Grives, Merles, alouettes ou Mauviettes, Ortolans, Becfigues, Rouges-Gorges

Tous ces petits oiseaux, que les chasseurs ne classent pas parmi le gibier proprement dit, et qu’on désigne sous le nom commun de petits pieds, se servent habituellement pour rôtis. On ne doit pas les vider ; on les barde et on les met en broche, toujours sur des hâtelets assez petits pour ne pas les déchirer. Prenons pour exemple les alouettes ou mauviettes. On peut les embrocher sur une grande aiguille à tricoter, et on les barde largement, de manière que la brochette où l’aiguille passe dans la barde en même temps que dans l’oiseau : il n’est pas nécessaire alors de maintenir les bardes avec de la ficelle comme pour les oiseaux plus forts. On fixe cette brochette ou ce hâtelet sur la broche au moyen de ficelles, et on met des rôties dessous, comme il a été dit pour les bécasses.

On peut également faire cuire les alouettes sur le gril, et elles sont tout aussi bonnes qu’à la broche. Voici de quelle manière vous procéderez : ayez une barde de lard que vous couperez en petits carrés ; sur un petit hâtelet, embrochez alternativement une alouette et un morceau de lard, jusqu’à ce que la brochette soit remplie ; assaisonnez de poivre et de sel. Préparez une feuille ou caisse de papier huilé, placez-y ces brochettes, l’estomac des alouettes étant posé dessus d’abord, et mettez-les sur le gril ; après quelques minutes, retournez-les, saupoudrez alors les estomacs d’un peu de chapelure fine ; laissez s’achever la cuisson, et servez les alouettes sur la caisse de papier avec les hâtelets, s’ils sont en argent.

Ce que nous disons des alouettes s’applique également aux autres oiseaux de ce genre.

Voici encore une excellente manière de manger ce petit gibier, lorsqu’on ne veut pas le faire rôtir, surtout les grives : flambez ces oiseaux à un feu bien clair pour ne pas les noircir ; essuyez-les dans une serviette, et mettez-les dans une terrine, saupoudrés de sel fin. Laissez-les pendant douze heures prendre ce sel. Préparez une friture avec du saindoux qui n’ait pas encore servi, et que cette friture soit chaude à point comme pour frire une marinade. Égouttez les petits oiseaux et mettez-les dans la friture, où vous les laisserez environ cinq minutes, en veillant à ce qu’ils ne prennent pas couleur et à ce qu’ils soient, au contraire, bien blancs. Après les avoir égouttés et essuyés, dressez-les sur une serviette avec du persil frit par-dessus, et serve chaud. Le petit gibier préparé de cette manière conserve toute sa finesse, toute la délicatesse de sa chair.

Nous croyons inutile de donner certaines recettes qui ne peuvent qu’altérer la qualité d’un gibier si délicat. Laissons donc les poêles, les daubes, les étuvées, à la grosse volaille, poules, poulets, canards, oies, dindonneaux, que nous pouvons nous procurer toute l’année, et que l’art culinaire se plaît, avec raison, à présenter sous les formes les plus variées. Mais quant à ces bons petits oiseaux de passage, qui ne font, pour ainsi dire, que paraître et disparaître, sachons profiter du bien que Dieu nous envoie et en user sans le dénaturer. Aussi nous abstiendrons-nous de parler de purée de cailles, de crépinettes et d’escalopes de filets de grives, de croustades d’ortolans, toutes choses qui peuvent être très appréciées sur certaines tables, mais qui n’appartiennent pas à notre cuisine, que nous voulons tout à la fois simple et bonne.