Quels sont les liens entre l’uchronie et le voyage temporel ?

Les liens entre le voyage dans le temps et l’uchronie ont donné naissance à de nombreux sous-genres, avec leurs particularités propres. Mais avant de s’intéresser à ceux-ci, voyons en quoi un voyage temporel peut déboucher sur une histoire contrefaite. Si la formule « Et si… » est symptomatique de l’uchronie et indique souvent le regret, elle voisine également avec le temps, puisque cette dernière se conjugue au passé. Si voir le futur est toujours exotique, aller visiter le passé pour vérifier si celui-ci correspond à ce qui est écrit dans nos livres d’histoire est plus que tentant. Avoir le pouvoir de le modifier et être témoin des conséquences apparaît alors comme le nouveau fruit défendu, source du tabou ultime : l’homme se prenant pour Dieu réécrit l’histoire selon son bon vouloir. L’un des premiers voyages dans le temps référencés – il y en a d’autres avant lui, mais moins aboutis – reste La Machine à explorer le temps de Herbert Georges Wells en 1895. Il est amusant de songer qu’on se souvient beaucoup plus du voyage dans le temps que de la critique sociale de la société victorienne qui transparaît du roman. Si Wells envoie son narrateur dans le futur, d’autres se sont amusés à envoyer leurs héros de papier dans le passé, ou à créer une police temporelle, chargée d’empêcher la modification de l’Histoire comme dans La Patrouille du temps de Poul Anderson. Le voyage dans le passé ne débouche pas obligatoirement sur une uchronie et une réinvention de l’histoire.

Un des exemples les plus célèbres de voyage dans le temps au cinéma reste la trilogie Retour vers le futur de Robert Zemeckis où le principal protagoniste, Marty McFly, envoyé dans le passé, tente de ne pas le réécrire sous peine de se voir disparaître… dans le futur. Mais s’il n’existe pas dans le futur, il ne peut pas non plus remonter le temps… Nous sommes face à un paradoxe temporel, déjà illustré par René Barjavel dans Le Voyageur imprudent : le héros retourne dans le passé, tue accidentellement son grand-père et ne peut donc venir au monde. Et s’il ne vient pas au monde, il ne peut pas se rendre dans le passé et tuer son grand-père.

D’autres possibilités s’ouvrent quand il s’agit de voyage temporel, comme celui de la boucle temporelle, où le protagoniste revit les mêmes événements jusqu’à ce qu’il réussisse à briser le cercle. Ce type de phénomène a été popularisé par le film Un Jour sans fin, de Harold Ramis, qui met en scène un météorologue peu amène, Phil Connors, envoyé dans la petite ville de Punxsutawney, pour réaliser un reportage sur une coutume locale. Le héros revit sans cesse la même journée en conservant le souvenir de la veille, jusqu’à craquer. La boucle temporelle connaît un succès certain auprès des scénaristes : on retrouve de plus en plus de séries télévisées mettant en scène un épisode de ce type et une série policière, Day Break, en a même fait son argument de base.

Qui dit voyage temporel, dit voyageur temporel avec la possibilité pour ce dernier de retourner dans le passé pour tenter d’améliorer les choses. Le dernier film de la franchise X-Men (X-Men : Days of Future Past, 2014) en est un exemple frappant. Dans un futur proche, les mutants sont traqués et impitoyablement éliminés par des Sentinelles, machines créées par les industries Trask à la fin des années 1960. Les derniers mutants tentent une ultime expérience en renvoyant l’esprit de l’un d’eux, Wolverine, au moment précis où il peut espérer changer l’histoire.

Comme vous le voyez, il y a de nombreuses déclinaisons et combinaisons possibles.