Au champ de Waterloo les épis blonds mûrissent.
Les bluets, dans la nielle, avant l'aube fleurissent.
Avant le laboureur et ses fils rassemblés, l'alouette quêteuse a glané dans les blés quand la gerbe est liée et que le chaume brille, où sont les moissonneurs, et que fait la faucille ?
Les moissonneurs au bois errent dès le matin ; la ferme abandonnée est cachée au ravin.
Le char fuit en criant sur la route pavée.
La colombe rustique appelle sa couvée ; blême est la terre, au loin, sans source, ni gazon ; et l'immense forêt tressaille à l'horizon.
Au verger d'Hougoumont, où blanchit l'aubépine, la génisse flamande a foulé l'églantine.
Holà ! Le bouc errant insulte le chevreau.
Va, berger, hâte-toi de paître ton troupeau.
Sinon, avant demain, sur le bord de la haie le boeuf aura rongé le bon grain et l'ivraie.
Comment, à Mont-Saint-Jean, au champ du laboureur, le chevrier d'écosse est-il venu sans peur sonner sa cornemuse ? Et dans l'ardente plaine qu'enferment Planchenoit, Rossomme, Merkebraine, comment les montagnards nés aux monts de Glenco ont-ils appris leurs chants et leurs noms à l'écho ?
Comment, à Mont-Saint-Jean, les moissonneurs des îles se sont-ils partagés dans leurs sillons fertiles ?
Que faisaient là, sans soc, sans herse et sans fléau, les bouviers d'Albion ? Comment à Waterloo avec l'herbe, en un soir, les faucheurs des Hébrides ont-ils fauché le cèdre éclos aux pyramides ?
Oh ! Les hardis bouviers ! Oh ! Les bons moissonneurs !
Pour de rudes troupeaux, oh ! Les rudes pasteurs !
Ecoutez ! écoutez ! Comment dans la prairie sonne leur cornemuse. " à moi, bouc de Cambrie !
« à moi, chevreau d'écosse ! Ou, bientôt les aiglons » vivant t'emporteront au sommet des vallons !
" à moi, brebis des clans ! à moi, bélier d'Irlande !
" aiguise là ta corne et cherche ta guirlande !
" fais sonner à ton cou ta clochette d'acier !
" sinon, tu te perdras au détour du sentier !
« à moi, boeufs des Douglas, d'érin et d'Angleterre, » qui, sous un même joug, rongez même bruyère !
« mieux qu'au pays des lacs, en votre auge d'airain, » dans le bois d'Hougoumont, vous mugirez demain. " et comme dans la Flandre, au moment de l'orage, un berger, en sifflant, appelle au pâturage la génisse et le boeuf ; ainsi vers leur sillon maints peuples, rassemblés sous un même aiguillon, suivaient la cornemuse ; et l'herbe des clairières sous leurs pas, desséchée, entassait leurs litières.
Au loin, fumaient le chaume et le toit des hameaux.
On entendait dans l'air le vol lourd des corbeaux.
Au loin, les chiens hurlaient sur leur seuil lamentable ; et la belle-alliance ouvrait sa grande étable.
D'avance la vallée avait, dans les lieux bas, creusé son lit d'ivraie au torrent des combats.