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L’éminente Jeanne Mance

Les filles de sœur Bourgeoys avaient résisté à l’hiver 1672-1673 dans le bâtiment neuf de la congrégation. Nul doute que l’existence y était moins misérable que dans l’ancienne étable et son nichoir rafistolé, mais la grande maison à la française avec ses cheminées monumentales aux deux bouts était une véritable chambre froide. Le jour, les maîtresses d’école jetaient parfois dans l’âtre quatre ou cinq grosses bûches en même temps afin de permettre aux écolières de tenir un livre ou d’écrire sans trop d’incommodités. Le soir, en compagnie des demoiselles à marier, elles se rassemblaient près de la cheminée pour ne pas trop engourdir leurs doigts de fée qui reprenaient l’aiguille et accomplissaient les menus travaux de couture, de tricot et de reprisage. Et dans toute cette vie qui les unissait, mère Bourgeoys continuait de façonner les âmes en louant l’ouvrage exécuté à la perfection.

Après une première expérience de l’hiver canadien, les sœurs Sommillard ne parlaient pas de retourner en France. L’aînée, Marguerite, avait découvert sa vocation auprès des enfants des colons et des petites Sauvagesses. Louise était toujours courtisée par François Fortin, mais compte tenu de l’importante différence d’âge existant entre les tourtereaux, sa tante souhaitait qu’elle vieillisse avant de prendre parti. Quant à Catherine, son cœur balançait encore entre le mariage et une vocation à la congrégation.

En mai, parmi ses nombreuses préoccupations quotidiennes, sœur Bourgeoys insérait des visites fréquentes à son amie mademoiselle Mance. Pour la fondatrice de l’Hôtel-Dieu, les ombres du crépuscule faisaient de plus en plus place à la nuit. Marguerite ne croisait plus Dollier de Casson, le supérieur des Sulpiciens. Celui-ci avait eu le temps d’achever son ouvrage sur l’histoire de Montréal ; il avait écouté la voix faible de la grabataire, qui lui avait transmis sa mémoire des événements survenus depuis la fondation de Ville-Marie. Jeanne avait confié à Marguerite que l’exercice de remémoration lui avait notamment permis de donner sa propre version de l’affaire des 22 000 livres dont elle avait disposé pour la défense de la colonie. Car les blâmes acharnés de monseigneur de Laval exigeant toujours des justifications lui avaient infligé une souffrance morale qui avait irrémédiablement hypothéqué sa santé.

Cependant, Marguerite, sœur Catherine Macé – à présent supérieure des hospitalières de l’hôpital – et la femme de Zacharie Dupuy – celui à qui Marguerite avait demandé de faire suivre en France par le navire suivant ses documents oubliés dans une auberge de Québec – se relayaient au chevet de la malade. Jeanne Mance avait particulièrement besoin de son amie Marguerite. La veille, elle l’avait pressée de revenir.

Le lendemain, Marguerite s’apprêtait à entrer dans la chambre de Jeanne quand Catherine Macé en sortit.

— Mademoiselle Mance a un sursaut de vie, l’informa la menue religieuse. Aujourd’hui, elle a mandé son exécuteur testamentaire afin de discuter des dernières dispositions à prendre après sa mort et d’ajouter quelques codicilles à son testament. L’abbé Souart est venu cet après-midi.

— Merci, ma sœur, dit Marguerite. Je vais faire attention de ne pas l’épuiser.

Elle se rendit auprès de la malade. Celle-ci était assise dans son lit, plus droite qu’à l’accoutumée, et elle portait ses lunettes sur le bout du nez.

— Vous êtes étonnante, Jeanne, déclara la visiteuse. On dirait que vous prenez du mieux, ma bonne amie.

— Mon héritage vous profitera, Marguerite : j’ai décidé de laisser 200 livres à votre congrégation.

— Mais donnez donc cet argent aux plus pauvres que nous, Jeanne.

— Je sais que la pauvreté règne déjà dans votre maison et que vous continuez d’instruire gratuitement les écolières. J’ai également fait un don de 100 livres pour la construction de l’église Notre-Dame…

La physionomie de mademoiselle Mance s’altéra.

— Vous ne vous sentez pas bien ? s’inquiéta Marguerite.

— La paroisse a un si grand besoin d’argent que certains ont même résolu de démolir le vieux fort de monsieur de Maisonneuve avec ses bastions pour en réutiliser les matériaux. Tant que je vivrai, je m’opposerai à cette destruction.

— Monsieur de Maisonneuve serait fier de savoir que vous tenez tant à la construction qu’il a fait ériger en les temps héroïques de Ville-Marie.

Marguerite promena son regard sur le cabinet de bois noir dans lequel étaient rangés des registres de l’hôpital, des papiers et des comptes. Ses yeux se posèrent sur des lettres empilées. Bientôt, elle enverrait assurément un message à l’ancien gouverneur pour l’aviser du décès de leur amie commune.

La grabataire avait épuisé ses forces de la journée. Elle tendit ses lunettes à son amie pour qu’elle les remise dans la boîte en bois et demanda ensuite de l’aide pour s’allonger. Puis, avant de s’installer dans un des deux fauteuils en tapisserie de Bergame, Marguerite alla fermer les rideaux de la même étoffe qui pendait de chaque côté de la fenêtre.

— Marguerite ! souffla Jeanne.

La confidente s’approcha et se pencha sur la mourante.

— Il y a encore une chose que je ne vous ai pas dite, murmura celle-ci d’une voix étouffée. À l’insistance de monsieur Souart, j’ai consenti à léguer mon cœur à mes chers Montréalistes.

— Ainsi, ils se rappelleront que celui de Ville-Marie a souvent battu par le vôtre et celui de monsieur de Maisonneuve.

Jeanne Mance ferma les yeux. Ses mains se croisèrent lentement sur sa poitrine et un sourire d’un indicible bonheur illumina son visage.

***

Mademoiselle Mance s’éteignait lentement comme la braise crépitant sous la cendre. Chaque jour qui passait lui enlevait un peu plus de son souffle.

Pendant ce temps, les habitants de Ville-Marie s’animaient. Plusieurs d’entre eux se rendirent à Québec pour se plaindre du poste de traite que le successeur de Maisonneuve avait établi au confluent de la rivière des Outaouais et du Saint-Laurent – ce qui, en quelque sorte, devançait les trafiquants de fourrures de Montréal. François-Marie Perrot, ayant été avisé par une estafette de la venue prestigieuse du gouverneur de la Nouvelle-France, ne voyait pas d’un bon œil la présence du représentant du roi. Il avait fait emprisonner Jacques Bizard, un des émissaires de Frontenac, envoyé pour arrêter les coureurs de bois à sa solde.

Marguerite, elle, se rendait fidèlement à la chambre de son amie Jeanne quand les cloches se mirent à sonner à toute volée.

— Monsieur le comte de Frontenac, ma sœur ! lança François Fortin, qui accourait avec Louise Sommillard.

Intriguée par l’arrivée du représentant de Sa Majesté royale, Marguerite se laissa entraîner par la foule enthousiaste qui se gonflait en s’approchant de la grève. Une rumeur persistante prétendait que le personnage qui avait demeuré à la cour de Louis XIV aimait le faste, qu’il avait une propension à vivre bien au-delà de ses moyens et qu’il avait accepté un poste en Nouvelle-France pour se mettre à l’abri de ses créanciers. Néanmoins, en sa qualité de gouverneur, il avait la main haute sur les affaires militaires et il excitait la curiosité du peuple qui le considérait comme un grand seigneur.

De la coque des pinasses en rade s’éloignait une nuée de barques surchargées transportant des hommes en tenues bigarrées qui commençaient à accoster. Monsieur le comte arriva dans le plus brillant équipage. Il n’avait rien ménagé pour frapper l’imagination des colons. Entouré de toute sa maison militaire, vêtu de ses plus beaux atours et coiffé d’un chapeau extravagant, Frontenac posa le pied à terre. Il s’avança pompeusement avec l’abbé de Fénelon, avec qui il était revenu de France, pour prendre possession de la colonie au nom du roi. Vinrent ensuite des soldats de métier, des miliciens et des volontaires qui défilèrent au son des tambours et des trompettes en se dirigeant vers le gouverneur de l’île qui l’accueillait avec sa femme et les messieurs de Saint-Sulpice, les seigneurs de Montréal. Apercevant mère Bourgeoys qui avait hésité à descendre jusqu’au fleuve, l’abbé de Fénelon se détacha du groupe avec son serviteur, le lunatique Barnabé, et alla vers elle. Après les salutations d’usage, il annonça :

— Monsieur de Frontenac va commencer sa visite par l’Hôtel-Dieu et se rendra ensuite à la maison de la congrégation.

— Ne serait-ce pas plutôt le contraire, mon cher maître ? interrogea son serviteur.

— Combien de fois vous ai-je prévenu de ne pas intervenir, Barnabé ? Contentez-vous de vous occuper de mes bagages pour éviter que ne se produise le même désagrément qu’a connu sœur Bourgeoys avant notre départ de Québec pour la mère patrie. N’est-ce pas, ma sœur ?

— Euh… oui, monsieur de Fénelon, dit Marguerite.

Le serviteur obtempéra. Pour sa part, Marguerite n’avait pas une minute à perdre. Elle souleva ses jupes et se rendit chez elle pour y aller de ses recommandations. Elle reporterait sa visite à mademoiselle Mance à plus tard durant la journée.

De leur fenêtre, Marguerite et sœur Crolo assistèrent à la défilade solennelle qui se dirigea vers l’hôpital sous les acclamations de la foule. Elles appréhendaient le passage des dignitaires à leur résidence.

Un peu plus tard, l’abbé de Fénelon entra – comme s’il était chez lui – avec le comte de Frontenac, ainsi qu’avec François-Marie Perrot et son épouse.

— Bienvenue dans la maison de Notre-Dame, déclara mère Bourgeoys.

— Votre maison est bien tenue ! s’extasia le comte.

— Je ne tolérerais pas que nos filles soient désordonnées, rétorqua sœur Crolo.

Les distingués personnages entreprirent de circuler d’une pièce à l’autre, saluant au passage les congréganistes alignées avec les filles destinées à fonder une famille. Celles-ci s’inclinèrent avec ostentation, contrairement à la consigne de leur directrice qui leur avait recommandé la simplicité.

Madeleine Senécal se pencha à l’oreille de Louise Sommillard.

— Monsieur le comte est atrocement laid ! commenta-t-elle tout bas.

— C’est certain qu’il n’est pas aussi avantagé que François, mais il n’est quand même pas un laideron, tempéra la nièce de Marguerite.

— Tu n’as vraiment pas remarqué son large front, son nez long et mince, ses joues creuses et son menton étroit et pointu ? détailla Madeleine Senécal. Le pauvre, il n’a sûrement pas trouvé à se marier.

— La comtesse est restée en France, rétablit Louise. C’est une fort jolie dame, paraît-il.

Sœur Raisin jeta un regard oblique vers les deux bavardes.

— Chut ! murmura-t-elle. Attendez un peu…

La porte se referma derrière les visiteurs de marque. Avec ses manières affables, sa tendre piété et ses paroles d’encouragement, Frontenac avait conquis l’admiration. Soulagée par le départ du comte et de son escorte, Marguerite félicita ses filles pour leur conduite presque exemplaire et s’empressa d’aller à l’hôpital.

À son arrivée, elle fut interceptée par la frêle sœur Macé, qui l’entraîna aussitôt dans la pièce attenante à la chambre de la mourante.

— La situation empire, exprima l’hospitalière. Jeanne accepte de boire, mais elle refuse de manger. Je crains que nous ne soyons proches de la fin.

Dans la petite salle qui servait de cuisine, la religieuse de Saint-Joseph avait fait transporter un lit d’appoint qui attira le regard de Marguerite.

— Ce soir, je commencerai à la veiller, dit la supérieure.

— Je prendrai le relais, promit sœur Bourgeoys.

— Vous avez bien assez de votre besogne à la congrégation, Marguerite…

— Et vous, de votre travail de soignante et de responsable des hospitalières.

— Revenez demain. La femme de Zacharie Dupuy et moi resterons près de Jeanne.

Le cœur gros, Marguerite s’en retourna à la congrégation. La journée lui avait donné beaucoup d’émotions. Dans le petit hameau de Ville-Marie, on achevait de loger les dignitaires, les militaires et le corps expéditionnaire du comte de Frontenac. Quant au gouverneur général, il bénéficierait de la plus belle chambre de ses hôtes, monsieur et madame Perrot.

***

L’enthousiasme presque délirant qu’avait suscité le débarquement du comte de Frontenac n’avait été que bien éphémère. Le peuple était maintenant furieux. Celui que les marchands avaient supplié de les défendre contre le gouverneur Perrot agissait maintenant contre eux. L’ambitieux personnage voulait profiter d’une position stratégique pour contrôler le commerce des fourrures. Un incroyable branle-bas agitait toute la population de Ville-Marie. Frontenac avait d’abord fait libérer Jacques Bizard, son émissaire, démontrant ainsi qu’il représentait l’autorité suprême en Nouvelle-France. Une expédition s’organisait, qui réclamait la participation d’un peu tout le monde. Il fallait préparer la construction d’un fort sur le bord du lac Ontario, à l’embouchure de la rivière Cataracoui : certains habitants furent réquisitionnés pour la fabrication de canots, les autres, pour l’approvisionnement et la nourriture de la troupe.

Un dimanche, dans les derniers brasillements du printemps, juste avant le solstice d’été, Marguerite se préparait à traverser le seuil de sa résidence, son tricot à la main. La température clémente faisait espérer les plus belles et longues soirées de l’année.

La nièce de Marguerite attendait son prétendant dans l’entrée.

— Vous vous rendez sans doute au chevet de mademoiselle Mance, ma tante…

— Tu attends François ? Tu le salueras de ma part.

À cet instant, François Fortin arriva, la tête basse, la mine déconfite.

— Quelque chose ne va pas ? questionna Louise.

— Je viens d’apprendre que je devrai m’absenter quelques mois, livra-t-il avec déception.

Sa bien-aimée s’élança dans ses bras.

— Je ne veux pas que tu partes ! gémit Louise d’une voix pleurarde.

— Tout le monde croyait que Frontenac mettrait un terme à l’activité illégale de Perrot, mais il va faire pire que lui ! rugit le Breton. Et ce qui est encore plus terrible, c’est que j’ai reçu une ordonnance du représentant du roi pour aller construire la fortification. Ce n’est pas étonnant que Perrot soit en guerre contre monsieur de Frontenac et qu’il appelle à l’insurrection, acheva-t-il.

Marguerite tenta de consoler sa nièce :

— Pour le moment, Louise, François n’a d’autre choix que d’obtempérer aux directives. Ces quelques mois seront bien vite passés.

— Vous ne pouvez pas comprendre, ma tante, larmoya la jeune fille.

Marguerite jeta un regard attendrissant au couple. Puis elle s’excusa et partit pour l’Hôtel-Dieu.

Lorsque Marguerite entra dans la chambre de Jeanne, sœur Macé et madame Zacharie Dupuy devisaient à voix basse près de la mourante qui avait les doigts refermés sur son chapelet. Mère Bourgeoys déposa son tricot sur le cabinet de bois, puis elle s’approcha de ses compagnes. Toutes deux paraissaient très lasses.

— Comment est-elle ? s’enquit Marguerite.

— Elle ne semble plus souffrir, répondit madame Dupuy. Et ce qui me surprend le plus, c’est que ses doigts s’activent encore sur les grains de son chapelet.

— Vous pouvez retourner chacune à vos occupations, dit Marguerite.

— Je reste avec Jeanne, décida madame Dupuy. Tout à l’heure, j’irai m’allonger un peu.

— Je vous recommande d’humecter les lèvres de Jeanne de temps en temps, conseilla sœur Macé. Cela lui fera du bien.

— Certainement, acquiesça Marguerite.

La supérieure des hospitalières se retira d’un pas menu et compassé. Madame Dupuy alla se reposer dans la petite pièce voisine. Marguerite posa tendrement la main sur le front de Jeanne. Puis elle reprit son tricot et s’assit près de sa précieuse amie. Ensemble, elles avaient souvent partagé les mêmes rêves, entretenu les mêmes espoirs, pleuré les mêmes départs... Marguerite savait que sa présence réconforterait Jeanne.

Deux heures s’écoulèrent. Marguerite alluma des cierges et se rassit. Puis elle songea aux événements qui agitaient les habitants. Elle n’aimait pas ce qui se tramait avec le comte de Frontenac et le gouverneur Perrot, ce cupide et ambitieux personnage qui avait commencé à monter la population contre le représentant du roi. Du reste, le gouverneur général avait pratiquement le champ libre. L’intendant Talon n’avait pas été remplacé et monseigneur de Laval prolongeait son séjour en France. Ce n’était plus comme avant ! Monsieur de Maisonneuve n’avait pas de ces ambitions mercantiles. Et si tel avait été le cas, mademoiselle Mance aurait certainement dit son mot.

De temps à autre, Marguerite se levait et contemplait le visage apaisé de Jeanne. Après un moment, comme respirant avec elle, ses yeux attendaient le soulèvement de la poitrine abritant le cœur d’une mère qui achevait de battre pour ses enfants de Ville-Marie. Les respirations se faisaient de plus en plus distantes, comme si la vie abandonnait tout doucement le corps de l’agonisante. Marguerite entendait les longs soupirs qui s’étiraient. Elle pressentait que la fin était imminente. Elle délaissa son ouvrage sur sa chaise et alla prévenir madame Dupuy. Cette dernière revint dans la chambre et se mit aussitôt à prier. Il ne servait à rien d’alerter les hospitalières, de les soustraire au sommeil ou aux soins des malades qu’elles pouvaient encore soulager. On ne pouvait plus rien pour mademoiselle Mance…

Vers dix heures, la nuit emporta la vie de la soignante. Madame Dupuy se mit à pleurer. Marguerite se recueillit quelques instants avant d’aller prévenir sœur Macé. Peu après, dans le calme du soir, la cloche de l’Hôtel-Dieu tinta, annonçant à Ville-Marie qui s’endormait qu’une de ses âmes les plus nobles venait d’expirer.

Au matin, des pas décidés se firent entendre dans les couloirs silencieux de l’hôpital. On frappa doucement à la porte entrouverte. À travers les rideaux de Bergame, le jour avait pénétré dans la pièce, luttant avec la pâle lueur des cierges. Le greffier et le bailli entrèrent, chapeau à la main.

Lentement, Charles d’Ailleboust des Musseaux – le bailli de Montréal – s’approcha de la morte. Il s’inclina devant elle avec une gravité empreinte de sympathie.

— On vient apposer les scellés sur les meubles et les effets de mademoiselle Mance, dit-il.

Le soir, lors d’une touchante cérémonie, un coffret d’étain renfermant le cœur de mademoiselle Mance fut déposé sous la lampe de la chapelle de l’Hôtel-Dieu.

Les obsèques furent célébrées par Dollier de Casson – partiellement rétabli – dans la chapelle bondée de l’hôpital. Tous les religieux et le petit peuple reconnaissant rendirent un ultime hommage à celle qui avait toujours veillé sur le berceau de Ville-Marie.

Dans un des premiers bancs, monsieur le comte de Frontenac – flanqué de sa garde rapprochée – avait mis en berne ses grands airs. Il resta impassible malgré les regards désenchantés qu’il sentit peser sur lui durant toute la cérémonie.