Se respecter et se faire respecter
Ayant jaugé son aliénation, mesuré la précarité de sa vie, réalisé d’où on vient, analysé son parcours, ses envies, ses forces, une fois prise une pleine conscience de son corps et de son esprit, une fois installée, par le jeu même de cette prise de conscience, l’irrésistible envie d’aller plus loin vers la confiance en soi, en découle la possibilité de faire prévaloir le respect de soi.
Se respecter : étymologiquement, regarder en arrière et avoir des égards, de la considération pour soi ; se juger digne de sa propre estime ; considérer sa vie comme précieuse pour soi et pour les autres.
Après la prise de conscience de son corps, la première dimension du respect de soi passe par son entretien, le refus de toute addiction ; la pratique d’un sport, le soin de son apparence, l’amour de l’image de soi que renvoient les miroirs et le regard des autres ; et, si ce n’est pas le cas, de tout faire pour la changer et surveiller sa santé : l’hypocondrie est, avec mesure, une des dimensions du respect de soi.
Le respect de soi exige également de se préciser à soi-même ses valeurs, ce qu’on entend par le Bien et le Mal, et d’en hiérarchiser les diverses formes ; de décider ce sur quoi on est prêt ou non à transiger ; de distinguer entre l’important et l’accessoire, entre la satisfaction immédiate et l’investissement dans une plénitude de plus long terme.
Un exercice peut être utile pour installer ce respect de soi : désigner en cinq mots ce qu’on entend respecter. Des vocables tels que propreté, élégance, honnêteté, sincérité, politesse, savoir-vivre.
Le respect de soi suppose de prendre au sérieux quotidiennement ces mots et les valeurs qu’ils recouvrent, de tenir les promesses qu’ils impliquent ; de se former et de se réformer sans cesse en utilisant le meilleur de ses capacités ; de viser sans répit l’excellence de soi.
Ce qui conduit aussi à ne pas se mentir ; à ne pas s’épargner ; à analyser et comprendre ses échecs ; à identifier ses responsabilités ; à comprendre ce qu’on peut attendre et espérer de soi ; à ne pas esquiver la vérité sur soi, sur ses tares, ses secrets de famille ; à refuser la perspective de mourir sans avoir fait ce qu’on s’était promis d’accomplir.
Le respect de soi conduit aussi à écarter la haine de soi, à ne pas se mépriser, à penser qu’il y a nécessairement en soi quelque chose qui mérite d’être mis en valeur ; que rien n’est perdu, qu’on a droit, comme tout un chacun, à une belle et bonne vie, à du beau et bon temps.
Il conduit aussi à ne pas chercher à tout prix à être plaint ou consolé, à être prêt à admettre la réalité de mauvaises nouvelles ou de perspectives difficiles ; à ne pas se morfondre et trouver plaisir à être malheureux ; à être préparé à saisir dans le malheur de nouvelles opportunités.
Le respect de soi conduit à trouver une force intérieure, à atteindre lucidité et intériorité, intégrité et courage ; il fortifie le désir de vivre ; il prépare à affronter les aléas de la vie sans optimisme béat ni pessimisme inhibant.
Il renvoie une image sereine et positive de soi à son entourage et conduit à en être respecté : de fait, comment espérer être respecté d’autrui si on ne se respecte pas soi-même ?
Il conduit, réciproquement, à respecter autrui, miroir et source du respect de soi.
Tel est l’aboutissement de la deuxième étape.