Waouh. C’est étrange. Mais aussi un peu agréable, peut-être ? Je n’arrive pas à décider.
Je lance le chronomètre du téléphone et charge le jouet « Belka Anal » sur l’application.
Quelques nouvelles commandes apparaissent sur l’écran, qui n’étaient pas disponibles avec le vibromasseur et Glurp. Par exemple, il y a un bouton intitulé « dehors » et un autre « plus profond ».
Je ne suis pas encore prête pour « plus profond », et « dehors » est prématuré.
J’appuie sur « démarrage ».
L’écureuil se met à vibrer.
La sensation est étrange, mais pas déplaisante. Une fois ajustée, je me sens prête à en affronter plus, et une touche « stimulation du point P » attire mon regard.
Je n’ai jamais entendu parler du point P. Mais après tout, je n’ai jamais entendu parler du point A non plus. Pour être honnête, je ne savais même pas qu’il y avait des « points » par la porte de derrière, mais ce doit être le cas, si tant de femmes aiment les jeux anaux.
J’appuie sur la touche « point P » avec hésitation.
L’écureuil cesse de vibrer et s’enfonce doucement en moi.
Bizarre.
Il continue de bouger.
Attendez une seconde.
Il s’arrête. Je le sens tourner sur lui-même comme à la recherche de quelque chose, puis il se remet à bouger.
Qu’est-ce que c’est que ça ? J’appuie sur le bouton « stop ».
Rien ne se passe. L’écureuil continue son petit bonhomme de chemin.
J’appuie frénétiquement sur le bouton « dehors ».
L’écureuil s’arrête.
Ouf.
Un moment… L’écureuil recommence à pivoter, comme s’il cherchait quelque chose en moi. Il ne semble pas le trouver, car il s’enfonce encore plus profondément.
C’est quoi, ce bordel ? Est-ce que le « P » signifie pancréas ? Je crois qu’il s’agit d’un organe du système digestif, en tout cas, il n’y a absolument rien de fun là-dedans.
Je scrute l’écran, paniquée.
Il y a une touche d’aide, ici, ainsi que quelques autres qui ne me paraissent pas très prometteuses.
J’appuie sur tous les boutons inutiles en même temps.
L’écureuil continue de s’enfoncer.
Je commence à paniquer. Et si le « P » désignait la glande pituitaire dans le cerveau ?
L’écureuil s’arrête. Un message d’erreur apparaît sur l’écran : « Prostate non trouvée ».
Prostate ? Oh non. Les femmes n’en ont pas, en tout cas, pas dans la zone postérieure. Il y a quelque chose appelé les Glandes de Skenes à l’avant du vagin, auxquelles ont fait parfois référence en tant que « prostate féminine », mais ce n’est clairement pas ce que l’écureuil cherchait.
Dans ma panique, je commence à comprendre ce qu’il s’est passé. L’écureuil doit faire partie du lot réservé au sexe masculin. Quand l’Empaleur a conçu l’application, il a oublié de prendre en compte les situations où l’on puisse rechercher une stimulation du point P tout en étant dépourvu de prostate à stimuler.
Ce n’est pas un bug surprenant, mais ça me fait très mal au cul – au sens propre comme au figuré.
Je balaie furieusement le message d’erreur jusqu’à ce qu’il disparaisse de l’écran. Puis j’appuie sur la touche « dehors ».
Le message d’erreur réapparaît, et il ne se passe rien.
À court d’options, j’appuie à nouveau sur le bouton d’aide.
Un son qui ressemble à une tonalité émane du téléphone.
Ce n’est pas bon signe. Je parie que c’est censé appeler le service après-vente, quand les jouets Belka arriveront entre les mains de vrais clients. Pour l’heure, je doute que l’on réponde à cet appel. De toute façon, je ne saurais pas quoi dire.
Affolée, je laisse tomber mon téléphone pro sur le lit et attrape Précieux pour appeler Ava.
— Je suis un peu occupée, dit-elle en décrochant.
— C’est une urgence médicale ! Code rouge. Je ne plaisante pas, c’est…
— Oh, là, ralentis, ralentis. Qu’est-ce qu’il s’est passé ?
— J’ai un écureuil coincé dans le rectum. Ou peut-être le colon. Quelque part dans le coin.
Il y a un moment de silence, puis elle lâche :
— C’est une blague ?
— J’aimerais bien ! J’étais en train de tester les jouets et…
— Donc l’écureuil est un jouet ? s’étrangle Ava, comme si elle avait un chat dans la gorge.
— Non, je parle d’un vrai putain d’animal.
— Eh, on ne sait jamais. J’ai entendu parler de beaucoup de choses coincées à cet endroit. Des fruits, des légumes, des clefs, des bougies, des bocaux de café et de beurre de cacahuète, des ampoules électriques, du déodorant, des téléphones portables, des bouteilles de spray pour le corps, Buzz L’Éclair…
— Ça ne me rassure pas du tout, la coupé-je en pressant le téléphone un peu plus fort. Qu’est-ce que je dois faire ?
— Viens aux urgences, répond-elle.
— Tu n’as pas une solution moins drastique ? demandé-je, m’imaginant combien une telle mesure serait embarrassante.
Pour le restant de leurs jours, les infirmières raconteraient à tout le monde l’histoire de Funny Fanny et de son jouet coincé dans le cul.
Ava prend une inspiration bien audible.
— Est-ce que tu éprouves des douleurs abdominales ?
— Non.
— Des saignements ?
Tout le sang reflue de mon visage.
— Ça vient tout juste de se produire. Tu crois qu’il pourrait y avoir des saignements ?
— C’est peu probable, s’il n’y a aucune douleur. Assure-toi simplement de ne pas essayer de le récupérer avec des pinces ni rien qui puisse entailler ou contusionner la zone. Y compris tes ongles.
Je ferme les yeux.
— Je ne suis pas idiote. En tout cas, pas à ce point.
— Bon, mais dis-toi bien que j’ai déjà entendu parler de cas où des pinces étaient coincées avec l’objet initial.
— Pas de pinces, dis-je catégoriquement. Mais qu’est-ce que je peux faire ?
— Mis à part les urgences ? Tu peux essayer de l’expulser en allant au petit coin.
C’est une note d’espoir.
— Tu crois que ça marcherait ?
— S’il est assez petit, il devrait ressortir par là où il est entré.
Je regarde la boîte vide du jouet.
— C’est petit comment, « assez petit » ?
— Je n’en ai aucune idée. Est-ce qu’il est entré facilement ?
Mon visage rougit.
— Plutôt.
— Dans ce cas, il sortira peut-être aussi facilement qu’il est entré.
Beurk.
— Ce n’est pas drôle !
— Écoute, je dois vraiment y aller. Tiens-moi au courant. Si tu décides d’aller aux urgences, viens ici, à l’hôpital presbytérien.
Je grimace.
— Je vais d’abord tenter la méthode toilettes.
— Mange des fibres, ajoute-t-elle. Ou mieux encore, prends un laxatif.
Sur ce conseil utile, elle raccroche.
Alors que je pose Précieux sur le lit, je vois quelque chose sur le téléphone professionnel qui me glace jusqu’aux os.
L’appel d’aide semble s’être connecté quelque part.
— Allô ? couiné-je dans le combiné. Il y a quelqu’un ?
— Miss Pack, fait une voix familière à l’accent russe. Je désapprouve fermement votre plan et je suis en chemin pour vous emmener immédiatement aux urgences.