Je me souviens très bien de ce matin du mercredi 12 octobre. Voilà bien un matin où je n’aurais jamais dû me lever ! Lorsque le réveil m’a tiré ce jour-là de mon profond sommeil, mon épouse dormait paisiblement, lovée dans une jaquette de flanelle, le visage enduit d’une crème soi-disant rajeunissante. Si mes souvenirs sont bons, je rêvais, avant le vacarme désolant de ce réveil abrutissant, que ma tendre moitié, après s’être débarrassée de sa robe de nuit encombrante et de la crème qui recouvrait son minois, s’était glissée sous les couvertures et me suçait copieusement, chose à laquelle elle était fort peu encline depuis de trop nombreuses années. Je l’aime tendrement, mais sur ce chapitre, nos relations sont davantage platoniques. Enfin…

Pour en revenir à ce matin du 12 octobre, je combattais un mauvais rhume depuis environ une semaine. La journée s’annonçait grise, quoiqu’à cette heure, il faisait encore trop sombre pour en être certain. Une petite voix intérieure me murmurait inlassablement : « Reste couché, ce matin. Tu peux te le permettre ! Une seule journée… Quand as-tu été malade pour la dernière fois ? » J’étais fort tenté de l’écouter. Effectivement, je n’avais jamais vraiment profité de journées de maladie, aussi aurait-il été merveilleux d’éteindre le maudit appareil et de dormir tout l’avant-midi dans la chaleur du lit conjugal. Mais le devoir m’attendait. Il faut dire que mon travail me plaisait bien. J’étais agent de sécurité, et comme j’avais accumulé suffisamment d’années de service pour la chaîne de magasins Les Galeries de la Mode, je pouvais désormais passer mes journées confortablement installé devant les écrans de surveillance de l’établissement.

Ce n’étaient toutefois pas mes beaux yeux qui m’avaient fait mériter ce poste ; et ce fameux poste, il était parfait. Je pouvais rester assis à longueur de journée, sans avoir à faire le tour des rayons sans relâche. Je n’avais pas d’arme à porter — je déteste les armes à feu ! —, puisque j’étais à l’abri de tout problème. Non qu’il en arrivât fréquemment… De toute ma carrière, je n’avais assisté qu’à deux vols à main armée. C’était pas mal, quand même, en près de quarante ans de service. Mais je préférais, et de loin, la sécurité de cet emploi, surtout à mon âge. Je n’avais en effet plus envie de courir après de petits malfaiteurs ou d’empêcher les adolescents de flâner. Et puis, pourquoi aurais-je passé la journée debout, alors que je pouvais m’asseoir ?

Quand les dirigeants des Galeries de la Mode avaient opté pour le système de sécurité en place, ils avaient eu un mal fou à déterminer la personne de confiance qui surveillerait toutes les installations. Le problème n’était pas tant la quantité de caméras à gérer, puisque leur nombre, dix-huit précisément, n’était pas exceptionnel. En fait, le plus délicat était de contrôler celles qui avaient été installées dans les cabines d’essayage. Évidemment, beaucoup d’agents s’étaient portés volontaires pour ce travail, espérant pouvoir passer la journée à regarder des femmes se déshabiller devant eux. Mais ils n’avaient rien compris ! Contrairement à eux, j’étais extrêmement fier du travail que j’accomplissais. Et si on m’avait confié ce poste, c’était parce que j’étais assez professionnel pour ne pas m’attarder plus longtemps que nécessaire sur ces cabines. Je n’étais pourtant pas plus idiot qu’un autre ! Mais si une femme ne pouvait plus faire ses emplettes en paix, sans se demander si on la regarderait lorsqu’elle essaierait des vêtements, où s’en irait le monde ? Il fallait donc trouver quelqu’un qui saurait garder l’œil discret et la bouche cousue. Les Galeries de la Mode n’avaient effectivement pas du tout l’intention de crier sur tous les toits qu’on y surveillait les clientes jusque dans les cabines d’essayage ! Cela aurait été catastrophique pour l’entreprise, car toutes sortes d’associations s’en seraient mêlées, et il aurait fallu abandonner l’idée. Et pourtant, c’était précisément dans ces petites cabines que se commettaient le plus de vols à l’étalage.

Bref, c’était moi, grâce à mon expérience, ma discrétion et mon professionnalisme, qui avais obtenu le poste. Et j’avais attrapé plus d’une voleuse en flagrant délit ! Oh, il était assurément très tentant de se poster devant les écrans correspondant aux cabines et de suivre tout ce qui s’y passait… Les clientes des Galeries étaient généralement des femmes assez à l’aise, belles et élégantes, mais j’avais passé l’âge de telles folies et j’espérais secrètement que nos compétiteurs faisaient preuve de jugement avant de confier ce genre de tâche à leurs employés. Enfin…

C’est ce sens du devoir qui m’a donné, ce mercredi 12 octobre, le courage nécessaire pour résister à l’appel, si tentant, de ma voix intérieure et de la chaleur de mon lit. Je me suis levé péniblement, jetant un regard envieux à ma tendre épouse qui dormait toujours, et me suis dirigé vers la douche. Je pensais avoir oublié mon rêve, mais il m’est férocement revenu en mémoire à la vue de mon membre semi-dressé sous le jet d’eau chaude. J’imaginais la bouche de ma douce Solange l’emprisonner tendrement, puis le lécher avec appétit comme elle le faisait jadis. À l’époque où elle dormait nue, de corps comme de visage… Distraitement, j’ai enduit ma verge de savon et laissé glisser ma main de haut en bas, sentant mon rythme cardiaque s’accélérer. Quand avais-je, pour la dernière fois, caressé cette queue paresseuse ? J’ai été agréablement surpris par l’état d’excitation dans lequel je me trouvais, et ai presque eu envie de réveiller Solange pour lui faire partager mon désir. Mais l’heure avançait, et ma douce moitié ne serait probablement pas aussi réceptive que mon organe, qui était tendu à l’extrême. J’ai donc joui dans un sursaut, me suis fait une brève toilette et me suis rendu au boulot.

Sur place, la matinée s’est déroulée lentement, sans qu’aucun événement spécial ne vînt la perturber, jusqu’à ce qu’Elle fît son entrée ; celle qui allait réveiller mes instincts endormis et bouleverser ma vie. Je l’ai tout d’abord aperçue dans l’écran relié à la caméra de l’entrée du magasin. Il s’agissait d’une jeune femme blonde d’environ vingt-cinq ans, avec beaucoup de prestance et dont l’apparence était soignée. Je voyais certes tous les jours de jolies femmes franchir ces mêmes portes, mais celle-ci était vraiment éblouissante. Elle semblait pressée, comme beaucoup de clientes cherchant un article particulier et profitant de la courte pause du midi pour se le procurer. Elle s’est dirigée directement vers le rayon de la lingerie. J’ai attentivement suivi sa silhouette, qui avançait gracieusement malgré les élégantes chaussures à talons hauts et le tailleur ajusté qu’elle portait. Ses cheveux étaient impeccablement coiffés, et j’aurais pu jurer qu’elle portait l’un de ces parfums capiteux, Shalimar ou Opium, à la fois classiques et terriblement chers. Devant l’étalage des dessous féminins, elle a retiré ses gants d’un geste lent et délibéré qui, inexplicablement, m’a tout de suite fait bander. Elle avait en effet l’air si sûre d’elle ! Il s’agissait probablement du genre de cliente difficile exigeant la plus haute qualité et un service irréprochable. Heureusement, la jeune vendeuse était une connaisseuse. Elle lui a conseillé quelques modèles et l’a guidée vers les cabines d’essayage. J’ai alors pris une profonde inspiration. Il était inadmissible que je profite de cette occasion rêvée ! Mais il aurait été surhumain d’y résister. Alors, que devais-je faire ? J’étais désemparé, ne pouvant expliquer cet attrait soudain et irrésistible pour cette inconnue. Moi qui, d’habitude, étais si respectueux de l’intimité des clientes, j’étais incapable, physiquement comme psychologiquement, de détacher mon regard des écrans surveillant les cabines d’essayage, et je tentais frénétiquement de deviner celle qui serait assignée à cette mystérieuse femme. La préposée a finalement guidé vers la cabine numéro trois la belle étrangère, qui s’y est engouffrée. J’ai du même coup tenté de m’imposer une limite d’une minute de voyeurisme avant de retourner à mes occupations. À peine le temps d’apercevoir sa silhouette plus clairement…

Attention, il faut comprendre que j’ai toujours été fidèle à ma femme, tant en pensées qu’en actes. Le mois dernier, alors que nous célébrions notre trente-cinquième anniversaire de mariage, j’étais ému, heureux, fier, me trouvant chanceux d’avoir passé tant d’années en sa compagnie, jouissant d’un bonheur paisible et sans histoires. J’espère sincèrement passer le reste de ma vie de la même manière. Le fait que je sois sensible à la vue d’une jolie jeune femme à la jupe trop courte n’altère en rien mon amour pour ma femme… même s’il m’arrive, à l’occasion, de tenter de deviner ce qui se cache sous cette même jupe. Ma femme Solange m’aime encore aussi, je crois. Sinon, elle ne serait pas aussi attentionnée et douce envers moi. Nos enfants volent depuis plusieurs années de leurs propres ailes, nous apprécions toujours notre compagnie mutuelle, et les soirées tranquilles avec une bonne bière devant la télé témoignent de notre confort, modeste quoique douillet. Seulement voilà, il y a longtemps que Solange ne se donne plus la peine de surveiller sa ligne ou de porter des vêtements aussi flatteurs que la femme qui venait d’apparaître devant mes yeux cette journée-là. Ceci explique en grande partie ce qui m’est arrivé par la suite.

Les caméras qui surveillaient les cabines étaient placées derrière les glaces. J’ai ainsi pu voir de plus près le délicieux visage de la belle inconnue. Son maquillage soigné mettait en valeur des yeux pâles dont la couleur ne m’était malheureusement pas dévoilée. Ces satanés écrans ne présentaient que des nuances infinies de gris ! Peu importe, cette femme était d’une beauté saisissante. Elle a accroché son sac sur un des crochets installés à cet effet et a déboutonné de ses longs doigts la veste de son tailleur. Je me suis aussitôt dit que c’était suffisant, que je ne la regarderais pas retirer sa blouse, sa jupe et le reste. Mais sous le tailleur, elle ne portait qu’un soutien-gorge, une écharpe savamment repliée donnant l’illusion d’une chemise. Et sans m’en rendre compte, je me suis laissé prendre au jeu. Il était déjà trop tard pour exercer un quelconque acte de volonté afin de détourner mon regard, car j’étais fasciné. Le magnifique soutien-gorge de l’inconnue était en dentelle, de même qu’une adorable culotte assortie dépassant furtivement de la jupe. Une jupe qui a soudain glissé jusqu’au sol et que la belle cliente a ramassée lentement, avant de la suspendre soigneusement pour éviter qu’elle ne se froisse. Pourquoi fallait-il qu’elle porte en plus ces bas qui adhéraient comme par magie aux cuisses ? Très pâles et soyeux, ils enveloppaient ses longues jambes et reposaient sur sa peau laiteuse. Avec des gestes très précis, l’étrangère a tout d’abord retiré son soutien-gorge, puis fait glisser sa culotte, avant de détacher les vêtements neufs du cintre. Je me suis vaguement dit qu’elle n’aurait pas dû la retirer, qu’on demandait d’ordinaire aux clientes de conserver leurs dessous pour essayer d’autres vêtements, mais cette pensée a quitté mon esprit aussi vite qu’elle était apparue. Cette femme avait en effet un corps splendide : des seins lourds et fermes, une taille étroite, des hanches légèrement rebondies, le ventre plat… Je me suis aperçu qu’elle était réellement blonde en apercevant brièvement la toison pâle ornant son bas-ventre. Elle s’est bientôt retournée, si bien que j’ai pu admirer la rondeur des fesses, ainsi que l’élégance et la minceur de son dos. Ses bras fins ont alors agrafé le nouveau soutien-gorge et glissé la culotte assortie le long de ses jambes somptueuses. L’ensemble lui allait à merveille, la vendeuse l’avait admirablement conseillée. La dentelle était si délicate qu’on pouvait facilement apercevoir les mamelons de l’inconnue, ainsi que l’ombre légère recouvrant son sexe. La belle s’est examinée d’un air grave, tournant sur elle-même afin de voir son corps sous des angles différents, se demandant visiblement si c’était bien l’article qu’elle cherchait. Après quelques instants, un sourire angélique a éclairé son visage. La cliente aimait de toute évidence ce qu’elle voyait, et sa décision était prise. J’espérais de mon côté qu’elle prendrait le temps d’essayer les autres ensembles qu’on lui avait suggérés, mais elle n’en a rien fait, satisfaite de ce premier essai. Elle s’est rhabillée rapidement, me laissant une fois de plus admirer la nudité de son corps fabuleux, avant de le recouvrir de ses vêtements chics. Puis, elle est sortie et a payé son achat. Elle affichait un petit sourire satisfait en attendant son paquet, sourire qui est resté accroché à ses lèvres jusqu’à ce qu’elle ait quitté le magasin. J’ai pour ma part légèrement sursauté lorsque, juste avant de franchir le portail de l’entrée, elle s’est retournée, a scruté l’intérieur du magasin, puis levé la tête vers la caméra qui surveillait cet endroit précis. Inexplicablement, j’ai rougi comme un adolescent pris en défaut, et j’ai eu l’impression troublante qu’elle me savait là, qu’elle devinait que je venais de l’observer impudiquement, la trouvant si belle. Si belle que lorsque je me suis par la suite levé de mon siège, mon pantalon avait l’allure d’une petite tente au mât central bien érigé.

Ce soir-là, en rentrant à la maison, je n’ai été capable de bafouiller qu’une vague réponse lorsque Solange m’a accueilli avec son éternel : « Paul, c’est toi ? Tu as passé une bonne journée ? » Je me suis précipité dans la chambre pour me débarrasser de mes vêtements et ai sauté sous la douche pour me rafraîchir les idées. Solange a évidemment trouvé étonnant que je prenne une seconde douche le même jour, mais je lui ai expliqué d’un air indifférent qu’il y avait eu un problème avec l’appareil de climatisation, si bien qu’une chaleur d’enfer avait régné toute la journée dans les bureaux. Un horrible sentiment de culpabilité m’a envahi en lui racontant ce mensonge, aussi me suis-je aussitôt approché d’elle et l’ai-je embrassée. J’ai alors été aussi surpris qu’elle de la tendresse et de la profondeur de ce baiser. Elle a reculé, rouge de confusion, et m’a fixé de son regard le plus perçant, celui qui devinait tout.

— Mais qu’est-ce qui se passe avec toi ? Allez, raconte !

J’ai pris une profonde inspiration et lui ai répondu :

— Eh bien ! J’ai pensé à toi toute la journée. Je ne suis pas très habile pour te le montrer, mais tu sais, je t’aime… c’est tout. Il y avait longtemps que je ne te l’avais pas dit.

Elle a ri et m’a serré dans ses bras.

Puis, elle m’a préparé un excellent repas. Et en la regardant s’activer dans la cuisine, j’ai senti monter une autre érection surprise. Voilà que j’étais embarrassé comme un collégien, alors même que nous étions mariés depuis si longtemps ! Il faut dire qu’il y a des années que nos ardeurs se sont calmées, et je crois bien que ni l’un ni l’autre ne savons comment briser la mince couche de glace qui s’est installée entre nous côté sexe. Devais-je toutefois, ce soir-là, lui montrer la réaction qu’elle venait de déclencher chez moi, ou bien être plus subtil et tenter de l’attirer au lit plus tôt que d’habitude ? J’étais indécis. Je me suis d’ailleurs posé tant de questions que mon érection est repartie d’où elle était venue… et que nous avons finalement passé, somme toute, une soirée ordinaire, chacun dans un fauteuil devant la télé.

Cette histoire n’aurait sans doute pas été plus loin si mon inconnue n’était jamais revenue au magasin. Toutefois, le lendemain, le jeudi 13 octobre, celle que j’appelais déjà mentalement « ma » cliente a refait son apparition. Même heure, même attitude pressée. Elle s’est dirigée d’un pas ferme vers l’étalage des dessous féminins pour s’emparer d’un des ensembles qu’elle n’avait pas essayés la veille. Fasciné, je n’ai pas du tout tenté de détourner le regard, et même si mon fameux sentiment de culpabilité a refait une timide apparition, il était loin d’être en mesure de m’arrêter. Je me suis donc cette fois-ci confortablement installé devant l’écran de la cabine six, et ai observé la belle étrangère. Elle avait recommencé le même manège que la veille, à ceci près qu’elle portait à présent une robe boutonnée, de laquelle elle a lentement libéré son corps divin. Elle avait revêtu, ce jour-là, un joli maillot noir, visiblement en soie, en plus d’adorables bas du même ton. Mais quelque chose a soudain changé dans son comportement. Son corps a commencé à se mouvoir au son d’une musique imperceptible. J’observais cette danse lascive, captivé par la fluidité de ses mouvements. Les doigts de l’inconnue s’enroulaient dans ses cheveux, puis s’attardaient autour de ses épaules en une intime étreinte. Elle a ensuite cajolé ses seins somptueux à-travers le tissu soyeux de son maillot, montrant des mamelons dressés dédiés aux caresses. Mais plutôt que ces seins pigeonnants, ce sont ses cuisses que ses mains ont caressées, massant doucement leur chair blanche et veloutée. La belle inconnue dansait toujours, s’accroupissant en écartant les jambes à un point tel que j’ai pu remarquer que son sexe n’était recouvert que d’une très fine lanière de dentelle. Ses doigts s’en approchaient d’ailleurs dangereusement, semblant répondre à un appel irrésistible. Tout à coup, elle a sursauté et paru se rendre compte de la situation étrange dans laquelle elle se trouvait. Elle a alors regardé autour d’elle comme si elle sortait d’un rêve, désorientée. Elle s’est ensuite empressée d’enfiler l’ensemble qu’elle avait apporté avec elle dans la cabine d’essayage et a paru déçue du résultat. Elle s’est alors rhabillée précipitamment, est sortie de la cabine et a remis les dessous à Nicole, la préposée. Puis, elle a quitté le magasin d’un pas pressé, me laissant pantelant au bord de ma chaise, dépité et beaucoup trop excité à mon goût.

Ce soir-là, j’ai bredouillé à Solange la même excuse que la veille, avant de partir me réfugier sous la douche, où je me suis violemment masturbé. Mais que m’arrivait-il donc ? Pourquoi cette femme avait une telle emprise sur moi ? Je m’étais masturbé davantage, ces deux derniers jours, qu’au cours des douze dernières années !

Le vendredi 14 octobre, je me suis rendu au travail en me préparant intérieurement à la visite de « ma » cliente. Il était peu probable qu’elle revienne un troisième jour d’affilée, mais avec le spectacle qu’elle m’avait offert la veille, je ne pouvais m’empêcher de l’espérer. Je tentais de puiser en moi le courage nécessaire pour résister, au cas où l’envie lui prendrait de revenir combler la curiosité de mon regard lubrique, mais je savais la bataille perdue d’avance. J’avais en effet rêvé d’elle, la nuit précédente, et je m’étais réveillé penaud, regardant ma chère Solange qui dormait sans se douter de quoi que ce soit. Je m’étais senti vil, menteur, comme si je lui avais été infidèle. Je m’en voulais terriblement, tout en essayant de me convaincre que je n’avais rien fait de mal. En réalité, je n’avais commis aucun acte répréhensible… C’étaient simplement mon esprit et mon corps qui s’étaient comportés en salopards.

Aussi, en voyant la jeune cliente arriver à son heure habituelle, ce vendredi-là, j’ai désespérément tenté de porter mon regard sur les autres écrans de mon bureau. En quelques fractions de seconde, je l’ai vue choisir un négligé de teinte pâle. Peu après, Nicole la guidait vers les cabines. Il n’en fallait pas plus pour m’exciter : j’avais les yeux rivés sur l’écran, et toute ma bonne volonté s’était envolée.

Ma belle inconnue était maintenant complètement dévêtue, n’ayant conservé que ses bas et ses chaussures. Toutefois, au lieu de s’emparer tout de suite du négligé qu’elle voulait essayer, elle a empoigné son épaisse chevelure et l’a négligemment remontée au-dessus de sa tête. Elle s’est observée ainsi, en pivotant sur elle-même pour s’admirer complètement, puis a laissé glisser ses mains le long de son cou, avant de caresser légèrement ses mamelons dressés. Elle s’est ensuite penchée et a ramassé le maillot soyeux qu’elle devait porter plus tôt — était-il beige ou rose ? Je ne pouvais que deviner la merveilleuse et subtile harmonie de ce morceau d’étoffe avec la couleur laiteuse de sa peau —, et l’a frotté contre ses seins généreux, avant de l’enrouler autour de sa taille fine, laissant le tissu délicat agacer ses fesses si rondes.

Puis, la pulpeuse cliente a saisi une extrémité du maillot, glissant l’autre entre ses jambes, et a ondulé d’avant en arrière devant mes yeux ébahis. Elle s’observait attentivement dans le miroir, glissant l’étoffe le long de son sexe en réalisant un long va-et-vient. Enfin, son corps entier s’est plaqué contre la glace, ses seins magnifiques s’y écrasant devant mes yeux ébahis. Je pouvais presque sentir sa chaude haleine qui embuait le miroir, sentir son souffle sur mon membre maintenant douloureux de désir. Tout à coup, j’ai brûlé d’envie de libérer ma queue de mon pantalon et de la branler copieusement, mais la crainte de me faire surprendre m’en a empêché. La belle inconnue, n’ayant que faire de mon problème, continuait à se caresser avec le tissu de plus en plus rapidement. Je me massais de mon côté discrètement par-dessus la toile rêche de mon pantalon. Toutefois, comme j’étais peu habitué à ce genre de plaisir solitaire — du moins, sur mon lieu de travail ! —, j’avais du mal à me détendre et à me laisser aller. Après tout, j’étais celui en qui on avait confiance pour respecter l’anonymat et l’intimité des femmes ! Eh bien, je n’étais pas très fier de moi, à présent. Malgré tout, je bandais de plus en plus férocement. « Ma » cliente a bientôt légèrement écarté les jambes et appuyé en son centre un doigt, auquel elle a fait réaliser une rotation soutenue. Quelques instants de ce manège ont suffi ; la belle a fermé les yeux, puis son corps entier s’est plié de jouissance. La main sur mon sexe, je m’apprêtais à défaire la fermeture-éclair de mon pantalon pour partager cet instant de plaisir, lorsque la porte du bureau s’est ouverte. Ce n’était qu’un de mes collègues qui voulait savoir si j’avais déjà mangé. Rouge de honte, je me suis relevé d’un bond, tentant de cacher celle qui me causait tant d’émoi. J’ai marmonné que je descendrais dans dix minutes, qu’il pouvait bien m’attendre s’il en avait envie. Mon excitation en est redescendue d’un coup. Je l’avais échappé belle !

Ce soir-là, j’ai tenté de convaincre Solange de venir me rejoindre au lit très tôt dans la soirée. Prétextant la fatigue, je lui ai dit que j’avais envie de la sentir près de moi, qu’elle pourrait très bien lire si elle le désirait. Elle a pris place en me tournant le dos, si bien que je me suis glissé aussi près d’elle que possible. En un éclair, une fabuleuse érection s’est manifestée… et Solange a fait mine de ne pas s’en apercevoir. Elle s’est au contraire excusée, s’est levée et rendue à la salle de bain. Pour en ressortir dix minutes plus tard, des bigoudis bien enroulés tout autour de son visage, lui-même enduit de la fameuse crème rajeunissante. Elle m’a alors donné un petit baiser sur le front, s’est étendue trop loin de moi et endormie quelques minutes plus tard. Déçu, amer, frustré, je suis parti au salon pour m’hébéter devant une comédie insipide à la télé, ne retournant au lit qu’après avoir dormi une partie de la nuit sur le canapé trop dur.

Le lendemain matin, le samedi 15 octobre, je ne travaillais que jusqu’à treize heures. J’étais épuisé et irritable en raison de la mauvaise nuit que je venais de passer, et je n’étais pas d’humeur à badiner avec les autres employés. Je me suis donc directement rendu à mon bureau, en évitant la cafétéria. Je croyais avoir réussi cette opération quand j’ai croisé Nicole qui avançait vers moi, tout sourire et dont la voix était si claire et si aiguë que j’ai eu l’impression de ressentir les premiers assauts d’un terrible mal de tête.

— Bonjour, Paul ! Dis-donc, ça n’a pas l’air d’aller, ce matin !

— Si, si, ça va… ai-je grommelé plus sèchement que je ne l’aurais voulu.

— Excuse-moi, je ne voulais pas t’embêter ! T’es frustré ou quoi ?

Elle était perspicace, la Nicole…

— Non, non. Juste fatigué.

Je brûlais en fait d’envie de lui poser des questions sur « ma » cliente. La connaissait-elle ? Comment était-elle ? Quel genre de voix avait-elle ? Allait-elle venir aujourd’hui ? Comment s’appelait-elle ? Je suis néanmoins parvenu à me contenir et suis parti me réfugier dans mon bureau, un thermos de café bien corsé pour compagnon.

Les heures se sont égrenées, sans que l’inconnue daigne se montrer. J’étais à la fois terriblement déçu et soulagé. Je réalisais que cette femme était presque devenue une obsession. Je songeais à elle comme on pense à une maîtresse, l’espérant, se satisfaisant du peu qu’elle veut bien nous donner, rêvant d’un sourire, d’un baiser. Je me trouvais tout à fait ridicule… et me sentais très malheureux. Je ne savais plus rien de rien. Mon quart de travail s’est terminé sans visite de la belle inconnue.

Le dimanche 16 octobre s’est lui aussi révélé une journée absolument médiocre. Je l’ai passé dans un état presque fébrile, ne pensant qu’à Elle, rêvant tout éveillé de son corps splendide, de ses mains caressant cette peau si pâle, de ses cheveux soyeux cascadant sur ses épaules. Elle me manquait. Je me sentais comme un toxicomane en pleine crise de manque, ne l’ayant pas vue de toute une journée. Je n’en pouvais plus de devoir attendre jusqu’au lendemain, lundi, alors que ce jour-là était normalement si tranquille qu’il en était ennuyeux. « Mais Elle viendra sûrement briser cette monotonie et éclairer cette journée de sa présence », me disais-je. J’en avais le pressentiment. Je ne pouvais faire reposer cette impression sur rien de concret, mais j’en avais la certitude.

Ce dimanche matin, donc, je suis sorti de chez moi, suis monté dans la voiture et me suis dirigé vers Les Galeries de la Mode. En fait, je ne travaillais pas ce jour-là, mais le magasin n’en était pas moins ouvert. « Sait-on jamais, peut-être sera-t-elle là ? », me répétais-je. Je pensais m’asseoir tranquillement devant l’entrée, peut-être même manger une bouchée en surveillant les allées et venues des clientes. Mais si elle venait, que ferais-je, au juste ? Eh bien ! je me contenterais de la regarder et serais satisfait pour le reste de la journée. Je pourrais enfin connaître tous ces détails que je brûlais de savoir : la nuance exacte du blond de ses cheveux, la couleur de ses yeux, son parfum. Je pourrais la suivre discrètement, faisant mine de faire des emplettes pour ma femme. Et que dirais-je aux employés croisés par hasard et qui savaient très bien que je n’avais aucune raison d’être là un dimanche ? Je trouverais bien, voilà tout.

Je me suis donc rendu, en fin d’avant-midi, au magasin et ai attendu. J’ai mangé un sandwich et ai attendu. J’ai bu un café, puis un deuxième, et j’ai attendu. Jusqu’à ce qu’amèrement déçu — il était près de seize heures — je me décide à rentrer chez moi, piteux et penaud. Par chance, Solange avait une sortie ce soir-là, me laissant seul avec mon obsession. Car c’en était bien une. Alors, pour la première fois depuis fort longtemps, j’ai sorti la bouteille de rhum du placard, m’en suis versé une bonne rasade pour tenter d’oublier cette femme ou pour permettre au lendemain d’arriver plus vite… J’ai bu plus que je ne l’aurais dû, puisque c’est Solange qui m’a réveillé alors que j’étais écrasé sur le canapé. Par chance, j’avais eu le bon sens de rattacher mon pantalon avant de sombrer dans l’alcool. Car mon dernier souvenir était de m’être péniblement lavé les mains après avoir joui seul, le pantalon lamentablement enroulé autour des hanches, en train de l’imaginer, Elle, à genoux devant moi, ouvrant sa bouche ardente pour m’accueillir.

Le lundi 17 octobre, je me suis levé très en avance. Qui plus est, j’ai été prêt à partir au travail ridiculement tôt, ce qui a éveillé les soupçons de Solange.

— Qu’est-ce qui te prend, toi, ce matin ?

— Oh ! tu sais, c’est une période occupée, au magasin. On a une réunion pour discuter des quarts de travail durant la période des Fêtes. Bon, il faut que j’y aille…

Un autre mensonge. Décidément, ça devenait une fâcheuse habitude. Mais j’étais fébrile, et tout ce que je voulais, c’était me rendre au boulot le plus vite possible, m’installer à mon poste et attendre « ma » cliente. Il me restait beaucoup d’heures à attendre avant sa visite, de longues heures… Le lundi matin, le grand magasin était en effet généralement peu achalandé et d’un ennui mortel. Tout le monde sait qu’il ne se passe jamais rien, le lundi. Mais je m’en foutais éperdument ; j’attendrais sagement la visite de la belle, prêt à l’accueillir et à savourer un peu de ce qu’Elle voudrait bien partager avec moi. J’ai eu l’heureuse surprise de la voir arriver vers dix heures. Peut-être ne travaillait-elle pas ce jour-là ? Cette pensée m’a amené à me demander quel pouvait être son métier. Elle pouvait facilement être mannequin, mais je lui prêtais des ambitions différentes. Je l’imaginais plutôt comme la directrice d’une importante compagnie de cosmétiques, peut-être, ou encore d’une revue de mode, mais cela avait peu d’importance. Elle était là, sous mes yeux, et c’était ce qui comptait. Elle semblait d’ailleurs beaucoup moins pressée que d’habitude. Elle déambulait au gré des allées, examinant tantôt une veste, tantôt un pantalon. Elle a essayé un magnifique manteau orné de fourrure et s’est admirée longuement dans un long miroir. Elle affichait l’air rêveur de quelqu’un qui hésite à se payer un cadeau. Pourrait-elle se l’offrir ? Elle a continué à se balader et s’est arrêtée devant le comptoir des bijoux. Les Galeries de la Mode s’enorgueillissaient effectivement de posséder un vaste assortiment de pierres précieuses et d’or. Elle a essayé un collier de perles, des bagues chaussées de diamants et des bracelets ornés de minuscules émeraudes. Elle a longuement hésité devant des boucles d’oreilles que je ne pouvais pas voir précisément, mais dont l’éclat était évident. Puis, elle a continué sa route, semblant marcher sans but précis. Tout à coup, son visage s’est illuminé d’un sourire quand un homme, grand, impeccablement vêtu et à la démarche assurée s’est dirigé vers elle.

Mon cœur s’est serré à cet instant. C’était absurde ! Pourquoi la vision de cette femme superbe avec son amant tout aussi superbe qu’elle me perturbait-elle ? Je n’avais pas l’intention de tenter de la séduire, quand même ! Entre cet homme imposant et mon humble personne, il y avait tout un monde ! Il était en effet immense, alors que j’étais petit. Il était svelte, et j’étais grassouillet. Il avait d’épais cheveux noirs et ondulés, alors que les miens, grisonnants, devenaient de plus en plus épars. Je n’avais vraiment aucune chance avec une telle femme, aussi était-il plutôt stupide d’essayer de penser le contraire.

J’ai néanmoins eu la curiosité malsaine de suivre des yeux les deux amants. Ils se sont dirigés vers le rayon de la lingerie fine, et elle a montré à son compagnon quelques-uns des ensembles qu’elle avait déjà essayés en minaudant. L’homme a fait lentement le tour des étalages, sélectionnant à son tour quelques vêtements qu’il lui a tendus. Le moins que l’on puisse dire, c’était qu’il avait des goûts un peu moins sobres qu’elle. En effet, alors qu’elle semblait préférer les vêtements chics et séduisants à d’autres, plus vulgaires et trop suggestifs, lui priorisait les ensembles ne laissant aucune place à l’imagination. Il a placé devant elle d’étroits bustiers, qui semblaient inconfortables mais excitants, ainsi que de minuscules cache-sexe aux porte-jarretelles assortis. Elle riait, ils riaient tous les deux, ils s’embrassaient… ils semblaient heureux, en un mot. On le serait à moins ! Elle s’est finalement emparée du bustier le plus osé et d’un cache-sexe muni de porte-jarretelles, avant de se diriger vers les cabines d’essayage. Comme j’étais heureux ! Ma divine inconnue se transformerait bientôt, devant moi, en femme moins respectable. Cette simple pensée m’a fait bander dur comme fer.

En arrivant devant les cabines, « ma » cliente s’est approchée de Nicole et a longuement discuté avec elle, l’air complice, tout en désignant son compagnon. Elles ont ricané, regardé l’homme qui semblait produire un certain effet sur la petite Nicole. Puis, la belle étrangère a pénétré dans une cabine. J’ai alors vu Nicole disparaître et se diriger vers le rayon des chaussures. Elle a choisi une paire de longues cuissardes aux talons vertigineux, les a prises avec elle, puis les a laissées devant la porte de la cabine 8, celle où Elle se dévêtait déjà.

Cette fois-ci, « ma » cliente s’est dépêchée d’enfiler les vêtements sélectionnés par son amant. Je l’ai une nouvelle fois admirée lorsqu’elle s’est retrouvée nue, sans cependant prendre le temps de se regarder. Elle a attrapé le bustier, dont l’étroitesse faisait saillir ses seins de manière provocante. La rigidité du tissu rendait qui plus est la taille de la belle inconnue minuscule, tout en arrondissant ses hanches voluptueuses. Sans être gênée outre mesure par ce corset, Elle s’est acharnée à en serrer les cordons à l’avant et a relevé ses seins, de façon à laisser poindre ses mamelons hors du corsage. J’ai aussitôt avancé machinalement une main vers l’écran, espérant toucher ces rondeurs affolantes qui se tendaient sadiquement devant moi. Puis, la cliente a enfilé le minuscule cache-sexe assorti au bustier. Je me suis alors surpris à me demander pourquoi je n’avais jamais remarqué que les Galeries de la Mode vendaient de tels accoutrements… mais quelle agréable façon de le découvrir !

La belle étrangère a ensuite attaché le porte-jarretelles autour de sa taille et y a fixé les bas soyeux qu’elle portait en arrivant dans le magasin. Elle s’est examinée dans la glace et a été visiblement satisfaite du résultat. Elle a donc ouvert doucement la porte de la cabine, a pris les bottes laissées sur place par Nicole et les a enfilées avec des gestes gracieux. L’effet était époustouflant ! J’étais aux anges et terriblement excité, mais je n’étais pas au bout de mes peines.

Ma belle cliente a défait son chignon d’un geste assuré, permettant à ses magnifiques boucles blondes de se répandre sur ses épaules. Puis, elle a fouillé dans son sac à main et en a sorti un tube de rouge à lèvres éclatant, avec lequel elle a rougi la pointe de ses seins, avant de peindre ses lèvres. Elle s’est par la suite retournée, me laissant tout le loisir d’admirer son magnifique corps de dos : fesses d’une rondeur presque exagérée, cuisses fines enchâssées dans les souples cuissardes, taille minuscule… Et c’est là qu’elle a ouvert la porte de la cabine à son amant, arrivé sur place comme par magie.

En la regardant attentivement, il l’a fait tourner sur elle-même, admirant son choix de vêtements et l’effet final de sa tenue. Puis, il est entré avec elle dans la cabine, a discrètement refermé la porte derrière lui et l’a prise dans ses bras. Il l’a aussitôt embrassée avec une passion dévorante, caressant, pinçant et pétrissant ses fesses délicieuses. Je pouvais voir le jeu de ses mains sur la douce chair de ma belle inconnue. Inconsciemment, j’ai laissé ma propre main faire ce dont elle brûlait d’envie — s’emparer de mon membre déjà tendu —, tandis que je continuais à regarder le couple. La belle étrangère s’était juchée sur un petit tabouret et balançait les seins devant le visage de l’homme. Celui-ci s’en est emparés et les a complètement libérés de leur étroit carcan, léchant goulûment le rouge dont ils étaient ornés. Ensuite, il a repoussé le cache-sexe d’une main, libérant la chaude toison de « ma » cliente, agaçant son sexe d’un doigt impatient. Elle a renversé la tête en arrière, cajolé elle-même ses seins offerts, afin de permettre à son compagnon de multiplier ses caresses. Il s’est alors penché davantage devant elle, a levé l’une des jambes bottées sur son épaule et a léché le clitoris ainsi offert. Je pouvais presque entendre les petits gémissements de la belle, sentir les frissons la parcourir tandis que son amant la dévorait. Puis, il s’est reculé, a écarté les douces lèvres et les a effleurées d’un doigt tendu. « Ma » cliente s’est agrippée à ses cheveux, en proie à une excitation extrême, et a souri lorsque le doigt s’est brutalement inséré en elle. Elle s’est laissée ainsi pénétrer quelques instants, avant d’ajouter son propre doigt à cette douce torture. Elle s’est aussi caressée violemment au rythme de la pénétration et s’est soudainement affaissée, les yeux clos.

L’homme en a profité pour baisser son pantalon et se masturber. Je trouvais étrange qu’il suive à peu près mon rythme, mais c’était très bien ainsi. Il a bientôt approché son membre imposant des cheveux de sa maîtresse. C’est alors qu’elle a ouvert la bouche bien grand et a aspiré la verge en elle, s’agenouillant devant son amant, soumise. Elle semblait savoir ce qu’elle faisait, attirant le pénis presque entier dans sa bouche chaude, prenant une pause, puis aspirant de nouveau. Elle pompait d’ailleurs si fort que je pouvais voir le mouvement de ses joues et que j’en ai eu mal. Mal de la posséder ainsi à distance, de la voir faire ce qu’elle faisait à cet homme devant mon propre corps à l’abandon, vêtue comme elle l’était, à l’endroit où elle se trouvait. Et je voyais bien, trop bien même, les réactions de l’homme, sa queue devenir de plus en plus grosse sous l’assaut de cette bouche sensuelle. Il lui tenait la tête, la forçant à le prendre plus loin, plus profondément, ce à quoi elle ne résistait aucunement. Puis, il lui a fait accélérer sa cadence. J’ai vu la tête de la belle inconnue se presser dans un brouillard blond, jusqu’à ce qu’il l’interrompe, l’invite à se retourner devant le tabouret et, en position toujours agenouillée, à s’y appuyer. Il s’est alors placé derrière elle et l’a enfilée d’un seul coup, la pénétrant avec une telle force que sa tête a heurté le mur de la cabine. Tandis que son dos s’arquait, elle a écarté au maximum les jambes pour mieux le recevoir. J’avais de mon côté une excellente vue sur l’énorme membre s’enfonçant en elle. Je croyais même ressentir, à chaque pénétration, les muscles de son sexe se resserrer autour de ma propre queue. J’étais si excité que j’ai cru que j’allais jouir sans avoir à me toucher. Mais la tension s’est encore accrue.

L’homme s’est en effet relevé et a tiré ma belle par les cheveux, pour qu’elle se mette aussi debout. Elle se laissait malmener sans rien dire, ayant plutôt l’air d’apprécier le manque de douceur dont son amant faisait preuve. Il a alors placé ses poignets sur le cadre du miroir, si bien que j’ai cru qu’elle me regardait. Elle me faisait maintenant face dans toute sa splendeur, offerte, le regard éperdu, une mince couche de sueur perlant au-dessus de sa lèvre supérieure. L’homme s’est alors placé derrière elle ; juchée sur ses talons vertigineux, elle était presque de sa grandeur. Elle a bombé les fesses, approchant davantage le haut de son corps du miroir, sur lequel ses seins se sont soudain écrasés, envahissant l’écran qui me faisait face. L’homme l’a à ce moment-là prise de nouveau, durement, sauvagement, aplatissant ses seins et son visage contre le miroir au rythme de ses assauts. Un peu plus, et j’avais la sensation qu’elle passerait au-travers de cette cabine et atterrirait entre mes jambes ! Et j’aurais été prêt à l’accueillir, bien sûr ! J’étais dur comme je ne l’avais jamais été, et je pompais mon pauvre membre ragaillardi à la cadence de leurs ébats. La belle semblait planer dans un autre monde. Les paupières closes, la bouche ouverte, elle devait fournir un effort surhumain pour réprimer des cris qui auraient sans doute alerté les autres clients. L’homme la fouillait cependant de plus en plus fort, de plus en plus profondément. Je sentais leur jouissance proche, aussi proche que la mienne. Une frénésie s’est soudainement emparée des amants, et leur rythme s’est accéléré, passant de passionné à insoutenable. Elle a ouvert les yeux, laissant des mèches de cheveux trempés lui coller au visage. Elle n’avait plus grand-chose à voir avec la femme sophistiquée et élégante sur laquelle je fantasmais depuis cinq jours. Elle était devenue une tigresse, une putain déchaînée. Elle s’activait autant que lui, jouant des hanches et du bassin en une danse extatique, jusqu’à ce qu’ils atteignent tous deux un orgasme formidable. Ils se sont alors écrasés sur le sol, dans les bras l’un de l’autre, et se sont embrassés, épuisés et repus.

J’en ai profité pour faire, de mon côté, l’examen des dégâts. Une tache embarrassante ornait maintenant mon pantalon. J’avais aussi répandu une flaque imposante dans ma main, qui n’avait pas été suffisante pour contenir le flot de mon plaisir. Je me suis assuré que personne ne traînait dans le corridor menant à mon bureau et me suis faufilé vers la salle de bain pour mettre un peu d’ordre dans ma tenue. J’en suis ressorti quelques minutes plus tard, confus mais béat, flottant sur un nuage d’images indélébiles que je ne dévoilerais à personne et que je conserverais précieusement pour de futurs divertissements.

« Ah ! Elle m’a gâté ! Si elle avait su que je les observais, les choses auraient sûrement été très différentes », me disais-je.

Solange me traite souvent de gros nigaud.

Je fais comme si c’était faux, même si je sais que c’est la vérité.

Ils ont d’ailleurs été nombreux, au cours des semaines suivantes, à me traiter de gros nigaud.

En fait, ils ont commencé à le faire dès le lendemain de la nouvelle, le mardi matin où on m’a mis à la porte.

Le lendemain du jour où Nicole et sa bande ont dévalisé, pour plus de huit-cent-mille dollars, la succursale des Galeries de la Mode que je devais surveiller. Le jour où ils l’ont dévalisée, tandis que deux des complices faisaient l’amour dans une cabine d’essayage.

On a lu dans les manchettes des journaux : « Agent de sécurité voyeur dupé », ainsi que d’autres titres du même genre.

C’était un lundi, le lundi 17 octobre que ça s’est passé.

Il ne se passe jamais rien, le lundi…