A.
la raison observante
Cette conscience, aux yeux de qui l'être à la signification d'être à elle2, d'être sien, nous la voyons certes maintenant entrer de nouveau dans le point de vue intime et le percevoir, mais elle n'y retourne pas comme dans la certitude d'un autre qui n'est que cela : elle y retourne avec la certitude d'être elle-même cet autre. Avant, il lui est seulement arrivé de percevoir et d'apprendre, de faire l'expérience d'un certain nombre de choses sur la chose ; au point où nous en sommes, elle organise elle-même les observations et l'expérience. Estimer intimement et percevoir, démarches qui s'étaient abolies antérieurement pour nous, sont maintenant abolies par la conscience pour elle-même ; la raison vise à savoir la vérité ; c'est-à-dire à trouver comme concept ce qui pour le point de vue intime et le percevoir est une chose, ou encore : à n'avoir dans la chosité que la conscience d'elle-même. C'est pourquoi la raison a maintenant un intérêt universel au monde, parce qu'elle est la certitude d'y avoir de la présence, ou encore, la certitude que le présent est rationnel. Elle cherche son autre en sachant qu'elle n'y possède rien d'autre que soi-même ; elle ne cherche que sa propre infinité. | 175 |
Ne faisant dans un premier temps que se deviner dans l'effectivité, ou ne la sachant d'abord que comme quelque chose qui tout simplement est à elle, la raison progresse en ce sens jusqu'à la prise de possession universelle de la propriété3 dont elle a l'assurance qu'elle est son bien, et plante sur tous les sommets et dans toutes les profondeurs le signe de sa souveraineté. Mais ce Mien superficiel n'est pas son ultime intérêt ; la joie de cette prise de possession universelle trouve encore dans sa propriété l'Autre étranger que la raison abstraite n'a pas chez elle-même. La raison se devine comme une essence plus profonde que ne l'est le pur Je, et doit exiger que la différence, l'être divers, acquière pour ce Je le statut de chose sienne, qu'il se voie et regarde comme l'effectivité, et se trouve présent comme chose et comme figure. Pourtant, même si la raison fouille et remue toutes les entrailles des choses et leur ouvre toutes les veines, pour pouvoir en jaillir à sa propre rencontre, elle ne parviendra pas à ce bonheur : il faut qu'elle se soit préalablement achevée chez elle-même pour pouvoir éprouver et découvrir ensuite son achèvement.
La conscience observe ; c'est-à-dire que la raison veut se trouver, s'avoir soi-même comme objet qui est, comme modalité effective, sensiblement présente. La conscience de cette observation estime certes, et déclare, qu'elle veut faire l'expérience non d'elle-même, mais au contraire de l'essence des choses en tant que choses. Que cette conscience estime et dise cela tient au fait qu'elle est raison, mais que la raison | 176 | n'est pas encore pour elle, en tant que telle, un objet. Si elle savait la raison comme étant une seule et même essence des choses et de soi-même, si elle savait que cette raison ne peut avoir de présence dans sa figure caractéristique que dans la conscience, elle descendrait alors au contraire dans ses propres profondeurs, et la chercherait là plutôt que dans les choses. Si elle l'y avait trouvée, celle-ci en serait renvoyée dans l'effectivité afin d'y contempler son expression sensible, mais prendrait aussitôt essentiellement cette expression comme concept. La raison, telle qu'elle entre en scène immédiatement comme certitude de la conscience d'être toute réalité, prend sa réalité au sens de l'immédiateté de l'être, et pareillement prend l'unité du Je avec cette essence objectale dans le sens d'une unité immédiate, en laquelle elle n'a pas encore séparé, puis de nouveau réuni, les moments de l'être et du Je, ou qu'elle n'a pas encore reconnue. C'est pourquoi en tant que conscience observante, elle approche les choses en pensant qu'elle les prend en vérité comme des choses sensibles, opposées au Je ; simplement, son activité effective contredit cette opinion ; car elle a la connaissance des choses, elle transforme leur sensibilité en concepts, c'est-à-dire précisément en un être qui est en même temps un Je, transforme ce faisant la pensée en pensée qui est, ou encore l'être en un être pensé, et prétend de fait que les choses n'ont de vérité que comme concepts. Pour cette conscience observante il n'advient et devient donc ici que ce que les choses | 177 | sont, tandis que pour nous advient ce qu'elle est elle-même ; mais le résultat de son mouvement sera de devenir pour soi-même cela même qu'elle est en soi.
Il faut considérer l'activité de la raison observante dans les moments du mouvement de cette activité où la raison reçoit chez elle la nature, l'esprit, et finalement la relation de l'une et l'autre comme être sensible, et telle qu'elle se cherche comme effectivité qui est.
a. L'observation de la nature
Lorsque la conscience sans pensée énonce l'observation et l'expérience comme la source de la vérité, le sens des paroles qui disent cette vérité pourrait bien être qu'il s'agit seulement du goût, de l'odorat, du toucher, de l'ouïe et de la vue. Dans son zèle à recommander le goût, l'odorat, etc., elle oublie de dire qu'elle s'est déjà, en fait, déterminé de manière tout aussi essentielle l'objet de ces sensations, et que cette détermination-là vaut au moins autant pour elle que la sensation en question. Elle concédera également tout aussitôt que ce qui lui importe de manière générale n'est pas tant uniquement de percevoir, et, par exemple, n'accordera pas à la perception du fait que ce canif se trouve à côté de cette tabatière, la valeur d'une observation. Le perçu doit avoir au moins l'importance et la signification d'un universel, et non d'un ceci sensible. | 178 |
Cet universel n'est ainsi d'abord que ce qui reste identique à soi ; son mouvement n'est que le retour uniforme de la même activité. La conscience qui, dans cette mesure, ne trouve dans l'objet que l'universalité ou le Mien abstrait4, doit prendre sur elle le mouvement propre de cet objet ; n'étant pas encore la compréhension par l'entendement de celui-ci, elle doit au moins en être la mémoire, laquelle exprime sur un mode universel ce qui dans l'effectivité ne se trouve que sur le mode singulier. Ce dégagement superficiel hors de la singularité, ainsi que la forme d'universalité tout aussi superficielle dans laquelle le sensible n'est qu'enregistré, sans être en lui-même devenu un universel, c'est-à-dire la description des choses, n'a pas encore le mouvement dans l'objet proprement dit ; ce mouvement n'est au contraire que dans la description. C'est pourquoi l'objet, dès lors qu'il est décrit, a perdu son intérêt ; dès qu'un objet est décrit, il faut en entreprendre, et toujours en chercher un autre, pour que la pratique descriptive n'aille pas s'éteindre. Il n'est plus si facile que cela de trouver de nouvelles choses pleines et entières, et il faut revenir aux choses déjà trouvées, pour les diviser davantage encore, les décomposer et déceler en elles de nouveaux aspects de la chosité. Cet instinct inquiet et toujours sur la brèche ne peut jamais manquer de matériau ; trouver une nouvelle espèce remarquable, voire une nouvelle planète, à laquelle échoit, bien qu'elle soit un individu, la nature | 179 | d'un universel, cela ne peut arriver qu'aux chanceux. Mais les frontières de ce qui, comme l'éléphant, le chêne, l'or, est défini par des propriétés remarquables, de ce qui est genre et espèce, transitent par de nombreux degrés dans la particularisation infinie du chaos animal et végétal, des sortes de montagnes, ou de métaux, de terres, etc., qui ne se peuvent exposer qu'après usage de violence et d'artifice. Dans ce règne de l'indéterminité de l'universel, où la particularisation se rapproche de nouveau de la singularisation, et même, ici ou là, y redescend complètement, s'ouvre une inépuisable réserve pour l'observation et la description. Mais ici, où s'ouvre à elle un champ immense, à la frontière de l'universel, il se peut au contraire qu'elle n'ait trouvé, plutôt qu'une richesse insondable, que la borne de la nature et de sa propre activité ; elle ne peut plus savoir si ce qui semble être en soi n'est pas une contingence ; ce qui porte sur soi la marque d'une vague forme confuse ou immature, faible et à peine sortie des limbes de l'indéterminité élémentaire, ne saurait prétendre à être même seulement décrit.
Même si cette recherche et cette description semblent ne s'intéresser qu'aux choses, nous voyons qu'en fait elles ne se déploient pas en en restant à la perception sensible, mais que ce à quoi les choses sont reconnues lui importe plus que toutes les autres propriétés sensibles, dont la chose proprement dite, | 180 | certes, ne peut pas se passer, mais dont la conscience se dispense. Par cette distinction entre l'essentiel et l'inessentiel, le concept s'élève au-dessus de la dispersion sensible et la connaissance y déclare et explique qu'en l'espèce elle s'occupe au moins aussi essentiellement d'elle-même que des choses. Cette double essentialité la plonge dans une hésitation quant à savoir si ce qui est l'essentiel et le nécessaire pour la connaissance l'est aussi chez les choses. D'un côté les caractères remarquables sont censés ne servir qu'à la connaissance, celle-ci distinguant grâce à eux les choses les unes des autres ; mais d'un autre côté, ce qui est censé être connu, ce n'est pas l'inessentiel des choses, mais ce par quoi elles s'arrachent elles-mêmes à la continuité universelle de l'être en général, se détachent de l'autre, prennent congé de lui et sont pour soi. Les caractères remarquables doivent non seulement avoir une relation essentielle à la connaissance, mais aussi avoir les déterminités essentielles des choses, et le système artificiel doit être conforme au système de la nature elle-même, et n'exprimer que celui-ci. Le concept de la raison fait que ceci est nécessaire, et son instinct — car c'est seulement en instinct que la raison se comporte dans cette activité observatrice — a également acquis dans ses systèmes cette unité où ses objets mêmes sont constitués de telle manière qu'ils ont en eux une essentialité ou un être pour soi, et ne sont pas seulement contingence de tel instant ou de tel ici. Les caractères distinctifs des animaux, | 181 | par exemple, sont empruntés aux griffes et aux dents ; car, de fait, la connaissance ne fait pas que distinguer par elles un animal d'un autre ; mais l'animal s'en sert lui-même pour se détacher : c'est grâce à ces armes qu'il se conserve pour soi, et ce, séparément de l'universel. La plante, en revanche, n'accède pas à l'être pour soi, mais ne fait qu'effleurer la frontière de l'individualité ; c'est pourquoi c'est à cette frontière, où elle manifeste une apparence de scission en deux sexes qu'on l'a enregistrée et différenciée. Mais ce qui se trouve plus bas encore dans l'échelle ne peut plus se différencier soi-même d'un autre, et se perd au contraire dès lors qu'il parvient dans l'opposé. L'être au repos et l'être en rapport entrent en conflit, la chose dans ce deuxième être est autre chose que selon le premier, tandis qu'à l'inverse ce qui fait l'individu, c'est que, dans le rapport à autre chose, il se conserve. Mais ce qui n'est pas capable de cela, et devient chimiquement autre chose que ce qu'il est empiriquement, trouble la connaissance et la plonge dans le même conflit quand il s'agit de savoir si elle doit se tenir à l'un ou l'autre côté, étant donné que la chose elle-même n'est pas quelque chose qui demeure identique, et que chez elle ces côtés se disjoignent.
Dans ce genre de systèmes d'être qui demeure universellement identique à soi, ce dernier a donc pour signification d'être le demeurant identique à soi aussi bien de la connaissance que des choses elles-mêmes. Simplement, cette extension des déterminités demeurant identiques, dont chacune décrit | 182 | tranquillement toute la série de sa progression et reçoit l'espace où vaquer pour soi à sa guise, se transporte essentiellement tout aussi bien en son contraire, dans la confusion de ces déterminités ; car la caractéristique, la déterminité universelle, est l'unité de ce qui est opposé : de ce qui est déterminé et de ce qui est en soi universel ; il faut donc qu'elle aille se disloquer dans cette opposition. Si donc, d'un côté, la déterminité vainc l'universel5, dans lequel elle a son essence, celui-ci, en revanche, conserve tout aussi bien, par ailleurs, sa domination et maîtrise sur elle, pousse la déterminité à sa limite, et là, mélange ses différences et ses essentialités. L'observation, qui les tenait bien comme il faut les unes à l'écart des autres et pensait détenir en elles quelque chose de solide, voit un principe gagner sur l'autre, voit se former des transitions et des confusions, y voit relié ce qu'elle prenait d'abord pour absolument séparé, et voit séparé ce qu'elle escomptait relié ; en sorte que cette attitude de ferme attachement à l'être tranquille et demeurant identique à soi ne peut ici, précisément dans ses déterminations les plus générales — savoir, par exemple, quelles sont les caractéristiques essentielles de l'animal, de la plante —, que se voir taquinée par des instances qui lui dérobent toute détermination, rendent muette l'universalité à laquelle elle s'était élevée, et la rabaisser à l'observation et à la description sans pensée.
Cette observation qui se restreint au simple, ou qui limite par | 183 | l'universel la dispersion du sensible, trouve donc dans son objet la confusion de son principe, étant donné que le déterminé doit, par sa nature, se perdre dans son contraire ; c'est pourquoi la raison doit bien plutôt progresser de la déterminité passive et molle, qui avait l'apparence de la permanence, à l'observation de celle-ci telle qu'elle est en sa vérité, qui est de se référer à son contraire. Ce qu'on appelle des caractéristiques essentielles, ce sont des déterminités arrêtées, qui ainsi, telles qu'elles s'expriment et sont appréhendées comme des déterminités simples, n'exposent pas ce qui fait leur nature, savoir, d'être des moments évanescents du mouvement qui se reprend en lui-même. Dès lors que maintenant l'instinct rationnel6 en vient à rechercher la déterminité conformément à sa nature — qui est de n'être pas essentiellement pour soi, mais de passer dans l'opposé — ce qu'il cherche est la loi et le concept de celle-ci ; certes, il les cherche tout autant comme effectivité qui est, mais celle-ci, en fait, disparaîtra de ses yeux et les aspects de la loi deviendront de purs moments, ou des abstractions, en sorte que la loi surgira dans la nature du concept qui a détruit en soi la pérexistence indifférente de l'effectivité sensible.
Aux yeux de la conscience observante la vérité de la loi est dans l'expérience, en ce que celle-ci est la modalité où il y a de l'être sensible pour elle ; et non en soi et pour soi-même. Mais, si la loi n'a pas sa vérité dans le concept, elle est quelque chose de contingent, | 184 | elle n'est pas une nécessité, ou encore, n'est pas en fait une loi. Toutefois, le fait qu'elle soit essentiellement comme concept, non seulement n'entre pas en conflit avec le fait qu'elle soit présente pour l'observation, mais a, au contraire, pour cette raison, une existence nécessaire et est elle-même pour l'observation. L'universel, au sens de l'universalité de raison, est également universel au sens que ce concept a chez lui, savoir, qu'il se présente pour la conscience comme l'actuel et l'effectif, ou que le concept se présente sur le mode de la chosité et de l'être sensible ; mais sans pour autant perdre sa nature, ni avoir chuté dans la pérexistence passive et molle ou l'indifférente successivité. Ce qui est universellement valable exerce aussi pratiquement cette validité universelle ; ce qui est censé être est aussi de fait, et ce qui n'est que censé être, sans être n'a pas de vérité. C'est à cela que l'instinct rationnel reste pour sa part, et à juste titre, fermement accroché, sans se laisser induire en erreur par les choses de raison qui ne sont que censées être, et sont censées n'avoir de vérité que dans cet ordre du censément, bien qu'on ne les rencontre dans aucune expérience — et aussi peu par les hypothèses que par toutes les autres invisibilités d'un « devoir-être » pérenne ; la raison en effet est précisément cette certitude d'avoir de la réalité, et ce qui n'a pas pour la conscience le statut d'essence autonome7, c'est-à-dire, ce qui n'apparaît pas, n'est pour elle rien du tout.
Le fait que la vérité de la loi soit par essence réalité redevient certes, aux yeux de cette conscience qui demeure | 185 | dans l'observation, une opposition au concept ou à l'universel en soi ; ou encore, une chose comme ce qu'est sa loi n'est pas pour elle une essence de la raison ; elle estime que ce qu'elle y obtient est quelque chose d'étranger. Simplement, elle réfute cette sienne opinion par l'acte dans lequel elle-même ne prend pas sa propre universalité au sens où toutes les choses sensibles singulières devraient nécessairement lui avoir montré l'apparition phénoménale de la loi, pour pouvoir en affirmer la vérité. Pour établir que les pierres qu'on soulève au-dessus du sol et qu'on lâche tombent, elle n'exige pas du tout qu'on ait fait la tentative avec toutes les pierres ; elle dit peut-être, certes, qu'on devrait au moins essayer avec un grand nombre d'entre elles, et qu'à partir de là on pourrait conclure par analogie pour toutes les autres avec la plus grande vraisemblance possible ou de plein droit. Mais l'analogie, non seulement ne donne aucun plein droit, mais sa nature l'amène si souvent à se réfuter elle-même, que pour conclure par l'analogie elle-même, on dira au contraire que l'analogie n'autorise pas à conclure. Face à la vérité, la vraisemblance, à laquelle son résultat se réduirait, perd toutes les différences qu'on peut faire entre plus ou moins grande vraisemblabilité ; celle-ci a beau être aussi grande qu'on voudra, elle n'est rien face à la vérité. Pourtant, en fait, l'instinct rationnel accepte comme vérité ce genre de lois, et c'est seulement en référence à leur nécessité, qu'il ne connaît pas, qu'il en vient | 186 | à faire cette distinction et abaisse à la vraisemblabilité la vérité de la chose même, pour marquer la façon imparfaite dont la vérité est présente pour la conscience qui n'a pas encore atteint l'intelligence du pur concept ; car l'universalité n'est présente que comme universalité immédiate simple. Mais c'est en même temps en vertu de celle-ci que la loi, pour la conscience, a vérité ; le fait que la pierre tombe est vrai à ses yeux parce qu'à ses yeux la pierre est pesante, c'est-à-dire parce que, dans la pesanteur, elle a en soi et pour soi-même la relation essentielle à la terre qui s'exprime comme chute. La conscience a donc dans l'expérience l'être de la loi, mais, pareillement, elle a celle-ci comme concept, et c'est seulement en vertu de ces deux facteurs que celle-ci est vraie à ses yeux ; elle a donc valeur de loi parce qu'elle se présente dans le phénomène et parce que en même temps elle est en soi-même concept.
Comme la loi est en même temps en soi concept, l'instinct rationnel de cette conscience va lui-même, nécessairement, mais sans savoir qu'il veut cela, purifier8 la loi et ses moments jusqu'à en faire le concept. Il tente des expériences sur la loi. La loi, telle qu'elle apparaît d'abord, se présente impure, sale, enveloppée d'être sensible singulier, le concept, qui constitue sa nature, se présente enfoncé dans la matière empirique. Dans ses expérimentations, l'instinct rationnel tend à trouver ce qui résulte de telle ou telle autre circonstance. La loi | 187 | n'en paraît que davantage encore être plongée dans l'être sensible ; or, c'est au contraire celui-ci qui y est perdu. Cette recherche a pour signification intérieure de trouver des conditions pures de la loi ; ce qui — quand bien même la conscience qui s'exprime ainsi devrait estimer qu'elle dit autre chose par là — ne veut rien dire d'autre qu'élever entièrement la loi à la figure du concept et anéantir tout attachement de ses moments à de l'être déterminé. L'électricité négative, par exemple, qui s'annonce d'abord sous le nom d'électricité résineuse9, de même que l'électricité positive s'annonce sous le nom d'électricité vitrée10, perdent complètement, du fait des expériences, cette signification, et deviennent purement électricité positive et négative, ni l'une ni l'autre n'appartenant plus à une espèce de choses particulière ; et on cesse de pouvoir dire qu'il y a des corps qui sont électriques positifs et d'autres qui sont électriques négatifs. De la même façon le rapport entre acide et base, ainsi que leur mouvement l'un à l'égard de l'autre, constituent une loi dans laquelle ces oppositions apparaissent comme des corps. Mais ces choses mises chacune à part n'ont pas d'effectivité ; la puissance11 qui les arrache l'une à l'autre ne peut pas les empêcher de se réengager aussitôt dans un processus chimique ; car elles ne sont que cette relation. Elles ne peuvent pas, comme une dent ou comme une griffe, demeurer chacune pour soi et être montrées en l'état. Le fait que leur essence soit de passer immédiatement à l'état de produit neutre fait de leur être un aboli en soi, ou encore | 188 | un universel, et acide et base n'ont de vérité que comme universels. De même, donc, que le verre et la résine peuvent être électriques tant positivement que négativement, l'acide et la base ne sont pas liés, au titre de propriétés, à telle ou telle effectivité, mais toute chose n'est que relativement acide ou basique ; ce qui semble être une base ou un acide caractérisé prend dans les « synsomaties12 » la signification opposée qui en fait autre chose. — Le résultat des expériences abolit de cette façon les moments ou spiritisations13 comme propriétés des choses déterminées, et libère les prédicats de leurs sujets. Ces prédicats ne sont trouvés, tels qu'ils sont en vérité, que comme universels ; c'est pourquoi, en vertu de cette autonomie, on leur donne le nom de matières, qui ne sont ni des corps, ni des propriétés, et on se garde bien d'appeler corps l'oxygène, etc., l'électricité positive et négative, la chaleur, etc.
La matière, en revanche, n'est pas une chose qui est, mais l'être en tant qu'universel, ou sur le mode du concept. La raison qui est encore instinct fait cette différence juste, sans la conscience que, en expérimentant la loi sur tout l'être sensible, elle abolit par là même précisément l'être seulement sensible de la loi, et qu'en appréhendant ses moments comme matières, leur essentialité est devenue pour la loi l'universel et est énoncée dans cette expression comme un sensible non sensible, comme un être incorporel et cependant objectal. | 189 |
Il nous faut voir maintenant la tournure que son résultat prend pour l'instinct rationnel, et quelle nouvelle figure de son observation entre alors en scène. Comme vérité de cette conscience expérimentatrice, nous voyons la loi pure qui se libère de l'être sensible, nous la voyons comme concept présent dans l'être sensible, mais qui s'y meut de manière autonome et sans être lié à quoi que ce soit, en est libre tout en y étant enfoncé, et est concept simple. Ce qui en vérité est le résultat et l'essence, intervient maintenant pour cette conscience elle-même, mais comme objet, et ce, en n'étant pas précisément pour elle un résultat et en n'ayant pas la relation au mouvement précédent, comme une espèce particulière d'objet, et son rapport à cet objet survient comme une autre sorte d'observation.
L'organique est un objet de ce genre, qui a chez soi le mouvement du processus dans la simplicité du concept. Il est cette absolue fluidité en laquelle est dissoute la déterminité qui ne le ferait être que pour autre chose. Si la chose inorganique a pour essence la déterminité, et ne peut donc constituer la totalité des moments du concept que conjointement avec une autre chose, et pour cette raison se perd en entrant dans le mouvement, chez l'être organique, à l'inverse, toutes les déterminités par lesquelles il est ouvert pour autre chose sont liées sous l'unité organique simple ; aucune ne surgit comme déterminité essentielle, qui aurait une relation libre à | 190 | autre chose ; et l'organique se conserve donc dans sa relation même.
Les côtés de la loi que l'instinct rationnel vient observer ici sont d'abord, ainsi qu'il résulte de cette détermination, la nature organique et la nature inorganique dans la relation qu'elles entretiennent l'une avec l'autre. C'est cette dernière qui est précisément pour la nature organique la liberté — contraire à son concept simple – des déterminités détachées les unes des autres en lesquelles la nature individuelle est en même temps dissoute, et par rapport à la continuité desquelles elle se met, en même temps, à part, et est pour soi. L'air, l'eau, la terre, les zones et les climats sont des éléments universels de ce genre, qui constituent l'essence simple indéterminée des individualités, et dans lesquels celles-ci sont en même temps reflétées en soi. Ni l'individualité, ni l'élémentaire, ne sont absolument en soi et pour soi, mais dans la liberté autonome où l'un et l'autre se présentent face à face pour l'observation, ils se comportent en même temps comme des relations essentielles, mais de telle manière, cependant, que l'autonomie et l'indifférence réciproque de l'un et l'autre sont l'élément dominant et ne passent que partiellement dans l'abstraction. La loi est donc ici présente comme la relation d'un élément à la formation de l'organique, qui tantôt a l'être élémentaire face à lui et au-dessus de lui, tantôt le représente en sa réflexion organique. Simplement, les lois du genre de celles qui posent que les animaux qui ressortissent à l'air ont la constitution des oiseaux, et que ceux qui ressortissent à l'eau | 191 | ont la constitution des poissons, ou que les animaux nordiques ont un pelage épais et fourni, etc., manifestent immédiatement à l'évidence une pauvreté qui ne correspond pas à la multiplicité et à la variété du monde organique. Outre le fait que la liberté organique sait reprendre à ces déterminations les formes qu'elle prend, et présente nécessairement en tous lieux des exceptions à ce genre de lois, ou plutôt de règles, comme on voudrait les nommer, ceci demeure chez ceux-là mêmes qui y sont soumis une détermination tellement superficielle que même l'expression de sa nécessité ne peut pas ne pas être superficielle non plus, et ne peut guère nous mener plus loin que la notion de grande influence ; personne ne sachant, en l'espèce, ce qui ressortit à proprement parler à cette influence, et ce qui n'y ressortit pas. C'est pourquoi, en fait, on ne doit pas appeler lois ce genre de relations de l'organique à l'élémentaire, d'une part, comme nous l'avons rappelé, parce que ce genre de relation, par son contenu, n'épuise pas du tout ni n'embrasse toute l'amplitude de l'organique, mais d'autre part aussi, parce que les moments de la relation elle-même demeurent mutuellement indifférents et n'expriment aucune nécessité. Dans le concept d'acide, on trouve le concept de base, de même que dans le concept d'électricité positive, on a l'électricité négative ; mais quand bien même on rencontre simultanément le pelage fourni et le Nord, le squelette des poissons et l'eau, celui des oiseaux et l'air, le concept de toison épaisse ne se trouve pas, pour autant, dans le concept de Nord, | 192 | ni dans celui de mer celui du squelette des poissons, ni dans le concept d'air celui du squelette des oiseaux. En vertu de cette liberté réciproque des deux côtés, il y a aussi des animaux terrestres qui ont les caractères essentiels d'un oiseau, du poisson, etc. Comme la nécessité ne peut être conçue comme nécessité intérieure de l'essence, elle cesse également d'avoir une existence sensible et ne peut plus être observée à même la réalité effective, mais au contraire est sortie d'elle. Et ne se trouvant donc pas ainsi chez l'essence réelle proprement dite, elle est ce que l'on appelle une relation téléologique, une relation extérieure aux choses référées les unes aux autres, et, par conséquent, est bien plutôt le contraire d'une loi. Elle est la pensée entièrement libérée de la nature nécessaire, qui quitte cette nature et se meut pour elle-même au-dessus d'elle.
Si la relation, ci-dessus abordée, de l'organique à la nature élémentaire n'exprime pas l'essence de celui-ci, cette essence, en revanche, est contenue dans le concept finalitaire14. Certes, pour cette conscience observante, ce concept finalitaire n'est pas l'essence propre de l'organique, mais échoit, pour elle, hors de cette essence, et n'est alors que cette relation extérieure, téléologique, dont nous parlions. Simplement, si l'on prend l'organique tel qu'il a été conçu ci-dessus, il est en réalité la fin réelle elle-même ; car en se conservant lui-même dans la relation à autre chose, il est précisément l'essence naturelle dans laquelle la nature se refléchit dans le concept, et où les moments désassemblés dans la relation de nécessité, d'une cause et d'un effet, | 193 | d'un élément actif et d'un élément passif, sont repris dans un ensemble unique ; en sorte qu'ici, non seulement quelque chose intervient comme résultat de la nécessité, mais que, au contraire, comme ce quelque chose est rentré en soi, le moment ultime, ou le résultat, est tout aussi bien le premier moment, qui initie le mouvement, et qui est pour soi-même la fin qu'il réalise effectivement. L'organique ne produit pas quelque chose, mais ne fait que se conserver, ou encore, ce qui est produit est tout aussi bien déjà présent que produit.
Il faut examiner de plus près cette détermination, telle qu'elle est en soi et pour l'instinct rationnel, afin de voir comment cet instinct s'y trouve, mais ne se reconnaît pas dans ce qu'il a ainsi trouvé. Le concept finalitaire, donc, auquel la raison observante s'élève, de même que c'est son concept conscient, est tout aussi bien présent comme quelque chose d'effectif ; et n'est pas seulement une relation extérieure de ce quelque chose d'effectif, mais est son essence. Cette effectivité qui est soi-même une fin visée, se réfère elle-même sur un mode final à autre chose, je veux dire, que sa relation est une relation contingente si l'on s'en tient à ce que l'un et l'autre sont immédiatement ; immédiatement, l'un et l'autre sont autonomes, et mutuellement indifférents. Mais l'essence de leur relation est tout autre chose que ce qu'ils paraissent être comme cela, et leur activité a un autre sens que ce qu'elle est immédiatement pour la perception sensible ; dans ce qui arrive, la nécessité est cachée, et ne se montre que tout à la fin, mais de telle sorte que cette fin, précisément, montre que la nécessité a été aussi la première chose. | 194 | Mais la fin montre cette priorité d'elle-même par le fait qu'il ne sort rien d'autre de la modification entreprise par l'activité que ce qui était déjà. Ou encore, si nous partons du début, du premier moment, celui-ci, dans sa fin ou dans le résultat final de son action, ne fait que revenir à soi-même ; et c'est précisément par là qu'il s'avère être un début dont la nature est qu'il s'ait soi-même pour fin ultime, qui donc, en tant que premier moment est déjà revenu à soi, ou encore, est en soi et pour soi. Ce qu'il atteint donc par le mouvement de son activité, il l'est lui-même ; et qu'il n'atteigne que soi, c'est cela qui constitue son sentiment de soi15. On a donc ainsi certes bien la différence de ce qu'il est et de ce qu'il cherche, mais ce n'est là que l'apparence d'une différence, en sorte qu'il est concept chez lui-même.
Mais, pareillement, la conscience de soi est ainsi faite qu'elle se différencie de soi d'une façon en laquelle, dans le même temps, aucune différence ne ressort. C'est pourquoi elle ne trouve rien d'autre dans l'observation de la nature organique que cette essence, elle se trouve comme une chose, comme une vie, mais elle fait encore une différence entre ce qu'elle est elle-même et ce qu'elle a trouvé, différence qui, cependant, n'en est pas une. De même que l'instinct de l'animal cherche et consomme la nourriture, mais n'en sort rien d'autre que soi-même, l'instinct de la raison ne trouve dans sa recherche que la raison elle-même. L'animal finit par le sentiment de soi. Tandis que l'instinct rationnel est en même temps | 195 | conscience de soi ; mais comme il n'est qu'instinct, il est mis sur le côté face à la conscience, et a en elle son opposé. Sa satisfaction se trouve donc coupée en deux par cet opposé ; certes, il se trouve lui-même, il trouve la fin qu'il visait, et pareillement trouve cette fin en tant que chose. Mais, premièrement, la fin visée lui échoit à l'extérieur de la chose qui se présente comme fin visée. Et, deuxièmement, cette fin visée, en tant que fin, est en même temps objectale, il ne la voit donc pas échoir en lui-même comme conscience, mais tomber dans un autre entendement.
À y regarder de plus près, il y a tout aussi bien dans le concept de la chose cette détermination qu'elle est une fin en elle-même. La chose en effet se conserve ; c'est-à-dire qu'en même temps c'est sa nature de cacher la nécessité et de la présenter dans la forme de la relation contingente. Car sa liberté, ou son être pour soi, consiste précisément à se comporter envers ce qui lui est nécessaire comme envers quelque chose d'indifférent ; elle se présente donc comme une chose dont le concept tomberait hors de son être. La raison a pareillement la nécessité de regarder son propre concept comme tombant hors d'elle, et donc comme chose, comme quelque chose face à quoi elle est indifférente, et qui donc est, réciproquement, indifférent à elle et à son propre concept. En tant qu'instinct, elle demeure arrêtée aussi à l'intérieur de cet être, ou de l'indifférence, et la chose qui exprime le concept demeure pour cet instinct autre chose que ce concept, cependant que le concept demeure autre chose que | 196 | la chose. Si bien que pour elle, la chose organique n'est fin en elle-même que pour autant que la nécessité — qui dans son activité se présente comme cachée, dès lors que l'agissant s'y comporte comme une instance indifférente qui est pour soi — tombe à l'extérieur de l'organique proprement dit. — Mais étant donné que l'organique, en tant que fin à même soi, ne peut se comporter autrement que comme tel, il apparaît alors sur le plan de l'apparition phénoménale et de la présence sensible qu'il est fin à même soi et il est observé comme tel. L'organique se montre comme quelque chose qui se conserve soi-même, qui rentre en soi et qui est rentré en soi. Mais cette conscience observante ne reconnaît pas dans cet être le concept finalitaire, ou encore, ne reconnaît pas que le concept finalitaire n'est pas quelque part n'importe où dans un entendement, mais existe bel et bien ici, est en tant que chose. Elle fait entre le concept finalitaire, d'un côté, et de l'autre, l'être pour soi et la conservation de soi, une différence qui n'en est pas une. Et qu'elle n'en soit pas une, cela n'est pas pour la conscience, mais c'est une opération qui apparaît par hasard et indifféremment à ce qu'elle-même fait advenir, et l'unité qui malgré tout rattachait l'une et l'autre, cette opération-là et cette fin-ci, se disloque à ses yeux.
Ce qui, de ce point de vue, revient à l'organique proprement dit, c'est l'activité qui occupe la position médiane interne entre son premier et son dernier temps, en ce que cette activité a chez elle le caractère de la singularité. Mais l'activité, en ce qu'elle a le caractère de l'universalité et où l'agissant | 197 | est posé comme identique à ce qui est produit par elle, l'activité adéquate à une fin, en tant que telle, ne lui reviendrait pas. La première, cette activité singulière qui n'est que moyen, passe, du fait de sa singularité, sous la détermination d'une nécessité parfaitement singulière et contingente. Ce que l'organique fait pour la conservation de soi-même en tant qu'individu, ou de soi-même en tant que genre, est donc, conformément à ce contenu immédiat, entièrement dépourvu de loi, car l'universel et le concept tombent hors de lui. Son activité serait alors l'efficience vide et sans contenu chez elle-même ; elle ne serait même pas l'efficience d'une machine, car celle-ci vise une fin, qui fait que son efficience a un contenu déterminé. Et ainsi abandonnée par l'universel, elle serait l'activité16 uniquement d'une instance qui est, en tant qu'elle est, c'est-à-dire une efficience qui ne serait pas en même temps réfléchie en elle-même, comme c'est le cas de celle d'un acide ou d'une base ; une efficience qui ne pourrait pas se dissocier de son existence immédiate, ni abandonner cela même qui dans la relation à son opposé est perdu, mais qui pourrait se conserver. Mais l'être dont l'efficience est celle qu'on observe ici est posé comme une chose qui se conserve dans sa relation à son opposé ; l'activité en tant que telle n'est rien d'autre que la pure forme inessentielle de son être pour soi, et sa substance, qui n'est pas simplement être déterminé, mais est l'Universel, sa fin, ne tombe pas hors d'elle ; elle est activité revenant en soi chez elle-même, et non pas réorientée et ramenée en elle-même par une | 198 | quelconque instance étrangère.
Mais la raison pour laquelle cette unité de l'universalité et de l'activité n'est pas pour cette conscience observante, c'est que cette unité est essentiellement le mouvement interne de l'organique et qu'elle ne peut être appréhendée que comme concept ; tandis que l'observation cherche les moments dans la forme de l'être et du demeurer ; et comme le tout organique est essentiellement ce fait de ne pas avoir chez lui et de ne pas laisser trouver chez lui les moments, la conscience, dans sa vue des choses, transforme l'opposé en un opposé qui lui soit adéquat.
L'essence organique, de cette manière, naît pour cette conscience observante comme une relation de deux moments fermement établis qui ont chacun leur être – opposition dont les deux côtés lui paraissent ainsi, d'une part, donnés dans l'observation, et d'autre part exprimer par leur contenu l'opposition du concept finalitaire organique et de l'effectivité ; mais comme le concept en tant que tel y est détruit, c'est de manière obscure et superficielle, où la pensée est tombée au niveau de la représentation. Nous voyons ainsi le premier signifié à peu près sous la notion d'intérieur, et la seconde sous celle d'extérieur, leur relation engendrant la loi qui veut que l'extérieur soit l'expressionde l'intérieur.
À considérer de plus près cet intérieur avec son opposé, ainsi que leur relation réciproque, il ressort, en premier lieu, | 199 | que les deux côtés de la loi n'ont plus le même sens que dans les lois antérieures, où ils apparaissaient comme des choses autonomes, chaque côté constituant un corps particulier ; ni non plus, deuxièmement, un sens où l'universel serait censé avoir son existence n'importe où ailleurs que dans ce qui est. Mais l'essence organique est posée tout simplement, sans être divisée, comme point de départ, comme fondement et comme contenu de l'intérieur et de l'extérieur, comme étant la même chose pour l'un et l'autre ; ce qui fait que l'opposition n'est encore qu'une opposition purement formelle dont les côtés réels ont le même en soi pour essence, mais qui, en même temps, dès lors que l'intérieur et extérieur sont également une réalité opposée, et un être distinct pour l'observation, lui semblent chacun avoir un contenu caractéristique. Mais ce contenu caractéristique, comme il est la même substance ou la même unité organique, ne peut être en fait qu'une forme différente de celle-ci ; et c'est ce que suggère la conscience observante quand elle dit que l'extérieur n'est que l'expression de l'intérieur. — Nous avons vu chez le concept finalitaire ces mêmes déterminations du rapport, savoir, l'autonomie indifférente des instances distinctes, et en celle-ci leur unité, en laquelle elles disparaissent.
Il faut voir maintenant quelle figure l'intérieur et l'extérieur ont dans leur être. L'intérieur en tant que tel doit, tout aussi bien que l'extérieur en tant que tel, avoir un être extérieur et une figure, car | 200 | il est objet, ou encore, il est lui-même posé comme étant et comme présent pour l'observation.
La substance organique, en tant que substance intérieure, c'est l'âme simple, le pur concept finalitaire ou encore, l'universel qui dans sa division demeure tout aussi bien fluidité universelle, et apparaît donc dans son être comme l'activité ou le mouvement de l'effectivité disparaissante ; tandis qu'à l'inverse l'extérieur, en opposition à cet intérieur qui est, consiste en l'être au repos de l'organique. La loi, comme relation de cet intérieur à cet extérieur, exprime ainsi son contenu, d'abord dans la présentation de moments universels ou d'essentialités simples, ensuite dans la présentation de l'essentialité réalisée effectivement, c'est-à-dire de la figure. Ces premières propriétés organiques simples, pour les nommer ainsi, sont la sensibilité, l'irritabilité et la reproduction17. Ces propriétés, du moins les deux premières d'entre elles, semblent certes ne pas se référer à l'organisme en général, mais seulement à l'organisme animal. L'organisme végétal, du reste, exprime en fait uniquement le concept simple de l'organisme, qui ne développe pas ses moments ; en sorte que, considérant ceux-ci dans la mesure où ils sont censés être pour l'observation, nous devons nous en tenir à celui qui expose leur existence développée.
En ce qui concerne maintenant ces propriétés elles-mêmes, elles résultent immédiatement du concept de fin propre18. La sensibilité exprime en effet tout simplement le concept | 201 | simple de la réflexion organique en soi-même, ou encore, la fluidité universelle de celui-ci ; tandis que l'irritabilité exprime l'élasticité organique, qui permet, au sein de la réflexion, de se comporter en même temps de manière réagissante, ainsi que l'effectivation opposée au premier et paisible être en soi-même, dans laquelle cet être pour soi abstrait est un être pour autre chose. Quant à la reproduction, elle est l'action19 de cet organisme tout entier réfléchi en soi-même, son activité en tant qu'il est fin en soi ou en tant que genre, où donc l'individu se détache de lui-même, répète par génération soit ses parties organiques, soit l'individu tout entier. Prise au sens de conservation de soi tout court, la reproduction exprime le concept formel de l'organique, ou encore, la sensibilité ; mais elle est à proprement parler le concept organique réel, ou le tout qui rentre en soi-même, soit en tant qu'individu, par la production des parties singulières de lui-même, soit en tant que genre, par la production d'individus.
L'autre signification de ces éléments organiques, je veux dire, en tant qu'ils sont l'extérieur, est leur modalité configurée, celle selon laquelle ils sont présents comme parties effectives, mais aussi en même temps comme parties universelles, ou comme systèmes organiques ; la sensibilité par exemple, comme système nerveux, l'irritabilité comme système musculaire, la reproduction comme entrailles20 de la conservation de l'individu et du genre. | 202 |
Les lois caractéristiques de l'organique concernent en conséquence un rapport des moments organiques dans leur double signification, selon laquelle ils sont, premièrement, une partie de la configuration organique, et, deuxièmement, déterminité fluide universelle qui traverse tous ces systèmes. Dans l'expression d'une loi de ce genre, par exemple, une sensibilité déterminée, en tant que moment de l'organisme tout entier, aurait donc son expression chez un système nerveux formé de manière déterminée, ou serait aussi en liaison avec une reproduction déterminée des parties organiques de l'individu, ou avec le réengendrement de l'individu tout entier, et ainsi de suite. — Les deux côtés de ce genre de loi peuvent être observés. L'extérieur est, conformément à son concept, l'être pour autre chose ; la sensibilité, par exemple, a dans le système sensible sa modalité rendue immédiatement effective ; et en tant que propriété générale, elle est dans ses manifestations extérieures tout aussi bien quelque chose d'objectal. Le côté qu'on appelle l'intérieur a son propre côté extérieur, lequel est distinct de ce qu'on appelle l'extérieur dans le tout.
Ainsi donc, les deux côtés d'une loi organique pourraient certes s'observer, mais ce ne serait pas le cas des lois de la relation de ces deux côtés ; et si l'observation ne suffit pas à cela, ce n'est pas parce que, en tant qu'observation, elle serait trop myope, ni que, plutôt que procéder de manière empirique, il faudrait partir de l'idée ; car ce genre de lois, si elles étaient quelque chose de réel, devraient de fait être effectivement présentes, et donc pouvoir s'observer | 203 | ; mais c'est parce que la notion de lois de cette espèce s'avère ne pas avoir de vérité.
Est ressorti comme une loi le rapport au sein duquel la propriété organique générale se serait faite chose en l'espèce d'un système organique, et aurait en cette chose sa copie expressive configurée, en sorte que l'une et l'autre seraient la même essence, présente une fois comme moment universel, une deuxième fois comme chose. Mais, par ailleurs, le côté de l'intérieur est aussi pour soi un rapport de plusieurs côtés, et c'est pourquoi ce qui s'offre c'est d'abord la notion d'une loi, comme relation mutuelle des activités ou des propriétés organiques universelles. Quant à savoir si une loi est possible, c'est une question qui se tranche nécessairement à partir de la nature de ce genre de propriété. Mais la propriété organique, pour une part, en tant qu'universelle fluidité, n'est pas quelque chose qui, à la façon d'une chose, a des bornes et se tient dans la différence d'une existence qui devrait constituer sa figure — la sensibilité au contraire va au-delà du système nerveux et passe à travers tous les autres systèmes de l'organisme — et pour une autre part, elle est moment universel qui, essentiellement, est non dissocié et inséparable de la réaction ou de l'irritabilité et de la reproduction. En tant que réflexion en soi-même, en effet, elle a tout simplement la réaction chez elle. Le fait d'être seulement réfléchi en soi-même c'est la passivité, ou l'être mort, ce n'est pas une sensibilité, tout aussi peu qu'une action, qui est la même chose que la réaction, sans réfléchissement en soi-même, est irritabilité. La réflexion dans l'action ou la réaction, | 204 | et l'action ou la réaction dans la réflexion, sont précisément ce dont l'unité constitue l'organique, unité qui a le même sens que la reproduction organique. Il s'ensuit qu'il faut que dans tout mode de l'effectivité soit présente la même grandeur de sensibilité — dès lors que nous considérons d'abord le rapport mutuel de celle-ci et de l'irritabilité — que d'irritabilité, et qu'un phénomène organique peut tout aussi bien être appréhendé et déterminé, ou si l'on veut, expliqué, en fonction de l'une qu'en fonction de l'autre. La même chose que tel prend pour une sensibilité élevée, tel autre pourra tout aussi bien la considérer comme irritabilité élevée, et comme irritabilité de même niveau. Si on les appelle des facteurs, et que ce mot est censé ne pas être dépourvu de toute signification, on énonce par là même précisément que ce sont des moments du concept, que donc l'objet réel, dont ce concept constitue l'essence, a chez lui ces facteurs de manière identique, et lorsqu'on le détermine, de l'une des manières, comme très sensible, on peut tout aussi bien l'énoncer, de l'autre manière, comme tout aussi irritable.
Quand, comme il est nécessaire, ces propriétés sont différenciées, elles le sont selon le concept, et leur opposition est qualitative. Mais quand on les pose comme ayant encore de l'être, en dehors de cette différence vraie, et pour la représentation de ce en quoi elles pourraient être des côtés de la loi, comme différentes, elles apparaissent alors dans leur diversité quantitative. Leur opposition qualitative | 205 | caractéristique passe alors dans la grandeur, et l'on voit naître des lois du genre de celles où, par exemple, sensibilité et irritabilité sont en grandeurs inversement proportionnelles, en sorte que l'une s'accroît dans la proportion où l'autre diminue ; mieux, on prend la grandeur elle-même comme contenu, et la grandeur de quelque chose augmente proportionnellement à la diminution de sa petitesse. — Mais quand on donne à cette loi un contenu déterminé, en sorte, par exemple, que la grandeur d'un trou augmente à mesure que diminue ce qui en constitue le remplissement, on peut tout aussi bien transformer et exprimer ce rapport inverse en un rapport direct, où la grandeur du trou augmente de façon directement proportionnelle à la masse de ce qu'on retire pour le faire — proposition tautologique, qu'on l'exprime comme proportion directe ou inverse, qui dans sa formulation caractéristique signifie simplement ceci qu'une grandeur augmente dans la mesure où cette grandeur augmente. De même que le trou et ce qui le remplit et qu'on retire sont qualitativement opposés, mais sont, comme la réalité de ces deux termes, et comme la grandeur déterminée de celle-ci dans chacun d'eux, une seule et même chose, et que leur opposition vide de signification débouche sur une tautologie, et que pareillement l'augmentation de la grandeur et la diminution de la petitesse sont la même chose, de même les moments organiques sontils également inséparables dans leur existence réelle et dans leur grandeur, qui est celle de cette existence réelle. L'un ne diminue, et n'augmente, qu'en même temps que l'autre, car l'un n'a tout bonnement de signification que dans la mesure où il y a l'autre | 206 | — ou encore, bien plutôt, il est indifférent de considérer un phénomène organique comme irritabilité, ou comme sensibilité, ceci déjà de manière générale, et pareillement quand on parle de leur grandeur. Tout comme il est indifférent d'exprimer l'augmentation d'un trou comme accroissement de soi en tant que vide, ou comme accroissement du plein retiré. Ou qu'un nombre, par exemple trois, reste de même grandeur, que je le prenne positivement ou négativement ; et quand j'agrandis le trois pour en faire un quatre, le positif aussi bien que le négatif sont devenus quatre — de la même façon que le pôle Sud d'un aimant est exactement aussi fort que son pôle Nord, ou qu'une électricité positive ou un acide sont exactement aussi forts que la négative ou que la base sur lesquels ils agissent. Une existence organique est une grandeur de ce genre, comme ce trois, ou cet aimant, etc. Elle est ce qui est augmenté et diminué, et quand elle est augmentée, ses deux facteurs le sont, tout de même que les deux pôles de l'aimant, ou que les deux électricités lorsqu'un aimant, etc., est renforcé. — Que l'un et l'autre moment puissent tout aussi peu différer en intension et en extension, que l'un ne puisse pas diminuer en extension, mais puisse en revanche croître en intension, tandis que l'autre, à l'inverse, serait censé diminuer son intension, mais augmenter en extension, tout cela tombe sous le même concept d'opposition vide ; l'intension réelle est tout bonnement, et tout aussi bien, | 207 | aussi grande que l'extension, et inversement.
À vrai dire, ainsi qu'il apparaît clairement, dans cette attribution de loi, les choses se passent de telle manière que ce sont d'abord l'irritabilité et la sensibilité qui constituent l'opposition organique déterminée ; mais ce contenu se perd, et l'opposition se dilue dans l'opposition formelle de l'accroissement et de la diminution, ou des intensions et extensions différentes — opposition qui désormais ne concerne plus en rien la nature de la sensibilité et de l'irritabilité, et qui ne l'exprime plus. Dès lors, ce genre de jeu vide qui consiste à attribuer des lois n'est plus lié aux moments organiques, mais peut être pratiqué en tous lieux avec tout ce qu'on voudra, et repose en définitive sur l'absence de familiarité avec la nature logique de ces oppositions.
Si enfin, au lieu de la sensibilité et de l'irritabilité, c'est la reproduction qu'on met en relation avec l'une ou l'autre, c'est l'occasion même d'attribuer ces lois qui disparaît à son tour ; la reproduction, en effet, n'est pas en opposition avec ces moments comme ceux-ci le sont l'un face à l'autre ; et comme c'est sur cette opposition que repose cette attribution de lois, disparaît ici l'apparence même qu'elle ait lieu.
L'attribution de lois que nous venons d'examiner contient les différences de l'organisme dans leur signification de moments de son concept, et devrait, à dire vrai, être une législation décrétée a priori. Mais il y a en elle-même | 208 | essentiellement cette idée, que ces différences ont la signification de choses présentes, et la conscience simplement observante n'a de toute manière qu'à s'en tenir à leur existence. L'effectivité organique a nécessairement chez elle une opposition du type de celle que son concept exprime, et qui peut être déterminée comme irritabilité et sensibilité, de même que l'une et l'autre apparaissent à leur tour distinctes de la reproduction. — L'extériorité dans laquelle les moments du concept organique sont ici examinés est l'extériorité immédiate propre de l'intérieur, et non pas l'extérieur qui est extérieur dans l'ensemble, qui est figure, et en relation avec lequel il faudra ultérieurement examiner l'intérieur.
Mais si l'on appréhende l'opposition des moments telle qu'elle est à même l'existence, sensibilité, irritabilité et reproduction se dégradent alors en propriétés communes, qui sont des généralités tout aussi indifférentes les unes à l'égard des autres que poids spécifique, couleur, dureté, etc. En ce sens, on peut certes bien observer qu'une réalité organique peut être plus sensible, ou plus irritable, ou d'une plus grande puissance reproductive qu'une autre ; et de même, que la sensibilité, etc., de l'un est, selon l'espèce, différente de celle d'un autre, que face à certaines excitations déterminées l'un se comporte autrement que ne le fait un autre, de même que le cheval n'a pas le même comportement face à l'avoine que face au foin, et qu'à son tour le chien aura encore une autre attitude face à l'une et à l'autre, etc., tout autant qu'on peut encore observer qu'un corps est plus dur | 209 | qu'un autre et ainsi de suite. — Simplement, ces propriétés sensibles, dureté, couleur, etc., tout comme les phénomènes d'excitabilité par l'avoine, d'irritabilité à la charge, ou du nombre de petits et de la façon de les mettre au monde, une fois qu'on les a mises en relation et comparées entre elles, sont par essence en contradiction avec la notion de conformité à une loi. La déterminité de leur être sensible consiste, en effet, précisément à exister de manière parfaitement indifférente les unes par rapport aux autres, et à donner à voir au contraire la liberté de la nature délivrée du concept, plutôt que l'unité d'une relation, à exposer bien plutôt leur irrationnel jeu de va-et-vient sur l'échelle des grandeurs contingentes entre les moments du concept, que ces moments eux-mêmes.
C'est l'autre côté, celui selon lequel les moments simples du concept organique sont comparés aux moments de la configuration, qui fournirait alors, et seulement alors, la loi proprement dite, qui exprimerait l'extérieur vrai comme copie de l'intérieur. — Or, comme ces moments simples sont des propriétés fluides qui pénètrent partout, ils n'ont pas en la chose organique une expression réelle disjointe, comme en est une ce que l'on appelle un système singulier de la figure. Ou encore, si l'idée abstraite de l'organisme dans ces trois moments n'est exprimée de manière véritable que parce qu'ils ne sont rien de stable, mais simplement des moments du concept et du mouvement, celui-ci en revanche, l'organisme, en tant que configuration, n'est pas embrassé dans ces trois systèmes déterminés, | 210 | tels que l'anatomie les disjoint. Dès lors que les systèmes de ce genre sont censés être trouvés dans leur effectivité, et légitimés par ce fait qu'on les a trouvés, il faut également rappeler que l'anatomie ne met pas seulement en évidence ces trois systèmes-là, mais de très nombreux autres encore. — En suite de quoi, et abstraction faite de cela, le système sensible notamment doit signifier quelque chose de tout à fait autre que ce que l'on appelle système nerveux, le système irritable, de même, doit signifier quelque chose d'autre que le système musculaire, le système reproductif quelque chose d'autre que les entrailles de la reproduction. Dans les systèmes de la figure en tant que telle, l'organisme est appréhendé selon le côté abstrait de l'existence morte ; ses moments ainsi recueillis ressortissent à l'anatomie et au cadavre, non à la connaissance et à l'organisme vivant. En tant que parties de ce genre, ils ont même, au contraire, cessé d'être, car ils cessent d'être des processus. Étant donné que l'être de l'organisme est essentiellement universalité ou réflexion en soi-même, l'être de son tout, de même que ses moments, ne peut consister en un système anatomique, mais l'expression effective de ces moments, et leur extériorité, n'est présente au contraire que comme mouvement qui parcourt les différentes parties de la configuration, et au sein duquel ce qui est arraché et fixé comme système singulier se présente essentiellement comme moment fluide, en sorte que ce n'est pas l'effectivité telle que l'anatomie la trouve qui est fondée à valoir comme sa réalité, mais seulement cette effectivité en tant que | 211 | processus, au sein duquel seul les parties anatomiques aussi ont un sens.
Il ressort donc de tout cela, d'une part, que les moments de l'intérieur organique pris pour soi ne sont pas capables de fournir les côtés d'une loi de l'être, dès lors que dans une loi de ce type ils sont énoncés à partir d'une existence, sont distincts les uns des autres, et ne peuvent pas tous être nommés de la même manière à la place des autres ; et d'autre part que, posés d'un côté, ils ne trouvent pas de l'autre côté leur réalisation en un système ferme ; car ce système est tout aussi peu quelque chose qui aurait en général une vérité organique, qu'il n'est l'expression de ces moments de l'intérieur. L'essentiel de l'organique, parce qu'il est en soi l'universel, est bien plutôt tout simplement d'avoir ses moments dans l'effectivité de manière tout aussi universelle, c'est-à-dire comme des procès courants de bout en bout, et non pas de donner à même une chose isolée une image de l'universel.
De cette manière, chez l'organique, la représentation d'une loi est tout simplement promise à se perdre. La loi veut appréhender et exprimer l'opposition comme autant de côtés figés, et chez ceux-ci la déterminité, qui est leur relation mutuelle. L'intérieur, auquel ressortit l'universalité qui apparaît, et l'extérieur, auquel ressortissent les parties de la figure au repos, devraient constituer les côtés corrélatifs de la loi, mais à être tenus ainsi l'un à l'écart de l'autre, ils perdent leur signification organique ; et au fondement | 212 | de la représentation de la loi, on trouve précisément cette idée que ses deux côtés auraient chacun une pérexistence indifférente qui serait pour soi, et que la relation, comme double déterminité corrélative, serait répartie sur chacun d'eux. Or, au contraire, chacun des côtés de l'organique est en soi-même cet être double, est à la fois l'universalité simple, où toutes les déterminations sont dissoutes, et le mouvement de cette dissolution.
L'intelligence de la différence que représente ce type d'attribution de loi par rapport à des formes antérieures éclairera complètement sa nature. — Si, en effet, nous revenons au mouvement de la perception et de l'entendement qui s'y réfléchit en soi et y détermine ainsi son objet, nous voyons que ce dernier n'a pas là sous les yeux, à même son objet, la relation de ces déterminations abstraites, de l'universel et du singulier, de l'essentiel et de l'externe, mais qu'il est lui-même le passage pour qui ce passage ne devient pas objectal. Ici, en revanche, c'est l'unité organique, c'est-à-dire précisément, la relation de ces oppositions — et cette relation est pur passage — qui est elle-même l'objet. Ce passage, dans sa simplicité, est immédiatement universalité, et dès lors que celle-ci entre dans la différence, dont la loi est censée exprimer la relation, ses moments sont en tant qu'objets universels de cette conscience, et la loi dit que l'extérieur est expression de l'intérieur. L'entendement a saisi ici la pensée de la loi elle-même, tandis qu'auparavant il ne | 213 | cherchait que des lois en général, et que ce qu'il avait l'impression de voir c'étaient les moments de celles-ci comme un contenu déterminé, et non comme les pensées de ces lois. — Et donc, pour ce qui est du contenu, on ne doit pas conserver ici les lois qui ne sont que réception statique, dans la forme de l'universalité, de différences qui se contentent simplement d'être, mais des lois qui ont immédiatement aussi en ces différences l'inquiétude du concept, et partant, en même temps, la nécessité de la relation des différents côtés. Simplement, comme l'objet, l'unité organique réunit précisément l'abolition infinie, ou la négation absolue, de l'être et l'être au repos, et que les moments sont essentiellement pur passage, il ne résulte aucun côté qui soit, du genre de ceux qui sont requis pour la loi.
Pour obtenir ce genre de côtés, l'entendement doit s'en tenir à l'autre moment du rapport organique ; savoir, à la réflexivité en soi-même de l'existence organique. Mais cet être est si parfaitement réfléchi en lui-même, qu'il ne lui reste plus de déterminité face à autre chose. L'être sensible immédiat ne fait qu'un, immédiatement, avec la déterminité en tant que telle, et exprime donc à même soi une différence qualitative ; comme le bleu, par exemple, face au rouge, l'acide face à l'alcalin, etc. Mais l'être organique revenu en soi est parfaitement indifférent à l'égard d'autre chose, son existence est l'universalité simple et refuse à l'observateur | 214 | des différences sensibles durables, ou, ce qui revient au même, ne montre sa déterminité essentielle que comme changement de déterminités qui sont. Et la façon dont s'exprime, par conséquent, la différence, en tant que différence qui est, c'est précisément qu'elle est une différence indifférente, sans intérêt, c'est-à-dire qu'elle s'exprime comme grandeur. Mais en cela, le concept est détruit, et la nécessité a disparu. — Cependant le contenu et ce qui emplit cet être indifférent, le changement des déterminations sensibles, repris dans la simplicité d'une détermination organique, exprime alors en même temps ceci qu'il n'a précisément pas cette déterminité — de la propriété immédiate — et le qualitatif ne fait que tomber dans la grandeur, comme nous avons vu ci-dessus.
Donc, bien que l'élément objectal qui est appréhendé comme déterminité organique ait déjà chez lui-même le concept, et se différencie par là de ce qui est pour l'entendement qui se comporte de manière purement perceptive dans l'appréhension du contenu de ses lois, cette appréhension retombe cependant entièrement dans le principe et la manière de l'entendement simplement perceptif, pour la raison que ce qui est appréhendé est utilisé pour devenir autant de moments d'une loi ; ce qui est appréhendé y reçoit en effet la modalité d'une déterminité ferme, la forme d'une propriété immédiate ou d'un phénomène figé, puis est accueilli dans la détermination de la grandeur, et la nature du concept est ainsi réprimée. — L'échange d'une chose simplement perçue contre une chose réfléchie en soi | 215 |, d'une déterminité purement sensible contre une déterminité organique perd donc de nouveau sa valeur, et ceci par le fait que l'entendement n'a pas encore aboli l'activité légiférante.
Pour engager la comparaison, relativement à cet échange, en prenant quelques exemples, c'est ainsi qu'on déterminera quelque chose qui pour la perception est un animal aux muscles puissants comme un organisme animal d'irritabilité élevée, ou, ce qui pour la perception est un état de grande faiblesse, comme un état de haute sensibilité, ou si l'on préfère encore, comme une affection anormale, savoir, une potentialisation de celle-ci (toutes expressions qui traduisent le sensible non pas en concept, mais en latin, et encore, en mauvais latin). Que l'animal ait des muscles puissants, c'est une chose que l'entendement peut aussi exprimer en disant que l'animal possède une grande force musculaire — de même qu'une grande faiblesse peut être exprimée comme une force minime. La détermination par l'irritabilité a sur la détermination par la force l'avantage que si cette dernière exprime la réflexion en soi indéterminée, la première exprime la réflexion déterminée, puisque la force caractéristique du muscle est précisément irritabilité — et elle a sur la détermination comme muscles puissants l'avantage que, comme c'est déjà le cas dans la force, la réflexion en soi y est en même temps contenue. De même, la faiblesse ou la force minime, la passivité organique, sont exprimées de manière déterminée par la sensibilité. Mais, à partir du moment où cette sensibilité est prise ainsi et fixée pour soi, et encore liée à la détermination | 216 | de la grandeur, et opposée, en tant que plus ou moins grande sensibilité, à une plus ou moins grande irritabilité, chacune est entièrement rabaissée dans l'élément sensible, ramenée à la forme commune d'une propriété, et leur relation n'est pas le concept, mais au contraire la grandeur, en laquelle désormais sombre l'opposition, qui devient une différence sans pensée. S'il est vrai qu'en l'espèce on a écarté ce qu'il y avait d'indéterminé dans les expressions de puissance, et de force, et de faiblesse, on voit surgir maintenant la pratique tout aussi vide et indéterminée qui consiste à se baguenauder ici et là, dans les oppositions d'une sensibilité et d'une irritabilité plus ou moins élevées selon leurs variations de niveau connexes et corrélatives. De même que force et faiblesse sont des déterminations entièrement sensibles et dépourvues de pensée, la plus ou moins grande sensibilité et irritabilité sont tout autant qu'elles le phénomène sensible, appréhendé et énoncé avec aussi peu de pensée. Ce n'est pas le concept qui est venu se mettre à la place de ces expressions sans concept : force et faiblesse ont été remplies par une détermination, qui, prise pour elle seule, repose sur le concept et a celui-ci pour contenu, mais qui perd complètement cette origine et ce caractère. — En sorte que, par la forme de la simplicité et de l'immédiateté dans laquelle on fait de ce contenu un côté d'une loi, et par la grandeur, qui constitue l'élément de la différence de ce genre de déterminations, l'essence qui originairement est et est posée comme concept, conserve | 217 | la modalité de la perception sensible, et demeure aussi éloignée du connaître que dans la détermination par la puissance ou la faiblesse de la force, ou par des propriétés sensibles immédiates.
Il nous reste encore maintenant à examiner pour soi seul ce qui est l'extérieur de l'organique, et comment en lui se détermine l'opposition de son intérieur et de son extérieur ; de la même façon que l'on avait d'abord examiné l'intérieur du tout dans sa relation à son propre extérieur.
L'extérieur considéré pour soi, c'est le processus d'affiguration21 en général, le système de la vie qui s'articule dans l'élément de l'être, et essentiellement, en même temps, l'être pour autre chose de l'essence organique : essence objectale dans son être pour soi. Cet autre apparaît d'abord comme sa nature inorganique extérieure. Si on les considère tous deux en relation à une loi, la nature inorganique ne peut pas, comme nous l'avons vu ci-dessus, constituer le côté d'une loi face à l'essence organique, étant donné que celle-ci est en même temps tout simplement pour soi, et a, avec la nature inorganique, une relation universelle et libre.
Cependant, si l'on détermine plus avant chez la figure organique elle-même le rapport de ces deux côtés, on la trouve d'un côté tournée vers la nature inorganique, mais de l'autre réfléchie pour soi et en soi-même. L'essence organique effective est le milieu qui | 218 | concatène l'être pour soi de la vie et l'extérieur en général, ou l'être en soi. — Or l'extrême de l'être pour soi est l'intérieur comme Un infini qui reprend en soi à leur pérexistence et à la connexion avec l'extérieur les moments de la figure elle-même, le sans contenu qui se donne son contenu en la figure et apparaît chez elle comme son processus à elle. Dans cet extrême comme négativité simple ou comme singularité pure, l'organique a sa liberté absolue, ce par quoi il est, en regard de l'être pour autre chose et de la déterminité des moments de la figure, à la fois indifférent et prémuni. Cette liberté est en même temps liberté des moments eux-mêmes, elle est leur possibilité d'apparaître et d'être appréhendés comme existants, et de même qu'à l'égard d'une chose extérieure, ils y sont aussi libérés et indifférents les uns à l'égard des autres, car la simplicité de cette liberté est l'être ou leur substance simple. Ce concept ou cette pure liberté est une seule et même vie, quel que soit le papillonnage de jeux multiples auquel la figure ou l'être pour autre chose puissent encore se livrer ; peu importe à ce fleuve de la vie la nature des moulins qu'il fait tourner. — En premier lieu, il faut maintenant noter que ce concept ne doit pas être saisi ici comme antérieurement, quand nous examinions l'intérieur proprement dit, dans sa forme de processus ou de développement de ses moments, mais dans sa forme d'intérieur simple qui constitue le côté purement universel face à l'essence vivante effective, ou en tant qu'il est l'élément de la pérexistence des membres de la figure | 219 | qui sont ; car c'est celle-ci que nous examinons ici et chez elle l'essence de la vie est comme simplicité de la pérexistence. En sorte que l'être pour autre chose ou la déterminité de la configuration effective, prise dans cette universalité simple qui est son essence, est une déterminité non sensible universelle tout aussi simple, et qui ne peut être que celle qui est exprimée comme nombre. — C'est elle qui est l'élément médian de la figure qui rattache la vie indéterminée à la vie réelle effective, simple comme la première et déterminée comme la seconde. Ce qui chez la première, l'intérieur, serait comme nombre, l'extérieur devrait l'exprimer à sa manière, comme l'effectivité multiforme, mode de vie, couleur, etc., bref, comme toute la foule des différences qui se développent dans le phénomène.
Quand on compare, selon l'intérieur de chacun d'eux, les deux côtés du tout organique — l'un étant l'intérieur, mais l'autre l'extérieur, de telle manière que chaque côté a derechef chez lui-même un intérieur et un extérieur —, on a vu que l'intérieur du premier était le concept, en tant qu'inquiétude de l'abstraction ; tandis que le second a pour intérieur l'universalité au repos, et en celle-ci également, la déterminité au repos, statique, le nombre. Si donc le premier, parce que en lui le concept développe ses moments, promettait, de manière illusoire, des lois, par l'apparence de nécessité qu'avait la relation, le second au contraire y renonce tout aussitôt, dès lors que le nombre se montre comme la détermination de l'un des côtés de ses lois. | 220 | Le nombre en effet est précisément la déterminité entièrement au repos, statique, morte et indifférente, chez laquelle tout mouvement et toute relation sont éteints, et qui a rompu le pont avec l'élément vivant des pulsions instinctives, la façon de vivre, et tout ce qui peut encore subsister d'existence sensible.
Mais en fait, l'examen de la figure de l'organique en tant que telle, et de l'intérieur en tant qu'intérieur de la seule figure, n'est plus un examen de l'organique. En effet, les deux côtés qui devraient être mis en relation sont seulement posés indifféremment l'un face à l'autre, et ceci a pour effet que la réflexion en soi, qui constitue l'essence de l'organique, est abolie. C'est au contraire plutôt la comparaison qui avait été entreprise de l'extérieur et de l'intérieur, qui est transférée ici sur la nature inorganique ; le concept infini n'est ici que l'essence qui est cachée, tournée vers l'intérieur, ou tombe à l'extérieur dans la conscience de soi et n'a plus, comme en l'organique, sa présence objectale. Il faut donc encore examiner cette relation de l'intérieur et de l'extérieur dans sa sphère proprement dite.
Pour commencer, cet intérieur de la figure, comme singularité simple d'une chose inorganique, est le poids spécifique. Celui-ci peut être observé comme être simple, exactement comme la déterminité du nombre, la seule dont il soit capable, ou à proprement parler, être trouvé par comparaison d'observations, et de cette manière semble fournir l'un des côtés | 221 | de la loi. La figure, la couleur, la dureté, la résistance et une foule innombrable d'autres propriétés, constitueraient toutes ensembles le côté extérieur, et auraient à exprimer la déterminité de l'intérieur, le nombre, en sorte que l'un aurait dans l'autre sa contre-image.
Or, comme la négativité n'est pas appréhendée ici comme mouvement du processus, mais comme unité mise en repos, ou être pour soi simple, elle apparaît au contraire comme ce par quoi la chose s'oppose, résiste au processus, et se conserve en soi-même et comme indifférente à lui. Mais par le fait que cet être pour soi simple est une tranquille indifférence à l'égard d'autre chose, ce poids spécifique vient prendre place comme une propriété parmi les autres, à côté d'elles ; ce qui marque la fin de toute relation nécessaire du poids à cette pluralité, ou si l'on veut, de toute conformité à une loi. — Le poids spécifique, en tant qu'il est cet intérieur simple, n'a pas la différence chez lui-même, ou encore, il n'a que la différence inessentielle ; car cette sienne simplicité pure abolit précisément toute différenciation essentielle. Il faudrait donc que cette différence inessentielle, la grandeur, ait chez l'autre côté, savoir, la pluralité des propriétés, sa contre-image, ou l'Autre, dès lors que c'est seulement par là et à partir de là qu'elle est, tout simplement, différence. Si cette pluralité elle-même est résumée dans la simplicité de l'opposition, et qu'on la détermine, par exemple, comme cohésion, de telle sorte que celle-ci est l'être pour soi dans l'être-autre, de même que le poids spécifique est le pur être pour soi, cette cohésion | 222 | est alors d'abord, face à la première, cette pure déterminité-là posée dans le concept, et la façon d'attribuer la loi serait alors celle que nous avons examinée ci-dessus à propos de la relation de la sensibilité à l'irritabilité. — Dès lors, en outre, comme concept de l'être pour soi dans l'être-autre, elle n'est que l'abstraction du côté qui fait face au poids spécifique, et, en tant que telle, n'a pas d'existence. Car l'être pour soi dans l'être-autre est le processus dans lequel l'inorganique aurait à exprimer son être pour soi comme une conservation de soi lui ayant évité de devoir sortir du processus comme moment d'un produit. Simplement, ceci précisément est contre sa nature, qui n'a pas chez elle-même la fin ou l'universalité. Son procès est au contraire seulement le comportement déterminé avec lequel son être pour soi, son poids spécifique, s'abolit. Mais, ce comportement déterminé lui-même, d'une part — en lequel sa cohésion consisterait en son vrai concept — et, d'autre part, la grandeur déterminée de son poids spécifique sont des concepts tout à fait indifférents l'un à l'autre. Si le mode de comportement était entièrement négligé et limité à la représentation de la grandeur, on pourrait, par exemple, penser la détermination suivante, savoir : qu'un poids spécifique plus grand, en tant qu'être en soi plus élevé, résisterait davantage qu'un poids spécifique moins grand à l'entrée dans le processus. Simplement, à l'inverse, la liberté de l'être pour soi ne fait ses preuves que dans la facilité à se commettre avec toute chose et à se | 223 | conserver dans cette multiplicité. Cette intensité sans extension des relations est une abstraction creuse, car c'est l'extension qui constitue l'existence de l'intensité. Mais, comme nous l'avons rappelé, l'autoconservation de l'inorganique dans sa relation tombe en dehors de la nature de celle-ci, car il n'a pas chez lui-même le principe du mouvement, ou parce que son être n'est pas la négativité absolue et le concept.
Si, en revanche, on considère cet autre côté de l'inorganique non comme un processus, mais comme un être au repos, il est alors la cohésion commune22, une propriété sensible simple venue sur le côté face au moment laissé libre de l'être-autre, qui gît démembré en de nombreuses propriétés indifférentes, et passe sous celles-ci, comme le poids spécifique ; la foule des propriétés rassemblées constitue alors l'autre côté qui fait pendant à celui-ci. Mais chez lui, comme chez les autres, le nombre est l'unique déterminité, qui non seulement n'exprime pas une relation entre ces propriétés ni un passage des unes aux autres, mais consiste même essentiellement à ne pas avoir de relation nécessaire, et au contraire à exposer la destruction radicale de toute conformité à une loi, car il est l'expression de la déterminité en ce qu'elle est inessentielle. Si bien, donc, qu'une série de corps qui expriment la différence comme différence numérique de leurs poids spécifiques n'est absolument pas parallèle à une série différentielle des autres propriétés, | 224 | même si, pour simplifier la chose, on ne prend qu'une seule ou un petit nombre d'entre elles. Car, en fait, c'est seulement la liasse tout entière de ces propriétés qui pourrait avoir à constituer ici l'autre côté dans ce parallèle. Pour mettre cette liasse en ordre en soi et la lier en un tout, d'un côté, les déterminités en grandeur de ce grand nombre de propriétés sont données à l'observation, mais d'un autre côté, leurs différences entrent en jeu sur le plan qualitatif. Quant à ce qui devrait dans cette masse être désigné comme négatif ou positif et s'abolirait mutuellement, savoir, tout simplement la figuration23 intérieure et l'exposition de la formule, qui serait très complexe, cela ressortirait au concept, lequel précisément est exclu dans la modalité où les propriétés se trouvent là et sont censées être prises comme des propriétés qui sont ; aucune dans cet être ne montre face à l'autre le caractère de quelque chose de négatif, mais chacune est aussi bien que l'autre, et aucune ne signifie autrement sa place dans l'ordonnancement du tout. — Dans le cas d'une série qui se développe en différences parallèles — qu'on en pense le rapport comme celui d'une croissance simultanée, ou d'une croissance inversement proportionnelle de part et d'autre —, il s'agit simplement de l'ultime expression simple de ce tout résumé, censé constituer un côté de la loi, face au poids spécifique ; mais ce même côté, en tant que résultat qui est, n'est précisément rien d'autre que ce que nous avons | 225 | déjà évoqué, c'est-à-dire une propriété singulière, comme l'est par exemple aussi la cohésion ordinaire, à côté de laquelle, d'une part, on trouve indifféremment les autres propriétés, et parmi elles aussi le poids spécifique, et d'autre part, toute autre propriété peut avec autant de bon droit, mais tout aussi à tort, être élue comme représentante de tout l'autre côté ; l'une comme l'autre ne feraient que représenter24 l'essence, ou pour dire la chose en allemand, vorstellen, représenter au sens de : placer la chose devant, sans pouvoir être la chose même. En sorte que la tentative de trouver des séries corporelles qui courraient sur le parallélisme simple de deux côtés et exprimeraient la nature essentielle des corps selon une loi corrélant ces côtés, doit être tenue pour une pensée ignorante de sa propre tâche et des moyens de la mener à bien.
Nous avons vu, précédemment, comment était directement importée dans la sphère de l'inorganique la relation de l'extérieur et de l'intérieur chez la figure censée se présenter à l'observation ; on peut désormais indiquer avec plus de précision la détermination qui l'a tirée jusque-là, et il en résultera une autre forme encore et une autre relation de ce rapport. Tombe et s'invalide dans l'organique, en effet, d'une manière générale, ce qui dans l'inorganique semble offrir la possibilité d'une pareille comparaison de l'intérieur et de l'extérieur. L'intérieur inorganique est un intérieur simple, qui s'offre à la perception comme propriété qui est ; c'est pourquoi sa déterminité | 226 | est essentiellement la grandeur, et il apparaît comme une propriété qui est, indifférente à l'extérieur ou aux nombreuses autres propriétés sensibles. Mais l'être pour soi de l'organico-vivant ne vient pas se mettre comme cela sur le côté face à son extérieur : il a chez lui-même le principe de l'être-autre. Si nous déterminons l'être pour soi comme relation simple à soi-même qui se conserve, son être-autre est la négativité simple, et l'unité organique est l'unité de la référence à soi identique à soi et de la négativité pure. Cette unité, en tant qu'unité, est l'intérieur de l'organique ; et ainsi celui-ci est en soi universel ou encore : il est genre. Or la liberté du genre par rapport à son effectivité est une autre liberté que celle du poids spécifique par rapport à la figure. La liberté de celle-ci est une liberté qui est ; ou encore : elle est de se mettre sur le côté en tant que propriété particulière. Mais comme elle est une liberté qui est, elle n'est aussi qu'Une déterminité qui appartient essentiellement à telle figure, ou par laquelle celle-ci, en tant qu'essence, est quelque chose de déterminé. Tandis que la liberté du genre est une liberté générale, indifférente à l'égard de telle figure ou de son effectivité. C'est pourquoi la déterminité qui échoit à l'être pour soi en tant que tel de l'inorganique, passe, chez l'organique, sous son être pour soi, de la même façon que, chez l'inorganique, elle ne passe que sous l'être de celui-ci. Et donc, bien qu'en celui-ci elle ne soit en même temps que comme propriété, | 227 | elle s'y voit impartir cependant la dignité de l'essence, parce que en tant qu'elle est le négatif simple, elle fait face à l'existence en tant qu'être pour autre chose ; et ce négatif simple, dans son ultime déterminité singulière, est un nombre. Mais l'organique est une singularité qui est elle-même négativité pure et qui par conséquent anéantit en soi la déterminité fixe du nombre qui revient à l'être indifférent. Dans la mesure où il a chez lui le moment de l'être indifférent et, en celui-ci, du nombre, ce dernier ne peut par conséquent être pris que comme un jeu chez lui, et non comme l'essence de son caractère vivant.
Et donc, maintenant, bien que la négativité pure, qui est le principe du processus, ne bascule pas hors de l'organique, et que celui-ci ne l'ait donc pas dans son essence comme une déterminité, mais que ce soit la singularité elle-même qui soit en soi universelle, cette pure singularité n'est pourtant pas, chez lui, développée et effective dans ses moments pris en tant qu'ils sont eux-mêmes abstraits ou universels. Cette expression sort au contraire de cette universalité-là qui retombe dans l'intériorité, et ce qui vient se mettre entre la réalité ou figure, c'est-à-dire la singularité en développement, et d'autre part l'universel organique, ou le genre, c'est l'universel déterminé, l'espèce. L'existence à laquelle parvient la négativité de l'universel ou du genre n'est que le mouvement développé d'un processus qui se déroule chez les parties de la figure qui est. Si le genre avait | 228 | chez lui, en tant que simplicité au repos, les différentes parties distinctes, et qu'ainsi sa négativité simple en tant que telle était en même temps un mouvement qui se déroulait à travers des parties tout aussi simples, immédiatement universelles chez elles-mêmes, qui seraient ici, à titre de ces moments, effectives, le genre organique serait alors conscience. Mais telle qu'elle est ici, la déterminité simple, comme déterminité de l'espèce, est présente chez elle sans aucun esprit ; l'effectivité commence à partir d'elle, ou encore, ce qui accède à l'effectivité, ce n'est pas le genre en tant que tel, c'est-à-dire, tout simplement, pas la pensée. Le premier, le genre, en tant qu'organique effectif, n'est représenté que par délégation d'un représentant. Mais ce représentant, le nombre, qui semble désigner le passage du genre dans la configuration individuelle, et offrir à l'observation les deux côtés de la nécessité, d'abord comme déterminité simple, et ensuite comme figure développée et née à la multiplicité, désigne au contraire l'indifférence et la liberté mutuelles de l'universel et du singulier que le genre a abandonné à l'inessentielle différence de grandeur, mais qui, en tant que vivant, s'avère lui-même tout aussi libre par rapport à cette différence. L'universalité vraie, telle qu'elle a été déterminée, n'est ici qu'essence intérieure ; comme déterminité de l'espèce, elle est universalité formelle, et face à celle-ci, cette universalité vraie passe du côté de la singularité, qui par là même est singularité vivante et se transporte par son intérieur loin au-delà de sa | 229 | déterminité d'espèce. Mais cette singularité n'est pas en même temps individu universel, savoir, un individu chez qui l'universalité aurait tout aussi bien une effectivité extérieure : ceci tombe au contraire hors de l'organico-vivant. Mais cet individu universel, tel que l'est immédiatement l'individu des configurations naturelles, n'est pas la conscience proprement dite ; s'il était censé l'être, son existence d'individu organique et vivantSINGULIER ne serait pas obligée de basculer hors de lui.
Nous nous trouvons donc en face d'un syllogisme dans lequel l'un des deux extrêmes est la vie universelle en ce qu'elle est quelque chose d'universel, de général, ou encore, en tant que genre, tandis que l'autre extrême est cette même vie universelle mais en ce qu'elle est quelque chose de singulier, ou comme individu universel ; mais le terme médian est composé des deux autres : le premier semble s'y dépêcher comme universalité déterminée ou comme espèce, et le second comme singularité proprement dite ou singulière. — Et comme ce syllogisme ressortit tout simplement au côté de la configuration, on comprend tout aussi bien sous lui ce qui est distingué comme nature inorganique.
Dès lors que maintenant la vie universelle en tant qu'elle est l'essence simple du genre développe de son côté les différences du concept et doit les exposer comme une série des déterminités simples, celle-ci est un système de différences posées indifféremment, ou encore, une série numérique. Si l'organique, précédemment, dans la forme de la singularité, a été opposé à cette différence inessentielle qui ne contient ni n'exprime | 230 | sa nature vivante — et si la même chose exactement doit être dite à l'endroit de l'inorganique d'après la totalité de l'existence qu'il développe dans la foule de ses propriétés, désormais, c'est l'individu universel qui doit être considéré non seulement comme libre de toute articulation du genre, mais comme étant aussi le pouvoir qui le tient. Le genre, qui se décompose en espèces selon la déterminité universelle du nombre, ou qui peut aussi prendre pour principe de répartition diverses déterminités singulières de son existence, par exemple, la forme globale extérieure, la couleur, etc., subit en cette paisible occupation une violence de la part de l'individu universel, la terre, qui, en ce qu'il est la négativité universelle, fait valoir contre la systématisation du genre les différences, telles que la terre les a en soi, et dont la nature, en vertu de la substance à laquelle elles appartiennent, est une nature autre que celle du genre. Cette activité du genre devient une occupation entièrement restreinte, qu'il ne peut mener qu'au sein de ces puissants éléments, et qui, interrompue en tous lieux par leur violence effrénée, devient lacunaire et s'étiole.
Il en résulte qu'à même l'existence configurée il ne peut advenir à l'observation que la raison comme vie en général, laquelle n'a pas cependant chez soi, dans sa différenciation et de manière effective, de sériation et d'articulation rationnelle, et n'est pas un système des figures fondé en lui-même. — Si | 231 | dans le syllogisme de la configuration organique, le terme médian, où tombe l'espèce et son effectivité comme individualité singulière, avait chez lui-même les extrêmes de l'universalité intérieure et de l'individualité universelle, ce terme médian aurait à même le mouvement de son effectivité l'expression et la nature de l'universalité, et serait le développement qui se systématise lui-même. — Et ainsi la conscience, entre l'esprit universel et sa singularité, la conscience sensible, a pour terme médian le système des configurations de la conscience, comme vie de l'esprit s'ordonnant en un tout — savoir, le système qui est examiné ici, et qui a comme histoire universelle son existence objectale. Mais la nature organique n'a pas d'histoire ; elle chute immédiatement de son universel, la vie, dans la singularité de l'existence, et les moments de la déterminité simple et de la motilité singulière réunis dans cette effectivité ne produisent le devenir que comme le mouvement contingent au sein duquel chaque moment s'active à sa partie et où le tout est conservé ; mais cette activité vive et intense est limitée pour elle-même à son seul point, parce que le tout n'est pas présent en lui, et celui-ci n'y est pas présent parce qu'il n'est pas ici pour soi en tant que tout.
Outre, donc, que dans la nature organique la raison observante ne parvient qu'à la contemplation de soi-même comme vie universelle en général, | 232 | la contemplation de son développement et de sa réalisation ne lui advient que selon des systèmes différenciés de manière tout à fait générale, dont la détermination n'a pas son essence dans l'organique en tant que tel, mais réside dans l'individu universel ; et sous ces différences de la terre, selon des ordonnancements que le genre tente d'établir.
Dès lors donc que, dans sa réalité, l'universalité de la vie organique se laisse immédiatement déchoir dans l'extrême de la singularité, sans la médiation véritable qui est pour soi, la raison observante n'a comme chose devant soi que le point de vue intime ; et si la raison peut avoir l'oiseux intérêt d'observer ce point de vue intime, elle est alors limitée à décrire et raconter des opinions et des idées sur la nature qui lui passent par la tête. Il est vrai que cette liberté sans esprit du point de vue intime offrira en tous lieux des débuts de loi, des traces de nécessité, des allusions à l'ordre et la mise en série, des relations amusantes et apparentes. Mais dans la relation de l'organique aux différences de l'inorganique, qui ressortissent à l'être, c'est-à-dire aux éléments, aux zones et climats, l'observation, pour ce qui concerne la loi et la nécessité, ne dépasse pas le niveau de la grande influence. Et de même, de l'autre côté, où l'individualité n'a pas l'importance et la signification de la Terre, mais de l'Un immanent à la vie organique, mais où celui-ci, en unité immédiate avec l'universel, constitue | 233 | bien le genre, dont cependant l'unité simple pour cette même raison précisément ne se détermine que comme nombre et laisse donc libre le phénomène qualitatif — l'observation ne peut pas non plus aller bien au-delà du niveau des remarques gentilles et bien tournées, des relations intéressantes, de l'amical bon accueil au concept. Mais les remarques bien tournées ne sont pas un savoir de la nécessité, les relations intéressantes en restent à l'intérêt, lequel n'est encore pourtant que l'opinion intime qu'on a de la raison ; quant à l'amabilité avec laquelle l'individuel fait allusion à un concept, c'est une amabilité enfantine, et même carrément infantile, chaque fois qu'elle veut ou qu'elle est censée valoir quelque chose en soi et pour soi. | 234 |
b. L'observation de la conscience de soi dans sa pureté
et dans sa relation à la réalité effective extérieure.
Lois logiques et lois psychologiques.
L'observation de la nature trouve le concept réalisé dans la nature inorganique, trouve des lois dont les moments sont des choses qui se comportent en même temps comme des abstractions. Mais ce concept n'est pas une simplicité réfléchie en soi-même. La vie de la nature organique, en revanche, est uniquement cette simplicité réfléchie en soi-même, l'opposition inhérente à cette vie, en ce qu'elle est l'universel et le singulier, ne se déploie pas comme opposition dans l'essence de cette vie même ; l'essence n'est pas le genre qui se disjoindrait et se mouvrait dans son élément sans différence, et qui dans son opposition serait en même temps pour soi-même indifférencié. L'observation ne trouve ce concept libre, dont l'universalité a en soi-même, de façon tout aussi absolue, la singularité développée, que dans le concept existant comme concept, ou encore, dans la conscience de soi. | 235 |
En se retournant maintenant vers et en elle-même, et en visant le concept effectif en tant que concept libre, l'observation rencontre d'abord les lois de la pensée. Cette singularité, que la pensée est chez elle-même, est le mouvement abstrait, entièrement repris dans la simplicité, du négatif, et les lois sont à l'extérieur de la réalité. — Elles n'ont pas de réalité, ce qui signifie tout simplement qu'elles sont sans vérité. Elles ne sont d'ailleurs pas censées être une vérité totale et entière, mais être au moins, malgré tout, vérité formelle. Simplement, le purement formel sans réalité est la banale chose-de-pensée25, ou encore l'abstraction vide dépourvue chez elle de la scission, qui ne serait autre chose que le contenu. — Toutefois, de l'autre côté, dès lors qu'elles sont des lois de la pensée pure, mais que celle-ci est l'universel en soi, et donc un savoir qui a chez lui immédiatement l'être, et en celui-ci toute réalité, ces lois sont des concepts absolus et sont indissociablement les essentialités de la forme aussi bien que des choses. Étant donné que l'universalité qui se meut en soi-même est le concept simple scindé, celui-ci a, de cette manière, un contenu en soi, un contenu qui est toute espèce de contenu, sauf un être sensible. C'est un contenu qui n'est ni en contradiction avec la forme, ni le moins du monde séparé d'elle, mais au contraire est essentiellement celle-ci même, car celle-ci n'est pas autre chose que l'universel se séparant en ses purs moments.
Mais telle quelle, comme forme ou contenu qui est pour l'observation en tant qu'observation, elle reçoit la détermination | 236 | d'un contenu trouvé, donné, c'est-à-dire qui ne fait qu'être. Ce contenu devient un être au repos de relations, une foule de nécessités dissociées, qui, en tant que contenu fermement établi en soi et pour soi, sont censées avoir une vérité dans leur déterminité, et sont ainsi, de fait, soustraites à la forme. — Mais cette vérité absolue de déterminités fixes ou de nombreuses lois diverses est en contradiction avec l'unité de la conscience de soi, ou de la pensée et de la forme en général. Ce qui est énoncé comme loi établie et durable en soi, ne peut être qu'un moment de l'unité qui se réfléchit en soi ne peut apparaître que comme une grandeur disparaissante. Mais une fois arrachées par l'examen à ce contexte du mouvement et mises une à une en posture singulière, elles ne sont pas en manque de contenu, puisqu'elles ont au contraire un contenu déterminé, mais sont bien plutôt dépourvues de la forme, qui est leur essence. Et de fait, ce n'est pas parce qu'elles sont censées n'être que formelles et ne pas avoir de contenu, mais bien plutôt pour la raison contraire — savoir, que, dans leur déterminité, ou précisément en tant qu'elles sont un contenu auquel la forme est prise, elles sont censées valoir pour quelque chose d'absolu — que ces lois ne sont pas la vérité de la pensée. Dans leur vérité, en tant que moments disparaissant dans l'unité de la pensée, il faudrait les prendre comme savoir, ou comme mouvement pensant, et non comme lois du savoir. Mais l'observation n'est pas le savoir proprement dit, et ne le connaît pas, mais renverse sa nature en la | 237 | figure de l'être, c'est-à-dire, appréhende sa négativité uniquement comme des lois de cet être. — Il suffit ici d'avoir mis en évidence l'invalidité des soi-disant lois de pensée en partant de la nature universelle de la chose. Le développement plus détaillé de ce point relève de la philosophie spéculative, où elles se montrent pour ce qu'elles sont en vérité, savoir, des moments disparaissants singuliers dont seul le tout du mouvement pensant, le savoir proprement dit, est la vérité.
Cette unité négative de la pensée est pour soi-même, ou, plutôt, elle est l'être pour soi-même, le principe de l'individualité, et dans sa réalité conscience agissante. C'est pourquoi c'est vers celle-ci, comme réalité de ces lois, que la conscience observante est ensuite amenée par la nature de la chose. Dès lors que cette connexion n'est pas pour elle, la conscience estime que la pensée perdure à ses yeux dans ses lois, d'un côté, et que de l'autre côté elle obtient un autre être chez ce qui pour elle est maintenant objet, savoir, la conscience agissante qui est de telle manière pour soi qu'elle abolit l'être-autre et a son effectivité dans cette contemplation de soi-même comme étant le négatif.
S'ouvre donc pour l'observation, dans l'effectivité agissante26de la conscience, un nouveau champ. La psychologie contient la multitude de lois selon lesquelles l'esprit se comporte de manière différente face aux différents modes de son effectivité, en ce qu'elle est un être-autre | 238 | trouvé tel quel ; c'est-à-dire, pour une part, accueille ceux-ci en lui-même et devient conforme aux habitudes, aux mœurs et au type de pensée tels qu'il les trouve, en tant que ce en quoi l'esprit est à ses propres yeux, en tant qu'effectivité, objet — et, pour une autre part, se sait lui-même auto-agissant face à eux, n'en tire pour soi avec inclination et passion que du particulier et rend conforme à soi la réalité objectale ; se rapporte négativement à soi-même, dans le premier cas, en tant que singularité, et dans le second cas, en tant qu'être universel. — Sous le premier aspect, l'autonomie donne uniquement à l'élément trouvé tel quel la forme de l'individualité consciente en général, et en reste, pour ce qui concerne le contenu, à l'intérieur de l'effectivité universelle qu'elle a trouvée telle quelle ; sous le second aspect, en revanche, elle donne à celle-ci au moins une modification caractéristique, qui ne contredit pas son contenu essentiel, ou encore même, une modification par laquelle l'individu, en tant qu'effectivité particulière et que contenu caractéristique, s'oppose à elle — et devient crime27, soit en abolissant celle-ci sur un mode uniquement individuel, soit en faisant la chose sur un mode universel, et donc pour tous, en produisant un autre monde, un autre droit, d'autres lois et mœurs en lieu et place de ceux et celles qui existent déjà.
La psychologie observante, qui énonce d'abord ses perceptions des modes universels qu'elle remarque chez la conscience en action, découvre un grand nombre de facultés, d'inclinations et de passions, et dès lors que le souvenir | 239 | de l'unité de la conscience de soi ne se laisse pas refouler lors du récit énumératif de toute cette collection, il faut bien qu'elle continue ainsi jusqu'à s'étonner que dans l'esprit, ainsi qu'en un sac, il puisse coexister une si grande quantité de choses à ce point hétérogènes et contingentes les unes par rapport aux autres, compte tenu en particulier de ce qu'elles ne se montrent pas comme des choses mortes et statiques, mais comme des mouvements sans trêve ni repos.
Dans la longue litanie de ces diverses facultés, l'observation est du côté universel ; tandis que l'unité de ces multiples capacités est le côté opposé à cette universalité : l'individualité effective. — Mais appréhender et décrire à leur tour par le menu les diverses individualités effectives en sorte qu'il apparaisse que tel homme a plus d'inclination pour ceci, tel autre pour cela, que l'un a plus d'entendement que l'autre, est une activité qui présente moins d'intérêt encore que d'énumérer les espèces d'insectes, de mousses, etc. Ceux-ci, en effet, donnent à l'observation le droit de les prendre un à un et sans concept, parce qu'ils ressortissent essentiellement à l'élément de la singularité contingente. En revanche, prendre, sans aucun esprit, l'individualité consciente comme phénomène singulier qui est, comporte ceci de contradictoire que son essence est l'universel de l'esprit. Mais dès lors que son appréhension la fait entrer en même temps dans la forme de l'universalité, elle trouve sa loi et semble maintenant viser une fin de raison et s'affairer à une occupation nécessaire. | 240 |
Les moments qui constituent le contenu de la loi sont d'un côté l'individualité proprement dite, et de l'autre sa nature inorganique universelle, c'est-à-dire, les facteurs et circonstances données, la situation, les coutumes, les mœurs, la religion, etc. C'est à partir d'eux qu'il faut concevoir l'individualité déterminée. Ils contiennent aussi bien du déterminé que de l'universel, et sont en même temps une donnée déjà là qui s'offre à l'observation et qui s'exprime, de l'autre côté, dans la forme de l'individualité.
Or, la loi de ce rapport des deux côtés devrait bien contenir le genre d'effet et d'influence que ces circonstances déterminées exercent sur l'individualité. Mais cette individualité, c'est précisément tout aussi bien d'être l'universel et donc de confluer paisiblement et de manière immédiate avec l'universel donné et déjà là, les mœurs, les coutumes, etc., et de se conformer à elles, que de s'y rapporter antagoniquement, et, ou bien plutôt, de les invertir — de même que de se comporter envers ces facteurs dans leur singularité avec une indifférence complète, de ne pas les laisser agir sur soi, et de ne pas être actif envers eux. C'est pourquoi ce qui est censé avoir une influence sur l'individualité, et le genre d'influence en question — ce qui, à proprement parler, signifie la même chose — ne dépend que de l'individualité elle-même ; c'est ce qui fait que la proposition : telle individualité est devenue telle individualité déterminée, ne signifie rien d'autre que : elle a déjà été cela. Circonstances, situation, mœurs, etc., qui d'un côté sont montrées | 241 | comme données, et d'autre part sont montrées dans cette individualité déterminée, n'expriment que l'essence indéterminée de celle-ci, dont nous ne nous occupons pas ici. Si ces circonstances, façon de penser, mœurs, état du monde, etc., n'avaient pas, tout simplement, été, l'individu ne serait certes pas devenu ce qu'il est ; car tous ceux qui se trouvent dans cet état du monde sont cette substance universelle. — Mais tel que cet état du monde s'est particularisé dans tel individu — et c'est celui-là que nous sommes censés concevoir — il faudrait qu'il se soit particularisé en soi et pour soi-même, et qu'il ait agi sur un individu dans cette déterminité qu'il se serait donnée ; c'est seulement ainsi qu'il aurait fait de celui-ci l'individu déterminé qu'il est. Si l'extérieur s'était constitué en soi et pour soi tel qu'il apparaît chez l'individualité, celle-ci serait alors conçue à partir de lui. Nous aurions alors une double galerie d'images dont l'une serait le reflet de l'autre ; l'une étant la galerie de la déterminité et de la délimitation complète de circonstances extérieures, l'autre cette même galerie transposée dans la modalité qu'ont ces circonstances dans l'essence consciente ; la première étant la surface de la sphère, la seconde, étant le point central qui les représente en lui-même.
Mais la surface de la sphère, le monde de l'individu, a immédiatement la signification équivoque d'être ou bien monde et situation étant en soi et pour soi, et monde de l'individu, dans la mesure où celui-ci aurait seulement conflué avec ce monde, l'aurait laissé entrer | 242 | en lui tel qu'il est, et ne se serait comporté à son égard que comme conscience formelle — ou alors d'être monde de l'individu de la manière où le donné a été inverti par lui. — Comme, au nom de cette liberté, l'effectivité est capable de cette signification double, le monde de l'individu ne peut être conçu qu'à partir de celui-ci lui-même, et l'influence sur l'individu de l'effectivité représentée comme étant en soi et pour soi reçoit absolument par lui le sens opposé, selon lequel ou bien l'individu laisse passer chez lui sans faire obstacle tout le flot de l'effectivité qui y influe, ou bien l'interrompt et le retourne. Mais ceci fait de la nécessité psychologique un mot si vide de sens qu'il existe une possibilité absolue que cela même qui est censé avoir eu cette influence aurait fort bien pu ne pas l'avoir.
Disparaît ainsi l'être qui serait en soi et pour soi et qui était censé constituer l'un des côtés, savoir même : le côté universel d'une loi. L'individualité est ce que son monde, en tant qu'il est le sien, est ; elle est elle-même le cercle de son activité, où elle s'est elle-même représentée comme effectivité, et n'est en fin de compte tout bonnement que l'unité de l'être donné déjà là et de l'être qui a été fait, unité dont les côtés ne se disjoignent pas, comme dans la représentation de la loi psychologique, en monde déjà donné en soi et en individualité qui est pour soi ; ou encore, si l'on veut par exemple considérer chaque côté pour soi, nous ne trouvons aucune nécessité ni loi de leur relation l'un pour l'autre. | 243 |
c. Observation de la relation de la conscience de soi à son effectivité immédiate.
Physiognomonie et phrénologie.
L'observation psychologique ne trouve pas de loi du rapport de la conscience de soi à l'effectivité, ou au monde qui lui est opposé, et elle est repoussée par l'indifférence mutuelle de l'une et de l'autre jusqu'à la déterminité caractéristique de l'individualité réelle qui est en soi et pour soi-même, ou qui contient, anéantie dans leur médiation absolue, l'opposition de l'être pour soi et de l'être en soi. Elle est l'objet qui naît maintenant pour l'observation, ou auquel celle-ci passe.
L'individu est en soi et pour soi-même : il est pour soi, ou encore, il est activité libre ; mais il est aussi en soi ; ou encore, il a lui-même un être déterminé originel — déterminité qui, selon le concept, est la même chose que ce que la psychologie voulait trouver en dehors de lui. C'est donc chez lui-même que surgit l'opposition qui consiste à être ce double, à la fois le mouvement de la | 244 | conscience et l'être fermement arrêté d'une effectivité phénoménale qui est chez lui immédiatement la sienne. Cet être, le corps charnel de l'individualité déterminée, est l'originarité de celle-ci, son « ne pas avoir fait ». Mais dès lors que l'individu n'est en même temps que ce qu'il a fait, son corps est aussi l'expression de soi-même qu'il a lui-même produite, est en même temps un signe qui n'est pas resté une chose immédiate, mais à même lequel il donne seulement à reconnaître ce qu'il est au sens où il met à l'œuvre sa nature originelle.
Si nous examinons les moments présents ici en relation avec le point de vue précédent, nous avons ici une figure humaine universelle, ou du moins la figure universelle d'un climat, d'une partie du monde, d'un peuple, tout comme nous avions auparavant les mêmes mœurs et la même culture universelles. S'ajoutent à cela les circonstances particulières et la situation au sein de l'effectivité universelle ; ici cette effectivité particulière a le statut de formation particulière de la figure de l'individu. — De l'autre côté, de même qu'auparavant la libre activité de l'individu et l'effectivité étaient posées comme siennes face à la réalité déjà existante, nous avons ici la figure comme expression de son effectivation posée par lui-même, les traits et les formes de son essence auto-agissante. Mais l'effectivité tant universelle que particulière, que l'observation trouvait antérieurement à l'extérieur de l'individu, est ici l'effectivité de celui-ci, son corps, le corps avec lequel il est né, et c'est précisément dans ce corps qu'échoit | 245 | l'expression qui ressortit à son activité, à ce qu'il fait. Dans l'examen psychologique, l'effectivité qui est en soi et pour soi et l'individualité déterminée étaient censées être référées l'une à l'autre ; mais ici c'est l'individualité déterminée tout entière qui est l'objet de l'observation ; et chaque côté de son opposition est lui-même ce tout. Il n'y a donc pas que l'être originel, le corps avec lequel on est né, qui ressortit au tout extérieur, mais également tout aussi bien la formation de celui-ci, qui ressortit à l'activité de l'intérieur. Le corps est l'unité de l'être non formé et de l'être formé, et l'effectivité de l'individu entièrement pénétrée par l'être pour soi. Ce tout, qui ressaisit en lui-même les parties fixes originelles déterminées, et les traits qui ne naissent que par l'effet de l'activité, est, et cet être est expression de l'intérieur, de l'individu posé comme conscience et mouvement. — Et pareillement, cet intérieur n'est plus l'auto-activité formelle, sans contenu ou indéterminée, dont le contenu et la déterminité résideraient comme antérieurement dans les circonstances extérieures, mais il est un caractère originaire déterminé en soi, dont la forme n'est que l'activité. C'est donc entre ces deux côtés qu'est examiné ici le rapport afin de savoir comment il doit être déterminé et ce qu'il faut entendre par cette expression de l'intérieur dans l'extérieur.
Cet extérieur ne rend d'abord l'intérieur visible que comme organe, ou encore, tout simplement, en fait un être pour autre chose ; l'intérieur, en effet, dans la mesure où il est dans l'organe, | 246 | c'est l'activité elle-même. La bouche qui parle, la main qui travaille, et, si l'on veut encore les rajouter, les jambes qui vont avec, sont les organes de l'effectivation et de l'accomplissement, qui ont chez eux l'agir en tant qu'agir, ou l'intérieur en tant que tel ; tandis que l'extériorité que celui-ci acquiert grâce aux organes est l'acte en tant qu'effectivité dissociée de l'individu. Le langage et le travail sont des manifestations extérieures dans lesquelles l'individu ne se garde et ne se possède plus en lui-même, mais laisse l'intérieur sortir tout entier de lui-même, et l'abandonne à autre chose. C'est pourquoi on peut dire tout aussi bien que ces manifestations extérieures expriment trop l'intérieur, et qu'elles l'expriment trop peu ; trop — parce que c'est l'intérieur lui-même qui éclate en elles, qu'il ne demeure pas d'opposition entre elles et lui ; elles ne donnent pas seulement une expression de l'intérieur, mais donnent immédiatement cet intérieur lui-même ; trop peu — parce que dans la parole et l'action, l'intérieur fait de soi un autre, et donc s'abandonne ainsi à l'élément de la métamorphose, qui invertit le mot prononcé et l'acte accompli et en fait autre chose que ce qu'ils sont en soi et pour soi en tant qu'actions de tel individu déterminé. Non seulement les œuvres produites par les actions perdent, par cette extériorité de l'intervention d'autres, leur caractère d'êtres durables face à d'autres individualités ; mais en se rapportant à l'intérieur qu'elles contiennent comme un extérieur mis à part et indifférent, elles peuvent | 247 | être en tant qu'intérieur, par le fait de l'individu lui-même, autre chose que ce qu'elles apparaissent — soit qu'il fasse d'elles intentionnellement pour l'apparition phénoménale autre chose que ce qu'elles sont en vérité — soit qu'il soit lui-même trop maladroit pour se donner la façade qu'il voulait, à proprement parler, et pour la fixer de telle manière que son œuvre ne puisse être invertie par d'autres en autre chose que ce qu'elle est. L'activité, donc, en tant qu'œuvre accomplie, a cette double signification contraire d'être soit l'individualité intérieure et non son expression, ou bien, en tant qu'extérieur, d'être une effectivité libre, dégagée de l'intérieur, quelque chose de tout à fait différent de lui. En vertu de cette équivocité, nous devons regarder autour de nous si nous ne voyons pas l'intérieur tel qu'il est encore, mais cette fois visible et extérieur, chez l'individu lui-même. Or, dans l'organe, il n'est que comme activité immédiate proprement dite qui parvient à son extériorité dans l'acte accompli, lequel représente ou ne représente pas l'intérieur. Considéré selon cette opposition, l'organe ne nous octroie donc pas l'expression qui est recherchée.
Si seulement maintenant la figure extérieure, dans la mesure où elle ne serait pas organe ou activité, donc en tant que Tout au repos, pouvait exprimer l'individualité intérieure, elle se comporterait donc comme une chose bien existante qui accueillerait tranquillement l'intérieur, comme quelque chose d'étranger, dans son existence passive, et par là même deviendrait le signe de celui-ci — c'est-à-dire une expression extérieure, contingente, dont le côté effectif serait pour soi sans signification | 248 | — un langage dont les sons et les combinaisons de sons ne sont pas la chose même, mais lui sont rattachés par le libre choix arbitraire28 et sont pour elle contingents.
Ce genre de liaison arbitraire opérée entre des choses qui sont l'une pour l'autre un extérieur ne donne pas une loi. La physiognomonie cependant est censée se distinguer d'autres arts médiocres et d'autres disciplines de la pire espèce en ce qu'elle examine l'individualité déterminée dans l'opposition nécessaire d'un intérieur et d'un extérieur, du caractère en tant qu'essence consciente, et de ce même caractère en tant que figure qui est, et réfère ces moments l'un à l'autre tels qu'ils sont référés l'un à l'autre par leur concept et doivent donc constituer le contenu d'une loi. Tandis que dans l'astrologie, la chiromancie et autres sciences du même genre, il n'y a semble-til que de l'extérieur référé à de l'extérieur, on met en relation n'importe quoi à quelque chose qui lui est étranger. Telle constellation à la naissance, et quand on ramène cet extérieur plus près du corps proprement dit, tels traits de la main sont des moments extérieurs pour une vie plus ou moins longue, et pour la destinée de l'homme singulier en général. En tant qu'extériorités ils ont un rapport d'indifférence les uns aux autres, et n'ont pas l'un pour l'autre la nécessité qui est censée résider dans la relation d'un extérieur et d'un intérieur.
Il est vrai que la main ne semble pas tant être pour le destin quelque chose d'extérieur que | 249 | se rapporter à lui, au contraire, comme quelque chose d'intérieur. Le destin, en effet, n'est à son tour lui-même que l'apparition phénoménale de ce que l'individualité déterminée est en soi en tant que déterminité originelle intérieure. Or, pour savoir ce que cette individualité est en soi, le chiromancien de même que le physiognomoniste usent d'un procédé plus rapide que Solon, par exemple, qui estimait ne pouvoir savoir cela qu'à partir du cours de l'existence tout entière et qu'une fois ce cours achevé ; lui considérait le phénomène, tandis qu'eux considèrent l'en soi. Mais que la main expose nécessairement l'en soi de l'individualité en regard de son destin est une chose qui se voit aisément au fait qu'à côté de l'organe du langage elle est, plus qu'autre chose, ce par quoi l'homme se fait lui-même apparaître et être effectivement. Elle est le maître d'œuvre inspiré de son bonheur ; on peut dire d'elle qu'elle est ce que l'homme fait, car c'est chez elle en tant qu'organe actif de son auto-accomplissement qu'il est présent comme celui qui anime, et dès lors qu'il est originairement son propre destin, elle exprimera donc cet en soi.
De cette détermination, selon laquelle l'organe de l'activité est tout aussi bien un être que l'agir en lui, ou que l'être en soi intérieur lui-même a chez lui une présence et un être pour autre chose, résulte un point de vue sur celui-ci tout à fait différent du précédent. Si, en effet, les organes se révélaient comme ne pouvant être pris pour des expressions de l'intérieur, tout simplement parce que, en eux, l'agir est présent | 250 | en tant qu'agir, mais que l'agir en tant qu'acte accompli n'est qu'extérieur, et que de cette manière intérieur et extérieur tombent l'un à l'écart de l'autre, et sont ou peuvent être des étrangers l'un pour l'autre, il faut, d'après la détermination examinée, que l'organe soit de nouveau pris aussi comme terme médian de l'un et l'autre, dès lors que le fait précisément que l'agir soit présent chez lui constitue en même temps une extériorité de cette activité, savoir, et au demeurant, une autre extériorité que celle de l'acte accompli, laquelle, en effet, demeure à l'individu et chez lui. — Or, ce médian et cette unité de l'intérieur et de l'extérieur sont d'abord eux-mêmes, également, extérieurs ; mais dorénavant cette extériorité est en même temps accueillie dans l'intérieur ; elle fait face, en tant qu'extériorité simple, à l'extériorité dispersée, laquelle ou bien n'est qu'une œuvre ou un état singulier contingent pour l'individualité tout entière, ou bien alors, en tant qu'extériorité totale, est le destin éclaté, éparpillé en une multitude d'œuvres et d'états. Par conséquent, les simples traits de la main, et pareillement le timbre et le volume de la voix, en tant que déterminité individuelle du langage — et ce langage à son tour, tel qu'il acquiert par la main une existence plus assurée que par la voix, l'écriture, dans sa particularité manuscrite — tout ceci est expression de l'intérieur, et de telle manière que cette expression, en tant que l'extériorité simple, se retrouve à son tour face à l'extériorité multiple de l'action et du destin, se comporte face à ceux-ci comme un intérieur. — Si donc on prend d'abord la nature déterminée et la caractéristique innée | 251 | de l'individu, en même temps que ce qu'il est devenu du fait de la culture, pour l'intérieur, pour l'essence de l'action et du destin, cet individu a d'abord son apparition phénoménale et son extériorité en l'espèce de sa bouche, de sa main, de sa voix, de son écriture, ainsi que des autres organes et de leurs déterminités permanentes ; et c'est seulement alors, après cela, qu'il s'exprime plus avant vers l'extérieur en s'appuyant sur son effectivité dans le monde.
Or, comme ce médian se détermine comme la manifestation extérieure qui est en même temps reprise dans l'intérieur, son existence n'est pas bornée à l'organe immédiat de l'agir, il est au contraire tout simplement le mouvement et la forme du visage et de la configuration en général, en ce qu'ils n'accomplissent rien. Ces traits et leur mouvement sont, selon ce concept, l'activité retenue qui demeure chez l'individu, et, selon sa relation à l'activité effective, la surveillance et l'observation propre de cette activité, l'expression extérieure comme réflexion sur l'expression effective. — L'individu n'est pas muet pendant que et sur le fait qu'il agit extérieurement, parce que ce faisant il est en même temps réfléchi en soi, et il manifeste extérieurement cet être réfléchi en soi ; cette activité théorique, ou le langage que l'individu se tient avec lui-même sur elle, est aussi perceptible pour d'autres oreilles, car ce langage intérieur est lui-même une expression extérieure.
C'est donc à même cet intérieur, qui demeure un intérieur dans son expression extérieure, que l'être-réfléchi | 252 | de l'individu est observé depuis son effectivité, et il faut voir maintenant ce qu'il en est de cette nécessité qui est posée dans cette unité. — Cet être réfléchi est d'abord différent de l'acte proprement dit, et peut donc être quelque chose d'autre et être pris pour quelque chose d'autre que ce qu'est cet acte ; on voit au visage de quelqu'un si, pour lui, ce qu'il dit ou fait est sérieux ou pas. — Mais à l'inverse, ce qui est censé être expression de l'intérieur est en même temps une expression qui est, et retombe soi-même par là dans la détermination de l'être qui est absolument contingent pour l'essence consciente de soi. C'est pourquoi il s'agit certes d'une expression, mais en même temps aussi uniquement en tant que signe, si bien que ce à quoi ressemble ce qui exprime le contenu exprimé est parfaitement indifférent à ce dernier. Certes, dans cette apparition phénoménale, l'intérieur est un Invisible visible, mais sans être rattaché à elle ; il peut tout aussi bien être dans un autre phénomène, qu'un autre intérieur peut être dans le même phénomène. — Lichtenberg a donc raison de dire : quand bien même le physiognomoniste mettrait un jour la main sur l'homme, il suffirait à celui-ci d'une seule brave petite décision pour se rendre de nouveau incompréhensible pendant des millénaires29. — De même que, dans le rapport précédent, les circonstances présentes étaient une chose qui est, à quoi l'individualité empruntait ce qu'elle pouvait et ce qu'elle voulait, soit en s'abandonnant entièrement à elle, soit en l'invertissant, raison pour laquelle cet être ne contenait pas la nécessité et l'essence | 253 | de l'individualité — de même ici l'être immédiat phénoménal de l'individualité est un être qui, ou bien exprime son être-réfléchi depuis la réalité effective et son être en soi-même, ou bien n'est pour elle qu'un signe qui est indifférent à ce qui est désigné, et donc, en vérité, ne désigne rien. Il est à ses yeux aussi bien son visage que le masque qu'elle porte et peut enlever. — Elle pénètre toute sa figure, se meut, parle en elle ; mais cette existence tout entière, cet être-là, sort de ce rapport et vient aussi bien se mettre, comme un être indifférent, face à la volonté et à l'action ; l'individualité détruit chez cet être le sens qu'il avait auparavant, qui était d'avoir chez lui l'être-réfléchi en soi ou l'essence vraie de celle-ci, et la place, au contraire, à l'inverse, dans la volonté et dans l'acte.
L'individualité abandonne l'être-réfléchi en soi qui est exprimé dans les traits, et place son essence dans l'œuvre. En cela, elle contredit le rapport établi par l'instinct rationnel qui s'installe dans l'observation de l'individualité consciente de soi en vue de ce qui est censé être son intérieur et son extérieur. Cette perspective nous amène à la pensée proprement dite qui est au principe de la science — si l'on veut employer ce mot — physiognomonique. L'opposition à laquelle cette observation aboutit, est quant à la forme l'opposition du pratique et du théorique, l'un et l'autre étant posés en l'espèce au sein du pratique proprement dit — de l'individualité qui | 254 | s'effective dans l'action, celle-ci étant prise au sens le plus général, et de cette même individualité, telle que dans cette action elle est en même temps hors de celle-ci, réfléchie en soi, l'action étant son objet. L'observation enregistre cette opposition selon le même rapport inversé où celle-ci se détermine dans le phénomène. Ce qui vaut à ses yeux pour l'extérieur inessentiel c'est l'acte lui-même et l'œuvre, que ce soit celle du langage ou celle d'une effectivité plus solidement établie — tandis qu'elle tient pour l'intérieur essentiel l'être en soi-même de l'individualité. Entre les deux côtés que la conscience pratique a chez elle, entre l'envisagement et l'acte, entre l'opinion intime sur son action, et l'action elle-même, l'observation choisit le premier côté comme intérieur vrai — et celui-ci est censé avoir son expression extérieure plus ou moins inessentielle en l'acte, et son expression extérieure vraie, par contre, en sa figure. Cette dernière manifestation extérieure est la présence sensible immédiate de l'esprit individuel ; l'intériorité qui est censée être la vraie, est la propriété caractéristique de l'intention et la singularité de l'être pour soi ; l'une et l'autre sont l'esprit tel qu'on estime intimement qu'il est. Ce que l'observation a pour objets, c'est donc de l'existence conjecturée, et c'est parmi cela qu'elle cherche des lois.
L'opinion immédiate qu'on a quant à une présence elle-même conjecturée de l'esprit est la physiognomonie naturelle, le jugement hâtif sur la nature intérieure et sur le caractère de la figure de celle-ci quand on la voit pour la première fois. L'objet de cette opinion est du genre de ceux dans l'essence desquels il est | 255 | d'être en vérité autre chose que simplement un être immédiat sensible. Certes, c'est aussi précisément cet être-réfléchi en soi dans le sensible à partir de lui, qui est présent, c'est la visibilité en tant que visibilité de l'invisible qui est objet de l'observation. Mais c'est précisément cette présence immédiate sensible qui est l'effectivité de l'esprit, telle qu'elle est seulement pour l'opinion intime ; et on voit l'observation venir traîner par là avec toute sa présumée existence, avec la physionomie, l'écriture des gens, le son de leur voix, etc. — Elle réfère ce genre d'existence à ce genre, précisément, d'intérieur présumé. Ce n'est pas l'assassin, le voleur qui sont censés être reconnus, mais l'aptitude à l'être ; la déterminité abstraite bien établie se perd ipso facto dans la déterminité concrète infinie de l'individu singulier, laquelle requiert maintenant des effigies plus empreintes d'art que ne le sont ces qualifications. Ce genre d'effigies empreintes d'art en disent sans doute plus que les qualificatifs assassin, voleur, ou encore généreux, non corrompu, etc., mais pour la fin qu'elles visent, savoir, d'énoncer l'être qu'on présume ou l'individualité singulière, elles n'en disent, loin s'en faut, pas assez ; aussi peu en tout cas que les effigies de la figure, qui vont au-delà du front aplati, du grand nez, etc. Car la figure singulière, comme la conscience de soi singulière, en tant qu'être « qu'on présume », est inénonçable. La science de la connaissance des hommes, qui se penche sur l'homme qu'on estime, à tort, être, tout comme celle de la physiognomonie, qui se penche sur sa présumée et ineffective effectivité et prétend élever au niveau du savoir le jugement sans conscience de la physiognomonie | 256 | naturelle, est donc quelque chose qui n'a ni fin, ni fond, qui ne peut jamais parvenir à dire ce qu'elle veut dire, précisément parce qu'elle ne fait que vouloir dire, qu'avoir un point de vue intime, et que son contenu n'est que point de vue intime.
Les lois que cette science tâche de trouver sont des relations entre ces deux côtés présumés, et ne peuvent donc elles-mêmes être rien d'autre qu'un point de vue intime vide. De même, étant donné que ce pseudo-savoir conjecturé qui se met en besogne de s'occuper de l'effectivité de l'esprit a justement pour objet que l'esprit sortant de son existence sensible se réfléchisse en soi, et que l'existence déterminée est pour lui une contingence indifférente, il est bien obligé de savoir immédiatement qu'avec les lois qu'il a découvertes rien n'est dit, et qu'au contraire, à dire vrai, il n'y a là que pur et simple bavardage creux, ou que quelqu'un a simplement donné son opinion intime, expression qui a ceci de vrai qu'elle exprime la chose pour ce qu'elle est : dire son opinion, et ce faisant ne pas faire savoir la chose elle-même, mais seulement une opinion qui vient de soi. Mais quant à leur contenu, ces observations ne sauraient se distinguer de celles-ci : « Il pleut chaque fois que c'est la foire annuelle, dit le boutiquier ; et aussi chaque fois que je mets du linge à sécher, dit la ménagère30. »
Lichtenberg, qui caractérise ainsi l'observation physiognomonique, dit encore31 : « Si quelqu'un disait à un autre ; “Tu agis certes comme un homme | 257 | honnête, mais je vois à ta figure que tu te forces, et que dans ton cœur tu es un gredin” ; pour sûr, le brave garçon qui entendrait ce genre d'apostrophe y répliquerait, et ceci d'un bout à l'autre de la terre, par une bonne paire de claques. » — Si cette réplique touche juste, c'est parce qu'elle est la réfutation du premier présupposé d'une science du point de vue intime de ce genre, savoir, que la réalité effective de l'homme, c'est son visage, etc. — L'être vrai de l'homme est bien plutôt son acte ; c'est en cet acte que l'individualité est effective, et c'est lui qui abolit l'intimement conjecturé dans ses deux côtés. D'abord le conjecturé en tant qu'être corporel au repos ; l'individualité se présente au contraire dans l'action comme l'essence négative qui n'est qu'en abolissant de l'être. Et ensuite, l'acte abolit pareillement l'inénonçabilité de l'opinion en regard de l'individualité consciente de soi, qui, dans l'opinion, est une individualité infiniment déterminée et déterminable. Dans l'acte accompli, cette mauvaise infinité est anéantie. L'acte est quelque chose de déterminé simplement, d'universel, susceptible d'être saisi dans une abstraction ; il est meurtre, vol, ou bienfait, acte de bravoure, etc., et on peut dire de lui ce qu'ilest. Il est ceci, et son être n'est pas seulement un signe, mais la chose elle-même. Il est ceci, et l'homme individuel est ce que cet acte est ; dans la simplicité de cet être, l'homme individuel est essence qui est pour d'autres, essence universelle, et cesse d'être seulement essence conjecturée par un point de vue intime. | 258 | Certes il n'y est pas posé en tant qu'esprit ; mais dès lors qu'il est question de son être en tant qu'être, et que d'un côté l'être double, celui de la figure et celui de l'acte, se fait face à lui-même, et que l'une comme l'autre sont censés être son effectivité, on peut seulement affirmer de l'acte, au contraire, qu'il est son être authentique, et on ne peut pas le dire de sa figure qui était censée exprimer ce qu'il a intimement en tête en commettant ses actes, ou ce qu'on estimait qu'il ne pouvait que faire. Pareillement, dès lors que de l'autre côté, son œuvre et sa possibilité intérieure, son aptitude ou son intention, se font face, c'est cette œuvre seule qui doit être regardée pour son effectivité vraie, même s'il se fait lui-même des illusions à ce sujet, et, si, revenu de son action en soi-même, il estime être autre chose dans cet intérieur que dans l'acte. L'individualité qui se confie à l'élément objectal en devenant une œuvre s'abandonne certes, ce faisant, à la perspective d'être modifiée et invertie. Mais ce qui fait le caractère de l'acte, c'est précisément de savoir s'il est un être effectif qui se maintient, ou seulement une œuvre conjecturée, qui périt en soi et s'annule. L'objectalité ne change pas l'acte lui-même, mais montre seulement ce qu'il est, c'est-à-dire s'il est ou s'il n'est rien. — Le démembrement de cet être en intentions, et les autres finesses du même ordre, par lesquelles l'homme, c'est-à-dire son acte, est censé être ramené à l'explication d'un être conjecturé par un point de vue intime, quelles que soient par ailleurs les intentions particulières qu'il puisse lui-même aller créer quant à son effectivité doivent | 259 | demeurer l'apanage de l'oisiveté de l'opinion, laquelle, si elle veut mettre en œuvre sa sagesse sans actes, dénier à l'homme agissant le caractère de raison, et le maltraiter de telle manière qu'au lieu de l'acte elle veuille au contraire proclamer la silhouette et les traits du visage pour l'être de cet homme, doit bien s'attendre à la réplique que nous évoquions ci-dessus, qui lui démontrera que la silhouette n'est pas l'en soi, mais peut être au contraire un objet auquel on peut appliquer un certain traitement.
Si maintenant nous regardons dans sa totalité l'ensemble des rapports en général dans lesquels l'individualité consciente de soi peut être observée dans son face-à-face avec son extérieur, nous verrons revenir une chose dont l'observation doit encore se faire son objet. Dans la psychologie, c'est l'effectivité extérieure des choses qui est censée avoir chez l'esprit sa contre-image à elle-même consciente et rendre celui-ci concevable. Dans la physiognomonie, en revanche, l'esprit est censé connu dans son extérieur propre comme dans un être qui soit le langage : l'invisibilité visible de son essence. Reste encore la détermination du côté de l'effectivité selon lequel l'individualité exprimerait son essence à même son effectivité immédiate, ferme, sa pure et simple existence. — Cette dernière relation se distingue donc de la relation physiognomonique en et par ceci que cette dernière est la présence parlante de l'individu qui dans sa manifestation extérieure agissante expose en même temps celle qui se réfléchit et s'examine en soi-même, manifestation extérieure | 260 | qui est elle-même mouvement, traits au repos qui sont eux-mêmes essentiellement un être intermédié. Tandis que dans la détermination que nous devons encore examiner, l'extérieur est enfin une effectivité entièrement au repos, statique, qui n'est pas en elle-même signe discourant, mais s'expose pour soi-même séparément du mouvement conscient de soi et est comme pure et simple chose.
Il est clair pour commencer, quant à la relation de l'intérieur à cette sienne extériorité, qu'elle semble devoir être conçue comme rapport de connexion causale, dès lors que ce rapport, c'est la relation, en tant que relation nécessaire de quelque chose qui est en soi à une autre chose qui est en soi.
Or, pour que l'individualité spirituelle ait de l'effet sur le corps, il faut qu'en tant que cause elle soit elle-même corporelle. Mais l'instance corporelle dans laquelle elle est en tant que cause est l'organe, non point celui de l'activité à l'égard de l'effectivité extérieure, mais de l'activité en soi-même de l'essence consciente de soi, n'agissant à l'extérieur qu'à l'égard de son propre corps. On ne peut pas prévoir tout de suite quels peuvent être ces organes. Si l'on pensait seulement aux organes en général, on aurait vite sous la main l'organe du travail en général, et pareillement l'organe de l'instinct sexuel, etc. Seuls les organes de ce genre doivent être considérés comme des outils ou comme des parties que l'esprit, en ce qu'il est l'un des extrêmes, a comme médian par rapport à l'autre extrême, qui est objet extérieur. | 261 | Tandis qu'ici nous entendons un organe dans lequel l'individu conscient de soi en tant qu'extrême face à sa propre effectivité, qui lui est opposée, se conserve pour soi, qui n'est pas un organe tourné en même temps vers l'extérieur, mais réfléchi dans son action, un organe chez qui le côté de l'être n'est pas un être pour autre chose. Certes, dans la relation physiognomonique, l'organe est également considéré comme une existence réfléchie en soi et qui commente verbalement l'activité ; mais cet être est quelque chose d'objectal, et le résultat de l'observation physiognomonique est que la conscience de soi vient faire face précisément à cette sienne effectivité comme à quelque chose d'indifférent. Cette indifférence disparaît en ceci que cet être réfléchi en soi est lui-même agissant avec efficience ; et par là même cette existence acquiert une relation nécessaire avec lui ; mais pour que cet être-réfléchi en soi soit efficient sur l'existence, il faut qu'il ait lui-même un être, mais non point à proprement parler un être objectal, et c'est en tant que cet organe qu'il doit être mis en évidence.
Or, dans la vie commune, la colère, par exemple, comme activité intérieure de ce genre, est située dans le foie ; Platon attribue même à celui-ci quelque chose de plus élevé encore, qui serait même selon certains ce qu'il a de plus haut, savoir, la prophétie, ou le don d'énoncer le sacré et l'éternel d'une manière qui n'est pas celle de la raison. Simplement, le mouvement qui est celui de l'individu dans le foie, dans le cœur, etc., ne peut être regardé pour le mouvement entièrement réfléchi en soi | 262 | de celui-ci, mais il y est au contraire de telle manière qu'il est déjà imprimé dans son corps et en tire une existence animale qui se tourne vers l'extériorité.
Le système nerveux, en revanche, est le repos immédiat de l'organique dans son mouvement. Certes, les nerfs proprement dits sont à leur tour les organes de la conscience déjà enfoncée dans la direction de l'extérieur qui est la sienne ; mais le cerveau et la moelle épinière peuvent être considérés comme la présence immédiate demeurant en soi — la présence non objectale, et qui ne va pas non plus au-dehors — de la conscience de soi. Dans la mesure où le moment de l'être, que cet organe a, est un être pour autre chose, est existence, cet être est un être mort, il n'est plus présence de la conscience de soi. Mais cet être en soi-même est, selon son concept, un fluide où les cercles qui se dessinent à sa surface se dissolvent immédiatement, et où aucune différence ne s'exprime comme différence qui est. Dans le même temps, de même que l'esprit lui-même n'est pas une chose abstraitement simple, mais un système de mouvements où il se différencie en moments, tout en demeurant lui-même libre au sein de cette différenciation, et de même qu'il articule en général son corps en différents dispositifs d'exécution, et ne destine qu'à un seul dispositif une partie singulière, on peut également se représenter que l'être fluide de son être en soi-même est un être articulé ; et il semble qu'il faille bien se le représenter ainsi, parce que l'être-réfléchi en soi de l'esprit dans le cerveau n'est lui-même à son tour qu'un élément médian de son essence pure et de son articulation corporelle, | 263 | élément médian qui, ainsi, du fait de la nature de l'une et de l'autre, et donc du côté de cette dernière, doit avoir à son tour chez lui aussi l'articulation qui est.
L'être spirituel-organique a en même temps le côté nécessaire d'une existence au repos qui perdure ; en tant qu'extrême de l'être pour soi, il doit prendre du recul, et avoir ce côté face à soi comme l'autre extrême, qui dès lors est l'objet sur lequel il agit en tant que cause. Si donc, maintenant, le cerveau et la moelle épinière sont cet être pour soi corporel de l'esprit, le crâne et la colonne vertébrale sont, outre cela, l'autre extrême excrété, savoir, la chose immuable et statique. — Mais dès lors qu'il ne vient à l'esprit de chacun, songeant à la localisation proprement dite de l'existence de l'esprit, que la tête et pas le dos, nous pouvons nous contenter, dans l'examen d'un savoir comme celui auquel nous avons affaire, de nous fonder sur cette raison, qui pour lui n'est pas trop mauvaise, pour limiter cette existence au crâne. Si quelqu'un devait songer au dos, dans la mesure où il peut arriver, parfois, que par lui, du savoir et de l'activité soient, pour une part, rentrés au-dedans, mais, pour une autre part aussi, poussés au-dehors, cela ne démontrerait rien quant au fait qu'il faille prendre en même temps la moelle épinière comme localisation immanente de l'esprit et sa colonne comme existence en contre-image, et cela parce que cela démontrerait trop. Car on peut tout aussi bien se rappeler que | 264 | d'autres voies externes de contribution à l'activité de l'esprit ont encore l'heur de plaire, tant pour l'éveiller, que pour la retenir. — C'est donc à juste titre, si l'on veut, que la colonne vertébrale tombe. Et c'est une construction guère plus mauvaise que celle de nombreuses autres doctrines de philosophie de la nature, que de poser que le crâne n'est assurément pas la seule partie du corps à contenir les organes de l'esprit. Ceci, en effet, a été exclu antérieurement à partir du concept de ce rapport, et c'est pourquoi le crâne a été pris comme côté de l'existence ; ou encore, s'il n'était pas loisible de rappeler le concept de la chose, l'expérience nous apprend bien que l'on n'assassine pas, ne vole pas, n'écrit pas de poème avec le crâne, comme on voit avec l'œil, en tant qu'organe. — C'est pourquoi il vaut mieux éviter d'utiliser l'expression organe pour la signification du crâne dont nous devons encore parler. Car bien qu'on ait coutume de dire que ce qui importe pour les gens raisonnables n'est pas le mot, mais la chose elle-même, ceci n'autorise point cependant à désigner une chose par un nom qui ne lui convient pas, car c'est tout à la fois une maladresse et une tromperie, qui consiste à estimer et à faire croire qu'il ne nous manque que le mot juste, tout en se dissimulant que ce qui manque, en fait, c'est la chose, c'est-à-dire, le concept. Si ce dernier était bien là, il aurait aussi son mot juste. — La seule chose qui d'abord ait été déterminée, c'est que, de même que le cerveau est la tête vivante, le crâne est le caput mortuum32. | 265 |
C'est donc dans cet être mort que les mouvements mentaux et les modes déterminés du cerveau devraient se donner leur exposition d'effectivité en extériorité qui, cependant, est encore sise chez l'individu lui-même. Pour le rapport de ceux-ci au crâne, qui en tant qu'être mort n'a pas chez lui l'esprit de manière immanente, ce qui se présente d'abord c'est le rapport établi ci-dessus, extérieur et mécanique, tel que les organes proprement dits — lesquels sont situés dans le cerveau — l'expriment ici dans la rondeur, là l'écrasent en largeur, ou encore l'aplatissent carrément, ou agissent autrement encore sur lui, comme on voudra. Certes, étant lui-même une partie de l'organisme, il faut penser en lui, comme en chaque os, une autoformation vivante, en sorte que, considéré de ce point de vue, c'est bien plutôt lui, le crâne, qui de son côté comprime le cerveau et arrête sa limitation extérieure ; ce dont, du reste, étant l'élément le plus dur des deux, il a davantage la capacité. Mais, en l'espèce, ce serait toujours le même rapport dans la détermination de l'activité réciproque de l'un et de l'autre qui demeurerait ; que le crâne, en effet, soit le déterminant ou le déterminé, cela ne changerait absolument rien à la connexion causale, si ce n'est qu'alors on ferait du crâne un organe immédiat de la conscience de soi, parce que alors le côté de l'être pour soi se trouverait en lui en tant que cause. Simplement, dès lors que l'être pour soi en tant que vieorganique échoit d'égale manière chez l'un et l'autre, c'est en fait la connexion causale entre eux qui tombe. Ces développements continués de l'un et de l'autre seraient cependant corrélés à l'intérieur, | 266 | et seraient une harmonie préétablie organique qui laisserait libres l'un à l'égard de l'autre les deux côtés en relation mutuelle, et laisserait à chacun sa figure propre, à laquelle la figure de l'autre n'a pas besoin de correspondre ; et plus encore laisserait libre l'une envers l'autre la figure et la qualité — de même que la forme des raisins et le goût du vin sont libres l'un par rapport à l'autre. — Mais dès lors que la détermination de l'être pour soi échoit du côté du cerveau, tandis que la détermination de l'existence échoit du côté du crâne, il faut mettre aussi à l'intérieur de l'unité organique une corrélation causale de ces deux côtés ; une relation nécessaire de ceux-ci en tant que côtés extérieurs l'un pour l'autre, c'est-à-dire une relation elle-même externe par laquelle donc leurs figures seraient déterminées l'une par l'autre.
Mais pour ce qui regarde la détermination dans laquelle l'organe de la conscience de soi serait une cause active sur le côté opposé, on peut discuter à l'envi de multiples manières ; car il est question là de la conformation d'une cause considérée selon son existence indifférente, sa figure et sa dimension, d'une cause dont l'intérieur et l'être pour soi sont précisément censés être le genre de chose qui ne concerne en rien l'existence immédiate. L'autoformation organique du crâne est d'abord indifférente à l'action mécanique, et le rapport de ces deux rapports, puisque celui-ci est la référence de soi à soi-même, est précisément cette indéterminité et cette absence | 267 | de limite elle-même. Dès lors, même si le cerveau accueillait en lui les différences de l'esprit en autant de différences qui soient, et était une pluralité d'organes internes occupant un espace distinct — ce qui contredit la nature, qui donne aux moments du concept une existence propre, et met donc purement d'un côté la simplicité fluide de la vie organique, et de l'autre l'articulation et la répartition de cette vie également dans ses différences, de telle sorte que ces dernières, telles qu'on doit les appréhender ici, se montrent comme des choses anatomiques particulières — il n'en reste pas moins que demeurerait sans réponse déterminée la question de savoir si un moment de nature spirituelle, selon qu'à l'origine il est plus ou moins fort, devrait, soit, dans le premier cas, posséder un organe cérébral plus expansé, soit, dans le second cas, un organe plus contracté, ou bien rigoureusement l'inverse. — De même que demeurerait sans réponse la question de savoir si son développement augmenterait ou diminuerait les dimensions de l'organe, le rendrait plus fruste et plus épais, ou plus fin. Le fait que la réponse à la question de ce à quoi ressemble la cause demeure indéterminée a pour conséquence qu'on laisse également sans réponse la question de la façon dont se produit l'action sur le crâne, si elle consiste en un élargissement, ou en un étrécissement et recroquevillement complet. Si l'on veut, par exemple, définir cette action de manière un peu plus distinguée en la définissant comme excitation, il n'en demeure pas moins indéterminé si cela se produit de manière érectile, comme fait un cataplasme de cantharide, ou de manière flaccidifiante comme fait un vinaigre. — Pour tous les points de vue du même genre on pourra avancer des raisons plausibles, puisque la relation organique, | 268 | qui intervient tout autant, laisse se produire aussi bien l'un que l'autre et est indifférente à tout cet entendement.
Mais la conscience observante ne se préoccupe pas de vouloir déterminer cette relation. Car, quoi qu'il arrive, ce qui se tient d'un côté, ce n'est pas le cerveau comme partie animale, mais ce même cerveau comme être de l'individualité consciente de soi. — C'est celle-ci, en tant que caractère stable et activité consciente se mouvant elle-même, qui est pour soi et en elle-même ; à cet être pour soi et en lui-même font face son effectivité et son existence pour autre chose ; l'être pour soi et en lui-même est l'essence et le sujet qui a, à même le cerveau, un être subsumé sous lui, et qui ne tire sa valeur que de la signification inhérente. Tandis que l'autre côté de l'individualité consciente de soi, le côté de son existence, est l'être en tant qu'il est autonome et sujet, ou encore, en tant qu'il est une chose, savoir, un os ; l'effectivité et l'existence de l'homme est son os crânien. — Voilà le rapport et l'entendement dont les deux côtés de cette relation bénéficient dans la conscience qui les observe.
Or, celle-ci doit s'occuper maintenant de la relation plus déterminée de ces côtés ; l'os crânien a certes, en général, la signification d'être l'effectivité immédiate de l'esprit. Mais la pluralité des aspects de l'esprit donne tout aussi bien à son existence une pluralité de sens du même ordre ; ce qu'il faut obtenir, c'est la | 269 | déterminité de la signification des localisations singulières entre lesquelles cette existence est partagée, et il faut voir comment celles-ci ont chez elles-mêmes l'indication de cette déterminité.
L'os crânien n'est pas un organe de l'activité, ni non plus un mouvement qui parlerait ; on ne vole pas, on n'assassine pas avec l'os crânien, pas plus qu'il n'esquisse, à l'appui de ce genre d'actes, la moindre mimique qui le ferait devenir geste éloquent. — Cette chose qui est n'a pas non plus la valeur d'un signe. La mimique et le geste, le son, même une colonne, un pieu planté dans une île déserte, font immédiatement savoir d'eux qu'on veut encore dire par eux autre chose que ce qu'immédiatement ils sont uniquement. Ils se donnent eux-mêmes d'emblée pour des signes en ce qu'ils ont chez eux-mêmes une déterminité qui renvoie à autre chose, par le fait même qu'elle ne leur appartient pas comme un caractère propre. On peut certes, y compris en présence d'un crâne, comme Hamlet en présence de celui de Yorick, laisser surgir en soi toute une série d'idées, mais l'os crânien pour lui-même est une chose si indifférente et si ingénue, qu'il n'y a immédiatement chez lui rien d'autre à voir et présumer que lui-même ; certes il rappelle le cerveau et sa déterminité, il évoque des crânes de formation différente, mais pas un mouvement conscient, dans la mesure où ne sont imprimés en lui ni mimique, ni geste, ni quoi que ce soit qui s'annoncerait comme provenant d'un agir conscient ; car cet os est l'effectivité qui serait censée exposer chez l'individualité | 270 | un autre côté d'un genre tel qu'il ne serait plus un être se reflétant en lui-même, mais un être purement immédiat.
Comme en outre il n'a pas lui-même de sensation, il semble qu'il puisse encore se produire pour lui une signification plus déterminée, de telle manière, par exemple, que des sensations déterminées fissent reconnaître par le voisinage ce qu'on veut dire avec lui ; et dès lors qu'un mode conscient de l'esprit a son sentiment à un endroit déterminé du crâne, ce lieu, par exemple, suggérera dans sa figure ce mode et sa particularité. De la même façon, par exemple, que bien des personnes, quand elles pensent de manière soutenue, ou même quand elles pensent, tout simplement, se plaignent de ressentir une tension douloureuse quelque part dans la tête, le vol, l'assassinat, la poésie, etc., pourraient chacun s'accompagner d'une sensation propre, qui devrait encore, par ailleurs, avoir son emplacement particulier. Cet emplacement du cerveau qui serait de la sorte davantage mobilisé et mis en action, développerait aussi, vraisemblablement, davantage la zone voisine de l'os crânien ; ou encore, celle-ci, par sympathie ou consensus, ne serait pas apathique non plus, mais s'agrandirait ou rapetisserait, bref, se donnerait forme d'une quelconque manière. — Pourtant, ce qui rend cette hypothèse invraisemblable, c'est que le sentiment en général est quelque chose d'indéterminé, et que le sentiment dans la tête, en tant que centre, pourrait bien être la sympathie universelle avec toute espèce de souffrance, quelle qu'elle soit, en sorte qu'aux démangeaisons | 271 | ou aux maux de tête du voleur, de l'assassin et du poète, viendraient se mêler d'autres affections qui se laisseraient tout aussi peu distinguer les unes des autres — ainsi que de celles qu'on appelle simplement corporelles — qu'on ne saurait, à partir du symptôme de la migraine, quand nous limitons sa signification au strict domaine corporel, déterminer de quelle maladie il s'agit.
En fait, de quelque côté qu'on considère l'affaire, c'est toute relation mutuelle nécessaire qui disparaît de la perspective, ainsi que toute suggestion de cette relation qui parlerait par soi-même. Ce qui reste, et demeure nécessaire, si la relation est censée avoir quand même lieu, c'est une libre harmonie préétablie et sans concept de la détermination respective des deux côtés ; car l'un de ces côtés est censé être effectivité sans esprit, simple chose. Et donc, précisément, on a d'un côté une foule de zones crâniennes inertes, et de l'autre une foule de propriétés de l'esprit, dont l'abondance et la détermination dépendront de l'état de la psychologie. Plus la représentation qu'on a de l'esprit est misérable, plus l'affaire, de ce côté-là, sera rendue facile. Car, d'une part, ces propriétés deviennent d'autant moins nombreuses, et d'autre part, elles deviennent d'autant plus discriminées, solides et ossifiées, et donc d'autant plus semblables à des déterminations de la matière osseuse et comparables à elles. Simplement, bien que le caractère misérable de la représentation qu'on a de l'esprit facilite beaucoup de choses, il subsiste toujours une très grande quantité de choses des deux côtés : il demeure toute la contingence de leur relation pour l'observation. Si chacun des enfants d'Israël | 272 | était censé ramasser, dans le sable du bord de la mer auquel ils sont censés correspondre, le grain dont il est le signe, l'indifférence et l'arbitraire qui présideraient à l'attribution de son grain à chacun seraient tout aussi forts que l'indifférence et l'arbitraire qui assignent à chaque aptitude de l'âme, à chaque passion, et — chose qu'il faudrait pareillement prendre ici en considération — à toutes les nuances de caractère dont la psychologie fine et la connaissance des hommes ont coutume de parler, leurs zones crâniennes et leurs formes osseuses. — Le crâne de l'assassin a, non pas tel organe, ni non plus tel signe, mais telle bourrelure33 ; mais cet assassin a encore toute une foule d'autres propriétés, ainsi que d'autres bourrelures, et avec ces bourrelures des enfoncements ; on a le choix entre bourrelures et enfoncements. Et, à son tour, sa disposition au meurtre peut être référée à n'importe quelle bourrelure ou dépression, lesquelles à leur tour, peuvent être référées de nouveau à n'importe quelle propriété psychologique ; car l'assassin n'est pas plus tel abstractum d'assassin qu'il n'a qu'une seule et unique protubérance et un seul et unique enfoncement. C'est pourquoi les observations qu'on fait sur ces questions ne peuvent guère signifier pratiquement davantage que la pluie du marchand et de la ménagère quand ils sont l'un à la foire annuelle et l'autre à sa lessive. Le marchand et la ménagère ont pu aussi faire l'observation qu'il pleut toujours quand tel voisin passe ou quand on mange du rôti de porc. Tout comme la pluie est indifférente à ces circonstances, pour l'observation, telle déterminité de l'esprit | 273 | est indifférente à tel être déterminé du crâne. Car des deux objets de cette observation, l'un est un sec être pour soi, une propriété osseuse34 de l'esprit, de même que l'autre est un sec être en soi. Ce genre de choses ossifiées que sont l'un et l'autre objet sont parfaitement indifférentes à tout ce qui est autre ; il importe aussi peu à la bourrelure proéminente qu'il y ait un assassin dans son voisinage, qu'il indiffère à l'assassin que la platitude soit dans ses parages.
Il subsiste néanmoins de façon indépassable la possibilité qu'à n'importe quelle propriété ou passion, etc., soit associée une bourrelure à n'importe quel endroit. On peut se représenter l'assassin avec une bourrelure proéminente ici à tel endroit du crâne, et le voleur avec une autre là, à tel autre endroit. Sous cet angle, la phrénologie est encore capable d'une grande extension ; elle semble en effet d'abord se borner à la seule association d'une bourrelure et d'une propriété caractéristique chez le même individu, en sorte que celui-ci les possède toutes deux. Mais la phrénologie naturelle — car il faut aussi bien qu'il en existe une, comme il existe une physiognomonie naturelle — va déjà au-delà de cette borne ; elle ne se contente pas seulement d'énoncer la sentence qu'un homme astucieux a derrière les oreilles une bosse grosse comme le poing, mais elle nous représente aussi que ce n'est pas l'épouse infidèle qui porte elle-même les frontales bourrelures, mais l'autre individu du ménage. — Pareillement | 274 | on peut aussi s'imaginer celui qui habite sous le même toit que l'assassin, ou encore son voisin, et en allant plus loin encore, tous ses concitoyens, etc., avec des bosses volumineuses à n'importe quel endroit du crâne, tout comme la vache volante, qui a d'abord été tendrement cajolée par le crabe qui montait l'âne, et qui après ça s'est fait…, etc. — Mais quand la possibilité n'est pas prise dans le sens de la possibilité de la représentation, mais dans le sens de la possibilité intérieure, ou du concept, l'objet est alors une effectivité qui est et qui est censée être une pure chose, sans ce genre de signification, qu'elle ne peut donc avoir que dans la représentation.
Si cependant, nonobstant l'indifférence des deux côtés, l'observateur se met à l'ouvrage en vue de déterminer des relations, partie tenu en haleine par l'universel argument de raison, qui veut que l'extérieur soit l'expression de l'intérieur, partie en s'appuyant sur l'analogie des crânes des animaux — qui certes peuvent avoir un caractère plus simple que les hommes, mais dont il est dans le même temps d'autant plus difficile de dire lequel ils ont, dès lors qu'il ne peut être facile pour la représentation de tout un chacun de se transporter correctement par l'imagination dans la nature d'un animal — notre observateur, donc, en cherchant à garantir les lois qu'il veut avoir découvertes, trouvera une aide éminente dans une différence à laquelle nous ne pouvons pas non plus ne pas finir par penser. — L'être de l'esprit, | 275 | à tout le moins, ne peut pas être pris tout bêtement comme quelque chose qui soit comme cela non dérangé et non dérangeable35. L'homme est libre ; on accorde que l'être originel n'est fait que de dispositions, sur lesquelles l'homme a beaucoup de pouvoir, ou auxquelles il faut des circonstances favorables pour être développées, c'est-à-dire qu'il faut énoncer un être originel de l'esprit tout aussi bien comme n'existant pas en tant qu'être. Si donc des observations contredisaient ce qu'il vient à un quelconque esprit d'assérer comme une loi — si, par exemple, il faisait beau lors de la grande foire annuelle, ou le jour de la lessive, l'épicier et la ménagère pourraient déclarer qu'à proprement parler il devrait pleuvoir, et que la disposition à pleuvoir est présente dans l'air ; et pareillement, observant le crâne, on pourrait dire : que tel individu à proprement parler devrait être comme ceci, comme le déclare son crâne selon la loi, et qu'il a une disposition originelle, mais que celle-ci ne s'est pas développée ; cette qualité n'est pas présente, mais elle devrait être présente. — La loi et le devoir-être se fondent sur l'observation de la pluie effective, et du sens effectif qui accompagne telle déterminité du crâne ; mais quand l'effectivité n'est pas présente, la possibilité vide vaut pour tout autant. — Cette possibilité, c'est-à-dire, la non-effectivité de la loi établie, ainsi que les observations qui en conséquence la contredisent, doivent précisément entrer en lice, parce que la liberté de l'individu et les facteurs circonstanciels de développement sont en général indifférents à l'égard de l'être, | 276 | tant à l'égard de l'être comme intérieur originel, que comme ossification extérieure, et parce que l'individu peut aussi être autre chose, que ce qu'il est en son origine interne et, plus encore, en tant qu'os.
Nous nous retrouvons donc avec la possibilité que cette bourrelure ou cet enfoncement du crâne désignent aussi bien quelque chose d'effectif qu'une simple disposition, sans même que celle-ci au demeurant soit destinée à quoi que ce soit de déterminé, bref, que cette bourrelure désigne quelque chose d'ineffectif ; nous voyons comme toujours ici ce qu'il advient d'une mauvaise échappatoire, savoir, qu'on peut l'employer contre cela même dont elle est censée être le recours. Nous voyons le point de vue intime amené par la nature même de la chose à dire lui-même le contraire, mais sans pensée, de ce qu'il tient pour établi : à dire que par cet os il y a bien quelque chose d'indiqué, mais tout aussi bien que ça n'est pas non plus le cas.
Ce dont l'opinion intime elle-même a la vague intuition face à cet argument échappatoire, c'est de l'idée vraie, et qui précisément l'anéantit, que l'être en tant que tel n'est pas du tout la vérité de l'esprit. De même que la disposition est déjà un être originel qui ne prend aucune part à l'activité de l'esprit, l'os, de son côté, est également un être de ce type. Sans l'activité spirituelle, ce qui est, est une chose pour la conscience, et est si peu son essence que c'est même bien plutôt le contraire de celle-ci, et que la conscience n'est effective à soi-même que par la négation et l'anéantissement d'un tel être. — Sous cet angle, | 277 | il faut regarder comme un complet reniement de la raison qu'on fasse passer un os pour l'existence effective de la conscience ; et c'est bien pour cela qu'on le fait passer en le considérant comme l'extérieur de l'esprit, car l'extérieur est précisément l'effectivité qui est. Il ne sert à rien de dire qu'on se contente, à partir de cet extérieur, de conclure à l'intérieur, qui serait quelque chose d'autre, mais que l'extérieur n'est pas l'intérieur proprement dit, mais seulement son expression. Car dans le rapport de l'un à l'autre, ce qui tombe précisément du côté de l'intérieur c'est la détermination de l'effectivité qui se pense et est pensée, tandis que tombe du côté de l'extérieur celle de l'effectivité qui est. — Quand donc on dit à un homme : tu (ton intérieur) es ceci parce que ton os est fait de telle manière, cela ne signifie pas autre chose que : ton effectivité, pour moi, c'est un os. La gifle qui faisait office de réplique à ce genre de jugement, quand nous parlions de la physiognomonie, a d'abord pour effet de faire sortir les parties molles de leur aspect et de leur emplacement ordinaires, et démontre simplement que celles-ci ne sont point un en soi véritable, ne sont pas l'effectivité de l'esprit ; — la réplique, en l'espèce, devrait proprement aller jusqu'à enfoncer le crâne d'un homme qui énonce pareils jugements, afin de démontrer d'une façon rigoureusement aussi tangible que l'est sa sagesse, que pour l'homme l'os n'est rien d'en soi, et est bien moins encore son effectivité vraie. | 278 |
L'instinct brut de la raison consciente de soi rejettera sans même la regarder ce genre de science phrénologique — ainsi que cet autre instinct d'observation qui est le sien, et qui, après avoir crû et prospéré jusqu'à l'idée vague de la connaissance, a saisi celle-ci de la manière peu spirituelle qui fait de l'extérieur l'expression de l'intérieur. Mais plus une pensée est mauvaise, moins on remarque parfois en quoi réside précisément ce qui la rend mauvaise, et plus il est difficile de l'expliciter. Car une pensée est dite d'autant plus mauvaise, qu'est plus pure et plus vide l'abstraction qui pour elle a valeur d'essence. Mais l'opposition décisive ici a pour membres l'individualité consciente d'elle-même et l'abstraction de l'extériorité entièrement devenue chose : cet être intérieur de l'esprit appréhendé comme un être figé et peu spirituel, précisément opposé à ce genre d'être. — Mais par là même il semble aussi que la raison observante ait en fait atteint son point culminant, et qu'à partir de celui-ci, elle doive prendre congé d'elle-même et se renverser ; car seul ce qui est entièrement mauvais a en soi la nécessité immédiate de s'invertir. — De même qu'on peut dire du peuple juif que c'est précisément parce qu'il se trouve immédiatement devant la porte du salut qu'il est et a été le plus réprouvé des peuples ; ce qu'il était censé être en soi et pour soi, cette auto-entité, il ne l'est pas à ses yeux, mais la repousse au-delà de soi ; par cette aliénation, il se rend possible une existence | 279 | qui serait plus élevée, s'il pouvait reprendre en soi son objet, que s'il était resté arrêté dans l'immédiateté de l'être ; parce que l'esprit est d'autant plus grand qu'est plus grande l'opposition d'où il revient en luimême ; mais cette opposition, il se la fabrique dans l'abolition de son unité immédiate et en aliénant son être pour soi. Simplement, si ce genre de conscience ne se refléchit pas, l'élément médian où elle se tient est le vide désolant, dès lors que ce qui était censé le remplir est devenu un extrême figé. Si bien que cet ultime stade de la raison observante est le plus mauvais qu'elle connaisse, mais que, pour cette raison, son retournement est nécessaire.
La récapitulation de toute la série de rapports observés jusqu'à présent, qui constituent le contenu et l'objet de l'observation, montre en effet que dans sa première modalité, dans l'observation des rapports de la nature inorganique, l'être sensible disparaît déjà pour elle ; les moments de son rapport se présentent comme de pures abstractions et comme des concepts simples qui devraient être fermement attachés à l'existence de choses, laquelle cependant se perd, en sorte que le moment s'avère comme pur mouvement et comme quelque chose d'universel. Ce libre processus achevé en lui-même garde la signification de quelque chose d'objectal ; mais entre en scène maintenant comme une réalité une ; dans le processus de l'inorganique, l'Un est l'intérieur non existant ; mais c'est en existant en tant qu'Un que le processus | 280 | est l'organique. — L'Un fait face, comme être pour soi ou comme essence négative, à l'universel, se soustrait à celui-ci et demeure libre pour soi, en sorte que le concept, n'étant réalisé que dans l'élément de la singularisation absolue, ne trouve pas dans l'existence organique son expression véritable, savoir, d'être là comme quelque chose d'universel, mais demeure quelque chose d'extérieur ou, ce qui revient au même, un intérieur de la nature organique. — Le procès organique n'est libre qu'en soi, mais il ne l'est pas pour soi-même ; c'est dans la fin visée que l'être pour soi de sa liberté entre en jeu ; existe comme autre essence, comme sagesse consciente d'elle-même, qui est à l'extérieur de ce procès. La raison observante se tourne donc vers celle-ci, vers l'esprit, le concept existant en tant qu'universalité, ou la fin existant en tant que fin, et, désormais, l'objet pour elle c'est sa propre essence.
Elle commence par se tourner vers la pureté de cet objet ; mais dès lors qu'elle est appréhension de l'objet qui se meut dans ses différences en tant que quelque chose qui est, il lui advient des lois de la pensée, des relations de durable à durable ; mais comme le contenu de ces lois n'est fait que de moments, elles se perdent, se dispersent dans l'Un de la conscience de soi. — Ce nouvel objet, qui est tout aussi bien pris comme quelque chose qui est, est la conscience de soi singulière, contingente ; l'observation se tient donc à l'intérieur de l'esprit présumé par un point de vue intime, à l'intérieur du rapport contingent d'une effectivité consciente à une effectivité inconsciente. C'est lui seul en soi-même | 281 | qui est la nécessité de cette relation ; c'est pourquoi l'observation vient le serrer au corps de plus près et compare son effectivité voulante et agissante avec son effectivité réfléchie en soi et examinante, qui est elle-même objectale. Cet extérieur, bien qu'il soit un langage de l'individu que celui-ci a chez lui-même, est en même temps, en tant que signe, quelque chose d'indifférent au contenu qu'il était censé désigner, de la même façon que ce qui s'appose le signe est indifférent à celui-ci.
L'observation revient donc finalement de ce langage changeant à l'être ferme, et énonce selon son concept que c'est l'extériorité, non pas en tant qu'organe, ni non plus en tant que langage et que signe, mais comme chose morte, qui est l'effectivité extérieure et immédiate de l'esprit. Ce qui avait été aboli par la toute première observation de la nature inorganique, savoir, que le concept devait être présent en tant que chose, est instauré par cette dernière manière, en ce qu'elle fait de l'effectivité de l'esprit lui-même une chose, ou, pour exprimer cela à l'inverse, en ce qu'elle donne à l'être mort la signification de l'esprit. — L'observation en est ainsi venue à énoncer ce qui était notre concept d'elle, savoir, que la certitude de la raison se cherche elle-même comme effectivité objectale. — On ne veut certes pas dire par là que l'esprit représenté à partir d'un crâne serait énoncé comme chose ; il n'est point censé y avoir de matérialisme, | 282 | comme on appelle cela, dans cette pensée, mais l'esprit, au contraire, est censé être autre chose encore que ces36 os ; mais dire qu'il est ne signifie soi-même rien d'autre que : il est une chose. Quand on attribue à l'esprit comme prédicat l'être en tant que tel, ou l'être-chose, la véritable expression de cela, de ce fait, est qu'il est quelque chose comme un os. C'est pourquoi il faut considérer comme de la plus haute importance que l'expression vraie du fait que l'on dise purement et simplement de l'esprit qu'il est ait été trouvée. Quand on dit par ailleurs de l'esprit : il est, il a un être, il est une chose, une effectivité singulière, on n'a pas en tête, ce disant, quelque chose qu'on peut voir, prendre dans la main, heurter, etc., mais c'est quand même quelque chose comme cela qui est dit, et ce qui est dit en vérité s'exprime du coup comme ceci : l'être de l'esprit est un os.
Or ce résultat a une double signification, d'abord sa signification vraie, dans la mesure où il est un complément du résultat du mouvement antérieur de la conscience de soi. La conscience de soi malheureuse s'est dépossédée de son autonomie et s'est battue pour tirer son être pour soi vers le statut de chose. Ce faisant elle est retournée de la conscience de soi jusque dans la conscience, c'est-à-dire dans la conscience pour laquelle l'objet est un être, une chose — mais ce qui est chose ici, c'est la conscience de soi ; c'est donc l'unité du Je et de l'Être, la catégorie… Dès lors que l'objet pour la conscience est ainsi | 283 | déterminé, celle-ci a de la raison. La conscience, ainsi que la conscience de soi, est à vrai dire en soi raison ; mais c'est seulement de la conscience pour qui l'objet s'est déterminé comme la catégorie que l'on peut dire qu'elle a de la raison37. Ce dont diffère encore le savoir de ce qu'est la raison. — La catégorie, qui est l'unité immédiate de l'être et de ce qu'on a à soi38, doit parcourir ces deux formes, et la conscience observante est précisément celle à laquelle elle se présente sous la forme de l'être. Dans son résultat, la conscience énonce ce dont elle est la certitude sans conscience, comme une proposition : comme la proposition qui est dans le concept de la raison. Cette proposition est le jugement infini que le Soi-même est une chose — un jugement qui s'abolit lui-même. — Ce qui par ce résultat est assurément venu s'ajouter à la catégorie, c'est qu'elle est cette opposition qui s'abolit. La catégorie pure, qui est dans la forme de l'être ou de l'immédiateté pour la conscience, est l'objet encore non intermédié, simplement là, présent, et la conscience est un comportement tout aussi peu intermédié. Le moment de ce jugement infini est le passage de l'immédiateté dans la médiation ou la négativité. C'est pourquoi l'objet présent est déterminé comme un objet négatif, tandis que la conscience, en tant que conscience de soi face à cet objet, ou encore la catégorie qui a parcouru la forme de l'être dans l'observation, est maintenant posée, dans la forme de | 284 | l'être pour soi ; la conscience ne veut plus se trouver immédiatement, mais se produire elle-même par sa propre activité. Elle est elle-même à ses propres yeux la finalité de son activité, de la même façon que dans l'observation elle ne se préoccupait que des choses.
L'autre signification du résultat atteint est celle, que nous avons déjà examinée, de l'observation sans concept. Celle-ci ne sait ni s'appréhender ni s'énoncer autrement qu'en déclarant sans aucune gêne, comme étant l'effectivité de la conscience de soi, l'os, tel qu'il se trouve comme chose sensible, qui dans le même temps ne perd pas son objectalité pour la conscience. Mais cette observation sans concept n'a pas non plus, quant au fait qu'elle dise cela, une grande clarté de conscience, et ne comprend pas sa proposition dans la déterminité de son sujet et de son prédicat, ni dans la relation de l'un et de l'autre, et encore moins dans le sens du jugement infini, qui se dissout lui-même, et du concept. — Mais partant, au contraire, d'une conscience de soi de l'esprit enfouie plus profondément, qui apparaît ici comme une honnêteté naturelle39, elle se cache le caractère honteux et méprisable de la pensée nue et sans concept qui consiste à prendre un os pour l'effectivité de la conscience de soi, et enduit cet os du badigeon de l'absence même de pensée qui consiste à mêler à cela toute une série de rapports de cause à effet, de signes, d'organes, etc., qui n'ont aucun sens ici, et à dissimuler par des distinctions qui leur sont empruntées ce qui jure et heurte dans cette proposition. | 285 |
Les fibres cérébrales40 et autres choses du même genre considérées comme l'être de l'esprit sont déjà une effectivité pensée simplement hypothétique, et non existante, non sentie, non vue, ne sont pas la vraie effectivité ; quand elles sont là, quand on les voit, elles sont des objets morts et ne valent plus alors pour l'être de l'esprit. Mais l'objectalité proprement dite doit être celle d'un objet immédiat et sensible, en sorte que l'esprit soit posé comme effectif dans cette objectalité en ce qu'elle est morte — car l'os est le mort dans la mesure où ce mort est à même le vivant lui-même. — Le concept de cette représentation est que la raison est à ses yeux toute chosité, y compris la chosité purement objectale elle-même ; mais elle est cela dans le concept, ou encore, seul le concept est sa vérité, et plus celui-ci est pur de son côté, plus est niaise la représentation où il déchoit, quand son contenu est non comme concept, mais comme représentation — quand le jugement qui s'auto-abolit n'est pas pris avec la conscience de cette infinité qui est la sienne, mais comme une proposition permanente et dont sujet et prédicat valent chacun pour soi, où le Soi-même est fixé comme Soi-même, la chose fixée comme chose, et où pourtant l'un est censé être l'autre. — La raison, essentiellement le concept, est immédiatement divisée en deux : elle-même et le contraire d'elle-même, opposition qui précisément pour cette raison est tout aussi immédiatement abolie. Mais se présentant ainsi comme soi-même et son contraire, et maintenue fermement dans le moment tout à fait singulier | 286 | de cet écartèlement, elle est appréhendée de manière non rationnelle ; et plus les moments de cette opposition sont purs, plus jure et heurte l'apparition phénoménale de ce contenu qui, soit, est seulement pour la conscience, soit, est énoncé par elle seule sans aucune gêne. — La profondeur de ce que l'esprit extrait et expulse de l'intérieur, mais seulement jusqu'au niveau de sa conscience représentative où il la laisse arrêtée — et l'ignorance de cette conscience quant à ce qu'est ce qu'elle dit, constituent la même association de l'élevé et de l'humble que celle que la nature exprime naïvement chez le vivant dans la conjonction de l'organe de son sublime accomplissement, l'organe génital, et de l'organe qui permet de pisser. — Le jugement infini en tant qu'infini serait l'accomplissement de la vie se saisissant elle-même, tandis que le comportement de la conscience de la vie qui demeure dans la représentation est du même ordre que celui de l'homme qui pisse. | 287 |
2 Des Seinen. Jeu de mots entre le possessif masculin et neutre sein et le verbe sein (« être »), suivi ici du même jeu entre le possessif mein et le verbe meinen.
3 Eigentum.
4 Jeu de mots entre Allgemeinheit et das abstracte Mein.
5 Das Allgemeine. Dans ce passage, comme souvent, c'est plutôt la généralité qui est désignée par ce concept, en particulier dans le contexte du classement en genres, espèces, articles, etc.
6 Der Vernunftinstinkt. Il ne s'agit pas de l'instinct de la raison, mais de la raison comme instinct.
7 Selbstwesen : auto-entité propre.
8 Reinigen : à la fois « rendre pur » (rein) et « nettoyer ».
9 Harzelectricität : on pensait que l'électricité, en tant que fluide unique, faisait défaut dans la résine.
10 Glaselectricität : en frottant le verre sur un corps, on mettait en évidence l'électricité positive.
11 Die Gewalt. C'est-à-dire aussi la « violence ».
12 Synsomatien : expression reprise de l'ouvrage de Jakob Joseph Winterl, Darstellung der vier Bestandteile der anorganischen natur, traduit du latin par Johann Schuster, Iéna, 1804. L'auteur y fabriquait ce néologisme pour désigner un type de processus chimique déterminé par des facteurs non chimiques, essentiellement physiques, qui vient se substituer aux combinaisons ou réactions attendues.
13 Begeistungen. Chez Winterl, le principe basique ou acide begeistet, « spiritise » le substrat. Il s'agit d'une relation immatérielle.
14 Zweckbegriff. Première occurrence de cette notion qui peut désigner à la fois le « concept de fin », et le concept en ce qu'il se définit par une finalité, par opposition à d'autres types de concept. Ce type de construction pour désigner un « concept de quelque chose » est peu représenté dans la Phénoménologie, Hegel ayant recours — comme le veut encore l'usage aujourd'hui — au génitif (ce qui donnerait : der Begriff des Zweckes, le concept de fin). À rebours de la traduction utilisée pour les œuvres de Kant, et bien qu'il soit question ici de la Critique du jugement, nous traduisons par « concept finalitaire », au sens que Jean Rostand donne à ce mot, afin de garder à la notion de concept sa substance prioritaire dans le composé, et à la notion de fin sa fonction organisatrice.
15 Sein Selbstgefühl, expression quasi synonyme de « fierté ».
16 Tätigkeit (de même que ci-dessous). Au sens strict de « caractère actif ».
17 Ces trois concepts de morphologie très « latine » sont repris de la terminologie de Schelling (in L'Âme du monde, Hambourg, 1798), lequel s'appuie sur les travaux de Karl Friedrich Kielmeyer. Ils ont été définis en ce sens dès le XVIIe siècle par le savant anglais Glisson (in Tractatus de natura substantiae, 1672).
18 Selbstzweck. Le Soi-même est le contenu de la fin visée, mais celle-ci est aussi déterminée formellement par cette auticité.
19 Action.
20 Eingeweide : formulation biblique de l'appareil ou du système génital, qui a pris depuis un sens plus intestinal…
21 Die Gestaltung. Nous traduisons généralement par « configuration », sauf lorsque, comme ici, le sens processuel est prégnant.
22 Gemeine Kohäsion. Par opposition à celle dont il était question précédemment. Hegel reprend dans tout ce passage la terminologie de Henrik Steffens (in Beiträge zur innern Naturgeschichte der Erde, 1801).
23 Figuration.
24 Representiren. Allusion aux théories de Steffens, selon qui l'azote « représente » le pôle positif et le carbone, le pôle négatif de la série métallique.
25 Das Gedankending. Terme qui n'est pas exempt d'une certaine connotation « chimérique ».
26 Handelnd. D'une manière générale, nous avons respecté le triangle Tat-Tun-Handlung en traduisant Tun par « activité », Tat par « acte » et Handlung par « action ». Le problème de cette discrimination se pose moins au niveau verbal, dès lors que handeln, comme « agir », est absolu, et que tun n'est jamais conjugué dans le texte, c'est-à-dire demeure un infinitif substantivé.
27 Verbrechen. Étymologiquement plus proche d'« infraction », mais lié par l'opérateur Verbrecher — le criminel — au monde de la représentation.
28 Die freie Willkür. Le concept de Willkür (l'arbitraire) est fortement chargé de connotations négatives au XVIIIe siècle, mais il conserve un écho du « libre arbitre » de la théologie, appuyé sur le radical -Kür, qui évoque le « choix ». En règle générale, l'usage de l'adjectif frei neutralise les connotations péjoratives et restaure provisoirement, dans le contexte, le sens plus neutre.
29 Georg Christoph Lichtenberg, Über Physiognomik, Göttingen, 1788, p. 35.
30 Citation de Lichtenberg, Über Physiognomik, op. cit., p. 72.
31 Ibid., p. 6.
32 Caput mortuum. Métaphore courante pour désigner le résidu d'oxyde de fer qui se forme après la fusion du sulfate ferreux, et sert à polir le verre ou fait office de pigment coloré. C'est le sens propre qui fonctionne ici et connote : ce qui ne sert plus à rien.
33 Der Knorren. Ce terme rural désigne un renflement sur une branche d'arbre, et plus généralement toute espèce de nodosité végétale.
34 Knöchern. Le sens de ce mot est plutôt péjoratif.
35 Unverrücktes und unverrückbares. Si verrückt a sans équivoque le sens de « fou », « dérangé », « détraqué », « déséquilibré », etc., le verbe verrücken a un sens neutre dominant et signifie « déplacer », « déranger », « changer de place » un objet lourd.
36 Corrigé en « cet » par les éditeurs ultérieurs.
37 Vernunft haben : l'expression est peut-être un écho de la locution française : avoir raison — qui se dit en allemand Recht haben.
38 Des Seins und des Seinen.
39 Honnetetät.
40 Gehirnfibern. Terme sans doute repris de la « théorie des fibres » du condillacien genevois Charles Bonnet, dont Hegel avait lu l'Essai analytique sur les facultés de l'âme (1759) dans la traduction de Christian Gottfried Schütz (Brême & Leipzig, 1770).