CHAPITRE 2

Le « devenir-soi » dans la pensée moderne

Le débat sur la capacité des hommes à choisir leur destin ne cesse ensuite de s’amplifier, au moins en Europe, avec le désir croissant des hommes qui peuplent ce continent de prendre le pouvoir sur leur propre vie, de refuser d’abord les mariages arrangés et l’entrée obligatoire dans les ordres des cadets de familles aisées.

Parmi les premiers, les marchands de Flandres et d’Italie refusent de continuer à croire que leur sort ici-bas est entièrement entre les mains de Dieu et de l’Église. Ils ne veulent plus admettre que seule la pauvreté permet d’obtenir le Salut. Ils savent qu’entreprendre peut changer leur existence et veulent croire que s’enrichir ne les privera pas du Salut.

Face à eux, des théologiens catholiques assènent que le destin de l’homme ne dépend pas de lui, mais de Dieu, et que seuls les pauvres auront accès à la Vie éternelle. Cornélius Jansen, évêque d’Ypres, affirme que le Salut de l’homme ne dépend que de son Créateur qui le pourvoit à la naissance de la « grâce suffisante » qui le mènera au Salut si – et seulement si – il garde, aussi, toute sa vie durant, la « grâce efficace » que le Très-Haut peut lui retirer à tout moment. Jansen répète que la pauvreté et l’ascèse sont les formes de vie les mieux à même de lui conserver la « grâce efficace » .

Dans le même sens, Blaise Pascal, qui découvre sa foi à l’occasion d’un éblouissement mystique, affirme que le « devenir-soi » n’est pas la réalisation des désirs, mais la prise de conscience de ce qui permet de distinguer entre le Bien et le Mal tout en laissant libre de préférer le Mal : « Toutes vos lumières ne peuvent arriver qu’à connaître que ce n’est point dans vous-même que vous trouverez ni la vérité ni le bien », écrit-il dans les Pensées. Pour lui, même si le seul moteur de l’action humaine est le désir d’être heureux, seul Dieu peut accorder ce bonheur. Dieu, accessible à ceux qui veulent Le voir : « Il y a assez de lumière pour ceux qui ne désirent que de voir, et assez d’obscurité pour ceux qui ont une disposition contraire. »

À l’inverse, certains théologiens de la même époque entendent montrer que la réussite matérielle n’interdit pas le Salut. Ainsi Jean Calvin, à Genève, affirme vers 1530 que l’homme est sauvé par Dieu indépendamment de sa propre volonté et de la vie qu’il mène. Un autre théologien rebelle à Rome, le Saxon Martin Luther, écrit au même moment, dans son traité De la liberté chrétienne : « Les bonnes œuvres n’ont jamais fait un homme bon, mais un homme bon fait de bonnes œuvres. » Autrement dit, l’action bonne, en particulier la réussite matérielle, est signe de l’élection divine et non pas condition de celle-ci.

Les Jésuites, menés par l’Espagnol Luis Molina, vont même aller plus loin en affirmant que si faire le bien assure le Salut, réussir matériellement ne peut y nuire.

Peu à peu s’affirme, par des penseurs dans et hors de l’Église, le droit de réaliser ses désirs, de vivre heureux ici-bas. Sans que soit encore pour autant accepté le libre choix d’un conjoint ou d’un métier, qui reste l’apanage des pères.

Pour Étienne de La Boétie dans son Discours de la servitude volontaire, écrit en 1549 à l’âge de dix-huit ans, l’homme désire en premier lieu être libre, s’arracher à sa condition servile. S’il ne l’est pas, c’est qu’il choisit plus ou moins tacitement son état ; c’est qu’il jouit dans une certaine mesure de sa servitude. Car un tyran ne peut imposer son ordre à tout un peuple, puisqu’il n’a « que deux yeux, deux mains, un corps, et rien de plus que n’a le dernier des habitants du nombre infini de nos villes ». La soumission est pour lui une forme du « devenir-soi ».

Son ami Michel de Montaigne en revient à la pensée grecque pour affirmer qu’on ne peut se trouver sans écrire sur soi : « Me peignant pour autrui, je me suis peint en moi de couleurs plus nettes que n’étaient les miennes premières. Je n’ai pas plus fait mon livre que mon livre m’a fait, livre consubstantiel à son auteur » (Essais, Livre II, chapitre 18). Il s’interroge, dans le dernier chapitre (Livre III, chapitre 13), sur la manière de bien vivre : « Les plus belles vies […] se rangent au modèle commun et humain avec ordre mais sans miracle et sans extravagance. » Il invite les hommes à vivre pleinement leur vie au lieu de « passer le temps » et de le laisser « couler et échapper » : « Nous n’avons à nous plaindre qu’à nous si [la vie] nous presse, et si elle nous échappe inutilement. […]. Principalement à cette heure que j’aperçois la mienne si brève en temps, je la veux étendre en poids ; je veux arrêter la promptitude de sa fuite par la promptitude de ma saisie, et par la vigueur de l’usage compenser la hâtivité de son écoulement ; à mesure que la possession du vivre est plus courte, il me la faut rendre plus profonde et plus pleine. » Il faut, pour cela, « étudier, savourer et ruminer » chaque plaisir, et non en jouir « sans le connaître ». Et il faut surtout agir, au lieu de rêver à un avenir meilleur sans le provoquer, comme font ceux qui « outrepassent le présent, et ce qu’ils possèdent, pour servir à l’espérance, et pour des ombrages et vaines images que la fantaisie leur met au devant ». Il ajoute enfin : « Quand je danse, je danse ; quand je dors, je dors ; et quand je me promène solitairement en un beau verger, si mes pensées se sont entretenues des occurrences étrangères quelque partie du temps, quelque autre partie je les ramène à la promenade, au verger, à la douceur de cette solitude et à moi. »

Un siècle plus tard, au moment où, après Shakespeare et Molière, Marivaux et Beaumarchais achèvent d’émanciper les jeunes gens, garçons et filles, un autre voyageur, Jean-Jacques Rousseau, raconte, dans la « Troisième promenade » des Rêveries du promeneur solitaire, le chemin qui le conduit à lui-même. Pour lui, le « devenir-soi » ne peut qu’être un devenir vertueux dès lors qu’il s’appuie sur les leçons de l’expérience. Il part d’une phrase attribuée à l’Athénien Solon : « Je deviens vieux en apprenant toujours », avant d’évoquer ses propres avanies, les malheurs qu’il a connus au contact des hommes et de la société, les désillusions qu’il a subies ; il se fixe une nouvelle ligne de conduite : « Soyons pour le reste de ma vie ce que j’aurai trouvé devoir être après y avoir bien pensé. » Il conclut : « Heureux si, par mes progrès sur moi-même, j’apprends à sortir de la vie, non meilleur, car cela n’est pas possible, mais plus vertueux que je n’y suis entré. »

La démocratie et l’esprit d’entreprise deviennent les nouvelles formes du « devenir-soi ».

Un peu plus tard, dans Qu’est-ce que les Lumières ?, Emmanuel Kant explique le passage, à son époque, de l’homme d’un état de « minorité » à celui de « majorité ». L’homme (qu’il nomme « enfant ») s’est, dit-il, longtemps complu dans l’ignorance par paresse intellectuelle, guidé dans ses moindres mouvements par les autorités séculières ou régulières. Les hommes doivent maintenant s’affranchir des modèles préconçus de pensée et oser grandir grâce à l’exercice de la raison. Pour Kant, « devenir-soi », c’est avoir l’audace de penser par soi-même et de passer au crible de la raison ce que les autorités (État, Église) présentent comme irréfutable.

Puis se précise le désir des hommes de faire de la liberté individuelle le but ultime de la condition humaine, l’objectif unique, politique et économique, du « devenir-soi ».

Dans La Phénoménologie de l’esprit, Hegel s’intéresse à la conscience de soi et à sa reconnaissance par l’autre, qui fait l’humanité de chacun. Elle passe, pour lui, par un combat, dans lequel chacun risque sa vie et qui permet de distinguer le Maître de l’Esclave : le premier, « pure conscience de soi », est celui qui parvient à dépasser l’instinct de conservation et accepte le risque de mourir, tandis que le second ne fait que réaliser que « la vie lui est aussi essentielle que la conscience de soi ». Le travail (Bildung) permet à la fois à l’Esclave de s’arracher à sa nature, qui l’a fait se soumettre au Maître, et d’échapper à sa domination. Le Maître et l’Esclave s’élèvent alors ensemble jusqu’à l’humanité, finalité du « devenir-soi », l’un en risquant sa vie, l’autre en transformant le monde par son travail.

Un peu plus tard, quand l’industrie et le capitalisme, le marché et la démocratie prennent le dessus sur l’agriculture et le féodalisme, devenir soi devient, pour Marx, se libérer de l’aliénation et de l’exploitation ; ce qui suppose une double révolution : personnelle pour l’une, collective pour l’autre. Dans les Manuscrits de 1844, Marx décrit l’aliénation du travail de l’ouvrier, qui n’est pas « une libre activité physique et intellectuelle », mais un travail forcé qui lui est extérieur et le mortifie. Mettre à bas l’aliénation, devenir soi, implique une prise de conscience pour détruire la marchandisation du travail et de la consommation, de l’État et de la religion. Dans Le Capital, après avoir expliqué la nature de l’exploitation, il en déduit que pour s’en libérer, une révolution politique est nécessaire. Dans les Statuts de l’Association internationale des Travailleurs, il précise que l’« émancipation de la classe ouvrière doit être l’œuvre des travailleurs eux-mêmes […] pour l’établissement de droits et de devoirs égaux, et pour l’abolition de toute domination de classe ».

Au même moment, dans la jeune démocratie américaine, l’écrivain Henry David Thoreau tire de cette même recherche sur le « devenir-soi » la conclusion qu’il faut pour cela décider de se retirer du monde, vivre en solitaire. Né dans le Massachussetts en 1817, ayant étudié à Harvard, il renonce aux carrières que lui ouvre son diplôme pour devenir instituteur. Entre 1845 et 1847, il vit dans une cabane au bord de l’étang Walden, à l’écart de la population du Massachussetts. Très critique envers le mode de vie occidental, Thoreau relate sa « révolte solitaire » dans Walden ou la vie dans les bois. Pour lui, la vie en solitaire est nécessaire à la construction de soi ; la société corrompt l’homme, paradoxalement seul dans les grandes villes.

Une grande partie de la littérature occidentale est ensuite consacrée à cette quête narcissique de soi dont les écrivains sont les héros et les narrateurs. Pour Léon Tolstoï, le « devenir-soi » passe, comme pour Montaigne, par l’écriture, instrument d’auto-analyse et d’autodétermination ; il y invente sans cesse sa vie, en opposition complète avec les structures politiques, économiques et sociales de son temps, redéfinissant des règles de conduite exigeantes, ce qui l’oriente vers un ascétisme inspiré d’un christianisme réduit à la stricte observance de la loi d’amour.

Cette quête du « devenir-soi » continue avec la théorie psychanalytique développée par Sigmund Freud à la fin du xixe siècle, qui vise elle aussi à aider l’homme à se libérer de l’aliénation, due à une lutte entre l’inconscient, espace mental où sont contenus des désirs inavouables ou socialement impossibles, et le surmoi, qui les censure. Ces affrontements peuvent aboutir à des névroses – « le moi qui réprime un fragment du ça » (vie pulsionnelle) – ou des psychoses – le moi qui « se met au service du ça en se retirant d’un fragment de la réalité » – qui paralysent l’homme. Pour résoudre ces contradictions, l’analysant est invité, au cours de la cure psychanalytique, à prononcer, sans se restreindre, tous les mots qui lui passent par la tête pour mettre au jour les fondements, contenus dans son inconscient, des pensées ou actions qui le troublent. Cela est censé lui permettre de redécouvrir son passé, d’en assumer l’héritage, et, dans le meilleur des cas, de sublimer ces névroses en sentiments supérieurs.

Pour Marcel Proust, le « devenir-soi » passe également par l’écriture. Elle agit comme un révélateur de la vie et du monde et permet de se réapproprier le passé. La Recherche du temps perdu retrace la découverte d’une vocation : c’est, comme le dira Roland Barthes, « le récit d’un désir d’écrire ». Le narrateur explique son projet par ces mots, à la fin du Temps retrouvé, qui en disent long sur le rôle de l’introspection dans le « devenir-soi » : « Enfin, cette idée de temps avait un dernier prix pour moi, elle était un aiguillon, elle me disait qu’il était temps de commencer si je voulais atteindre ce que j’avais quelquefois senti au cours de ma vie, dans de brefs éclairs, […] et qui m’avait fait considérer la vie comme digne d’être vécue. Combien me le semblait-elle davantage, maintenant qu’elle me semblait pouvoir être éclaircie, elle qu’on vit dans les ténèbres ; ramenée au vrai de ce qu’elle était, elle qu’on fausse sans cesse, en somme réalisée dans un livre. Que celui qui pourrait écrire un tel livre serait heureux, pensais-je ; quel labeur devant lui ! »

Autres autobiographies imaginaires, Voyage au bout de la nuit et Mort à crédit, de Louis-Ferdinand Céline, réinventent le vécu de l’auteur au travers du personnage de Ferdinand Bardamu, médecin et écrivain comme lui. Mort à crédit est dédié à son enfance et à son adolescence, et s’achève sur son souhait de s’enrôler dans l’armée, tandis que le Voyage retrace ses expériences d’adulte. Celles-ci le confrontent aux événements et évolutions, associés à l’exploitation et à la mort, qui ont marqué les débuts du xxe siècle : la Première Guerre mondiale, le colonialisme en Afrique, le productivisme fordiste, enfin la misère des banlieues. Elles le conduiront à un « devenir-soi » épouvantable.

Autre metteur en scène de sa propre vie, Blaise Cendrars (de son vrai nom Frédéric Sauser-Hall) confie à son frère Georges dès ses vingt-quatre ans : « C’est une question de vie ou de mort que celle de construire sa vie, la plus importante après celle de l’inspiration ; les deux sont d’ailleurs très intimement liées. » Il décrit lui-même la tétralogie qu’il écrit dans les années 1940 – L’Homme foudroyé, La Main coupée, Bourlinguer et Le Lotissement du ciel – comme « des mémoires sans être des mémoires ». Il y évoque la Première Guerre mondiale, le voyage à travers les ports d’Europe et « sur les voies du monde intérieur ». Ainsi écrit-il dans L’Homme foudroyé : « J’ai pris feu dans ma solitude car écrire c’est se consumer… L’écriture est un incendie qui embrase un grand remue-ménage d’idées et qui fait flamboyer des associations d’images avant de les réduire en braises crépitantes et en cendres retombantes. Mais si la flamme déclenche l’alerte, la spontanéité du feu reste mystérieuse. Car écrire c’est brûler vif, mais c’est aussi renaître de ses cendres. » D’où le nom qu’il se choisit.

Dans le sillage de Freud, Carl Gustav Jung distingue le « Moi » du « Soi ». Le Moi constitue le centre de la conscience et est survalorisé par l’homme occidental qui se veut un être de raison. Le Soi englobe le conscient et l’inconscient et regroupe ainsi la personnalité d’un homme. L’objectif de toute vie est d’atteindre une harmonie entre le conscient et l’inconscient, c’est-à-dire l’harmonie du Soi. « Le Soi est aussi le but de la vie car il est l’expression la plus complète de ces combinaisons du destin qu’on appelle individu », écrit Jung dans La Dialectique du moi et de l’inconscient.

Sans doute faut-il aussi citer ici Emmanuel Levinas pour qui le « devenir-soi » exige la prise de conscience de l’Autre, nécessaire à l’intelligibilité de la subjectivité (liberté d’être soi).

Ou encore Paul Ricœur, pour qui, dans Soi-même comme un autre, l’Autre n’est pas seulement la contrepartie du même, mais participe à la constitution intime de son sens.

Aujourd’hui, la demande de « devenir-soi » est de plus en plus considérable : prolifèrent les témoignages et les méthodes sur la meilleure façon de prendre le pouvoir sur son esprit et son corps, de perdre du poids, de cesser de fumer ou de boire, de maîtriser ses émotions, de se trouver, de réussir sa vie. Certains expliquent que le « devenir-soi » passe par la découverte de son corps qui, disent-ils, ne ment pas, n’emprunte pas de chemins qui ne mènent nulle part, contrairement au mental. Pour d’autres, il passe par un travail sur soi, le breakthrough, qui permet d’engendrer une meilleure prise de conscience.

Aux États-Unis s’est développée depuis plusieurs dizaines d’années une littérature abondante sur le « devenir-soi ». Pour la plupart des auteurs, devenir soi-même est le moyen le plus efficace et le plus direct pour atteindre le bonheur. De nombreux entrepreneurs à succès, coachs en vie privée et psychiatres ont écrit sur le sujet.

Ainsi de Jim Rohn, l’un des premiers coachs en développement personnel, entrepreneur américain né en 1930 et décédé en 2009, élevé dans une famille d’agriculteurs de l’Idaho. Sa publication la plus célèbre a été The Five Major Pieces to the Life Puzzle en 1991. Il y développe les cinq fondements de l’existence qui sont, selon lui, la « philosophie » (la manière dont nous pensons), l’« attitude » (la manière dont nous ressentons les choses), l’« activité » (la manière dont nous agissons pour atteindre nos objectifs), le « résultat » (comment nous nous situons par rapport à ces objectifs) et la manière de vivre. Rohn insiste sur la brièveté de l’existence, le devoir d’utiliser efficacement le temps qui nous est imparti et la nécessaire discipline pour mener sa vie.

Ainsi de Margaret Moore et Paul Hammerness, de l’Université de Harvard. Dans Organize your Mind, Organize your Life, publié en 2011, ils expliquent cinq principes qui permettent à celui qui les applique d’atteindre une paix ou un ordre intérieur : contrôler ses émotions négatives, se concentrer sur une seule chose à la fois, savoir réagir efficacement aux distractions de l’environnement, utiliser au maximum sa mémoire de court terme et passer avec agilité d’une tâche à une autre.

Ainsi de William Glasser, psychiatre californien disparu en 2013. Il est l’instigateur de la « théorie du choix » et de la « thérapie par le réel ». La théorie du choix est fondée sur trois principes : toute action humaine se traduit par un comportement ; presque tous les comportements sont choisis ; les comportements sont motivés par cinq besoins primaires dont le plus important est l’amour. Les personnes malheureuses sont celles qui ne parviennent pas à bâtir des relations affectives de longue durée avec d’autres. Ce manque affectif se traduit par la démence, la violence ou encore les addictions. Glasser propose sept attitudes à adopter pour nouer des liens durables avec autrui : écouter, accepter, respecter, faire confiance, encourager, soutenir et négocier. La thérapie par le réel consiste à mettre en pratique ces sept attitudes.

Ainsi de l’étude Harvard Grant, menée entre 1938 et 2012 sur 268 étudiants de l’Université de Harvard, suivis par des scientifiques qui ont régulièrement collecté des données sur tous les aspects de leur existence. Voici quelques leçons tirées de cette étude par le professeur George E. Vaillant, qui l’a dirigée entre 1966 et 2004 : l’amour et les relations affectives fortes sont les composantes essentielles du bonheur, très loin devant la gloire et l’argent. Les personnes qui réussissent le mieux à nouer de telles relations vivent mieux, plus longtemps, et sont moins stressées. Ceux qui connaissent une enfance malheureuse ne sont nullement condamnés à rester malheureux toute leur vie, bien au contraire. Les défis de la vie peuvent pousser les hommes à se dépasser, sortir d’un narcissisme qui les étouffe pour se tourner vers les autres et ainsi atteindre le bonheur.

Ainsi également dans le discours d’ouverture de la cérémonie de remise de diplômes aux étudiants de Stanford, en 2005, Steve Jobs déduit trois leçons de sa propre trajectoire pour devenir soi : suivre son instinct sans se satisfaire des déterminismes ; retourner chaque situation à son avantage ; choisir constamment de faire ce que l’on aime. Il conclut : « Stay hungry ! Stay foolish ! »

 

Le désir de devenir soi est aujourd’hui l’ambition majeure de dizaines, de centaines de millions de gens qui y réfléchissent, l’expriment et s’y essaient.

À vous, lecteurs, de la mettre maintenant aussi en actes, pour vous et les vôtres. Les chapitres suivants visent à vous y aider.