Un record ! Pas un son ne s’est fait entendre dans ces murs depuis plus de deux heures. Aucun gémissement, ni plainte, ni vagissement, rien du tout. Ce silence est si extraordinaire… Il y a un tas de choses que je considérais comme acquises, auparavant, comme ce silence divin, et que je vois aujourd’hui d’un tout autre œil. Ces petites merveilles, somme toute si anodines, ont accédé au rang de fantasmes inaccessibles : une soirée tranquille à la maison, à lire un bon roman ; décider, à la dernière minute, de m’offrir quelques jours à la campagne ; pouvoir partir, comme ça, pour aller voir un bon film au cinéma ; dormir douze heures d’affilée, surtout le matin ; passer la nuit à faire l’amour… enfin, ces jours-ci, quelques minutes de cette dernière activité seraient déjà un exploit !
Les jumeaux ont maintenant six mois. Ah ! que je les aime ! Ces adorables poupons trouvent toujours le moyen de me faire sourire, peu importe mon état de fatigue ou de déprime. Car, oui, je suis fatiguée et déprimée. Je les ai voulus, désirés, et j’ai tout fait pour les avoir, ces enfants. J’ai même laissé un homme que j’aimais pour en trouver un autre qui accepterait — ou, du moins, ne s’objecterait pas — à me faire un enfant. Un enfant.
Le hasard et les mystères de la génétique ont décrété que j’en aurais deux, et c’est là que certains de mes plans ont changé. Je ne m’attendais pas, bien entendu, à ce que chaque jour soit une partie de plaisir. Je savais dans quelle aventure je me lançais, mais parfois, je dois dire que ça devient un véritable cauchemar. Certains jours sont pires que d’autres, bien sûr, mais ceux-là sont, malheureusement, de plus en plus nombreux.
Les jumeaux franchissent toutes les étapes à peu près en même temps. Depuis quelque temps, ce sont les poussées dentaires de nos petits chéris qui nous tiennent éveillés toute la nuit. Avant cela, nous avons eu droit à toute la panoplie des malaises qui s’abattent sur les enfants. La varicelle sévissait par exemple il y a à peine trois semaines. On m’avait bien dit qu’ils pouvaient l’attraper même s’ils avaient été vaccinés, et ils en ont eu une version atténuée, mais ça s’est quand même avéré pénible. Auparavant, il y avait eu la gastroentérite, des fièvres inexpliquées, les nez bouchés et tant d’autres situations agaçantes que j’ai cessé de les répertorier. Rien qui me permette toutefois d’oublier les coliques qui nous ont tous exténués au cours de leurs trois premiers mois de vie, ou encore leur faim insatiable. Quand les deux pleuraient invariablement en même temps, exigeant ensemble qu’on change leur couche, qu’on les nourrisse ou qu’on les cajole, Louis et moi versions des larmes de désarroi.
Néanmoins, il ne faut pas se méprendre sur mes sentiments. Pour rien au monde, je ne changerais quoi que ce soit à tout ce que nous avons vécu depuis leur naissance. Bien que difficiles, ces six mois ont aussi été les plus exaltants de ma vie. L’amour que je ressens pour Amélie et Thierry est immense, démesuré, farouche, incroyable, presque ridicule. Je peux passer des heures à les regarder grandir — ce qu’ils font à une vitesse affolante ! —, et je ne cesse de m’émerveiller devant leurs moindres exploits. Si seulement je ne me sentais pas si moche et n’avais pas l’impression d’être passée de l’état de femme à celui de réfrigérateur ambulant, tout irait pour le mieux. En d’autres mots, si je me sentais assez désirable et que nous trouvions le temps et l’énergie, Louis et moi, de faire l’amour de temps en temps, mon bonheur serait total.
Qu’est-ce que je donnerais pour retrouver la passion que nous partagions si allègrement chaque fois que l’occasion se présentait il y a encore un an ! Louis et moi étions toujours en train de faire l’amour, à tout moment de la journée, peu importaient l’endroit et la circonstance. Ah ! nous avions vraiment une vie sexuelle merveilleuse jusqu’à la naissance des fruits de notre amour. Au fil de ma grossesse, nos retraites au chalet étaient devenues de plus en plus enivrantes. Nous y allions tous les deux pour y vivre quelques jours de paix et de tranquillité parsemés de plaisir et de jouissance bénéfiques. Louis préparait une bonne flambée dans l’âtre, et une fois la pièce baignant dans une douce chaleur, nous nous étendions, nus et amoureux, sur une épaisse fourrure. Mon amant prenait plaisir, lorsqu’une certaine rondeur était apparue sur mon ventre, à le caresser tendrement. Son regard, alors, reflétait une joie profonde mêlée à un désir intense. Il m’embrassait longuement, laissant courir sa langue sur mon corps entier, s’attardant sur mes seins gonflés. Il me faisait jouir lentement, dans un long et délicieux supplice, en caressant de sa main chaude mon sexe qui n’en pouvait déjà plus. Puis, il écartait davantage mes jambes et mordillait mes cuisses et la douce chair offerte. Il me léchait et me suçait ensuite, s’amusant à glisser un doigt en moi et me fouillant si doucement qu’on aurait dit un chatouillement. Un deuxième doigt rejoignait enfin le premier, tandis que le pouce de son autre main, bien appuyée sur mon ventre, palpait et tapotait la chair la plus tendre. Ces trois doigts, immobiles à l’intérieur de mon corps, déployaient mon sexe entier, tandis que la bouche de Louis me léchait davantage, mêlant sa salive au chaud liquide qui émanait de moi. Quand il me sentait prête à abdiquer, il me caressait du pouce plus intensément, plus durement aussi, jusqu’à ce que les muscles de mon sexe, palpitant sous ses doigts, lui indiquent que j’étais en proie à un orgasme. Il adorait sentir la montée de mon plaisir, léchant ma jouissance sur ses doigts luisants.
Enfin, il me pénétrait doucement et tendrement, soucieux de mon bien-être. Mais à ce niveau d’excitation, j’aurais été incapable de ressentir quelque inconfort que ce soit ! Je l’aspirais enfin au plus profond de mon corps, admirant sa peau et le reflet du feu dans ses yeux magnifiques. Ses cheveux bouclés tressautaient autour de son visage au rythme de sa danse en moi, et nos corps, bouillants et ruisselants, s’unissaient pour se fondre l’un dans l’autre, se berçant avec une intimité et une complicité formidables. C’était le bon temps !
Pour en revenir à Louis et à son rôle de père, il accomplit sa tâche à merveille. Il a pris tout le congé auquel il avait droit à la naissance des jumeaux, et même depuis qu’il est retourné travailler, il change d’innombrables couches, donne le bain à Amélie tandis que je m’occupe de Thierry. C’est souvent lui qui les met au lit pour la nuit — la nuit ! La bonne blague ! —, et il m’aide à les nourrir. J’apprécie énormément tout ce qu’il fait. Je me rends compte aujourd’hui que si j’avais été seule avec ces poupons depuis leur naissance, j’y aurais probablement laissé mon équilibre mental. Quel homme merveilleux !
Mais il y a un problème, un ombrage à notre amour l’un pour l’autre : nous n’avons pas encore eu une seule relation sexuelle depuis l’arrivée des jumeaux. Chaque fois que nous planifions de nous retrouver en tête à tête, les petits au lit, il faut que l’un d’eux se réveille, tirant l’autre du sommeil, et il se passe parfois une heure ou plus avant que le calme ne revienne. À ce moment-là, notre désir mutuel se transforme en une fatigue irrépressible ; c’est typique. J’ai même l’impression que nos chers anges devinent nos intentions, car ils choisissent toujours le moment le plus inopportun pour nous rappeler qu’ils existent. Nous avons dû essayer de faire l’amour une bonne demi-douzaine de fois, mais au moment où nous étions tous deux prêts à passer aux choses sérieuses, le son de notre respiration haletante a toujours été enterré par un « Oooouuuuiiiiinnnn » retentissant, suivi de très près par un deuxième.
Bien sûr, le premier mois s’est écoulé sans que nous réalisions quoi que ce soit. Au cours du deuxième, j’étais si exténuée que lorsque j’avais un répit — aussi bref fût-il —, je me hâtais de me mettre au lit, seule, pour me reposer un peu ; le sommeil ne tardait évidemment pas à venir. Louis n’insistait pas ni ne tentait alors jamais de me séduire. Toutefois, par la suite, c’est lui qui s’est épuisé. Il rentrait du travail, préparait à manger, m’aidait à donner les bains, à changer les couches, à mettre les pyjamas et tout le reste. Une fois les enfants couchés, il se réfugiait dans la chambre. Quand je l’y rejoignais à peine quelques minutes plus tard, il ronflait déjà.
Comme il me manque ! Je ne peux néanmoins me résoudre à briser la glace, car j’ai peur d’essuyer un refus. Je ne me suis jamais sentie si peu attirante, et je comprendrais qu’il n’ait pas envie de moi. Je suis en effet cernée, blême, et mon corps s’est transformé et me semble fort peu attrayant. De plus, je suis terrorisée à l’idée que le plaisir que nous partagions en faisant l’amour ne soit plus aussi présent qu’avant. Et si je ne lui plaisais plus autant ? Et si mon corps ne réagissait plus à ses caresses comme avant ? Et si je ne réussissais plus à l’exciter ? Et si, et si ?
Pourtant, lorsque je repense à tous les souvenirs fantastiques liés aux bons moments que nous avons passés ensemble, je deviens toute moite… Lorsqu’un simple regard lui faisait comprendre que j’étais en proie à un désir urgent, ou lorsqu’il caressait ma cuisse d’une manière bien particulière, m’indiquant qu’il souhaitait que nous nous retrouvions seuls un moment, où que nous soyons. J’adorais sentir le sexe de Louis s’engloutir de plus en plus profondément en moi, se faufiler posément jusqu’au tréfonds de mon sexe humide, le combler de sa chaleur et de son impatience. Louis m’a déjà fait l’amour dans des endroits inusités, à des moments où je m’y attendais le moins, comme cette fois, par exemple, au théâtre… Pendant l’entracte, nous avions repéré la pièce vide. Louis m’y avait entraînée subtilement, s’assurant que personne ne nous avait remarqués. J’avais refermé la porte, et il s’était glissé derrière moi, caressant mes seins en écartant la large encolure de la robe que je portais ce soir-là. Me mordillant le cou et la nuque, pétrissant toujours ma poitrine déjà gonflée par la grossesse, il avait faufilé un genou entre mes jambes pour les écarter. Puis, il avait remonté la robe sur mes reins et retiré ma culotte, exposant mes fesses à la noirceur ambiante avant de glisser une main brûlante entre mes cuisses. Il m’avait palpée, étirée, frottée tant et si bien que j’avais joui immédiatement, les coudes appuyés contre la porte de la loge. Il avait alors défait son pantalon et m’avait pénétrée rudement, ne prenant pas la peine de ménager mon sexe ruisselant, et m’avait fait l’amour rapidement, avec une intensité jamais égalée. Quand nous étions ressortis de la loge, l’un après l’autre, nous avions le rose aux joues et le regard brillant.
Dans ma tête, nos corps se complètent toujours à merveille, quelle que soit la position que nous choisissons, quel que soit l’endroit. Qu’il plane au-dessus de moi et que j’élève les jambes pour encercler son cou, ou que je prenne place sur ses cuisses pour me glisser sur lui, il n’y a que sa verge qui sache combler chaque parcelle de mon corps. Il sait atteindre mes parties les plus sensibles, les exploiter, les tirailler, les exciter… Bref, chaque fois que je fais l’amour avec lui, tout me confirme à quel point je souhaite passer le reste de ma vie à ses côtés. Je donnerais tant pour savoir s’il en va toujours de même pour lui !
Après l’accouchement, je croyais qu’il s’abstenait de me faire l’amour par respect. Il savait effectivement que j’étais fatiguée et tentait de me ménager le plus possible. Cependant, je me suis peut-être méprise sur ses raisons. Ai-je changé à ses yeux ? Peut-être me voit-il et m’apprécie-t-il comme mère pour ses enfants, mais plus comme maîtresse ? Une chose est certaine : nous ne pouvons plus continuer de la sorte. J’ai envie de lui chaque jour, depuis la deuxième semaine suivant l’accouchement. Faire l’amour était alors impossible à envisager, mais ça ne l’est plus aujourd’hui. J’ignore toutefois comment retrouver cette complicité, cette passion.
Peut-être devrais-je commencer par me rendre plus désirable ? Pour lui autant que pour moi… Mais chaque fois que j’ai l’intention de faire les premiers pas, le courage me manque. Je me sens mal dans ma peau, maladroite, incertaine. Mon apparence est plutôt négligée, mais je peine à m’habiller de façon plus coquette et à me maquiller un peu. Quand suis-je allée magasiner pour la dernière fois ? La seule pensée de sortir de cette maison, en traînant avec moi l’énorme poussette double, les couches, les débarbouillettes, les vêtements de rechange, les biberons et tout le reste me décourage. Je dois pourtant me reprendre en main et sortir de ma torpeur.
Ça y est ! Les enfants sont en sécurité chez une gardienne, et je suis seule… Haletant devant les choix illimités que m’offre cette journée, j’opte pour un peu de lèche-vitrines et me dirige vers la ville. Il fait beau, c’est le printemps et j’ai le cœur à la fête. Je n’avais jamais réalisé à quel point le simple fait de déambuler lentement dans une rue pleine de boutiques plus attirantes les unes que les autres pouvait être agréable ! Dans une boutique de lingerie, je me décide finalement à essayer quelques vêtements suggestifs qui pourraient plaire à Louis. Je n’aime pas beaucoup l’image que me renvoie la glace, mais me force quand même à acheter quelque chose. Voilà un pas de fait dans la bonne direction !
La faim me tenaille bientôt, et je m’arrête à un petit bistro, m’installe confortablement à une table et consulte lentement le menu. Du coin de l’œil, je vois le serveur approcher.
— Bonjour ! Vous avez fait votre choix ?
Un immense sourire éclaire son visage, et il me faut quelques minutes pour le reconnaître. Cette voix me semble familière, surtout lorsqu’elle prononce par la suite mon prénom :
— Caroline ? Comment vas-tu ? Dis donc, ça fait une éternité !
Je n’en crois pas mes yeux. Gabriel ! Il habitait la maison voisine de la mienne, alors qu’il était adolescent et que j’étais une jeune femme déjà pleine d’expérience dans la mi-vingtaine. C’était il y a si longtemps… Nous avions passé plusieurs soirées à refaire le monde, et j’encourageais son bel idéalisme. Toutefois, il n’a plus la gaucherie maladive ni les boutons disgracieux qui le caractérisaient. Ce serait même plutôt le contraire ! Le Gabriel d’aujourd’hui a plutôt l’air d’un jeune dieu. En une fraction de seconde, je calcule que comme il est mon cadet d’une dizaine d’années, il doit avoir près de vingt-trois ans. Je lui souris aussi chaleureusement que possible, malgré le choc.
— Gabriel ! Eh bien, dis donc, j’aurais besoin d’une échelle pour t’embrasser…
Il se penche vers moi et m’embrasse affectueusement sur les joues. J’apprends qu’il a ouvert ce petit bistro avec un copain, Yannick, grâce à l’héritage que lui a laissé son père. Les affaires marchent assez bien, il est heureux et, selon ses dires, terriblement content de me voir. Son monologue m’a permis de l’examiner et d’analyser les changements survenus chez lui ces dernières années. Tout d’abord, il est très grand, mais je m’y attendais, puisqu’il l’était déjà à seize ans. Toutefois, sa stature est impressionnante, contrastant avec sa maigreur d’antan. Et il est magnifique : un sourire éclatant et d’une spontanéité attendrissante, de grands yeux bruns expressifs, les membres proportionnés et solides, la taille étroite et souple, les jambes si longues… Mais c’est avant tout sa voix qui me fascine. Muait-il quand je l’avais vu pour la dernière fois ? Ce souvenir m’échappe, et je ne suis pas certaine que j’aurais fait très attention à ce détail à l’époque. Cependant, aujourd’hui, avec son allure de sportif, ce corps splendide et ce visage adorable, sa voix chaude et grave ne fait qu’ajouter à son charme. Il n’arrête pas de sourire ; moi non plus, d’ailleurs. Puis, il me demande s’il peut se joindre à moi.
— Yannick se débrouillera bien sans moi ! Qu’est-ce que tu veux manger ?
J’ai à peine le temps de balbutier quelques mots que déjà, il se lève, pour réapparaître peu après et s’asseoir devant moi. Nous parlons du passé et de ce qu’il est advenu de nos vies. Puis, un autre jeune homme nous rejoint, une assiette appétissante dans les mains à mon intention. Gabriel le retient :
— Yannick ! Reste. Il faut que je te présente Caroline, une vieille connaissance.
— Ah ! enfin ! J’ai beaucoup entendu parler de toi. Ça me fait vraiment plaisir de pouvoir mettre un aussi joli visage sur ce prénom avec lequel Gabriel me casse les oreilles depuis tant d’années !
Mon ami est tout rouge, c’est attendrissant. Je me doutais bien qu’il avait été un peu amoureux de moi à l’époque, et les paroles de Yannick, en plus de confirmer ce doute, me flattent. De nouveau seuls, nous reprenons notre conversation. Gabriel est épatant. Il est enjoué, sincère, drôle et possède un rire contagieux. Il finit par me dire :
— Tu sais, Caroline, tu as toujours été spéciale pour moi. J’étais amoureux de toi, à seize ans. Je ne t’en aurais jamais glissé un mot, bien sûr ! Je suis tellement content de te revoir. Tu seras à jamais quelqu’un d’exceptionnel à mes yeux… et tu es toujours aussi belle !
Là, je crois qu’il exagère. Néanmoins, le plaisir que me procure ce compliment me fait tellement de bien que je joue le jeu. Je le remercie sincèrement, lui avoue qu’il a toujours été et demeurera spécial pour moi aussi, et nous finissons par nous quitter en nous promettant de nous revoir très bientôt.
Je retourne, à la fin de cette journée merveilleuse, chercher mes poupons. Ils m’ont manqué, bien sûr, mais je me sens enfin revivre. Je réalise tout à coup que l’univers n’a pas changé, et que c’est seulement moi qui n’en faisais plus partie. Je devrais me payer ce genre de sortie plus souvent !
Ce regain de vie me permet d’envisager de séduire Louis le soir même. Je suis heureuse, les compliments de Gabriel et Yannick m’ont été bénéfiques et me font sentir belle. Incroyable, ce que des mots flatteurs peuvent accomplir, surtout quand ils viennent de beaux jeunes hommes qui jouissent sans doute de conquêtes illimitées, plus jeunes et plus minces que moi en plus ! Avec un peu de coopération de la part de mes petits trésors, je me permets même d’espérer que nous pourrons peut-être, Louis et moi, reprendre certaines choses où nous les avions laissées, plus de neuf mois auparavant. Qui sait ?
Louis n’est pas d’humeur à faire la fête. Dure journée au travail, paraît-il. Je suis déçue, amère, triste. Je n’ai même pas eu la chance de lui montrer ma bonne humeur ou de parader dans ma nouvelle tenue. Il est parti se coucher sitôt les enfants endormis. Je ne peux m’empêcher de repenser à Gabriel. Peut-être l’apprécierait-il, lui, mon désir. Peut-être serait-il excité, lui, à l’idée de disposer de mon corps comme bon lui semblerait. Et là, je visualise le beau jeune homme nu dans mon lit. Cette image me semble vaguement interdite, mais après tout, il s’agit d’un être absolument désirable. J’essaie d’imaginer la sensation que j’éprouverais à me glisser le long de son corps, ses grands bras m’emprisonnant et sa bouche sublime m’embrassant fougueusement. Je le sens qui effleure mes seins, les pétrit, les lèche, les mord. Il caresse mes cuisses de sa large main, les écarte impatiemment. Son poids m’écrase, il me retient les poignets au-dessus de la tête. Puis, il se fraie un passage en moi, ondulant doucement, et j’enroule mes jambes autour de sa taille. Il me pénètre alors lentement, comme pour reprendre toutes les années perdues, et un plaisir diffus émane de mon corps. D’un coup de hanches, je me retourne, les bras toujours retenus, et le supplie d’entrer en moi par l’arrière. Il m’obéit, et sa verge immense m’emplit. Il saisit mes hanches et m’embrasse le dos, les épaules, caresse mes seins à pleines mains. Je jouis en même temps que lui et, maintenant seule dans mon lit, la main humide et bien calée entre les cuisses, je pense à Louis et me demande ce que je dois faire.
Quelques jours plus tard, après avoir passé une journée d’enfer avec mes deux petits diables hurlants et déchaînés, Louis m’apprend qu’il ne rentrera qu’à la fin de la soirée. Incapable de faire face seule à un autre repas, à deux bains et à la bataille du dodo, je demande à une voisine de venir à la maison pour prendre soin d’Amélie et de Thierry pendant quelques heures. Elle n’avait qu’à ne pas le proposer aussi souvent ! Elle accepte tout de suite… Mon soulagement est immense.
Enfin libre, je marche sans but précis, tentant de découvrir ce que j’ai envie de manger. Mes pas me transportent, sans que je m’en rende vraiment compte, jusqu’au bistro de Gabriel et Yannick. Devant ma mine déconfite, Gabriel m’offre un verre, que j’accepte avec plaisir. Cette boisson est délicieuse et je l’avale d’un trait. Une autre la suit peu après. Je me sens mieux. Ce soir, je m’offre quelque chose de bien, un bon repas en bonne compagnie, et je suis heureuse de voir que Gabriel pourra se joindre à moi. Il apporte une bouteille de vin que nous dégustons en silence, les yeux dans les yeux.
— Caroline, qu’est-ce qui ne va pas ?
Confuse, je n’ose pas commencer une conversation qui risque d’être ennuyeuse pour lui. Je suis troublée par le désir qu’il suscite en moi, mais ne m’en sens pas menacée, seulement réconfortée. Ma main entre les siennes, il me regarde attentivement :
— Je suis incapable de te voir malheureuse. Allons, prends encore un peu de vin.
— Je ne suis pas malheureuse, loin de là. C’est simplement que…
Je lui raconte finalement que Louis et moi n’avons pas fait l’amour depuis plus de neuf mois et que je ne sais plus très bien où j’en suis. Abasourdi, il traite mon compagnon d’imbécile, ajoutant que ce dernier n’apprécie pas sa chance d’avoir une femme telle que moi qui l’aime et le désire. Il renchérit en disant qu’il donnerait n’importe quoi pour être à sa place. Dieu qu’il me fait sentir féminine, séduisante ! Il ne cesse de me dire que je suis belle, attirante, qu’il m’a toujours désirée. Je m’avoue finalement que je le désire aussi, même si ce genre d’écart est absolument hors de question. Au fond, ce fantasme ne fait pas de mal à personne, et je sais très bien que je le transférerai sur Louis dès que j’en aurai la chance. Mais au moins, je constate que ma libido n’est pas complètement à plat ! Je lui rends son sourire, ravageur s’il en est, et il semble comprendre exactement ce que je ressens. Nous continuons à parler de tout et de rien, de sexe et de caresses. Je suis bien, maintenant, heureuse et presque épanouie. Curieusement, cette conversation n’est pas lourde ni déplacée. Je crois que nous réalisons tous deux que nous ne vivrons jamais ce que nous imaginons, et que c’est précisément ce qui rend tout cela si excitant.
Nous avons terminé la bouteille de vin et je suis un peu saoule. J’ai peine à croire les images lubriques qui me traversent l’esprit. Je lui ferais de ces choses, à ce jeune homme-là ! Et je lis dans ses yeux étincelants qu’il a probablement les mêmes pensées que moi. Il est temps de partir. La marche jusque chez moi me fera sans doute le plus grand bien et calmera mes ardeurs… Du moins, je l’espère. Gabriel me raccompagne jusqu’à l’entrée du bistro, m’aide à enfiler ma veste. Mais au lieu des baisers inoffensifs qu’il avait déposés l’autre soir sur mes joues, il m’embrasse fougueusement sur la bouche, forçant sa langue près de la mienne, frottant sa queue durcie contre ma hanche. Comment résister ? J’en suis incapable. Aussi, lui rends-je son baiser, accentuant la pression sur son entrejambe.
— Je suis con de te laisser partir comme ça. Est-ce que…
— Chut ! Ne dis rien, rien du tout.
L’embrassant à nouveau, je me sauve avant de voir ma volonté faiblir.
Je suis passablement sobre en arrivant chez moi, mais loin d’être calmée. Après avoir fredonné une berceuse à mes petits amours, je les serre tout contre moi et les couche l’un après l’autre. C’est vendredi, aujourd’hui, et Louis ne travaille pas demain. S’il ne rentre pas trop tard, peut-être pourrai-je profiter de l’état dans lequel Gabriel m’a mise et le prendre d’assaut, qui sait ? Cette pensée en tête, je m’installe confortablement dans notre lit.
Nous avons connu tellement de nuits de bonheur entre ces draps ! Je tente de m’accrocher à ces souvenirs, mais la fatigue et le vin bu plus tôt me gagnent. Je m’endors rapidement, sombrant dans un sommeil profond peuplé de rêves.
Dans mon dernier songe, je suis avec Gabriel et nous nous embrassons avec ardeur comme pour transmettre, par le biais de nos seules lèvres, le désir qui nous chavire. Chaque fois que nos regards se croisent, je sens mon sexe palpiter, mon ventre l’appeler. Il m’entraîne vers la sortie, fait démarrer sa moto, me tend un casque, puis nous filons à toute allure. Je m’accroche à lui, écrase ma poitrine contre son dos, glissant mes mains entre ses jambes. Sa verge bandée est dure comme de l’acier. Nous sortons de la ville et je n’ai pas la moindre idée de l’endroit où nous allons. Mais plus rien ne compte. Nous empruntons une route sinueuse et, grisée par la vitesse, je le caresse avec insistance. Puis, le reflet d’un lac se dessine devant notre engin, qui quitte la route pour suivre un chemin étroit.
Gabriel m’aide bientôt à descendre de moto et me guide vers une petite clairière, au bord d’un lac. Les étoiles brillent, la nuit et l’herbe sont fraîches et douces. Le jeune homme m’appuie de dos contre un arbre. Il est si grand ! Son corps s’écrase contre le mien, ses lèvres me mordent le cou, les oreilles, le visage. Il m’embrasse et je sens mon ventre fondre de désir. Ma culotte est déjà trempée et son membre, à l’étroit dans son pantalon ajusté, est impatient. Je l’en libère et m’accroupis devant lui. Je le désire tant que, lorsque je le glisse dans ma bouche, mon ventre se contracte de convoitise. Je l’engouffre entièrement, léchant et aspirant de tout mon cœur. Mes mains s’emparent de ses fesses, fermes et rondes, les écartant doucement. Je passe la main sous ma jupe et insinue un doigt le long de la fente humide de mon sexe. Ce même doigt, maintenant onctueux, fouille les fesses de mon nouvel amant, qui soupire en le sentant glisser en lui. Je l’enfonce ensuite très doucement, agaçant et triturant sa chair, et ma bouche use de tout son savoir-faire sur un Gabriel haletant. Il montre des signes d’impatience. Me soulevant par les bras, il me relève et me hisse plus haut, m’appuyant toujours fermement contre l’arbre. Puis, je me laisse redescendre, les jambes bien ancrées autour de sa taille, sur sa queue maintenant immense, les bras solidement accrochés à une branche au-dessus de ma tête. Je ne peux retenir un cri de bonheur. Je reste là, empalée, et jouis sans la moindre caresse supplémentaire. Les mains de Gabriel empoignent mes fesses et me soulèvent encore, me laissant retomber sur son sexe qui me perce davantage. Il répète le même manège, jusqu’à ce notre rythme devienne effréné. L’écorce m’écorche le dos et les fesses. Je gémis, et Gabriel me fait lâcher la branche pour me prendre dans ses bras. Il me transporte alors jusqu’à sa moto, sur laquelle je m’appuie lascivement, admirant mon amant et le lac immobile. L’odeur du cuir et de l’essence envahit mes narines, alors que Gabriel emplit mon corps. Je le crois sur le point de jouir, mais à ma grande surprise, il s’arrête et se retire. Me soulevant de nouveau, il me couche sur la selle de la moto. Ses doigts agiles déboutonnent ma blouse et défont mon soutien-gorge. Mon corps est exposé aux rayons de la lune et à la brise fraîche. Afin de me réchauffer, Gabriel embrasse mes seins et mon ventre, tout en caressant mon sexe palpitant. Son toucher est merveilleux. Merveilleux parce que différent ? Il n’a certes pas la dextérité de Louis en la matière, mais son impatience et son impétuosité compensent largement son manque d’expérience. Un doigt s’insère, puis un autre, et un troisième. Gabriel souffle sur mon sexe exposé, avant d’y déposer les lèvres, l’embrassant et le léchant avec application. Puis, après m’avoir relevé les genoux, il enjambe la moto et s’installe devant moi, glissant une nouvelle fois mes jambes autour de sa taille. Sa queue luit sous les étoiles un moment, avant de s’engouffrer dans la chaleur de mon sexe. Il me fait alors l’amour tendrement, lentement, et me soulève doucement, me permettant de glisser les bras autour de ses larges épaules et de m’asseoir sur lui. Je le monte ainsi avec bonheur, et il me semble que sa queue a encore grossi, qu’elle m’emplit davantage. Je ne peux empêcher ma main de me caresser, merveilleux complément à son membre magnifique. Sur le point de jouir, j’accélère la cadence. Puis, tout se met à aller très vite. Gabriel m’empoigne à nouveau sous les fesses et me pénètre de plus en plus intensément. Je n’ai plus besoin de me caresser, ma friction contre son corps me fait jouir plusieurs fois sans interruption. Quand il explose enfin en moi, je m’écroule dans ses bras, heureuse et comblée.
C’est ce moment-là que Thierry choisit pour hurler à m’en glacer le sang, et je me réveille brutalement, le cœur battant la chamade. Avant même de me rendre jusqu’à la chambre des petits, je remercie intérieurement mon fils de ne pas avoir hurlé quelques instants plus tôt… et aussitôt, Amélie se joint à lui dans une plainte tonitruante. Puis, je vois l’heure : deux heures du matin. Louis n’est toujours pas rentré.
Il est près de trois heures trente quand le calme revient. Je doute, cependant, de me rendormir de sitôt. Où est Louis ? L’inquiétude me gagne. Comme toujours, lorsqu’il tarde, je m’imagine sa voiture enroulée autour d’un poteau et son corps blessé, gisant sans secours. Aussitôt, la culpabilité m’assaille. En principe, je n’ai rien à me reprocher. Ma conduite envers Gabriel a été irréprochable en dehors d’un baiser volé et de quelques rêves, et je ne peux tout de même pas les contrôler ! N’empêche que ce dernier baiser, au bistro, n’avait rien d’innocent. Je sais que ces pensées sont totalement déraisonnables, mais je ne peux les réprimer. Ce que je viens de vivre dans mon sommeil avec Gabriel était si intense, si passionné, si merveilleux… aussi fabuleux que les nuits passées avec Louis, auparavant. Je me sens affreusement mal. Je dois faire quelque chose, et très bientôt, sinon Louis et moi nous éloignerons inexorablement l’un de l’autre.
La porte d’entrée vient de s’ouvrir ; Louis se hâte vers la chambre. Voyant que je suis éveillée, il se précipite dans mes bras. Il pleure, il sent l’alcool. Sa tête est chaude. Il m’embrasse dans le cou, s’accroche à moi, me murmure qu’il m’aime. Il me supplie de ne pas le détester et m’explique qu’en raison de notre éloignement, qu’il ressentait aussi cruellement que moi, il avait eu besoin de se retrouver un peu seul. Il était allé dans un bar et s’était saoulé en réfléchissant à notre problème. Une femme avait tenté de le consoler — une très belle femme, selon ses dires —, et cette seule constatation qu’il était désirable lui avait fait du bien.
Comment lui en vouloir ? S’il savait que la même chose m’était arrivée avec Gabriel ! Je le serre contre moi, lui disant que je l’aime plus que jamais, que tout ce dont nous avons besoin est d’un peu de temps seulement pour nous. Il me regarde de ses si beaux yeux, malgré leur rougeur du moment, et m’embrasse passionnément. En ressentant la fougue de ce baiser, je sens mon corps réagir et s’ouvrir entièrement à lui. Soudain, plus rien ne nous sépare, et je serais prête à parier que les petits nous laisseront tranquilles, cette fois-ci.
Louis réagit aussi, et son sexe brandi semble vouloir percer son pantalon. Nous nous déshabillons mutuellement à la vitesse de l’éclair et nous retrouvons enfin, nus et ensemble, vibrant d’un désir des plus ardents. Louis est déchaîné, je ne le reconnais plus. Il m’écrase sous lui, m’embrasse presque avec violence, sa barbe m’égratigne le visage. Il me broie littéralement, bloquant mes mouvements, privant mon corps de sa mobilité. L’impétuosité de son désir me rassure, m’enchante, m’excite, et nous nous retrouvons bientôt ancrés l’un à l’autre, le sexe de Louis profondément enfoui dans mon ventre. La sensation est indescriptible.
Soudainement, Louis se calme. Comme s’il arrivait à la fin d’une recherche épuisante, il s’apaise, m’embrasse amoureusement et s’insinue dans mon corps avec davantage de douceur. Je ne sais comment décrire le plaisir et le bonheur qui m’envahissent tout autant que sa queue, cette queue qui me manquait tant ! Ses gestes sont maintenant langoureux, attentionnés, pleins de tendresse. Il m’embrasse la gorge, les paupières, les lèvres, le front, lèche délicieusement mes épaules et mes seins. Ses mains me chatouillent les aisselles, les côtes, emmêlent mes cheveux… Mais tout cela ne dure qu’un instant. Déjà, il se raidit, s’éloigne un peu de moi pour me laisser déposer mes jambes sur ses épaules. Sachant que cette position le fera jouir très vite, je tente de me relever. Toutefois, il me repousse, laissant mon corps retomber contre les oreillers, et il s’enfonce en moi avec véhémence, ses hanches cognant contre mes fesses avec de plus en plus d’ardeur.
Mettant fin à mes espoirs, c’est cet instant que choisit Amélie pour s’éveiller de nouveau, son cri perçant tirant Thierry d’un sommeil profond. Louis ralentit à peine. Il fait la sourde oreille et m’interroge du regard, mais je demeure impassible. Oserons-nous les laisser pleurer un moment ? Quelques secondes passent, et les cris des jumeaux prennent davantage d’ampleur. Louis accélère, m’attirant contre lui avec plus de force chaque fois, puis il finit par se répandre en moi. Il m’étreint à peine un instant et me quitte, allant veiller au bien-être de nos enfants.
Déçue de la tournure des événements, qui semblaient pourtant prometteurs, je suis quand même heureuse de voir que la passion est toujours bien vivante entre nous. Une nuit, une seule nuit d’amour et de tranquillité saura tout arranger. Bien que bref, cet épisode m’a redonné l’espoir que notre couple surmontera cette période mouvementée et que nous en sortirons plus unis que jamais.
Cette perspective me soulage et me rend si heureuse que je m’endors sans même offrir mon aide à Louis.
Nous avons commencé à tout planifier dès le lendemain. Ce sera notre première escapade amoureuse en six mois. Nous passerons probablement ces deux jours à nous inquiéter pour nos enfants et à nous demander si tout va bien avec la voisine, qui a accepté avec plaisir de les garder durant notre absence, mais peu importe. Louis s’occupe de la réservation d’hôtel. Il a été convenu que nous partirions le jour de mon anniversaire pour un lieu que Louis garde secret jusqu’à notre arrivée. Cela me laisse amplement le temps de me consacrer aux préparatifs. Il m’a seulement dit que je raffolerais de l’endroit : très champêtre, sans aucune attraction touristique ni autre distraction. Notre emploi du temps ? Faire l’amour jusqu’à épuisement total, et ensuite, dormir jusqu’à ce que nous ayons encore envie de faire l’amour. Voilà qui me plaît !
Je suis complètement exaltée par la promesse de cette escapade. Rien ne viendra gâcher ces quelques jours de réclusion. Pas de pleurs, ni de couches à changer, ni de biberons à préparer, ni de téléphone obligeant Louis à travailler le soir. Chaque journée d’attente avant le départ est une véritable torture. Je ne cesse de penser à Louis, à tout le plaisir que je lui procurerai et qu’il ne manquera pas de me rendre. Moite de désir pour lui, j’imagine un lit aux draps défaits, nos deux corps voguant au rythme de notre jouissance. Chaque fois que je le vois en train de se raser, de s’habiller, ou même lorsqu’il vient de mettre les petits au lit, je n’ai qu’une envie : lui arracher son pantalon et plonger son membre en moi. Je veux le rendre fou de plaisir, le subjuguer, le faire hurler de désir. J’ai de la peine à me retenir de le plaquer contre un mur ou sur la table de la salle à manger, puis de rentrer son membre jusqu’au fond de mon ventre, bondissant sur lui avec toute la fougue et la passion que je possède.
J’en suis tellement obsédée que j’ai du mal à dormir. Il reste trois nuits avant le matin de notre départ et je suis seule dans mon lit, espérant voir arriver Louis, qui travaille encore tard. Peu importe, il ne perd rien pour attendre !
L’avant-dernière nuit, je suis frénétique. Je vérifie que j’ai bien pensé à tout, prévu toute éventualité. Je me démène comme une lionne en cage, à tel point que j’en ai mal à la tête et me sens fiévreuse. La dernière nuit est la pire de toutes. Je tourne et me retourne dans le lit, n’arrivant pas à trouver une position confortable pour dormir. Je me croirais presque en train de développer de l’urticaire, tellement j’ai hâte que le lendemain arrive !
Au réveil du grand jour, lorsque j’ouvre les yeux et réalise que c’est aujourd’hui que nous allons enfin pouvoir reprendre le temps perdu, je suis heureuse. Je me sens terriblement séduisante et d’humeur aguicheuse. Je décide que le trajet qui nous sépare de notre retraite ne sera pas de tout repos pour mon amant. Je porterai une robe minuscule, des chaussures à talons hauts, et je lui rendrai la vie dure. Je suis prête à tout… mais pas aux répugnants boutons rouges qui me recouvrent le corps entier et me démangent de façon épouvantable ! Mon médecin m’avait pourtant dit que la transmission était peu probable… J’imagine que je suis l’exception qui confirme la règle ! Ma mère aurait-elle omis de me dire que je n’avais jamais eu la varicelle ?