.

— Ah ça, ils ne bougeront jamais. Cela me fait plaisir de t’entendre. Après toutes ces années, que deviens-tu ?

— Rien de spécial. Je travaille comme comptable, j’habite près de Paris, à Fontenay-sous-Bois. Et toi ?

— Je suis assistante sociale, j’habite à Meudon. C’est marrant que tu appelles maintenant, après toutes ces années.

— En triant des vieilles caisses, j’ai retrouvé une photo de nous adolescents, mentit Paul. Alors, je me suis demandé ce que tu étais devenue. Tu es mariée ? Tu as des enfants ?

— Divorcée depuis trois ans et j’ai un fils qui a quinze ans. Et toi ?

— Célibataire et pas d’enfant. Je me disais que ce serait sympa de boire un verre ensemble pour discuter de nos vies.

— C’est une bonne idée. Le dimanche, je suis souvent libre.

— Dimanche prochain, alors ?

— Oui, avec plaisir. Je pense qu’on aura du mal à se reconnaître, après toutes ces années.

— Je suis sûr que je te reconnaîtrai facilement. J’imagine que tu es toujours aussi jolie.

— Arrête, tu vas me faire rougir. J’ai passé l’âge de ce genre de compliment.

Paul savait qu’elle était toujours aussi belle. Peu importe son boulot, son salaire, son mariage raté, elle était Géraldine et elle était vivante.

Et il allait la revoir.