Scène Première
ATALIDE, seule.
Hélas ! je cherche en vain : rien ne s'offre à ma vue.
Malheureuse ! Comment puis-je l'avoir perdue76 ?
Ciel, aurais-tu permis que mon funeste amour
Exposât mon amant tant de fois en un jour ?
Que pour dernier malheur, cette lettre fatale
Fût encor parvenue aux yeux de ma rivale ?
J'étais en ce lieu même, et ma timide main,
Quand Roxane a paru, l'a cachée en mon sein.
Sa présence a surpris mon âme désolée ;
Ses menaces, sa voix, un ordre m'a troublée,
J'ai senti défaillir ma force et mes esprits.
Ses femmes m'entouraient quand je les ai repris ;
À mes yeux étonnés leur troupe est disparue.
Ah ! trop cruelles mains qui m'avez secourue,
Vous m'avez vendu cher vos secours inhumains,
Et par vous cette lettre a passé dans ses mains.
Quels desseins maintenant occupent sa pensée ?
Sur qui sera d'abord sa vengeance exercée ?
Quel sang pourra suffire à son ressentiment ?
Ah ! Bajazet est mort, ou meurt en ce moment.
Cependant on m'arrête, on me tient enfermée.
On ouvre ; de son sort je vais être informée.