S’il est une chose que les humains ont toujours eue en commun, c’est le sexe. Que ce soit en solitaire ou accompagnés, la plupart d’entre nous en ont envie et ont des relations sexuelles. Sans, la vie serait plus ennuyeuse et l’espèce humaine n’existerait plus sur terre. Le sexe est l’une des activités les plus naturelles auxquelles nous nous livrons et, que nos rapports charnels soient homosexuels ou hétérosexuels, ils ne sont pas très différents de ceux des autres animaux.
Il y a tout de même une différence : l’homme est la seule espèce animale qui en ait honte. Nous nous cachons pour faire l’amour, du moins en règle générale. Cette pudeur a conduit à ce que le sexe soit entouré de mystère et de doutes : nous n’avons aucune idée de ce que font les autres, nous ne savons pas si nos désirs sont acceptables et nous ne pouvons jamais être tout à fait certains d’être à la hauteur. Paradoxalement, le sexe reste une expérience solitaire malgré le duo qu’il implique.
C’est particulièrement vrai à la puberté, au tout début de la vie sexuelle.
Aujourd’hui, on écrit beaucoup sur le sexe. Les adolescents (filles et garçons) passent des heures à regarder de la pornographie. Les vidéos à caractère sexuel se répandent sur les médias sociaux, et on drague en s’envoyant des snaps de pénis érigés ou de mamelons durcis. Certains affirment que nous vivons dans la société la plus ouvertement sexualisée de tous les temps.
Ce phénomène est à l’origine d’une singulière contradiction. Nous avons un accès exceptionnel à des sources de savoir et d’inspiration sur le corps, le désir et les envies. Ce savoir est à la portée de quelques clics. Et pourtant, cette mine d’informations ne semble pas nous donner plus d’assurance, au contraire.
Ce que l’on voit sur Internet, ce ne sont que des représentations, des images. Les idéaux de la sexualité se sont élevés et en même temps le manque d’assurance demeure. Quand le désir nous anime, nous continuons de vouloir nous cacher, alors que nous vivons dans une société qui nous incite à tout partager. Ce paradoxe peut paraître accablant et nous pensons qu’il est la raison pour laquelle un certain nombre de femmes ont le sentiment d’avoir une libido trop faible, pas assez d’orgasmes et une vie sexuelle qui manque de piment.
Notre image de la réalité doit changer. Dans cette partie du livre, nous souhaitons parler de ce qu’on pourrait qualifier de vie sexuelle normale. “Normale” dans le sens de “ce que fait la majorité”, sans insinuer le moins du monde que tout ce qui s’en écarte est mal ou honteux. La sexualité se présente sous mille formes et vous seule savez ce qui est bien pour vous. Nous espérons pouvoir contribuer à une approche décontractée du sexe et vous donner quelques conseils favorisant une vie sexuelle sereine et satisfaisante.
Dans la vie, peu d’expériences sont aussi mythiques que le premier rapport sexuel. Les attentes à l’égard de sa propre prestation et de celle de son partenaire peuvent être monstrueuses et il est difficile d’imaginer par avance ce que nous allons vivre.
Du coup, quand elles font l’amour pour la première fois, les filles sont parfois déçues d’elles-mêmes ou de leur partenaire. Vous n’avez pas joui ? Les positions sur lesquelles vous vous étiez documentée étaient compliquées à mettre en œuvre ? Il a perdu son érection au bout de dix secondes ? Elle n’a pas touché votre clitoris ?
Ne perdez pas espoir ! Le sexe, c’est comme tout. Il faut de l’entraînement – et c’est valable pour vous comme pour votre partenaire. Il est important de se dire que la première fois ne sera pas parfaite. Mais s’il ne faut pas s’attendre au Pérou, l’expérience peut toutefois être réussie. Il faut bien qu’il y ait une première fois. Nous avons réuni quelques éléments d’information qui peuvent la rendre aussi agréable que possible.
Dans le film Bare Bea (2004) de Petter Næss (Rien que Bea), nous suivons une bande d’élèves de seconde d’un lycée d’Oslo. Bea est la seule qui n’a jamais fait l’amour. Quand l’une des copines de la bande entre dans le camp des “baiseuses”, le rituel est de lui offrir un gâteau à la pâte d’amandes. À 16 ans et 9 mois, Bea a le sentiment que le monde va s’écrouler si elle n’arrive pas à coucher avec quelqu’un. Dans la vitrine de la pâtisserie, le gâteau lui tend les bras.
Bea n’est pas la seule à s’imaginer que “tout le monde l’a fait sauf elle” et qu’il est urgent de passer à l’acte. Si ce genre de pensées vous traversent la tête, permettez-nous de vous présenter ici quelques données.
En Norvège, l’âge moyen auquel les femmes ont leurs premiers rapports sexuels est environ 17 ans57, mais attention, il ne s’agit là que d’une moyenne et non d’un âge limite. Certaines commencent avant, d’autres après. Seuls 20 % des adolescents font l’amour avant 16 ans. À cet âge, quatre adolescents sur cinq n’ont donc jamais eu de relations sexuelles. Autrement dit, il n’y a pas d’urgence pour Bea.
Même si on souhaite se référer à une moyenne d’âge, il est important de se souvenir que pour “la première fois” les seules personnes concernées sont vous et votre partenaire. Lancez-vous quand vous vous sentez prête, c’est-à-dire quand vous en avez envie (le désir est dans la tête) et que vous êtes excitée (ça, c’est dans le corps). Parfois la tête et le corps ne sont pas tout à fait en phase. Il peut alors être indiqué d’attendre un peu. D’un individu à l’autre, le moment où l’excitation survient varie, tout comme la personne qui la déclenche. Certaines filles se sentent prêtes au collège, d’autres au lycée, et d’autres encore attendent d’avoir 20 ans, 30 ans ou plus.
En Norvège, la première fois se passe souvent avec un amoureux ou une amoureuse du même âge, mais il n’y a là aucune règle. Pour certains, ce sera la personne avec qui ils sortent, pour d’autres une aventure d’un soir ou encore un copain ou une copine. Ça se passera dans la chambre à coucher ou derrière le bloc sanitaire d’un festival. Il n’y a rien qui soit bien ou mal, tant que les deux participants en ont envie.
Souvenez-vous simplement que même si vous et votre partenaire êtes vraiment très excités et que vous voulez faire l’amour tout de suite, il est préférable de trouver un endroit où vous ne gênerez personne. Par exemple, ce n’est pas très cool de se retrouver dans un avion, à côté d’un couple en train de baiser. Ellen, qui en a fait l’expérience sur un vol pour New York, peut le confirmer. Que les tourtereaux aient prétendu ne parler ni l’anglais ni le norvégien, alors qu’ils venaient de toute évidence de la ville de Kristiansand, a été la goutte d’eau qui a fait déborder le vase. Soyons respectueux, n’importunons personne.
On se demande souvent où se situe la frontière de la virginité : que faut-il avoir fait pour considérer qu’on a eu un rapport sexuel. Peut-on par exemple se livrer à certains actes sexuels et être vierge malgré tout ? Est-on vierge si on a eu un rapport sexuel anal, mais pas vaginal ? Quid du sexe buccal et des doigtés ? Qu’est-ce qui compte, qu’est-ce qui est du vrai sexe ? Nous ne détenons pas la vérité, mais nous sommes d’avis qu’on attache bien trop d’importance aux étiquettes. Il n’y a pas de sexe “bon” ou “mauvais”, encore moins de “vrai” ou de “faux” sexe. C’est vous qui déterminez le caractère de votre vie sexuelle. Quand on parle de “rapport sexuel” il peut être question de sexe oral, vaginal, anal ou avec les doigts. On peut avoir des relations sexuelles géniales sans coït vaginal traditionnel. Il serait totalement absurde de prétendre qu’une fille lesbienne est vierge tant qu’elle n’a pas eu de rapport sexuel vaginal avec un homme.
De nos jours, la plupart des jeunes ont une petite idée de ce que le sexe peut impliquer, et ce n’est pas en classe qu’ils l’ont appris. La plupart ont déjà vu des images ou des vidéos pornographiques58. En dépit (et peut-être à cause) de cela, nombre d’entre eux craignent de ne pas être assez habiles lors de leur première fois. Ils se demandent : et si je ne suis pas assez bon ? Et si il ou elle n’est pas fan de ce que je lui fais ?
Nous l’avons dit : lors de votre premier rapport sexuel, attendez-vous à ce que les choses soient laborieuses. Quoi que vous fassiez, ce ne sera pas comme dans un film porno. Ces films-là, comme tous les autres, ont recours à des artifices, à beaucoup d’invention. Le porno a beau s’inspirer du réel, ce qu’il montre n’est pas toujours réalisable. C’est un peu comme la trilogie du Hobbit. Les montagnes existent réellement, mais on n’y trouve pas de dragons pour autant. Et si tel avait été le cas, ils n’auraient sans doute pas eu la voix de Benedict Cumberbatch.
Il ne faut jamais oublier que les acteurs pornographiques sont comme des sportifs de haut niveau : ils n’en sont pas à leur coup d’essai. Aux Jeux olympiques, Kjetil Jansrud descend la piste avec une grande facilité, mais vous vous briseriez sans doute la nuque si vous essayiez de faire comme lui la première fois que vous chausseriez des skis.
Ne cherchez pas à réaliser la performance de la célèbre actrice porno Stoya. Vous n’arriveriez pas à adopter les postures sophistiquées du Kamasutra au premier essai. Vous n’y arriverez même probablement jamais, et peu importe, car vous n’en avez pas besoin pour prendre votre pied. Quand c’est la première fois, la maladresse l’emporte, et c’est normal. C’est un peu le charme de la chose. Vous avez peut-être l’impression d’avoir un bras en trop et pas suffisamment de jambes, mais avec l’entraînement, les choses deviendront plus faciles.
Il est important de ne pas avoir d’attentes trop énormes quant à votre propre prestation, mais ce n’est pas tout. Soyez bienveillante avec votre partenaire. La première fois que vous ferez l’amour ensemble, non seulement il ou elle ne saura pas ce que vous aimez, mais il ou elle aura sûrement autant le trac que vous. Quoi qu’il en soit, débriefer après coup n’est pas une mauvaise idée. Qu’est-ce qui était bien ? Y aura-t-il une prochaine fois ? Si oui, que ferez-vous autrement ?
Nous l’avons dit : le sexe peut se pratiquer de diverses manières et le réduire aux seuls rapports sexuels vaginaux exclut trop de monde. Contrairement à ce que notre société hétérocentrée veut nous faire croire, un rapport sexuel ne se déroule pas forcément entre une femme et un homme. En Norvège, environ une femme sur dix a fait l’expérience de relations sexuelles avec une personne du même sexe59. Nous allons néanmoins consacrer un peu plus de place au premier rapport sexuel vaginal, car c’est le sujet sur lequel on nous pose le plus de questions.
Avant de s’essayer au sexe vaginal, un nombre phénoménal de filles se pose les questions suivantes : Est-ce que je vais saigner ? Est-ce que ça va faire mal ? (Elles ont très souvent peur que ce soit trop étroit.) Comment faire entrer quelque chose là-dedans ? Je n’arrive même pas à mettre un tampon !
Faire entrer quelque chose d’aussi gros qu’un pénis dans le vagin peut paraître spectaculaire, mais il y a largement la place. Le vagin est extrêmement flexible, et quand vous êtes excitée, il s’étire en longueur et en largeur. On s’imagine souvent que le vagin d’une femme qui n’a jamais eu de relations sexuelles est plus étroit que celui d’une femme qui en a eu. Vous avez sûrement entendu dire que plus on a eu de rapports, plus le vagin est relâché. C’est faux.
Le vagin est un tube musculaire robuste, dont vous pouvez vous-même contrôler le diamètre. Ce variateur fonctionne indépendamment du nombre de pénis ou de godemichés qui y sont passés. Un pénis pénétrera plus facilement dans le vagin si vous êtes bien détendue, et, à l’inverse, si vous vous crispez, il pourra être difficile d’y faire entrer quoi que ce soit. Vous pouvez resserrer votre vagin et le rendre ainsi plus étroit même si vous avez eu beaucoup de relations sexuelles. Et en vous servant activement de vos muscles vaginaux pendant l’acte sexuel, vous avez la possibilité de moduler la friction entre le vagin et le pénis. Faites vos expériences !
De nombreuses filles ont le trac avant leur premier rapport sexuel, et ce n’est pas étonnant avec toute cette pression ambiante. Ce n’est pas grave d’être tendue, mais si vous l’êtes trop, la nervosité peut rendre l’expérience désagréable. Quand on est stressée, on a vite fait de serrer inconsciemment les muscles du vagin, rendant difficile d’accueillir quoi que ce soit. Du coup, le rapport peut même faire mal.
Quand les femmes sont excitées, le sexe produit souvent plus d’humidité. Ce fluide opère alors comme un lubrifiant sécrété par le corps. Ce n’est pas vrai pour toutes les femmes. Il est parfaitement possible de se sentir excitée sans que le vagin ne se lubrifie, et inversement. Vous pouvez être mouillée sans ressentir le moindre désir. Vous trouverez davantage d’informations à ce sujet dans le passage sur le désir. Si vous êtes très tendue, l’excitation et la lubrification sont moins intenses. Cela peut vous arriver même si vous aviez décidé que vous vouliez faire l’amour. D’une manière ou d’une autre, la nervosité peut empêcher votre corps d’obéir à votre volonté.
Si votre vagin est sec et que sans le vouloir vous le serrez, sa paroi pourra facilement s’érafler et saigner légèrement. Ces éraflures sont sans gravité, mais elles peuvent être désagréables. Le secret est d’y aller tranquillement la première fois. Passez du temps à vous embrasser, attardez-vous sur les préliminaires, et il vous sera plus facile de détendre vos muscles. Si vous vous donnez du temps pour être vraiment excitée, vous produirez aussi davantage d’humidité.
Certaines filles ne produisent pas beaucoup d’humidité, quoi qu’il advienne, même si elles se détendent, font de longs préliminaires et ont envie de sexe. À l’inverse, d’autres ont le sexe plus humide alors qu’elles ne se sentent pas excitées. Parfois, la connexion entre cerveau et organes génitaux ne se fait pas. La bonne nouvelle, c’est qu’il existe des solutions alternatives à la lubrification naturelle du vagin. La salive ou un lubrifiant du commerce sont tout aussi efficaces. Très souvent, le lubrifiant rend l’expérience plus agréable – pourquoi ne pas en utiliser la première fois que vous faites l’amour puisque vous ne pouvez pas deviner comment votre corps va réagir ?
Et puis il y a l’hymen, cette épineuse question à laquelle nous avons déjà consacré tout un passage. Rappelons ici quelques points. Il n’est pas certain que votre hymen saigne la première fois que vous faites l’amour. Vous avez à peu près autant de chances de saigner que de ne pas saigner. Et on ne pourra pas voir sur votre sexe si vous avez déjà eu des rapports sexuels ou non. L’hymen n’est pas une membrane fermée, c’est une couronne flexible de muqueuse à l’entrée du vagin. Ne dépensez donc pas trop d’énergie à vous tracasser à son sujet. Souciez-vous plutôt de choses graves comme les changements climatiques, la situation des réfugiés ou encore les lacunes de l’éducation sexuelle à l’école. L’hymen ne vaut pas d’insomnies !
Vous voilà bien renseignée sur ce qui se passe dans le vagin quand vous avez un rapport sexuel. Mais d’un point de vue purement pratique, comment faut-il s’y prendre ? Nous vous proposons deux manières concrètes de procéder pour faire l’amour avec un garçon pour la première fois, mais vous pouvez très bien choisir de faire autrement. Après tout, c’est votre vagin. Ces deux propositions sont différentes, mais tout aussi bonnes l’une que l’autre.
La première, bien que très traditionnelle, est à considérer absolument. C’est la “position du missionnaire”. Elle est rarement montrée dans les films pornos parce que le spectateur ne verrait alors aucun sexe en action (et que serait le porno sans l’exposition des organes sexuels ?). Pourtant, dans la vraie vie, le missionnaire est champion des premiers rapports sexuels. Dans la position du missionnaire, la fille est allongée sur le dos et le garçon couché entre ses jambes, poitrine contre poitrine, ventre contre ventre. Le pénis entre dans le vagin et le garçon va et vient au-dessus de la fille. Ce n’est pas une position active pour elle, mais c’est bien de commencer par là pour plusieurs raisons : vous avez tous les deux pleinement accès au corps de l’autre, vous voyez le corps de l’autre, vous pouvez vous embrasser et, surtout, vous pouvez observer les réactions de l’autre, et savoir à tout moment s’il se sent bien. C’est particulièrement important la première fois, quand vous êtes tous les deux un peu anxieux. S’il y a trop de contact visuel à votre goût, il vous suffit de fermer les yeux.
Pour certaines filles, il est plus angoissant de ne pas avoir le contrôle que de prendre les commandes. Un tas de gens sont terrifiés quand quelqu’un d’autre est au volant et éprouvent le besoin d’être copilotes. C’est votre cas ? Alors mieux vaut prendre les rênes vous-même. Vous voilà au-dessus de lui. Si le garçon est sur le dos et que vous êtes sur lui, vous serez en bonne position de départ. C’est un peu comme un missionnaire inversé. Les genoux de part et d’autre de ses hanches, vous vous placez sur son pénis. Même si on dit souvent que, dans cette position, la fille chevauche le garçon, personne ne vous oblige à rester assise bien droite comme sur un cheval. Si vous le souhaitez, vous pouvez prendre appui sur vos avant-bras ou vos mains en les posant sur le lit. Maintenant, c’est avant tout vous qui allez bouger. Vous avez la maîtrise de la profondeur de la pénétration et de la vitesse des opérations. C’est ça l’avantage de cette position !
Tout comme avec la position du missionnaire, les deux partenaires peuvent regarder le visage de l’autre. Certes, cela peut être un peu intimidant, mais cela vous permet aussi de communiquer plus facilement quand quelque chose ne va pas ou, au contraire, quand c’est plutôt sympa.
Malgré l’image propagée par la pornographie, tout le monde ne jouit pas à chaque rapport sexuel. Ce constat est vrai pour les filles comme pour les garçons. L’orgasme est une question d’entraînement, ce n’est pas une chose que vous devez attendre de vous-même ou de votre partenaire la première fois que vous faites l’amour. Pour atteindre l’orgasme, il est important de connaître son corps et de se sentir bien. Certaines femmes jouissent plus facilement quand elles sont dans une relation stable. Pour faire connaissance avec votre corps, vous devez vous exercer. Autrement dit : masturbez-vous. On peut mettre plusieurs années pour jouir avec un partenaire sexuel, toute seule, c’est plus facile, et la pratique fait avancer ! Nous y reviendrons.
Parler avec votre partenaire est important aussi. N’hésitez pas à lui dire ce dont vous avez envie, mais ne vous attendez pas à ce qu’il ou elle vous serve votre orgasme sur un plateau. Il est tout à fait acceptable et normal de prendre les choses en main. Faire l’amour avec un partenaire ne signifie pas qu’il est interdit de s’occuper de soi-même. Vous pouvez montrer à votre partenaire comment vous faites et votre partenaire peut vous montrer ce qu’il ou elle aime.
Le sexe, c’est amusant, mais comme un tas d’autres choses amusantes, ce n’est pas sans risque. Tout comme les ceintures de sécurité et les casques de vélo réduisent les risques de blessures graves, il y a des moyens pour limiter le risque d’infections sexuellement transmissibles et éviter de tomber enceinte.
La contraception est une responsabilité entièrement partagée. Si on est deux à avoir un rapport sexuel, on partage aussi le souci de la contraception. Une grande erreur serait de croire que votre partenaire s’en est occupé. Nous vous conseillons d’être vous-même prévoyante. Cela vaut aussi pour les garçons qui liraient ce livre. Si votre partenaire y pense, c’est bon signe. C’est peut-être une preuve que la personne en question a quelque chose dans le crâne.
La contraception, ça se prépare. Renseignez-vous sur la façon de s’y prendre bien avant votre premier rapport sexuel. Demandez conseil à un médecin ou à l’infirmière scolaire et jetez un coup d’œil au chapitre que nous consacrons à la contraception. Tout ce que vous avez besoin de savoir s’y trouve. Nous recommandons de combiner le préservatif avec une méthode sûre qui empêche une grossesse non désirée. Pour l’instant, les solutions contraceptives concernent presque exclusivement les femmes, mais, par bonheur, des solutions pour les hommes se profilent. Le seul moyen de contraception qui protège des infections sexuellement transmissibles reste le préservatif. Vous pouvez l’utiliser seul, mais prenez garde à ne pas l’abîmer au milieu de vos ébats. Vous pouvez suivre notre école du préservatif plus loin dans ce livre. Et puis, il peut être sage d’avoir sous la main une pilule du lendemain au cas où quelque chose tournerait mal. Nous y reviendrons.
Si vous avez envie de faire l’amour et que vous avez un moyen de contraception, il ne reste plus qu’à vous lancer. Il n’y a que vous qui sachiez si vous êtes prête ou non. Notre principal conseil est de surtout prendre la première fois pour ce qu’elle est : la première fois. Il y en aura d’autres, vous allez devenir plus habile et ce sera mieux. C’est en forgeant qu’on devient forgeron.
À la fin de notre partie sur “l’autre trou”, nous avions laissé un peu de suspens : la zone qui entoure l’anus et celle située juste à son entrée regorgent de terminaisons nerveuses n’attendant que d’être stimulées. Inviter l’anus à se joindre à la fête peut parfois enrichir la vie sexuelle.
D’accord, nous avons un tas de terminaisons nerveuses anales, mais comment s’y prendre pour les stimuler ? N’est-il pas un peu optimiste de croire que l’anus pourrait participer à la fête ? Pour certains, le sexe anal paraît intimidant, voire un peu cracra, relevant de la même catégorie que le martinet et le bandeau sur les yeux. “Quoi ? Quelque chose va entrer là derrière ? On est censée faire l’amour par le trou par lequel on…?”
Le sexe anal est indubitablement pour amants de “niveau avancé”. Il n’est d’ailleurs pas indispensable si on n’en a pas particulièrement envie. Mais cette pratique est de plus en plus répandue chez les couples hétérosexuels. Près d’un jeune Britannique de 16 à 24 ans sur cinq a eu des rapports sexuels anaux au cours de l’année écoulée60. Rien ne porte à croire que les Norvégiens sont différents.
Les gens ont donc des rapports sexuels anaux, mais c’est souvent pour de mauvaises raisons. Malheureusement, on a pu constater que bien trop souvent les filles étaient poussées au rapport anal et qu’elles le vivaient comme une expérience douloureuse et désagréable61. D’après une idée répandue, le sexe anal serait une chose que les filles doivent “apprendre à aimer”. Ce n’est pas acceptable. Le sexe anal doit être consenti et source de plaisir. Si cela ne vous intéresse pas, inutile d’aller plus loin. Imposez vos propres limites. Vous pouvez sauter les pages suivantes.
Si, en revanche, le sexe anal pique votre curiosité, ce chapitre est pour vous. De nombreuses femmes aiment le sexe anal. Cette expression recouvre plein de formes différentes de stimulation de l’anus : sexe avec pénétration du pénis ou d’un godemiché, doigté, sexe buccal ou anulingus, où on lèche l’anus et son pourtour. Ne pas souhaiter avoir de pénis dans le rectum n’empêche pas de tirer autrement plaisir de son anus.
Les conseils que nous donnons ici concernent le sexe anal avec pénétration, du doigt, du pénis ou d’autres objets. Le sexe anal étant un peu différent du sexe vaginal, il y a quelques éléments à connaître avant de vous lancer.
Vous vous souvenez peut-être de l’avoir lu plus haut, l’anus est doté de deux sphincters puissants montés en série : l’un fonctionne par réflexe sans aucune action de votre part, l’autre est dirigé par la volonté. Ce qui est pratique, car nous évitons ainsi de passer notre temps aux toilettes. Ces sphincters maintiennent l’anus complètement étanche, ce qui le rend plissé comme une jupe et cache la véritable taille de l’entrée.
On s’imagine que le rectum est très étroit, bien plus que le vagin. C’est peut-être l’une des raisons pour lesquelles il semble exercer un tel pouvoir magique sur les hommes, mais ce n’est que partiellement vrai. Le rectum pourrait en fait se comparer à un ballon de baudruche, fermé par un nœud en une seule extrémité. Situés tout au bout de l’intestin, les sphincters le referment avec une puissance étonnante, rendant ainsi l’extrémité très étroite. Mais une fois les sphincters franchis, ce n’est pas la place qui manque. Le vagin, en revanche, est un cylindre constitué de muscles sur toute sa longueur, de l’orifice au col de l’utérus. Le vagin peut donc être étroit sur toute la ligne, alors que le rectum est avant tout étroit à son entrée. Et les sphincters ne restent pas aussi serrés tout le temps. Quand vous vous occupez d’eux pendant un certain temps, les sphincters se relâchent et ce n’est plus vraiment étroit nulle part.
En raison de ce “nœud de ballon”, le sexe anal présente quelques défis tout particuliers. Avant un rapport sexuel vaginal, il faut se détendre pour éviter que les muscles ne se serrent et rendent le rapport sexuel difficile. Les sphincters de l’anus, eux, ne fonctionnent pas comme ça. Vous le savez, quand vous êtes complètement détendue, l’anus reste fermé. Il est étanche même quand vous dormez ou que vous êtes en méditation profonde. C’est le sphincter automatique qui travaille. Vous ne pouvez donc pas en élargir activement l’ouverture en vous détendant. Ce que vous pouvez faire, c’est empêcher le sphincter dirigé par la volonté de se serrer davantage. Le sphincter automatique, vous n’avez aucun contrôle dessus, mais, comme nous le disions, avec la stimulation, il va progressivement se relâcher.
Le conseil le plus important est donc de commencer tranquillement. Si vous n’avez jamais rien accueilli dans le rectum, ne pratiquez pas d’emblée le sexe anal avec un pénis érigé ou un godemiché géant. Il faut du temps pour que les sphincters se détendent. Il faut d’abord réussir à détendre celui dirigé par la volonté pour que le sphincter automatique comprenne l’allusion. Expérimentez d’abord avec des objets plus petits, les doigts ou un petit jouet sexuel, et habituez-vous à la sensation procurée. La plupart des femmes ont besoin d’un échauffement avant d’être prêtes.
N’allez pas trop vite, l’anus est vulnérable aux petites déchirures, ce qui peut faire terriblement mal le lendemain. Celles qui ont mal visé et ont reçu un pénis en érection non pas dans le vagin mais dans l’anus savent de quoi nous parlons. Ça fait mal. Pour avoir un rapport anal, il faut être prête et avoir un partenaire patient. Démarrer sur les chapeaux de roues n’est pas une bonne idée.
Une fois que vous êtes lancée, les choses deviennent plus faciles, l’anus se relâche toujours plus. C’est là que nous sommes confrontées à une inquiétude fréquente : est-ce que le nœud de ballon se resserre quand on a fini ? Aïe, et si le tuyau à gaz restait ouvert ? Rassurez-vous, les sphincters vont peu à peu se contracter de nouveau. Cette phase prend juste un peu de temps.
Il est certes possible d’endommager les sphincters à titre permanent, tout comme on peut endommager n’importe quelle partie de son corps, mais il faut alors y aller très fort. Souvenez-vous que le rectum est fait pour évacuer des choses plus grosses qu’un pénis de taille moyenne. Commencez doucement, avec précaution, refusez ce qui ne vous convient pas, et tout se passera bien.
Pour le sexe anal, il est nécessaire d’aborder l’importante question de la lubrification. Alors que la plupart du temps, le vagin s’humecte de lui-même quand vous êtes excitée, l’anus est difficile à pénétrer sans lubrifiant artificiel, et en cas de trop grande sécheresse, la friction est importante, ce qui favorise les éraflures et les petits saignements.
Certes, les glandes du rectum génèrent elles aussi un peu d’humidité, mais ces sécrétions ne sont pas liées à l’excitation. Tout comme l’intérieur du vagin et de la bouche, l’intérieur de l’intestin est tapissé d’une muqueuse. Les muqueuses produisent de l’humidité. Comme la salive dans la bouche et les sécrétions vaginales dans le vagin, la muqueuse du rectum produit du mucus. Cela l’aide à se protéger des blessures quand elle est irritée par, disons, un pénis. Le rapport sexuel lui-même entraînera donc une petite production d’humidité, mais en quantité insuffisante. Un lubrifiant est donc nécessaire.
Passons maintenant à la grande question : le caca. Tout le monde a entendu des histoires de femmes ayant déféqué sur leur partenaire lors de rapports sexuels anaux. La plupart d’entre nous jugeront la chose dégoûtante, mais, bon, il y a des excréments dans le rectum, il est fait pour ça. Même quand vous ne ressentez pas le besoin d’aller aux toilettes, les excréments s’accumulent dans votre intestin jusqu’à ce qu’il soit plein. Il peut donc y avoir de la matière fécale sur le pénis, le jouet sexuel ou les doigts, et si vous n’y aviez jamais pensé, vous serez peut-être légèrement traumatisée. Le cas échéant, sachez que vous n’avez aucune raison d’avoir honte, rien ne cloche chez vous. Si vos rapports sexuels impliquent l’intestin, c’est le tarif.
Il est toutefois possible de réduire le risque de présence d’excréments. Certaines résolvent le problème en se rinçant le rectum au préalable, à l’aide d’une petite poire qui peut s’acheter en pharmacie. D’autres veillent à passer aux toilettes avant de lancer les opérations.
Lors d’un rapport sexuel anal, vous ne pouvez évidemment pas tomber enceinte, mais vous pouvez tout à fait attraper des maladies sexuellement transmissibles. On s’imagine parfois que les risques de contagion sont moindres en pratiquant le sexe anal. C’est le contraire. Certaines maladies se transmettent plus facilement lors de rapports anaux. Si vous avez des relations sexuelles avec un nouveau partenaire, il est indispensable d’utiliser des préservatifs jusqu’à ce que vous ayez tous les deux fait les tests de dépistage d’infections sexuellement transmissibles. Cela vaut d’ailleurs quelle que soit la forme de rapports sexuels.
Une fois que vous avez obtenu les résultats des tests, les rapports sexuels sans préservatif ne posent plus de problème, sauf que dans le rectum il y a des bactéries intestinales non recommandées pour votre vagin ou votre urètre. Le risque d’infection est très grand et l’hygiène donc vitale ! C’est aussi valable pour les hommes. Soyez donc prudents dans le passage de sexe anal à sexe vaginal, que ce soit avec les doigts ou avec le pénis. Il est judicieux d’utiliser un préservatif pendant les rapports sexuels anaux et d’ôter ce préservatif si vous voulez enchaîner sur du sexe vaginal. Pensez aussi à nettoyer les jouets sexuels que vous utilisez par voie anale.
Il existe également des jouets conçus pour l’usage anal. Ils sont souvent pourvus d’une extrémité évasée qui les empêche de disparaître complètement dans le rectum. Rien ne peut disparaître dans le vagin, puisqu’il ne mesure pas plus de sept ou dix centimètres de long et qu’il est fermé au sommet. L’intestin, en revanche, est pratiquement sans fin. Ce n’est pas cool de devoir se présenter aux urgences parce qu’on a un objet coincé dans le rectum. Mais ces choses-là arrivent, et c’est un divertissement répandu chez les médecins que d’échanger des anecdotes sur toutes ces choses bizarres qu’ils ont dû aller repêcher, que ce soit de grosses bougies, des petites voitures, des iPod ou des bouteilles. Les médecins ont bien le droit de rigoler un peu, eux aussi !
Voilà ce qu’il faut savoir si vous voulez essayer le sexe anal. Dans de bonnes conditions, cette pratique peut être délicieuse pour les femmes comme pour les hommes, à condition que les femmes ne l’adoptent pas pour faire plaisir à l’homme. Comme toute autre forme de sexe, le sexe anal doit avant tout répondre à un désir.
Quand la série américaine Girls a conquis les écrans de télévision norvégiens en 2015, le fait de voir enfin des femmes ordinaires ayant des rapports sexuels ordinaires (qu’est-ce que c’est au juste, d’ailleurs ?) a été jugé révolutionnaire. Au lieu d’orgasmes en série et de sexe torride sur le plan de travail de la cuisine, on découvrait des gestes maladroits, des blancs embarrassants et des tentatives ratées de se présenter chez son petit copain en lingerie sexy. On était frappé de voir à quel point les filles de la série essayaient d’être à la hauteur des idéaux sexuels de la culture populaire, avec plus ou moins de succès. A priori, paroles lubriques et fessées érotiques paraissent sexy, mais quand Adam et Lena s’y mettent, on ne sait plus où se mettre. Girls, ce sont les rêves confrontés à la réalité.
Cette série a été réalisée en réaction à la banalisation du sexe. Autour d’une bouteille de vin rouge avec les copines, on étale les détails les plus intimes de sa vie sexuelle. Les femmes ont pris possession de leur vie sexuelle. C’est cool d’aimer le sexe, cool de savoir ce qu’on veut et c’est tant mieux, pour celles qui y arrivent.
Malheureusement, les attentes sur ce que la vie sexuelle devrait être ne sont qu’une pression de plus dans notre lot quotidien. La sexualité est devenue un terrain de performance supplémentaire. Et c’est seulement en tête à tête avec une bonne copine que les questions les plus honteuses font surface : Est-ce que c’est normal de n’avoir des rapports sexuels que tous les quinze jours ? Est-ce que tu fais des fellations à ton copain chaque fois que vous couchez ensemble ? Je jouis seulement quand je me touche pendant que nous faisons l’amour, c’est normal ?
Parce que c’est quoi, au juste, une vie sexuelle tout à fait ordinaire ? Nous sommes parties à la recherche de sexe conventionnel.
Pour évaluer notre vie sexuelle, nous avons souvent le réflexe de comparer la quantité de nos rapports. Compter, c’est facile, alors que la qualité, c’est subjectif. Quand on interroge des hétérosexuels sur la fréquence de leurs rapports, on obtient la même réponse un peu partout dans le monde occidental : une à deux fois par semaine. Les couples vivant maritalement un peu plus souvent que les couples mariés. Ce sont les célibataires qui ont le moins de rapports sexuels62. Nous disposons de moins d’éléments sur les gays et lesbiennes, mais certaines données portent à croire que la fréquence des rapports sexuels est à peu près la même chez les couples lesbiens que chez les couples hétérosexuels63.
Les Norvégiens ne sont pas différents. Dans une étude norvégienne effectuée auprès de couples de personnes entre 23 et 67 ans, environ 40 % avaient eu des relations sexuelles une à deux fois par semaine au cours du mois écoulé64. Seul un enthousiaste groupe de 10 % avait eu des relations sexuelles trois à quatre fois par semaine ou plus. Le même pourcentage n’avait pas eu de relations sexuelles du tout au cours du mois écoulé. Le reste avait des relations sexuelles tous les quinze jours ou moins.
On sera peut-être surpris de lire que, dans cette étude, il n’y avait pas tellement de différence de fréquence des rapports sexuels selon les groupes d’âge. C’est seulement après 50 ans que la fréquence des rapports commençait à diminuer un peu, mais même après 50 ans plus de 40 % des personnes interrogées avaient des relations sexuelles une ou deux fois par semaine ou plus. Une longue série de travaux nous indique toutefois que l’âge est l’un des principaux facteurs jouant sur la fréquence des rapports sexuels dans une relation. C’est notamment dû au corps qui, avec l’âge, fonctionne moins bien sexuellement. La libido baisse, les hommes ont des problèmes d’érection et les femmes peuvent avoir des muqueuses génitales plus fragiles et plus fines en raison de la baisse du taux d’estrogènes, entraînant alors plus d’inconfort au cours des relations sexuelles. Mais l’âge n’est pas le seul facteur expliquant la fréquence de nos rapports sexuels. La passion amoureuse en est un autre.
Au début d’une nouvelle relation, on peut avoir l’impression de se trouver dans une bulle. Le cerveau est assailli par les messages chimiques transmettant le bonheur, la satisfaction et le désir. Accaparés par la passion amoureuse, on oublie tout ce qui se passe en dehors de cette relation. Le sexe devient plus important que le sommeil, la nourriture et les amis. Il devient un langage commun pour communiquer ce qu’on n’ose pas dire encore avec des mots : c’est toi et moi désormais, nous sommes ensemble, c’est tout ce qui compte.
Mais le quotidien finit toujours par reprendre le dessus. Un soir, alors qu’une main ardente se glisse dans votre culotte, vous vous surprenez à regarder l’heure. “On ne pourrait pas juste faire un peu la cuillère ? Je dois me lever tellement tôt demain”, dites-vous en vous excusant d’un sourire. Y a-t-il un problème dans votre couple pour que vous n’ayez soudain plus envie de faire l’amour à toute heure du jour et de la nuit ? Ou est-ce simplement une évolution normale ?
Une étude allemande qui s’est penchée sur la vie sexuelle de 1 900 étudiants d’une vingtaine d’années en relation de couple stable65 a montré un lien évident entre durée de la liaison et fréquence des rapports sexuels. En moyenne, les couples qui venaient de tomber amoureux avaient des rapports sexuels dix fois par mois, soit deux fois et demie par semaine ; 70 % avaient des rapports sexuels plus de sept fois par mois. Au bout d’un an, la fréquence des rapports sexuels commençait à diminuer. Quand la liaison durait depuis un à trois ans, moins de la moitié des couples avaient des rapports sexuels deux fois par semaine ou plus. Au bout de cinq ans, on atteignait une espèce de plancher. La fréquence des rapports sexuels avait alors diminué de moitié, passant de dix à cinq fois par mois. Ces résultats correspondent à ceux qu’on a pu voir dans d’autres travaux66 et sont valables pour les couples lesbiens67.
Autrement dit, si vous avez l’impression d’avoir moins de rapports sexuels qu’avant, vous n’êtes pas seule. Alors que se passe-t-il ? L’étude allemande faisait quelques observations intéressantes. Au début de la relation, hommes et femmes avaient le même appétit sexuel et le même désir d’intimité et de tendresse. Puis il se passait une chose étrange. Alors que les hommes conservaient le même désir que trois ans auparavant, on constatait une réduction drastique de la libido des femmes après un an de relation. La première année, trois femmes sur quatre disaient avoir souvent envie de sexe. Au bout de trois ans, les chiffres tombaient à une sur quatre. Elles étaient deux fois plus nombreuses qu’au début, de 9 à 17 %, à dire qu’il leur arrivait souvent de manquer d’appétit sexuel.
Ce phénomène est illustré par la fréquence à laquelle les hommes et les femmes en relation de couple font l’expérience d’un rejet quand ils ont envie de sexe. Dans l’étude norvégienne évoquée plus haut, la moitié des hommes disaient se faire éconduire sexuellement de temps à autre, et un sur dix estimait se faire éconduire souvent. Pour les femmes, les chiffres étaient inverses : 90 % des femmes ne se faisaient jamais ou rarement éconduire sexuellement par leur partenaire68.
Ce qui en revanche ne baissait pas, mais augmentait au fil de la relation, était le besoin d’intimité et de proximité des femmes. Chez les hommes, l’envie de câlins chutait au contraire avec le temps. Le cliché est peut-être plus vrai que nous ne voulions l’admettre : les femmes veulent câliner et les hommes veulent baiser. Pourquoi ? Nous l’ignorons. Les auteurs de l’étude allemande considéraient que la meilleure explication se trouvait dans l’évolution. Les femmes se servent inconsciemment du sexe comme d’un moyen de lier l’homme à elle, puis, quand l’objectif est atteint et que l’homme est ferré, elles perdent leur intérêt pour le sexe. D’autres pensent que la réponse réside dans les différences de pulsion sexuelle biologique (nous reviendrons plus tard sur la question de savoir dans quelle mesure le sexe est une pulsion). Enfin, de nombreuses voix soulignent que la société dispose de ce qu’on appelle des “scripts de la sexualité” qui indiquent aux hommes et aux femmes comment ils doivent se comporter. On se dit alors qu’être porté sur le sexe est un élément de ce que la société perçoit comme viril, alors qu’exprimer le même degré d’intérêt pour le sexe quand on est une femme est jugé peu féminin. Cela peut conduire les femmes à tomber plus facilement que les hommes dans un schéma d’asexualité.
Jusqu’ici, nous avons vu que plus la relation remontait à loin, moins on avait de rapports sexuels. En même temps, nous savons que les couples les plus heureux sont ceux qui ont le plus de rapports sexuels. Mais en guise de consolation, il semblerait qu’il existe un plafond. Une étude canadienne portant sur 30 000 personnes a montré que les personnes ayant plus d’un rapport sexuel par semaine ne connaissaient pas d’augmentation de leur niveau de bonheur69. Les humains auraient donc trouvé d’eux-mêmes une sorte de nombre d’or oscillant entre un et deux rapports sexuels par semaine !
En dehors de la fréquence à laquelle nous faisons l’amour, quels sont les facteurs qui participent à déterminer la satisfaction que nous tirons de notre vie sexuelle ? Encore une fois, la réponse est sans doute une évidence : la qualité de la relation de couple70. Il y a une étroite corrélation entre le degré de satisfaction de notre relation et la qualité de notre vie sexuelle. Pour faire simple, une bonne vie sexuelle, c’est une bonne relation de couple. On ne sait pas si c’est une vie sexuelle satisfaisante qui améliore la relation de couple ou l’inverse. C’est probablement un mélange des deux.
Une bonne relation repose largement sur la communication. On peut parler ensemble de sexe et de sentiments. Mais quelle barbe ! Pourquoi doit-on à tout prix parler de sexe ? N’est-ce pas la preuve consommée que la relation est morte sur le plan sexuel ? Ce qui est sexy dans les coups d’un soir et les nouvelles relations, c’est justement l’absence de parlote. On a d’ailleurs parfois tellement peur de parler qu’on n’hésite pas à laisser tomber le préservatif pour ne pas casser l’ambiance. La petite pause discussion est une menace contre le fragile état de mystère et de suspense.
Pourtant, il se trouve que, sur le long terme, les couples les plus satisfaits de leur relation et de leur vie sexuelle sont ceux qui parviennent à avoir une intimité émotionnelle et à partager leurs sentiments, leurs besoins ainsi que leurs attentes71. Être ouvert sur ses désirs et sur ses besoins sexuels, c’est créer de la sécurité, dont découle la satisfaction. Les couples qui parlent de sexe ne sont pas seulement plus satisfaits, ils ont aussi plus de rapports sexuels72.
De nombreux éléments dans une relation peuvent tuer la libido : le stress, le manque de temps en tête à tête, le sentiment de ne pas être à la hauteur sexuellement, une image négative de soi et une mauvaise connaissance de son corps. Quand on a le sentiment de ne pas avoir les mêmes besoins sexuels que son partenaire, on peut rapidement échouer dans un cercle vicieux où l’un prend systématiquement l’initiative et l’autre se refuse. C’est désagréable d’éconduire. On se sent coupable de ne pas parvenir à répondre aux attentes de l’autre et on risque de s’inquiéter à l’idée que son partenaire finisse par se lasser et ne plus avoir envie de rester avec nous. Plus on se fait de souci pour ces choses-là, plus le désir sexuel diminue. On finit par éviter même les câlins ou les baisers innocents de peur d’éveiller des attentes chez son partenaire.
Cette dynamique est souvent présente chez les couples qui cessent de faire l’amour régulièrement et il est naïf de croire qu’on peut s’en sortir sans en parler. Si les couples osaient plus souvent avoir cette conversation dès qu’ils s’aperçoivent que quelque chose cloche, ils pourraient sans doute éviter de nombreux problèmes. Donc asseyez-vous avec votre moitié, posez votre téléphone et ayez une vraie conversation. Votre vie sexuelle en sera peut-être bonifiée.
Maintenant, vous êtes peut-être d’avis que la quantité n’est pas tout, et nous sommes tout à fait d’accord. C’est très bien de faire l’amour une ou deux fois par semaine, mais le sexe peut impliquer beaucoup de choses. On peut sucer et lécher, stimuler le vagin ou l’anus. On peut jouir ou ne pas jouir, s’envoyer en l’air sur le grand lit, sur le canapé ou dans l’ascenseur de l’hôtel. Pour certains, le sexe routinier est l’ennemi à abattre, ils sont nostalgiques de la tension et de l’imprévisibilité de leur vie de célibataire ou des débuts de leur relation de couple.
Une étude australienne de 2006 effectuée sur 19 000 personnes s’est penchée sur la combinaison des pratiques sexuelles choisie lors du dernier rapport sexuel73. 12 % des personnes interrogées avaient eu exclusivement un rapport vaginal. La moitié des personnes interrogées avaient eu un rapport vaginal assorti d’une stimulation manuelle et réciproque des organes sexuels. Un tiers des interrogés avaient de surcroît eu des rapports sexuels buccaux. Sans surprise, on a découvert que plus les mains et la langue étaient impliquées, plus les chances que la femme ait un orgasme étaient grandes.
La notion de “bonne vie sexuelle” est assortie d’énormes attentes. Mais la réalité, c’est qu’une vie sexuelle ordinaire est, par définition, assez ordinaire. Les gens qui baisent comme des lapins sont rares. Quand la passion amoureuse s’émousse, on se lasse un peu. Une minorité de gens pratiquent systématiquement la fellation et le cunnilingus quand ils font l’amour. Et pourtant la majorité des gens sont contents. Et si vous voulez mieux, il n’y a qu’une chose à faire : parler.
Aimer le sexe n’est plus un tabou. C’en est presque devenu un idéal chez les jeunes femmes. Le “forfait perfection” demande aux femmes d’avoir du plaisir dans les relations sexuelles, d’en prendre l’initiative et d’expérimenter de nouvelles choses. Mais que faire quand le désir s’est envolé ou qu’on ne l’a jamais connu ? On peut se sentir terriblement exclue.
L’hiver 2015, Nina a eu le plaisir de rencontrer une mamie tout à fait fascinante, Shirley Zussman, qui était alors âgée de 100 ans. Cette petite dame au dos voûté, aux lèvres charnues et au regard pétillant avait été un témoin de premier ordre de la révolution sexuelle. Titulaire d’un doctorat, elle avait été formée aux côtés de William Masters et de Virginia E. Johnson, connus pour leur “découverte” de l’orgasme féminin. Ils ont inspiré la série de HBO Masters of Sex. Depuis les années 1960, Shirley Zussman exerce en tant que sexothérapeute à New York.
Aujourd’hui encore, elle continue de recevoir des patients dans son bureau fleuri de l’Upper East Side de New York, dont les bibliothèques sont ornées de figurines en bois représentant diverses positions sexuelles. Cette longue carrière lui offre une perspective unique sur un demi-siècle de problèmes sexuels et leur évolution dans le temps : “Avant, les gens venaient avec des problèmes relatifs à l’orgasme, par exemple éjaculation précoce ou absence d’orgasme, maintenant, c’est même l’excitation sexuelle qui fait défaut”, explique-t-elle. D’après Zussman, le sexe pratiqué de nos jours est résolument meilleur que dans les années 1960, mais à quoi bon quand on a la flemme de faire l’amour. Elle en impute la faute à la technologie et à la forte pression du travail. “Les femmes qui viennent me voir sont tellement fatiguées qu’elles préfèrent regarder leur maudit iPhone plutôt que de réserver du temps à leur intimité. Nous oublions de nous toucher, de nous regarder dans les yeux.”
Le Dr Zussman a peut-être raison. On dirait bien que l’absence de désir est la nouvelle maladie féminine. Une grande étude de 2013 a montré qu’en Grande-Bretagne une femme sur trois avait souffert d’un manque de désir au cours de l’année écoulée74. Parmi les femmes âgées de 16 à 24 ans, une sur quatre indiquait un manque d’intérêt pour le sexe. C’est un bien triste constat.
Mais ces femmes-là, à quelle aune mesurent-elles leur absence de désir ? Depuis les années 1960, on opère avec l’espèce de jeu de dominos qu’est le modèle des quatre stades de la réponse sexuelle : Désir – Excitation – Orgasme – Résolution. Le désir est défini comme un souhait d’activité sexuelle ; il inclut les fantasmes et les pensées. Le désir est donc un processus purement mental : j’ai envie de sexe, tout de suite ! L’excitation, en revanche, est à la fois une sensation de plaisir et une réaction purement physique, incluant notamment l’augmentation de l’afflux sanguin dans le sexe, la lubrification et l’élargissement du vagin, l’accélération du pouls, l’augmentation de la pression artérielle et de la fréquence respiratoire.
Ce n’est que récemment que les chercheurs ont commencé à remettre en cause ce modèle. Des enquêtes ont en effet montré que jusqu’à un tiers des femmes ne ressentaient jamais ou rarement d’envie avant les relations sexuelles, qu’elles ne ressentaient donc pas de “désir spontané”, comme on dit dans le jargon. Mais une fois lancées dans un rapport sexuel, la plupart d’entre elles ressentaient toutefois de l’excitation physique et du plaisir. Cela paraît peut-être curieux. Peut-il vraiment y avoir tant de femmes chez qui quelque chose cloche sérieusement75 ?
De plus en plus de voix s’élèvent pour dire non. Chez bien des femmes, le désir est en effet réactif ou responsif, c’est-à-dire qu’il survient en résultat d’une caresse intime ou d’une situation érotique76. L’excitation sexuelle vient avant le désir, si vous voulez, et ces femmes sont donc plus dépendantes de préliminaires et d’intimité pour que l’interrupteur bascule. Les femmes qui ont un désir réactif ont un intérêt réduit pour le sexe et prennent peu d’initiative au lit, mais elles gardent la capacité d’avoir des rapports sexuels délicieux une fois qu’elles sont lancées. Il faut juste être un peu plus à l’écoute du désir.
La sexologue Emily Nagoski s’est donné pour mission d’informer les femmes sur le désir réactif. Dans le livre Come as You Are – Venez/jouissez telles que vous êtes –, elle affirme que le désir est de forme réactive chez près d’une femme sur trois. À l’opposé, nous trouvons 15 % de femmes ressentant le désir “classique” et spontané, l’envie de sexe qui tombe du ciel. Le reste des femmes se situent quelque part entre les deux77. Parfois elles ont envie de sexe sans trop savoir pourquoi, d’autres fois, le sexe leur paraît être une perspective fatigante jusqu’à ce qu’elles sentent leur corps répondre et que la tête se joigne tranquillement à la partie. Seulement 5 % des femmes manquent de tout désir, qu’il soit spontané ou réactif.
Le modèle du désir réactif est en rupture nette avec la représentation idéale du sexe dans la culture populaire. Ce qui explique qu’un certain nombre des filles et des femmes que nous rencontrons ne se reconnaissent pas dans le modèle propagé. Elles se demandent si elles sont anormales parce qu’elles n’ont pas le même intérêt pour le sexe que les autres. Elles pensent que leur copain va les trouver nulles et se sentent coupables de ne jamais prendre l’initiative d’un rapport sexuel. Pour beaucoup d’entre elles, il peut être libérateur d’avoir un autre modèle explicatif. De nombreux éléments portent à croire que le désir réactif est tout simplement une variante parfaitement normale de la sexualité féminine, et non un défaut ou une maladie. Cette classification des types de désirs vaut bien entendu pour l’homme. (Les hommes aussi peuvent avoir un désir réactif. Il est simplement un peu plus rare qu’il s’agisse de leur forme de désir primaire. D’après Emily Nagoski, environ 75 % des hommes connaissent avant tout le désir spontané, contre 15 % des femmes ; 5 % des hommes ont le désir réactif comme forme principale de désir, contre 30 % des femmes.)
Si nous pensons que le désir spontané chez la femme est la norme, c’est en partie parce que cette forme de désir prédomine chez les hommes. Toujours d’après Emily Nagoski, environ trois quarts des hommes connaîtraient un désir de type spontané, et pour une raison x ou y, on part du principe que la sexualité marche de la même façon chez les hommes et chez les femmes. Nous allons bientôt voir que ce n’est peut-être pas le cas.
Le mythe selon lequel l’être humain naîtrait avec une pulsion sexuelle est une autre source de confusion78. Qu’on serait nés tout excités… Les pulsions (notamment à l’origine de la soif, de la faim et de la fatigue) agissent comme un instinct et nous permettent de rester en vie. À un niveau tout à fait inconscient, notre cerveau nous informe que pour maintenir l’équilibre du corps il est temps de faire certaines choses, comme boire, manger ou dormir. Si nous avions une pulsion sexuelle, cela signifierait que nous avons besoin de sexe au même titre que de nourriture, de sommeil et de vêtements chauds. Le sexe serait un besoin fondamental pour survivre. Partant de là, ce n’est pas étonnant qu’on croie avoir un sérieux problème quand on n’a pas d’appétit sexuelI. Si vous en doutez encore, sachez que personne ne meurt de manque de sexe. Le sexe n’est pas une pulsion, mais une récompense79.
Si elle est motivée par le désir, l’activité sexuelle agit sur le cerveau comme une drogue : nous en voulons toujours davantage. Dès que le désir est stimulé, nous commençons à rechercher les occasions de l’assouvir. Et c’est là que nous arrivons à l’argument essentiel d’Emily Nagoski : si dans votre cas, le sexe ne fonctionne pas comme une récompense, parce qu’il est associé à des agressions antérieures, vous fait mal, ou pour la simple raison que vous trouvez ça ennuyeux, le désir diminue. Rien ne marche si le sexe n’est pas perçu par le cerveau comme une récompense. Autrement dit, on ne naît pas excités sexuellement, on le devient.
Nous pouvons en tirer deux enseignements. Le premier : les femmes (ou les hommes) dont le désir sexuel est faible, de manière générale ou parce qu’ils ressentent uniquement du désir réactif, ne sont pas nés avec une tare et ne sont pas malades non plus. Certaines personnes adorent le chocolat, d’autres non. Nous ne disons pas pour autant que celles qui n’aiment pas le chocolat ont un problème, même si la plupart des cerveaux réagissent positivement à cette combinaison sublime de matière grasse et de sucre. Mais pourquoi serait-il si grave de considérer ces personnes comme malades ? Eh bien, parce que quand on se sent comme un ovni, cela tue le dernier petit reste de désir qu’on avait encore en soi.
Le second enseignement est que le désir sexuel n’est pas une constante. Nous avons toutes le potentiel pour être excitées, mais le désir varie selon le degré de plaisir et de satisfaction que nous retirons de notre vie sexuelle et de notre situation générale. En outre, notre histoire sexuelle contribue à former notre désir.
C’est ce qui explique pourquoi la libido baisse et remonte par vagues au gré de la vie et de nos relations. En même temps, cela nous offre de formidables possibilités d’agir sur notre désir. Quand on comprend comment fonctionne le système de récompense du cerveau, on peut le manipuler. Et nous arrivons ici à la plus grande différence entre les hommes et les femmes.
Les sexologues débordent d’inventivité. Dans le cadre d’une série d’expériences, on a mesuré le débit sanguin des organes génitaux d’hommes et de femmes. Les appareils placés sur leur pénis ou dans leur vagin ont permis d’obtenir une mesure de leur excitation physique. Il s’agit là de réflexes qui ne peuvent pas être commandés consciemment. Lors de ces expériences, les gens regardaient du porno : sexe hétéro, sexe homo, sexe tendre, sexe violent, et même sexe entre singes. Autrement dit, il y en avait pour tous les goûts. Les gens devaient indiquer à quel point ils se sentaient excités pendant qu’ils regardaient les divers extraits de films. On a alors découvert une chose très intéressante80.
Chez les hommes, la rigidité de la verge correspondait à 65 % au degré d’excitation ressentie81. La tête faisait donc équipe avec les réponses automatiques du bas-ventre masculin. Ah, je bande, donc je dois avoir envie de sexe, se dit l’homme. (C’est évidemment une simplification. Les hommes peuvent aussi avoir des érections sans quelconque désir sexuel, la fameuse érection matinale par exemple ou celle de l’ado appelé au tableau pour faire la démonstration d’un calcul.) Le désir des hommes est en effet étroitement lié aux cabrioles du pénis, et des comprimés comme le Viagra fonctionnent donc incroyablement bien quand les hommes ont du mal à avoir une érection. Le Viagra n’agit pas sur le cerveau, mais fait simplement rétrécir les vaisseaux sanguins par lesquels le sang ressort du pénis, de sorte que le pénis reste gorgé de sang et donc plus dur. Si le pénis est de la partie, l’essentiel est fait.
Chez les femmes, en revanche, on ne trouve que 25 % de recoupement entre la tête et les désirs du bas-ventre82. La corrélation est suffisamment faible pour qu’on ne puisse absolument pas déterminer si une femme a envie de sexe ou non en se fondant sur la lubrification ou l’irrigation sanguine de son organe sexuel. Le bas-ventre des femmes gonfle et s’humecte aussi bien quand elles voient des hommes qui couchent avec des hommes que quand elles voient des singes copuler, mais elles ne se sentent pas nécessairement excitées pour autant. Le bas-ventre des femmes réagit aussi largement au sexe lesbien, souvent plus qu’au porno hétéro. Chose plus troublante encore, on a constaté que certaines femmes connaissaient une excitation strictement physique et atteignaient l’orgasme pendant une agression83. Qu’est-ce que cela signifie ? Que le sexe entre singes fait kiffer les femmes ou que certaines filles aiment se faire violer ?
Non, non et encore non. Cela signifie que les femmes peuvent connaître ce que les sexologues appellent arousal non-concordance ou subjective-genital (dis) agreement, phénomène plus rare chez les hommes. Ces termes compliqués signifient que, en ce qui concerne le désir, il n’y a pas de correspondance entre le cerveau et la minette. Les deux parties du corps ne parlent manifestement pas la même langue, et ce sont les femmes dont le désir sexuel est le plus faible qui obtiennent le score le plus élevé en non-concordance de la réponse physiologique et du désir. Leur cerveau ne parvient presque pas à capter les signaux du bas-ventre84.
Le désir de la femme habite avant tout dans sa tête. Il ne nous suffit pas, comme c’est souvent le cas pour les hommes, d’avoir une personne séduisante dans notre lit ni d’avoir le sexe humide et gonflé. Il nous en faut davantage. C’est notre cerveau, pas notre sexe, qui doit être stimulé. C’est pourquoi le Viagra fonctionne rarement chez les femmes, même si on a vraiment essayé85. Pour agir sur le désir sexuel des femmes avec des cachets, il faut jouer sur les dédales complexes du cerveau, et ça, c’est de la médecine à un tout autre niveau.
On a plusieurs fois tenté de développer un “comprimé rose” pour le désir sexuel des femmes. On a par exemple essayé de leur administrer de la testostérone, puisqu’on pensait que cette hormone sexuelle était centrale dans le désir. Le problème, c’est qu’en raison des effets potentiellement nuisibles au fœtus, en cas de grossesse, on ne souhaite pas donner de testostérone aux femmes en âge de procréer. La plupart des études ont donc été effectuées sur des femmes n’ayant presque pas de testostérone à la suite d’un cancer ou parce qu’elles avaient atteint l’âge de la ménopause. Dans la plupart des cas, on a constaté un effet positif modéré de l’apport de testostérone sur le désir sexuel86. Dans la meilleure étude qui ait été faite sur des femmes un peu plus jeunes, entre 35 et 46 ans, on n’a trouvé aucune augmentation du désir87. Sur un mois, les femmes ayant reçu une dose moyenne de testostérone avaient toutefois eu 0,8 “événement sexuel satisfaisant” de plus que les femmes qui avaient pris un placebo.
Les recherches portent largement à croire que, hormis chez les femmes qui en ont un niveau minimum très bas, l’apport de testostérone a un effet très limité. Que vous ayez beaucoup ou peu de testostérone ne semble pas pouvoir indiquer où vous vous situerez sur l’échelle du désir88. Il semblerait tout simplement que les hormones sexuelles n’exercent pas autant d’effet qu’on le pensait sur le désir sexuel féminin89.
D’autres médicaments ont été testés. On a beaucoup parlé de l’hormone de synthèse Melanotan, aussi appelée Barbie drug, parce que des adolescentes, dont Sophie Elise Isachsen, célèbre blogueuse norvégienne, l’achetaient illégalement sur Internet. La Melanotan imite les hormones du corps qui nous font bronzer en été et fabriquent nos grains de beauté. Au départ, elle a été développée comme un autobronzant en cachet. Puis on s’est aperçu qu’elle avait pour effets secondaires de réduire l’appétit et peut-être d’augmenter le désir sexuel. Le rêve de la femme parfaite : dorée, mince et chaude. On comprendra que l’industrie pharmaceutique en ait eu plein les mirettes.
Le problème, c’est que la Melanotan s’est peu à peu révélée pouvoir avoir des effets secondaires potentiellement mortels. Tous les essais cliniques de ce médicament ont été arrêtés. Le laboratoire a ensuite découvert qu’il pouvait fabriquer une variante moins dangereuse, appelée le Bremelanotide. Après des années de tests, ce médicament est maintenant dans la dernière phase d’études et il semblerait qu’il puisse être homologué. Mais ce médicament très cher doit être administré par injection et, même alors, ses effets ne sont pas spectaculaires. Les utilisatrices connaissent en moyenne un demi-“événement sexuel satisfaisant” de plus par mois que celles qui ont eu une injection de placebo90. Pas de quoi sauter au plafond.
Initialement développée comme un antidépresseur, la flibansérine a été homologuée en août 2015 pour une utilisation chez les personnes auxquelles on a diagnostiqué un faible désir sexuel. Il faut prendre ce médicament (qui est hors de prix) tous les jours, sans jamais consommer d’alcool, en raison du risque de chute de tension pouvant être mortel. Les effets secondaires comme les nausées, les vertiges et la fatigue sont relativement fréquents. Et là encore, l’effet n’est pas spectaculaire. Les utilisatrices ont entre 0,4 et 1 “événement sexuel satisfaisant” supplémentaire par mois91.
En d’autres termes, les comprimés ne semblent pour l’instant pas être le remède miracle qu’on espérait. Quand vous tenez compte des effets indésirables, du coût et de l’effet produit, aucun des médicaments mentionnés ne vaut grand-chose. En revanche, ce type de travaux a souligné le rôle que jouent nos sentiments dans notre vie sexuelle et pour notre satisfaction. Les chercheurs ont en effet noté un remarquable effet placebo, plus important que presque n’importe quel autre “médicament”. Une étude sur le Viagra a montré que 40 % des femmes à qui l’on donnait des placebos connaissaient une amélioration de leur libido92. En prenant un comprimé, elles basculaient dans un nouveau mode, adoptaient un nouveau rôle, et parvenaient à rompre avec leurs vieux schémas éprouvés. Elles cessaient de se considérer comme des femmes sans désir.
L’effet placebo nous montre la chose suivante : le désir sexuel est dans la tête, et il peut être manipulé. Mais comment ?
La sexologue Emily Nagoski nous l’explique très bien93. Imaginez que le cerveau trône au sommet du corps comme un directeur sensible. Notre directeur reçoit constamment des signaux du corps et de l’environnement, qu’il interprète et assemble en un tableau finement composé. Le système nerveux et les signaux qu’il adresse au cerveau sont construits très simplement, un peu comme les codes d’un ordinateur où tout n’est que 0 ou 1. Nous avons une voie de signalisation qui dit “vas-y”, appelée excitation, et une autre qui dit “ralentis”, nommée inhibition. L’équilibre entre signaux excitateurs et inhibiteurs détermine à tout moment ce que le cerveau va décider de faire du corps. Si c’est sur le frein que vous appuyez le plus fort, peu importe que vous mettiez un peu d’accélérateur en même temps, c’est l’ensemble qui est déterminant.
Imaginez que chacune des raisons – consciente ou inconsciente – vous dissuadant d’avoir un rapport sexuel agit comme une légère pression sur le frein : le stress, la dépression, une mauvaise image de son corps, un sentiment de culpabilité ou encore la peur de ne pas avoir d’orgasme. Ces légers coups de frein peuvent s’accumuler jusqu’à ce que vous ayez le pied au plancher. Résultat : l’arrêt complet. Pour cesser d’appuyer si vigoureusement sur le frein, le cerveau doit recevoir un signal encore plus intense pour allumer le voyant “vas-y”. Ces signaux peuvent être l’amour et le plaisir. Le gain doit dépasser la mise. Parfois, cela se fait tout seul, par exemple quand nous sommes amoureux. Sinon, le travail consiste à permettre aux signaux “vas-y” de dominer et à rendre l’action du frein aussi faible que possible. Cela peut paraître un peu flou, mais, en réalité, ça n’a rien de magique. La première étape est de reconnaître que le désir sexuel ne vient pas tout seul et que ce n’est pas non plus un trait de caractère constant qu’on aurait de naissance. Ensuite, vous devez prendre le temps de réfléchir à ce qui vous allume et ce qui vous éteint. Suivez le conseil de Nagoski et dressez une liste.
1. Qu’est-ce qui me coupe l’envie ?
Par exemple : l’amour pile à l’heure du coucher, parce que j’ai peur de ne pas être assez reposée le lendemain. Être triste ou abattue. La peur d’une approche quand je n’ai pas envie et que je vais donc devoir repousser, encore. L’incertitude qui entoure notre relation. La jalousie. Le sexe routinier, quand je sais exactement ce qui va se produire. Le besoin de mon partenaire que je jouisse pour qu’il se sente bon amant. Le stress ou les préoccupations concernant des choses que j’aurais dû faire, mais que je n’ai pas eu le temps de faire dans la journée. Me sentir laide. N’être pas douchée et me sentir sale. Que nous checkions notre portable au lit.
2. Qu’est-ce qui me donne envie ?
Par exemple : savoir que j’ai tout mon temps, qu’il n’y a pas d’urgence. L’amour vite fait sans parler. L’idée d’un orgasme. Me sentir bien dans mon corps. Un livre ou un film érotique, ou simplement du porno. L’amour après le sport quand les endorphines affluent et que le sang circule encore vite. L’amour en plein jour. La protection de l’obscurité totale. Des draps frais. Me sentir aimée. Les compliments. Un environnement inhabituel. Un environnement familier. Voir mon partenaire prendre son pied. Prendre mon pied. Être chatouillée dans le dos. Oser expérimenter au lit. Savoir que ce que je fais toujours au lit est précisément ce que mon partenaire préfère.
Quand vous aurez rédigé votre petite liste, le véritable travail commencera. Vous allez mettre en place les conditions pour que la balance penche vers le “vas-y”. Cela signifie supprimer autant de freins que possible, tout en créant un environnement qui attise votre désir.
Si vous êtes en couple, ce travail est quasiment impossible à faire seule. Vous devez impliquer votre partenaire et lui dire ce qui vous embrase et ce dont vous avez besoin. Dans les relations très enlisées, les sexothérapeutes recommandent même souvent d’arrêter toute activité sexuelle pendant un certain temps, ou d’établir des règles de conduite pour le sexe, par exemple en choisissant un jour fixe et un horaire pour faire l’amour. Pas très sexy, peut-être, mais cette démarche a un but précis. En interdisant les rapports sexuels, on neutralise toutes les attentes qu’on peut ressentir autour des rapports sexuels, on crée un vide pour que le désir revienne de lui-même. On ne peut pas le forcer et le sentiment de devoir ressentir du désir constitue un frein supplémentaire.
Il ne faut pas pour autant cesser d’être proches l’un de l’autre. Chez bien des personnes, c’est d’ailleurs le phénomène inverse qui se produit ; parce qu’on a le loisir d’être tendre sans ressentir la pression d’une chose à laquelle on n’est pas prêt. Il faut être gentil et patient avec soi-même. Si votre partenaire ne juge pas cela important, vous aurez alors peut-être mis le doigt sur une partie du problème.
Forte de ses cent ans d’expérience, mamie Zussman a compris quelque chose d’essentiel. Le désir sexuel ne tombe pas du ciel. Il est étroitement lié aux circonstances de notre vie, notamment à la relation que nous entretenons avec nous-mêmes. Il n’y a pas de solution rapide. Mais la plupart d’entre nous avons la capacité de ressentir le désir.
L’orgasme est un phénomène singulier et fabuleux. Il se distingue de l’ennuyeux travail routinier auquel se livre le corps pour nous maintenir en vie. Alors que le cœur bat pour faire circuler le sang dans le corps, que le système digestif brasse et broie pour nous nourrir et que le cerveau frémit de signaux neurologiques pour mouvoir le corps et réfléchir, l’orgasme a une fonction tout à fait particulière. Il n’existe que pour nous procurer du plaisir, faire se crisper nos orteils et se hérisser nos poils ; du plaisir qui nous fait pousser des gémissements. L’orgasme est notre petite récompense.
On a maintes fois tenté de définir l’orgasme, mais les chercheurs ne sont pas tout à fait d’accord. La vision médicale traditionnelle explique l’orgasme comme un pic transitoire de plaisir sexuel associé à des contractions rythmiques de la musculature du bas-ventre94.
Les sexologues modernes trouvent cette définition trop restrictive. L’orgasme est perçu différemment d’une femme à l’autre. Pour couronner le tout, il est possible de vivre des orgasmes désagréables ou totalement asexuels, par exemple lors d’une agression ou pendant le sommeil. Des orgasmes purement physiques, en quelque sorte. Par exemple, pas moins d’une femme sur trois a des orgasmes quand elle dort95. C’est pourquoi ces sexologues préfèrent définir l’orgasme comme une libération soudaine et involontaire de la tension sexuelle96, disons : une corde d’arc qu’on relâche.
On peut donc avoir des orgasmes sans plaisir, des orgasmes sans contact physique avec les organes génitaux et des orgasmes sans contractions du bas-ventre. Certaines le décrivent juste comme une sensation de fourmillement chaud qui se répand dans le corps entier, suivie d’un sentiment “d’achevé”. Mais on a toutes au moins une chose en commun : quand on a un orgasme, on le sait. Si vous n’êtes pas certaine d’en avoir déjà eu, c’est que vous n’en avez jamais eu.
Si nous nous en tenons à l’explication classique, qui est la plus courante, l’orgasme correspond au climax de la réponse sexuelle. Quand les femmes sont physiquement excitées, les petites lèvres et les parties internes du clitoris se remplissent de sang – et le tout gonfle, de la même manière que le pénis. Le complexe clitoridien double de taille quand vous êtes excitée ! En général, après 10 à 30 secondes de stimulation du sexe, le vagin commence déjà à s’humecter. Il s’élargit et s’allonge d’au moins un centimètre. Plus vous approchez de l’orgasme, plus le pouls augmente, la respiration s’accélère et la pression artérielle croît. De nombreuses femmes vivent aussi une contraction des autres muscles du corps, et leurs doigts tout comme leurs orteils se recroquevillent sur le drap. Ce phénomène porte le joli nom de spasme carpopédal.
À la fin surgit l’orgasme et une sensation de bien-être se répand dans le corps, de la tête aux orteils. On a l’impression que le sexe explose et, la plupart du temps, il y a des contractions rythmiques des muscles du bas-ventre. Les contractions débutent dans l’entrée du vagin et remontent, elles gagnent le vagin entier et englobent l’utérus, impliquant souvent les muscles autour de l’urètre et de l’anus. En moyenne, l’orgasme de la femme dure 17 secondes97. Ensuite, le sang commence à quitter le bas-ventre, comme chez l’homme dont le pénis se relâche après l’orgasme. Le corps passe alors dans la phase de résolution, où tout revient à son état normal.
À la différence de l’homme, la femme peut avoir plusieurs orgasmes consécutifs si elle continue de se stimuler elle-même. On ne sait pas quel est le record du monde du nombre d’orgasmes chez les femmes. Pour une raison inconnue, le Guinness ne s’y intéresse pas, alors que d’autres records sexuels franchement palpitants, comme les “rapports sexuels les plus fréquents”, sont accessibles sur son site internet. Pour votre gouverne : il s’agit du grillon australien Ornebius aperta, avec 50 rapports sexuels en trois ou quatre heures. Le petit coquin.
En ce qui concerne les humains, le seul record connu provient d’une manifestation non officielle, le Masturbate-a-thon, qui n’est rien d’autre qu’un formidable concours de masturbation à des fins humanitaires98 ! Le record a été établi en 2009 au Danemark et il semblerait que la gagnante ait eu pas moins de 222 orgasmes au cours d’une seule séance de masturbation, dont nous supposons qu’elle a dû être longue. Pour la plupart d’entre nous, il reste sans doute un peu de chemin à faire…
Vous êtes peut-être étonnée de nous voir parler de l’orgasme en général, alors qu’il y en a tant de différents : l’orgasme clitoridien, l’orgasme vaginal, l’orgasme du point G, l’orgasme tantrique, l’orgasme fontaine, l’orgasme en série et l’orgasme de quand on se fait sucer les orteils. À moins que…?
En réalité, tous les orgasmes sont une seule et même chose : un orgasme. La réponse physiologique et psychologique est la même. La différence réside uniquement dans ce qui le déclenche. Notre corps entier est une zone érogène. Partout des terminaisons nerveuses peuvent être stimulées et donner du plaisir. Songez seulement au délice que ce peut être de se faire embrasser le cou, chatouiller les cheveux ou caresser l’intérieur de la cuisse. Nous avons aussi rencontré des femmes qui ont des orgasmes spontanés, tout au long de la journée, tous les jours, sans aucune forme de stimuli physiques, et des femmes qui savent déclencher un orgasme par la respiration.
Les expressions “orgasme vaginal” et “orgasme clitoridien” sont particulièrement répandues, même s’il n’existe pas de différences entre les deux99. Nous savons maintenant que le clitoris est un grand organe et non pas un simple petit bouton à l’avant de la vulve. Les parties internes du clitoris entourent l’urètre et le vagin et peuvent être stimulées indirectement. Le clitoris est éminemment impliqué dans le sexe vaginal, parler d’orgasme “clitoridien” et d’orgasme “vaginal” est donc inexact. En réalité, le vagin lui-même est assez insensible. Comme nous allons le voir plus loin, le gland du clitoris n’est pas localisé au même endroit chez toutes les femmes, et, d’après certains chercheurs, ce positionnement favorise ou non l’orgasme lors d’un rapport vaginal100.
L’orgasme fontaine, éjaculation féminine ou squirting, est légendaire. Il est décrit dans la littérature depuis Aristote101, soit depuis plus de deux mille ans. Chez la plupart des femmes, et malgré sa localisation entre le gland du clitoris et le vagin, l’urètre n’est pas très impliqué dans la vie sexuelle. Mais chez certaines, l’urètre a un comportement qui donne du fil à retordre aux chercheurs et aux femmes, perplexes devant ce phénomène. Quand elles jouissent, un liquide limpide ou laiteux jaillit de l’orifice de l’urètre. Certaines parlent de quelques millilitres, d’autres rapportent des quantités correspondant à un verre à eau. Qu’est-ce donc que cet orgasme ?
Nous ignorons combien de femmes connaissent l’éjaculation féminine, mais nous savons qu’elle existe, et bien des gens l’ont vue sur Internet. Depuis 2014, le porno représentant des femmes qui éjaculent est illégal en Grande-Bretagne102. Nous ne savons pas en quoi l’éjaculation féminine serait pire que d’autres formes de pornographie, celles montrant l’éjaculation masculine, par exemple, mais certaines personnes semblent trouver celle des femmes particulièrement choquante, peut-être parce qu’elles pensent qu’il s’agit d’urine ? Mais en est-ce vraiment ?
À l’heure actuelle, l’incertitude règne quant à la composition de ce liquide. D’après certaines études, l’éjaculat proviendrait de petites glandes appelées glandes para-urétrales ou glandes de Skene. Ces glandes se situent entre le vagin et la partie inférieure de l’urètre. Apparemment, les femmes n’en sont pas toutes munies et leur taille peut varier d’une femme à l’autre, chose qui pourrait expliquer pourquoi seules certaines femmes connaissent des éjaculations. Ces glandes seraient le pendant féminin de la prostate de l’homme, qui participe à la production de liquide dans le sperme, et elles se videraient de leurs sécrétions dans l’urètre lors de l’orgasme103. La découverte de substances prostatiques dans l’éjaculat de certaines femmes est un élément qui favorise cette hypothèse104. En revanche, une étude de 2015, au cours de laquelle les chercheurs ont effectué des échographies sur sept femmes qui se masturbaient, a permis de conclure que l’éjaculat était essentiellement de l’urine, même si le liquide contenait aussi de petites quantités de substances prostatiques105. Certains chercheurs pensent qu’il s’agit de phénomènes différents : on trouve des femmes qui éjaculent de petites quantités de liquide blanc des glandes para-urétrales, alors que d’autres produisent des quantités plus importantes de liquide transparent provenant de la vessie106. Quoi qu’il en soit, la réelle composition de cette sécrétion n’a peut-être pas grande importance. Ce qui compte, c’est que c’est une composante naturelle de l’orgasme d’un certain nombre de femmes.
Revenons maintenant à nos histoires d’orgasmes clitoridiens et vaginaux. Les femmes ont longtemps souffert du sentiment qu’il existait une hiérarchie des orgasmes, au sommet de laquelle trônait l’orgasme dit vaginal, déclenché par le seul rapport sexuel vaginal. Elles ont le sentiment que quelque chose cloche chez elles quand elles n’ont pas d’orgasme uniquement avec le bon vieux va-et-vient, le old in-out, pour reprendre la dénomination qu’affectionne Alex DeLarge dans Orange mécanique (1962). Quand elles ont besoin de l’aide des doigts ou d’un cunnilingus pour jouir, elles ont l’impression de tricher.
C’est étrange. D’une part, parce qu’un orgasme est un orgasme, d’autre part, parce que l’orgasme “vaginal” est finalement inhabituel. Comment cette curieuse hiérarchie des orgasmes féminins est-elle née107 ? Ce n’est assurément pas un vestige des jours anciens. Avant les Lumières, on pensait carrément que la femme devait avoir un orgasme pour tomber enceinte108. Pour vraiment avoir la certitude de concevoir, il fallait même que l’homme et la femme jouissent en même temps. À une époque où la mortalité infantile était extrêmement élevée, il était important d’avoir de nombreux enfants. S’ils voulaient s’assurer des descendants, les hommes devaient donc perfectionner l’art de donner un orgasme à la femme. Et la clef de l’orgasme féminin se trouvait dans la stimulation directe du gland clitoridien.
Le médecin de l’archiduchesse Marie-Thérèse d’Autriche recommandait donc en 1740 que “la vulve de Sa Très Sainte Majesté soit titillée avant le coït109”. Nos médecins d’aujourd’hui pourraient s’en inspirer. Imaginez qu’au lieu de vous dire de mener une vie plus saine, on vous conseille de vous faire titiller la vulve ? La santé publique en profiterait !
Les hommes du XVIIIe siècle ont beau s’être trompés sur de nombreux aspects du monde, sur ce point, ils avaient bien compris le tableau. Tout se joue à une époque bien plus récente. Le complexe d’infériorité qui naît de n’avoir que des orgasmes dits clitoridiens trouve son origine au XXe siècle.
La distinction entre orgasme vaginal et orgasme clitoridien, et l’élévation de l’orgasme vaginal au rang d’orgasme véritable, est tout simplement une invention masculine moderne. Sigmund Freud, le père de la psychanalyse, a émis en 1905 une nouvelle hypothèse110 : l’orgasme clitoridien était, selon lui, la forme d’orgasme de la femme immature. C’était le genre de choses qui devait avoir lieu dans sa chambre de jeune fille. Mais dès qu’elle flairait un homme, l’intérêt pour le clitoris devait disparaître pour être remplacé par le désir brûlant d’être pénétrée. La fusion de l’homme et de la femme était la seule forme de sexe qui soit saine, et la seule qui doive donner du plaisir. Les vraies femmes avaient des orgasmes vaginaux111.
D’où Sigmund Freud tirait-il cette idée ? De sa propre tête, bien entendu ! Peu importait que pléthore de femmes soient profondément en désaccord avec lui. Car elles étaient “malades”. Elles souffraient de cet état imprécis, qu’on nomme frigidité, et qui se caractérise principalement par l’incapacité des femmes à avoir le plaisir qu’elles devraient ressentir grâce au fier membre de l’homme. C’était la technique de domination consommée. Ou vous étiez d’accord ou vous étiez folle112.
D’après Sigmund Freud, les femmes devaient consulter un psychologue de toute urgence si elles trouvaient très agréable de se toucher le clitoris ou si, Dieu nous en préserve, elles n’avaient pas d’orgasme lors de rapports sexuels vaginaux avec leur mari. Pour l’homme, bien sûr, c’était très chouette. Si la femme ne jouissait pas, ce n’était pas ses qualités d’amant qui étaient en cause, c’était juste la femme qui devait travailler sur elle-même. L’homme avait désormais obtenu la bénédiction officielle pour aller vite en besogne, jouir, pousser un soupir de satisfaction et se retourner en éteignant la lumière. Le plaisir de la femme relevait de sa responsabilité à elle.
Sigmund Freud n’étant pas n’importe qui, son hypothèse a recueilli une grande adhésion. Et c’est ainsi qu’une façon de jouir que les femmes connaissaient depuis des millénaires s’est trouvée dénigrée comme une névrose de fillette. Le clitoris, connu comme le noyau du plaisir sexuel féminin depuis des siècles, est passé aux oubliettes et a disparu des atlas d’anatomie. Il allait falloir près de soixante ans pour que quelqu’un ose riposter.
Dans les années 1960, une révolution silencieuse a commencé à prendre forme au Washington University Hospital, aux États-Unis. Le gynécologue William Masters et sa partenaire de recherche Virginia E. Johnson ont commencé à s’intéresser à la sexualité de la femme et ont lancé une série d’expériences totalement délirantes par rapport aux standards de l’époque. Ils ont recruté des couples auxquels ils ont demandé de faire l’amour dans le laboratoire en étant reliés à des appareils de mesure, avec les chercheurs comme avides spectateurs. Ils avaient même fabriqué un pénis vibrant en plastique avec une caméra au bout pour pouvoir observer ce qui se passait dans le vagin quand la femme jouissait. Résultat, une découverte médicale stupéfiante : le clitoris était central dans l’orgasme de la femme. Une bombe ? De toute évidence.
Aujourd’hui, nous savons que moins d’un tiers des femmes jouissent habituellement lors d’un rapport sexuel incluant seulement le vagin. Et quand c’est le cas, de nombreux éléments portent à croire que le clitoris joue là aussi un rôle essentiel. Un certain nombre de chercheurs pensent que ces femmes ont eu de la chance à la loterie de l’anatomie. Leur clitoris semble en effet avoir une taille et un placement particulièrement propices. La première à avoir étudié la chose de façon quasi scientifique était encore une princesse, la Française Marie Bonaparte, qui malgré son grand appétit de sexe et d’amants n’était jamais satisfaite parce qu’elle ne jouissait pas par stimulation vaginale113. Bonaparte et les chercheurs modernes s’accordent sur un point : un gland de clitoris de grande taille situé à une courte distance du vagin favorise l’orgasme114, pour la simple raison que le clitoris bénéficie d’une plus large stimulation indirecte de ses parties externes comme de ses parties internes lors de la pénétration. Prenant des mesures drastiques, Marie Bonaparte a opté pour la chirurgie afin de rapprocher son clitoris de son vagin, ce qui donna, hélas, des résultats peu concluants115.
Nous aurions voulu que Marie Bonaparte soit au courant que ne pas avoir d’orgasme lors d’un rapport sexuel ordinaire avec un homme n’avait rien d’anormal. Au contraire, c’est la norme. Mais la recherche sur la sexualité féminine tout comme le discours public sur le sexe ayant été dominés par des hommes, ce message est passé largement au-dessus de la tête de la plupart des gens. Le sexe est devenu synonyme d’une pratique qui ne permet quasiment qu’à l’homme de jouir : la pénétration du vagin par le pénis. On dit même qu’un rapport sexuel n’est “accompli” que quand l’homme a un orgasme. Si la femme est seule à jouir, le rapport sexuel n’est en théorie pas terminé, c’est un coït interrompu. Quant à l’inverse, aucun problème. Le plaisir de la femme a disparu de l’équation.
Pour être équitable, le sexe de tous les jours devrait apporter plaisir et orgasme aux deux, et le sexe dans une relation hétérosexuelle pourrait, par exemple, se pratiquer pour moitié par cunnilingus et pour moitié avec pénétration. Les femmes lesbiennes ont plus souvent des orgasmes pendant leurs rapports sexuels que les hétérosexuelles, il y a donc manifestement quelque chose à tirer d’une variation du répertoire116. Il faut arrêter de considérer l’orgasme féminin comme un simple bonus. Pour les femmes aussi, l’orgasme devrait être la règle.
On ne peut pas nier qu’il est plus difficile pour les femmes d’atteindre l’orgasme que pour les hommes. La part de femmes anorgasmiques – qui n’ont jamais eu d’orgasme, que ce soit en solo ou avec un ou une partenaire – oscille entre 5 et 10 %117. Les hommes, eux, ont souvent le problème inverse, ils jouissent trop vite. Une grande étude britannique a découvert que 21 % des femmes entre 16 et 24 ans avaient du mal à avoir des orgasmes pendant les rapports sexuels118. La majorité des femmes se trouve dans la catégorie “jouit de temps à autre”.
Seules quelques chanceuses n’ont pas la moindre idée de quoi on parle. Nous avons toutes une copine agaçante qui raconte qu’elle jouit systématiquement, et souvent à trois ou quatre reprises. Vous aimeriez bien savoir quelles astuces magiques elle utilise. Malheureusement, il est peu probable qu’elle puisse vous aider. Les astuces magiques, il y en a certainement, mais il existe aussi de réelles différences entre les femmes quant à la facilité à jouir, et nous n’y pouvons rien. Ces différences sont en partie déterminées par nos gènes. La plupart d’entre nous n’aimons pas penser à nos parents en train de faire l’amour, mais il y a des chances que leur vie sexuelle rappelle un peu la vôtre. Si vous êtes une reine de l’orgasme, vous le devez peut-être à papa et maman…
Des chercheurs se sont penchés sur le cas des sœurs jumelles. Ils ont découvert que nos gènes pouvaient expliquer au moins un tiers des différences dans la fréquence des orgasmes lors des rapports sexuels119. Cela ne paraît peut-être pas énorme, mais en termes de génétique, ce n’est pas négligeable du tout. Ces chercheurs se sont aussi intéressés à la fréquence de l’orgasme lors de la masturbation et, là, l’hérédité joue un rôle encore plus important. Ces travaux laissent penser que nos gènes expliqueraient la moitié des différences de fréquence des orgasmes par masturbation. À première vue, il peut sembler singulier que les gènes ne jouent pas le même rôle selon qu’il s’agit de l’amour à deux ou en solo. Après tout, on peut imaginer que la masturbation offre un reflet plus réaliste de la capacité physique à avoir un orgasme, puisqu’on élimine, dans une plus large mesure, les freins psychologiques et la question de l’entente sexuelle avec son partenaire.
Le contexte dans lequel on fait l’amour est un autre facteur qui impacte la capacité de la femme à jouir. Lors d’une aventure d’un soir, les chances d’avoir un orgasme sont maigres chez presque toutes les femmes. Dans une étude effectuée auprès d’étudiantes américaines, seule une fille sur dix disait jouir la première fois qu’elle couchait avec un nouveau partenaire, alors que près de 70 % d’entre elles jouissaient quand elles étaient en couple depuis plus de six mois120.
Il y a donc des différences héréditaires dans la facilité à avoir un orgasme, mais la bonne nouvelle est que la grande majorité des femmes peuvent jouir si elles le veulent. La difficulté est de passer de l’orgasme obtenu en solo, ou de temps à autre avec son partenaire, à l’orgasme presque systématique. Nous ne prétendons pas que c’est facile, ni qu’il est particulièrement vital de se démener pour jouir, mais si vous êtes prête à travailler dur, il est possible d’y arriver ! Inspirés des conseils donnés en thérapie aux femmes qui n’arrivent pas à jouir, voici nos conseils pour avoir des orgasmes avec un grand O.
COMMENT JOUIR ET REJOUIR
1. Cent fois sur le métier tu retourneras
Si vous ne vous êtes jamais masturbée, il est temps de l’inscrire sur votre liste des choses à faire. La masturbation, ça marche121. Des études sur des femmes qui n’avaient jamais eu d’orgasme ont montré qu’au bout de cinq à sept semaines d’exercice régulier122 entre 60 et 90 % d’entre elles y arrivaient, à la fois seules et avec un partenaire. Nous vous promettons que c’est la forme d’exercice la plus amusante qu’un médecin puisse vous prescrire. Servez-vous de vos doigts ou achetez-vous un godemiché. Faites ce qui vous excite et qui vous met dans l’ambiance adéquate. Préférez-vous la littérature érotique, aimez-vous le porno ou voulez-vous fantasmer ? Au début, le principal est de ne surtout pas penser à l’orgasme comme à un but, mais plutôt de vous concentrer sur la découverte de techniques qui vous plaisent. Exercez-vous à écouter vos sens et à vous ouvrir au plaisir. Exercez-vous à vous vider la tête de toutes les pensées qui vous dérangent, que ce soit vos bourrelets sur le ventre ou vos partiels imminents. Mieux vous saurez vous donner un orgasme à vous-même, plus la probabilité d’en avoir un avec un partenaire sera grande. Souvenez-vous aussi qu’il n’y a jamais de mal à prendre les choses en main, même quand vous êtes avec un ou une partenaire. Peu importe qui fait quoi tant que vous prenez votre pied ensemble !
2. Ton dû tu exigeras
Il faut inclure votre partenaire dans votre “programme orgasme”. Ici, il faut prendre garde à ne froisser personne, faites-en un projet commun joyeux. À moins qu’il ou elle n’ait systématiquement refusé de faire un effort pour vous satisfaire, ce n’est pas la faute de votre partenaire si vous ne jouissez pas. C’est à vous de faire le gros du travail. Votre bas-ventre n’est pas fourni avec un mode d’emploi, sans vos indications votre partenaire peut donc mettre une éternité à comprendre comment vous jouissez.
Le plus simple est de commencer vous-même, en vous touchant pendant les ébats. Vous pouvez aussi vous masturber ensemble. Peu à peu, vous pourrez apprendre vos astuces à votre partenaire. Les gens trouvent souvent cela embarrassant, mais c’est malheureusement la seule façon de s’y prendre. Ne vous attendez pas à y arriver dès la première fois. Soyez patiente et complimentez votre partenaire chaque fois qu’il ou elle fait quelque chose qui marche. C’est ainsi que vous finirez par être un super-amant ou une super-amante.
3. La position du chat tu apprendras
Il existe une foule de positions sexuelles et, comme vous le savez à présent, peu d’entre elles sont particulièrement propices à l’orgasme féminin. Il y en a pourtant une qui occupe une place à part : la position du chat. Il est prouvé qu’une variante de la position du missionnaire appelée coital alignment technique, ou CAT (en français “chat”), est particulièrement favorable à l’orgasme féminin123. Cette position requiert un peu d’entraînement et de coordination, mais elle mérite quelques efforts.
Dans la position du chat, au lieu de prendre appui sur ses mains, votre amoureux se met sur ses avant-bras en plaçant son corps autant que possible contre le vôtre. Au lieu du va-et-vient ordinaire, son corps doit glisser à l’horizontale au-dessus du vôtre de façon à ce que vos sexes restent l’un au-dessus de l’autre. En même temps, vous appuyez vos sexes l’un contre l’autre, comme une vague qui bat le rivage. Ses hanches à lui doivent basculer vers le bas pour que l’os de son pubis et la racine de son pénis frottent contre votre clitoris. Quand il fera le bon mouvement, vous le sentirez. En ce qui vous concerne, vous devez garder vos jambes aussi droites et serrées que possible, éventuellement enroulez-les autour des siennes pour que vos chevilles reposent au-dessus.
Alors que la position du missionnaire ordinaire implique une espèce d’emboutissage, la position du chat, elle, est fondée sur un bon vieux frottement. Le pénis n’entre pas aussi profondément dans votre vagin, mais offre un maximum de stimulation à son entrée, sur les deux ou trois centimètres où se situent toutes les terminaisons nerveuses. Cette position permet un contact continu avec le clitoris.
Quand vous vous serez fait la main, vous pourrez essayer le CAT inversé, où c’est vous qui êtes au-dessus. Vous avez alors le plein contrôle et vous pouvez maîtriser la stimulation du clitoris en choisissant exactement le rythme et la pression que vous désirez.
4. Détendue, tu ne seras pas !
Détendez-vous, détendez-vous, entend-on souvent. C’est sans doute le meilleur et le pire conseil qui soit. Oui, vous devriez essayer de vous détendre dans votre tête, mais si vous restez sans bouger à attendre que l’orgasme tombe du ciel, vous ne l’obtiendrez jamais. Il s’agit d’être tonique. Serrez les fesses et essayez de tendre les muscles du périnée, n’hésitez pas à les contracter, puis à les décontracter, comme dans un rythme orgasmique, ou peut-être en cadence avec votre respiration.
Non seulement vous allez augmenter la circulation sanguine dans votre bas-ventre et attiser votre désir, mais vous allez aussi vous exercer mentalement à diriger votre attention là où ça se passe. Vous pouvez toujours essayer de penser aux boulettes de viande du dîner tout en serrant les muscles de votre bas-ventre, mais c’est plus facile à dire qu’à faire.
Au début, il peut s’avérer difficile d’entrer en contact avec ces muscles. Il n’existe pas de programme “Shape Up, challenge vagin” dans votre club de gym. Mais ça devrait. Un certain nombre de femmes qui font régulièrement des exercices de musculation du périnée remarquent qu’elles ont des orgasmes plus vigoureux, survenant de surcroît plus facilement. Elles remarquent aussi qu’elles sont plus en lien avec leur sexe. Les exercices de musculation du périnée permettent en outre de prévenir les pertes d’urine et la descente d’organes et peuvent aider à lutter contre les douleurs pendant les rapports sexuels124. Vous pouvez faire ces exercices n’importe où, dans votre lit avant de vous coucher aussi bien que dans le bus. Vous pouvez aussi utiliser des boules de geisha, mais ce n’est pas une nécessité.
5. Du jogging tu feras
Chez un certain nombre de femmes, le sport, surtout juste avant l’amour, favorise l’excitation et augmente la capacité à avoir des orgasmes125.
6. Des chaussettes tu enfileras
Ce n’est pas qu’une plaisanterie, notre corps envoie en continu des signaux au cerveau pour lui indiquer notre état. Ces signaux, et les pensées qu’ils déclenchent, se disputent notre attention. Il est difficile d’avoir un orgasme quand la tête est complètement ailleurs, par exemple si vous pensez à vos pieds frileux ou à votre silhouette qui ne vous satisfait pas. Nous les femmes aurions, paraît-il, particulièrement tendance à nous laisser distraire par ce qu’il y a autour de nous. Le sexologue Alfred Kinsey a remarqué que les rates, à la différence des rats, se laissaient facilement distraire par des bouts de fromage pendant la copulation126.
La morale de l’histoire est simple : autant que possible, il faut réunir les conditions pour pouvoir concentrer toute votre attention sur le plaisir. Si cela signifie que vous devez éteindre les lumières, garder votre tee-shirt ou même enfiler une paire de chaussettes, eh bien soit, soyez à l’écoute de vos besoins. Il faut vous cajoler. L’orgasme ne vient que quand vous êtes à l’aise, à la fois physiquement et psychologiquement, quand vous arrivez à exclure tout le reste. C’est sans doute l’enseignement à la fois le plus difficile à mettre en œuvre et celui qu’on oublie le plus souvent en cours de route.
I La perte ou l’absence de désir sexuel est même un trouble dans la classification internationale des maladies psychologiques et des troubles du comportement (CIM-10). On peut recevoir ce diagnostic même si on ressent excitation et plaisir sexuels. Dans le système de diagnostic américain DSM-V, le diagnostic correspondant est désormais modifié.