Hans Memling, Portrait d’homme, vers 1472.

Huile sur chêne, 35,3 x 25,7 cm. Musées royaux

des Beaux-Arts de Belgique, Bruxelles.

 

 

C’est au cœur de l’église de l’hôpital (les bâtiments furent séparés au XIXe siècle) que se trouve encore la fameuse Châsse de sainte Ursule (Illustration 1, 2, 3, 4, 5) réalisée en 1489, et où rayonnent d’autres chefs-d’œuvre également produits par Hans Memling. Soigneusement gardés depuis plus de cinq siècles, brillant de tout leur éclat primitif, leur grâce enchante soudain le voyageur et le transporte dans des temps qui ne sont plus. Il remonte le cours du fleuve éternel, débarque loin de notre époque au milieu d’autres générations, d’autres monuments, sur une grève que l’humanité a fui pour toujours. Les types, les mœurs, les costumes, les passions et les croyances, immobilisés sous le pinceau de l’artiste, semblent avoir atteint l’éternité, à l’instar de la nature. Une lumière douce et tendre éclaire les tableaux, un silence profond règne autour du spectateur ; les murmures venant du dehors secondent sa poétique émotion : le vent soupire en effleurant les croisées, l’hirondelle babille en rasant les toitures, la cité gronde au loin comme une rivière des montagnes. Dans la pensée, ces bruits se mêlent aux formes qu’elle évoque et, dominé par le génie des souvenirs, on se figure entendre la voix des anciens jours.

— Pourquoi ces tableaux appartenaient-ils à un hospice ?

Demande inévitable, importune, qui chagrine l’historien d’art, qui ne peut y répondre d’une manière satisfaisante. La nue envieuse, qui nous a caché jusqu’ici tant de maîtres flamands, s’abaisse sur le front de Memling et nous dérobe presque tous les souvenirs de son existence. Un impénétrable mystère l’environne : on connaît, on admire son talent, mais on ne sait rien de sa biographie, ou l’on en sait peu de chose ; quelques traditions vagues, quelques notes arides composent son histoire. Son nom même a été longtemps un sujet de disputes, et des pièces authentiques n’en ont fixé l’orthographe qu’au début de l’année 1861. [1]