DANS CE CHAPITRE :
» Respiration consciente et inconsciente
» Les vertus de la respiration ventrale
» Les trois exercices du Pr Leung
» La pleine conscience
Dans le cadre des méthodes de préservation de la vie, des méthodes dites Yang Sheng Fa en chinois et dans toutes les pratiques qui vont suivre, la respiration, comme nous allons le voir, va avoir une place centrale.
La respiration est par essence, l’élément fondamental à mettre en œuvre pour recharger la « batterie du Rein » (voir chapitre 10).
Le seul problème est que, la respiration étant un élément si évident pour nous depuis notre naissance, nous la considérons comme allant de soi et ne prenons pas le temps de bien la mettre en pratique.
Et si on demande aux personnes, depuis ce matin, combien de fois avez-vous respiré en pleine conscience, les réponses les plus courantes sont : « j’ai oublié », « je ferai cela plus tard », « je n’ai pas eu le temps », « je ne savais pas que c’était si important », « je n’arrive pas à passer à l’acte », autant de faux alibis qui ne font que retarder notre accès à la pleine santé et d’une certaine façon à la plénitude d’un bonheur constant.
La respiration est tellement importante que notre maître, le Pr Leung Kok Yuen, nous disait la chose suivante : « Si, mis bout à bout, tout au long d’une journée, vous ne respirez pas en pleine conscience 2 à 300 fois, toute autre pratique de santé sera alors quasiment inopérante. »
Pour bien comprendre l’importance de ce sujet, il faut posséder un minimum de points de repère, de connaissances d’anatomie et de physiologie de la respiration.
La respiration apparaît avec la vie. À la naissance, vous allez prendre votre première inspiration, qui est un acte Yin, centripète au regard du mouvement de l’énergie et au moment du passage, vous allez émettre votre dernier souffle, l’échappement complet du Yang. Entre les deux, depuis votre naissance jusqu’au passage, vous n’allez pas arrêter de respirer.
Mais si on prend un peu de recul, nous allons très vite nous rendre compte qu’il existe deux types de respirations. D’un côté, ce qu’on appelle une respiration inconsciente, et de l’autre côté la respiration consciente. C’est une lapalissade que de dire : « Si cela existe, c’est pour s’en servir ! »
Que veut dire respiration inconsciente ? Cela signifie que vous ne savez pas que vous respirez. En ce moment, vous êtes en train, je l’espère, de respirer, et vous ne vous en rendez pas compte. Je dis « j’espère », car tout est fait dans notre mode de vie pour nous donner des situations où on arrête de respirer, où on se met en apnée. Télévision et ordinateur font partie, avec bien d’autres facteurs externes ou internes, de ces éléments qui accaparent tellement notre mental que l’organisme en oublie lui-même de respirer.
Quant à la respiration consciente, il est intéressant de comprendre que c’est le seul élément physiologique interne qu’on puisse rendre instantanément conscient. À titre d’exemple, on peut grâce au mental agir sur les battements cardiaques pour les augmenter où les ralentir. Par exemple certains exercices tirés du yoga nous permettent grâce à la médiation et à la visualisation d’accélérer le rythme cardiaque pour nous protéger par exemple du froid extérieur grâce à l’augmentation de la circulation sanguine. Mais tous ces processus physiologiques sont lents à s’installer et vont demander des dizaines de secondes pour se mettre en place et surtout beaucoup d’entraînement. En revanche, quand il s’agit de respiration, c’est dans l’instantanéité que je peux la rendre consciente. J’inspire, j’expire en pleine conscience. Je viens d’occulter la respiration inconsciente pour la rendre consciente.
LES TROIS GRANDS PILIERS DE LA VIE
Pour comprendre l’importance de cette respiration, nous pouvons dire que dans notre vie existent trois grands piliers de prévention.
» Premier pilier : nos émotions et notre mental qui peuvent effectivement être à l’origine de pathologies internes. Petit à petit, par une mauvaise gestion des émotions, on va pouvoir se « fabriquer » pas à pas un cancer, une dépression ou toute autre pathologie d’autodestruction. La mauvaise gestion des émotions peut alors raccourcir notre espérance de vie, mais il va falloir plusieurs mois, plusieurs années avant que cela devienne un problème létal.
» Deuxième pilier de la vitalité : boire et manger. Arrêtez complètement de manger et de boire, vous vivrez encore de 5 à 10 jours.
» Le troisième pilier : la respiration. Arrêtez de respirer, vous ne vivrez que 3 à 4 minutes.
La respiration est donc la première prise de courant, la première source d’énergie qui nous relie à notre environnement et qui permet de faire fonctionner l’incroyable complexité de notre organisme. Sans air, plus de vie humaine sur cette terre.
En vingt-quatre heures, vous respirez entre 14 000 et 17 000 fois, et ce, depuis que vous êtes né. Si on envisage un cycle respiratoire, soit une inspiration suivie d’une expiration, vous échangez en moyenne 500 cc d’air. En revanche, dès que vous êtes soumis au stress, dès que vous êtes fatigué, en excès de pensée, de réminiscence, en excès de tristesse, dès que vous avez des blocages au niveau du Foie et donc aussi de votre diaphragme, vous n’échangez plus que 200 à 300 cc d’air.
Quand cela devient chronique, on ne peut plus parler de santé, mais juste de « survivance » au quotidien. Vous avez perdu toute possibilité d’adaptation à votre environnement, votre batterie est à plat, car elle n’a plus de carburant, et le premier choc émotionnel qui se présente, ou un changement brutal dans la météo, ou bien encore un stress qui surgit inopinément vous déséquilibrera fortement sur votre câble de vie. Votre organisme aura perdu la capacité de vous envoyer des signaux d’alarme. Une maladie pourra apparaître alors brutalement.
Dans cet état de sous oxygénation, de sous énergie, votre organisme émet quand même quelques réflexes de survie pour récupérer un peu de cet air vital. On le constate beaucoup chez les déprimés qui ont le diaphragme complètement bloqué : ce sont les soupirs à répétition. Chaque fois que vous soupirez, que vous inspirez fortement, vous amenez une grande quantité d’énergie dans votre organisme. C’est un réflexe archaïque de survie. Le bâillement à répétition fait aussi partie de ce type de réflexe.
APPRENDRE À RESPIRER, MÊME PAS DUR !
Comme dans toute initiation, nous allons essayer de nous créer une image mentale, en l’occurrence ici un « film mental ». On visualise ainsi deux gros ballons dans le thorax qu’on réunit en un seul. Ce ballon, vous allez le gonfler en inspirant, en faisant entrer de l’air dans votre cage thoracique. Mais vous décidez un peu arbitrairement de ne pas bouger le thorax, un peu comme si vous aviez une main dessus pour empêcher de se dilater. Comme ce ballon se gonfle et qu’il est « emprisonné dans cette cage », il ne peut alors que descendre, se développer vers le bas.
En réalité, c’est le diaphragme qui va être poussé vers le bas. Quand celui-ci descend, la masse des viscères abdominaux va être comprimée. Comme cette masse ne peut pas aller en arrière du fait de la présence des côtes et de la colonne vertébrale, elle va avoir tendance à « sortir » en avant. C’est pour cela qu’on dit que le « ventre gonfle ». Ce n’est pas l’air qui entre dans le ventre !
Ensuite dans un deuxième temps, vous « rentrez » le ventre. Du coup, les viscères abdominaux remontent vers le haut, appuient sur le diaphragme. Du fait de cette compression, les deux poumons se vident et l’expiration se produit alors.
Un des très grands avantages de ce mécanisme respiratoire, c’est de faire travailler ce qu’on appelle la base des poumons. Quand on ne respire que par en haut, on ne respire que par les sommets. Or, il faut savoir que toutes les toxines et la pollution, les déchets, ont tendance, du fait de la gravité, à aller vers la base des poumons. Le simple fait de pratiquer cette respiration permet à tous ces déchets d’être mobilisés et d’être évacués des poumons.
La manière dont ce mouvement vient d’être décrit rend cette respiration abdominale excessivement simple à comprendre. J’inspire, le ventre « sort » et je souffle, le ventre « rentre ».
Souvent comme la respiration inversée est devenue un réflexe conditionné, certains ont des difficultés à apprendre cette respiration naturelle. Alors, une image mentale supplémentaire : vous recevez un coup de poing dans le ventre, ce qui déclenche une brusque expiration. Ensuite l’air entre à nouveau dans les poumons et le ventre « ressort ».
Mais à côté de cela, vous pourriez mettre en œuvre ce que l’on appelle la « respiration consciente ». La respiration consciente est avant tout une « respiration diaphragmatique », connue souvent sous le terme aussi de « respiration ventrale » ou encore « abdomino-diaphragmatique ».
Si vous avez l’occasion de voir un bébé dans son berceau, vous pouvez observer qu’il ne respire que par le ventre. Plus tard, de très nombreuses habitudes de vie ont fini par « inverser » notre respiration. Les couches des bébés trop serrées, les ceintures empêchant toute amplitude respiratoire, certaines gymnastiques corporelles nous faisant inspirer en tirant les épaules en arrière.
Tout cela a un impact non seulement sur la quantité d’air que nous inhalons, mais on ne fait travailler alors principalement que le sommet de ses poumons.
Ne pourrait-on pas dire que le niveau d’évolution non pas matériel, mais spirituel d’un peuple était directement lié à leurs habitudes vestimentaires ? Toges, gandouras, « robes » des lettrés, etc. La plus ou moins grande amplitude respiratoire influe directement sur l’oxygénation de nos neurones !
Figure 17-1 La respiration abdomino-diaphragmatique.
Le diaphragme en réalité est le muscle principal de la respiration.
Or, ce sont les muscles accessoires de la respiration qui sont devenus les muscles principaux, chez tous ceux qui présentent une respiration dite inversée. Ces muscles sont entre autres les muscles intercostaux ou les muscles sterno-cléido-mastoïdiens. Ce sont des muscles qui tirent vers le haut les côtes pour ouvrir un peu plus la cage thoracique. Ils sont visibles au moment des crises d’asthme, ou chez les insuffisants respiratoires. C’est ce qu’on appelle dans le jargon médical un « tirage respiratoire ». Mais c’est bien le diaphragme qui est le muscle principal de la respiration.
Cependant, pour être encore plus performant dans ce type d’exercice, il convient de connaître un minimum de son anatomie.
Le diaphragme est une double coupole tendino-musculaire qui divise en deux notre tronc, qui sépare le thorax de l’abdomen.
À partir de là, il convient de visualiser la chose suivante : le cœur qui est dans la cage thoracique ainsi que les deux poumons sont « posés » sur le diaphragme. En dessous du diaphragme, vous avez le foie-vésicule biliaire, à droite de votre abdomen, l’estomac, le plexus solaire au centre, ainsi que la partie transverse du côlon et la Rate-Pancréas à droite, ainsi que les reins en arrière. Tous ces organes sont en contact direct avec cette nappe tendino-musculaire.
Il est facile de se rendre compte que cette zone est fondamentale. Quand, petit à petit, vous allez débloquer et faire travailler votre diaphragme, grâce à cette respiration, d’hypotonique, il va retrouver une certaine force et surtout sa mobilité. En effet, il va retrouver son amplitude. Elle peut aller jusqu’à 15-20 cm d’amplitude, entre les mouvements de montée et descente dans le thorax. On parle alors d’un déblocage du diaphragme.
Vous allez masser directement tous ces organes internes entre autres le Foie, véritable éponge à sang. Et tout cela par la montée et la descente du diaphragme. C’est là le point fondamental de cette respiration.
Vous allez éviter que des stagnations perdurent et qu’elles génèrent de la chaleur, de la douleur, des inflammations, des gonflements, de la transformation de déchet en poisons à l’origine de quasiment toutes les maladies internes.
Un autre effet de cette respiration, et non des moindres : un peu plus haut, nous avions vu que dans les respirations inconscientes nous échangions entre 300 et 500 cc d’air entre l’inspire et l’expire. Quand nous pratiquons ce type de respiration abdomino-diaphragmatique, nous échangeons entre 3 000 et 7 000 cc d’air, soit 10 fois plus. Sur le moment, nous n’avons pas besoin d’autant d’énergie. Tout le surplus va donc nous servir à recharger notre batterie du Rein.
Le sommeil et la respiration sont les deux grands moyens que Dame Nature a mis à notre disposition pour cette recharge.
Une fois cette respiration de base bien assimilée, nous allons pouvoir y greffer une multitude d’exercices. Notre maître nous en avait appris trois que je vais à présent vous exposer.
Juste une petite mise en garde. Au bout de quelques jours de pratique, vous risquez d’avoir des tiraillements, de petites contractures surtout sous les côtes. C’est là où s’attache le diaphragme. C’est tout à fait normal. Ce sont de simples contractures liées au fait de travailler un muscle qui a été trop longtemps laissé au repos. N’allez pas consulter pour autant !
Certains auront peur de pratiquer par crainte de « prendre du ventre ». Mais c’est tout le contraire qui arrive. Plus vous « sortez le ventre », plus les muscles transverses et autres muscles abdominaux devront travailler pour « rentrer » ce même ventre. Résultat des courses, ce type d’exercice vous fait perdre du ventre.
Ces trois exercices vont agir sur quasiment tout le panel des pathologies que nous nous créons pas à pas par méconnaissance du fonctionnement de notre corps. Cette action sera aussi bien préventive, que curative. Deux exercices se feront allonger sur le sol, ou dans son lit, et un exercice que vous allez mettre en œuvre tout au long de la journée, et ce, dans n’importe quelle position.
Une particularité quant aux exercices que l’on pratiquera allongé : pour une meilleure visualisation, on inspirera par le nez et on soufflera par la bouche pour canaliser le souffle. Quant à ceux pratiqués tout au long de la journée, l’inspire et l’expire ne se feront que par le nez pour éviter le dessèchement des fausses nasales.
Mieux que la douche ou le café du matin. Cet exercice doit être pratiqué le matin au lever avant de poser les pieds par terre. Vous allez quand même prévenir votre conjoint avant pour éviter qu’il n’appelle tout de suite le SAMU. En effet, cette respiration va être assez violente.
« J’inspire au maximum de mes possibilités assez rapidement et j’expire tout aussi rapidement en vidant totalement les poumons. »
Évitez de vous lever dans la minute ou les deux minutes qui suivent : en effet, vous allez être momentanément shooté à l’oxygène, ce qui risque de déclencher quelques vertiges.
Vous allez ainsi pratiquer deux séries de dix respirations conscientes.
Premier effet : quand vous allez respirer par le ventre de manière assez violente, en faisant monter et descendre votre diaphragme, vous allez masser physiquement le Foie et obliger le sang à repartir vers les extrémités. Si vous pratiquez ce type des respirations tous les matins pendant une quinzaine de jours, vous allez voir que vos mains et vos pieds vont commencer à se réchauffer. C’est le sang qui repart vers les extrémités.
Deuxième effet : grâce à cet afflux sanguin très rapide au niveau du cerveau, vous allez atteindre beaucoup plus rapidement l’état de pleine conscience. C’est le meilleur moyen pour se réveiller.
Troisième effet : le fait de mobiliser « le ventre » et les viscères abdominaux, par ces mouvements de va-et-vient du ventre et du diaphragme, va déclencher ce qu’on appelle le « péristaltisme intestinal » qui a ralenti pendant toute une nuit de sommeil. Il y a alors de grandes chances que vous ayez à ce moment-là envie d’aller à la selle.
Donc un simple exercice peut vous masser le Foie, éviter sa congestion, ses problèmes de stagnation, mais aussi tous les autres organes internes et ce, dès le matin. Il vous amène sur le moment dix fois plus d’oxygène qu’une respiration inconsciente, elle vous réveille et vous permet aussi de nettoyer vos intestins.
Souffler la bougie pour mieux s’endormir. Cet exercice se fera le soir avant de se coucher. On pourra aussi le pratiquer pendant les périodes d’insomnie. Surtout l’insomnie de deuxième partie de nuit encore appelée « insomnie de trois heures du matin », qui est directement liée à une stagnation de sang et d’énergie au niveau du Foie.
Le soir avant de vous endormir, quand vous êtes dans votre lit, vous allez pratiquer deux séries de dix respirations, mais différentes des précédentes. Vous laissez tranquillement l’air pénétrer par vos narines, sans forcer l’inspiration. Ensuite vous imaginez que vous avez une bougie devant vous et, lorsque vous expirez, la flamme doit quasiment ne pas bouger. L’expiration va donc être très lente et progressive. Ce temps expiratoire peut se faire en 30, 40 secondes, voire avec de l’entraînement, une minute. Vous ne devez jamais être à bout de souffle. Il convient donc de s’arrêter avant d’arriver à l’apnée, au blocage respiratoire. Sur cet exercice respiratoire, vous allez pouvoir rajouter une visualisation. Vous vous imaginez que l’air que vous inspirez est blanc, immaculé et vient nourrir votre corps. L’air que vous allez expirer beaucoup plus longtemps est un air un peu grisâtre, chargé des toxines de votre organisme. C’est tous les déchets du corps qui s’en vont. On s’est rendu compte que grâce à cette visualisation, on pouvait décupler l’élimination des déchets par l’expiration, surtout à la base de nos poumons. Rappelez-vous, c’est l’énergie mentale, la puissance de nos pensées qui dirigent tous les phénomènes physiques à l’intérieur de notre organisme.
Quand vous faites une telle pratique, un autre phénomène va se produire. Si nous avions à parler ici de la fatigue en général, « je suis fatigué », une des grandes causes provient de l’excès de pensées. Notre cerveau est en ébullition permanente et nos pensées se succèdent sans discontinuer. C’est une grande cause d’insomnie, ou tout au moins cela nous empêche d’avoir un endormissement profond.
Tout le but de cette technique est de nous permettre de canaliser progressivement toutes nos pensées sur une seule, à savoir la visualisation de la respiration. C’est un peu comme si vous arrêtiez votre ordinateur central, un peu comme si vous le déconnectiez.
Dans un ordinateur, vous entendez un bruit : c’est le ventilateur qui permet en permanence de refroidir les éléments vitaux du fonctionnement d’une telle machine. Et plus vous lui donnez de travail à faire, de calculs à effectuer, plus le ventilateur tournera vite. Si celui-ci tombe en panne, c’est la surchauffe et votre ordinateur grille. Si on ne ventile pas grâce à notre respiration notre « corps-ordinateur » et si nos pensées se succèdent à un rythme effréné, cette « masturbation du mental » va finir par produire un dernier symptôme signal d’alarme : le burn out. C’est le corps-esprit qui au bout d’un moment disjoncte. Il vous envoie alors comme dernier signal d’alarme une profonde lassitude, une pré-dépression jusqu’à ce que le burn out vous oblige à vous reposer complément. La respiration en pleine conscience telle que je viens de vous la décrire est l’antidote de cet état. En canalisant votre mental, vous arrivez progressivement à une seule pensée : la respiration. Vous n’êtes plus que respiration.
Vous verrez alors que vous allez vous endormir beaucoup plus facilement.
Vous pouvez rajouter un « ingrédient » à cet exercice : quand vous êtes en période d’insomnie, laissez l’air entrer « sans forcer », ensuite l’expiration se fait très lentement. Cela représente un cycle respiratoire. Vous allez vous mettre à compter mentalement ces cycles, un peu comme on compte les moutons pour s’endormir. Un inspire et un expire égal 1, puis un deuxième cycle jusqu’à 10. À 10, vous repartez à 1 et vous allez jusqu’à 9. À 9, vous repartez à 1 et allez jusqu’à 8 et ainsi de suite… En règle générale, au bout du troisième cycle, vous êtes déjà retourné dans les bras de Morphée. Le simple fait de canaliser vos pensées sur un seul point, ici le comptage vous permet de vous rendormir très rapidement. Faites l’expérience la prochaine fois que vous avez cette insomnie de trois heures du matin.
Le soir, 2 fois 10 respirations, 2 fois 10 le matin, cela nous fait 40 respirations conscientes. Où allons-nous placer nos 260 autres respirations dans la journée ? C’est là où nous arrivons à une notion fondamentale en MTC, « la pleine conscience ».
Dans une journée en réalité, vous avez pléthore de moments qu’on pourrait appeler « moment mort » et vous pensez beaucoup trop pendant ces moments morts.
En réalité, dans la journée, vous êtes tout à fait capable de vous arrêter, là, ici et maintenant, comme le font spontanément les enfants après une période d’hyperactivité. Ils s’arrêtent, se posent et on a l’impression qu’ils ne pensent plus à rien, qu’ils sont ailleurs.
Par exemple vous êtes à un feu rouge, ou dans un bouchon, plutôt que de vous laisser envahir et phagocyter par vos pensées, vous allez vous dire : « Tiens, je vais en profiter pour faire pendant 30-40 secondes 7, 8, 10, voire plus de respirations conscientes. » Et ce, que vous soyez dans n’importe quelle position, debout en train de marcher, assis devant votre ordinateur, etc., vous inspirez tranquillement par le nez, sans obligatoirement forcer sa respiration abdominale, puis vous expirez par le nez.
La respiration est ample, abdominale, mais non forcée et se fait en pleine conscience. De l’extérieur, les gens ne se rendent pas compte de votre pratique.
À ce moment-là, non seulement vous échangez quand même entre 2 000 et 4 000 cc d’air, 10 fois plus qu’une respiration inconsciente, mais le jour où vous êtes capable de vous arrêter comme cela 10, 20, 30 fois dans la journée en respirant une dizaine de fois en pleine conscience à chaque fois, donc entre 2 et 300 respirations, vous allez toucher du doigt, vous allez progressivement vous initier au : « ici et maintenant ».
Le simple fait de s’arrêter plusieurs fois dans la journée ne peut être que bénéfique pour votre santé. Toutes les activités que vous avez dans la journée, du matin au lever jusqu’au soir au coucher, sont des activités qui ont une action que l’on pourrait appeler centrifuge quant à l’émission de votre énergie. Vous puisez dans votre énergie interne, dans votre batterie, et vous l’émettez vers l’extérieur. On pourrait dire que c’est du Yang qui s’échappe du corps. Ainsi quand vous parlez, pensez, bougez vos articulations, digérez un bol alimentaire, etc., tout cela demande de l’énergie.
Si vous ne prenez pas, dans la journée, le temps de recharger cette énergie qui s’est échappée du corps, vous finiriez par épuiser vos réserves, par vider votre batterie. À l’inverse, si vous vous arrêtez de temps en temps 30, 40 secondes, chaque fois que vous respirez en pleine conscience 3 000 à 5 000 cc d’air, vous êtes en train de recharger votre batterie que vous venez de décharger.
Le maître mot en MTC, dans les méthodes Yang Sheng Fa de préservation de la vie est : « Je décharge, je charge, je décharge, je charge en permanence tout au long d’une même journée », alors que dans notre mode de vie occidental, « Je décharge, je décharge, jusqu’à épuisement du matin jusqu’au soir. J’essaye tant bien que mal de recharger la nuit par le sommeil, pendant les week-ends ou les vacances. » Mais ceci est une utopie, car votre organisme à ce moment-là va être en dispersion d’énergie due à cet excès de fatigue (en MTC, c’est le Yin qui n’arrive plus à retenir le Yang) et vous n’arriverez pas à vous recharger. Or, nous apprenons ici à nous recharger dans une même journée !
On peut atteindre l’état de pleine conscience, du ici et maintenant, grâce à la méditation. Mais peut-être que la pleine conscience de ceux qui méditent n’est pas la même pleine conscience dont je suis en train de vous parler.
Quelle est alors la finalité de cette pleine conscience ? Apprendre à gérer nos émotions ! Une émotion en médecine chinoise est à mettre en relation avec l’énergie d’un logiciel organe spécifique et c’est l’énergie du Cœur qui génère et régule l’ensemble des émotions. On parle alors en MTC, du Shen, de l’esprit.
Chaque famille d’émotion est donc directement reliée au fonctionnement de chaque organe (voir chapitre 2). Si on s’attache à étudier un type d’émotion comme la colère, la tristesse, la peur, la réminiscence, on pourrait aller jusqu’à dire que vous en êtes l’écrivain, le scénariste, le réalisateur et en même temps l’acteur.
Il y a toujours des liens de causalité dans le crescendo de l’émotion. Mais au départ, il y a une première image, à laquelle se juxtapose une deuxième, puis une autre et encore une autre. C’est ainsi que se déroule le film. La pleine conscience nous permet de nous arrêter à la première image.
JE RESPIRE DONC JE NE PENSE PLUS !
La pleine conscience des méditants est d’arriver à une non-pensée totale. Et qui dit alors non-pensée, dit non-temps. C’est un peu compliqué à expliquer, mais pour faire court, nous pouvons dire que le temps n’existe que parce qu’il y a un avant et un après, les deux pôles Yin-Yang de la dualité. Parce qu’il y a un passé et parce qu’il y a un avenir, il y a entre les deux un « passage à vide », car deux pensées ne peuvent pas se juxtaposer. Fondamentalement la pleine conscience, telle qu’on la définit au niveau de nos pratiques, n’existe pas vraiment, car c’est aussi du temps. Les neurobiologistes ont essayé de donner leur propre vision sur la notion de temps. Ils partent du principe que nous émettons en permanence des pensées.
Sauf qu’entre deux pensées, il y a quelques millisecondes où il n’y a rien. Les méditants essayent d’allonger progressivement la durée de ce vide entre deux pensées pour arriver à la non-pensée. On pourrait appeler cela l’Éveil. Mais en ce qui nous concerne, avant d’y arriver, il nous faudrait des générations et des générations de « réincarnation » ou des heures de pratique quotidienne bien incompatibles avec notre mode de vie actuel. Quand on parle de santé, de préservation de la santé, quand on parle de pleine conscience, c’est : « Je suis là, je focalise ma pensée sur un point pour canaliser et arrêter le flot des pensées » et la respiration consciente nous permet effectivement d’arriver à cet état.
C’est dans ce sens-là qu’on apprend à gérer ses émotions, à faire que dans une discussion familiale, on ne prononce pas une parole assassine capable de détruire une famille. Vous êtes en plein contrôle et vous ne jouez pas le film jusqu’au bout. Vous vous arrêtez à la première image.
Il n’est pas question de devenir des êtres « a-émotionnels », sans émotion. Les émotions sont obligatoires pour un bon fonctionnement de l’organisme et permettent d’alimenter, de nourrir énergétiquement les différents logiciels organes. En revanche, il ne faut pas qu’une émotion soit trop violente d’un seul coup ou qu’une émotion soit toujours en permanence au-dessus des autres.
Nous avons comme cela à notre disposition des méthodes de régulation des émotions et la pleine conscience en fait partie. Cette pleine conscience, vous allez l’apprendre grâce à la respiration, grâce à ces multi-arrêts dans la journée.
COMMENT FAIRE ENTRER LA RESPIRATION DANS NOS GÈNES
Dans tout acte de changement quel qu’il soit, vous allez passer par quatre étapes successives. Au départ, il y a ce qu’on pourrait appeler une incompétence inconsciente qui va se transformer ensuite en incompétence conscience. Ensuite, vous avez l’étape de compétence consciente, jusqu’arriver à la compétence inconscience.
» Au départ, vous n’aviez aucune notion quant à l’importance cruciale que représente la respiration et de tout ce que vous apportent de telles pratiques. Vous n’aviez pas accès à la connaissance et par là même, vous ne pouviez pas l’inventer.
» Ensuite, on passe à cette deuxième phase qui est l’incompétence consciente. C’est-à-dire que maintenant vous savez que cela existe, vous êtes encore incompétent puisque vous ne l’avez pas encore mis en œuvre. C’est une étape un peu critique parce qu’à force de remettre au lendemain la pratique, vous risquez de l’oublier. Et même de vous persuader que cela ne fonctionne pas et pourquoi pas, vous retourner contre les enseignements traditionnels.
Mais si on vous demande : depuis ce matin, combien de fois avez-vous respiré en pleine conscience ? Je vous laisse répondre à cette question. Vous risquez alors de vous culpabiliser : « Je sais que je devrais mettre cela en œuvre, mais je n’y arrive pas. » Si vous avez alors la chance de rencontrer quelqu’un qui est capable de vous expliquer ce qu’est le passage à l’acte, la confiance en soi, et comment pratiquer, vous allez passer dans la phase de compétence consciente.
» La compétence consciente est la répétition, encore et encore, de tous ces exercices. Mais cela ne se fait pas du jour au lendemain. Il faut à peu près un an, pour apprendre à respirer en pleine conscience ! Vous allez pratiquer, abandonner, le remettre en place, etc.
» À un certain moment, vous allez atteindre la phase de l’autorégulation permanente : c’est la compétence inconsciente. Vous ne vous rendrez même plus compte que vous pratiquez ce type de respiration, elle deviendra quasiment automatique. Et là, vous aurez fait le vrai travail de l’initiation en étant passé par ces quatre étapes. Je souhaite du fond du cœur que vous arriviez tous à cette étape.