Celui avec qui j’étais quand j’étais jeune, il n’était pas très détendu de ce côté-là. C’était un peu basique. Et puis peut-être un peu rapide. Il était jeune, quoi. Celui d’après, il était un petit peu plus âgé, un peu plus d’expérience je pense dans sa sexualité, et c’était un peu plus rock’n’roll. C’était plus marrant.
Peut-être de faire l’amour toute la journée, toute la nuit. De passer quatre jours au lit. Voilà, c’est ça que j’avais jamais fait.
Eh bien, il faisait l’amour quatre fois, cinq fois dans la journée. Il était un petit peu (rires)… il était efficace en tout cas.
Si, peut-être, mais pendant ça ne me dérangeait pas. Et du coup, le corps, il y a tout qui lâche, quoi. Puis d’avoir envie de l’autre, voilà. Puis d’utiliser l’autre aussi pour se faire jouir, c’était un peu ça. Comme ça, avec le recul, peut-être que je ne l’avais jamais dit avant comme ça, mais je pense que c’était quelqu’un qui était fier de sa bite, qui était fier de son corps, qui était « alors vas-y », et du coup moi aussi.
C’était curieux parce qu’il avait un physique qui ne me plaisait pas du tout, je ne voulais pas qu’il se déshabille au début, donc c’est arrivé je pense dans une voiture, chez lui, chez moi, enfin un peu comme ça. Mais je ne voulais pas qu’il se déshabille. Lui, il racontait qu’il sortait avec moi, mais moi je disais : ah non, mais pas du tout, n’importe quoi. J’avais honte. Je crois que ça a duré quelques mois comme ça. Et finalement je l’ai retrouvé dans le sud de la France. On s’est revus comme ça, je pensais pas… Et puis on a recouché ensemble. Et du coup on s’est installés ensemble. Donc là, c’était officiel. Pendant un certain temps, on avait tous les deux des métiers qui permettaient de rester une semaine dans notre chambre.
Oui, là il a pu se déshabiller. (Rires.) Il a eu le droit.
Il avait un physique très mec, que n’avaient pas les jeunes de mon âge, parce qu’il était un peu plus âgé que moi. J’avais été avec des grands maigres, et là c’était un petit trapu, un peu vulgaire.
* * *
Il y a eu cette soirée où on s’est croisés… Oui, après je ne l’ai pas revu. Et puis il m’a contactée pour aller au cinéma, on est allés au cinéma. Voir A Dangerous Method. Il y a quelques scènes de sexe où elle prend des fessées. Je sentais qu’à côté il était gêné. Moi, ça me faisait rire. Après le film, je lui ai demandé : « Mais c’est un message ou… ? » (Rires.) Puis on a dîné, il était plutôt timide, réservé… C’est parfait, j’aimais bien, ouais.
Une fois qu’on avait vu le film, j’ai fantasmé. Donc c’est moi qui l’ai appelé le jour de l’an, comme une gamine : « Oh ben je pensais à toi… ! » Et il m’a dit un truc horrible, j’ai failli raccrocher, il m’a dit : « Mais tu serais pas en train de me dragouiller ? » (Rires.) C’était horrible. « Ah non, bon moi je vais raccrocher, si ça se voit tant que ça ! Je raccroche… » « Non, non ! c’est bien, je suis content, j’aime bien, j’aime bien ! » Bon. Et comme il m’avait invitée à dîner au resto, du coup je lui avais dit que je l’inviterais la fois suivante. Et je l’ai invité, on est sortis. Et je lui ai demandé s’il voulait monter, il m’a dit non-non, non-non. Et c’est là qu’il a commencé à me dire : « Mais moi j’ai pas envie d’une relation comme ça… » Et j’ai dit : « Bah non, moi non plus, je sais pas enfin voilà, on se rencontre, je sais pas comment ça sera. » Finalement il n’est pas monté. On s’est revus le lendemain, puis on s’est vus tout le temps.
Oui, je crois que j’ai essayé de lui plaire, et lui aussi… Et puis, découvrir quelqu’un d’autre, c’était curieux aussi après vingt ans avec le même, surtout que j’avais été très fidèle.
Non, je n’étais pas nerveuse. Je savais que c’était bizarre, mais je me suis préparée, ça a pris l’après-midi, je suis allée m’acheter une nouvelle lingerie, je me suis crémée, épilée. Il m’avait invitée à dîner chez lui. Alors on avait déjà parlé de comment on ferait, enfin c’est moi qui avais posé des questions parce que j’avais l’impression de ne plus savoir, et puis bon, évidemment je savais, enfin c’était bizarre, ouais. C’était rigolo. « Et alors on mettra des capotes, ou pas ? » (Rires.) Des trucs comme ça. Donc je suis arrivée pile à l’heure. Il dit maintenant : « Ben t’es arrivée, tu avais la culotte sur la tête. » Non non, j’étais archiprête.
J’imagine que c’était pour montrer que j’avais pas de culotte. Mais c’est pas vrai, j’avais une culotte. Voilà, et c’était très gênant parce que dès qu’on a commencé nos ébats, j’ai joui tout de suite, mais tout de suite ! (Rires.) Alors il était un peu surpris. Voilà, puis ça a continué, et puis ça s’arrête pas.
Non. (Rires.)
* * *
Je n’en ai pas parce que je sais que j’ai un problème de stérilité, et puis avec la séparation, le divorce, j’ai été ménopausée du jour au lendemain. Tout s’est arrêté d’un coup.
J’ai eu mes règles, et le mois d’après je ne les ai plus jamais eues.
Après, oui, j’ai eu des bouffées de chaleur, et puis je suis allée voir le médecin, ils ont essayé de me donner des hormones, justement durant les deux ans après que j’ai quitté mon mari, enfin mon ex-mari. Entre la séparation, qui était difficile psychiquement, parce que je ne l’aimais plus du tout, mais c’était là, et puis les enfants étaient tristes, donc c’était un peu rude parce qu’ils sont avec moi tout le temps. Non, ça a touché le fait d’être femme. En plus, le père des enfants est reparti avec une beaucoup plus jeune. J’ai pas aimé ne plus avoir mes règles, même si maintenant je trouve ça très confortable. Ça m’a fait me sentir vieille d’un coup.
Non, je ne crois pas. Tous les deux, on a retrouvé quelqu’un rapidement, donc c’était qu’on ne s’aimait plus, quoi. On s’aimait bien, mais on ne s’aimait plus. Puis c’était très différent. On ne faisait plus rien ensemble, il n’y avait que les enfants qui nous… Lui, il a été un peu rude, mais je pense qu’il avait besoin de me détester. Donc il était pas très sympa pendant un an. Il me disait des saloperies, vraiment… que j’étais la cause de tous ses problèmes, que j’en demandais trop. Parce qu’il a fait faillite… voilà que c’était moi qui avais voulu me marier, que c’était moi qui avais voulu des enfants, que c’était moi qui avais voulu l’installer parce que moi j’avais de l’argent au départ et pas lui. Et que du coup, j’avais tout forcé et que lui n’avait rien décidé, que tout était de ma faute. Mais dans ces paroles il était assez violent, donc c’était un peu dur. Il ne reconnaissait pas trop ses torts. Et puis j’étais peut-être embarquée dans ce qu’il disait, je le croyais un peu trop, s’il disait que j’étais conne j’y croyais.
Je le trouve bête. (Rires.) C’est dingue, hein.
* * *
Là, c’est encore plus intime. À un moment donné, j’ai découvert l’éjaculation féminine. J’ai jamais rencontré de femmes comme ça.
Oui. Et maintenant, avec cet homme-là, c’est presque tout le temps.
Quelquefois, mais pas comme ça.
Oui, c’est chiant. (Rires.) Mais bon. Enfin, une fois qu’on est dedans, on est dedans. Mais c’est un peu compliqué. Parfois, il me dit : « Bon, viens, on va dans la cuisine. » (Rires.)
Un peu, mais il n’y a pas grand-chose. J’ai vu que ça s’appelait la cyprine. Que c’était un mélange d’une substance et d’un peu d’urine aussi. Avec lui, j’ai eu ça tout de suite. Ça faisait trente minutes qu’on se caressait, cinq minutes qu’on faisait l’amour, et c’est arrivé. Pour une première fois, c’était gênant, j’étais embêtée. Même lui me dit qu’il était surpris. (Rires.) C’était étrange parce que j’avais l’impression d’entendre un homme, de m’entendre dire : « Ah ben je suis désolée », genre j’ai joui trop vite, comme un mec, c’était bizarre. Et il m’a dit : « C’est pas grave, ça va, ça va ! » Alors, on s’est arrangés autrement. Mais il m’a dit : « Mais non, mais ça va, c’est pas grave, ça se lave ! » Bon, il m’a mise à l’aise.
J’ai regardé. Ça n’est pas un jet, enfin je n’en ai pas vu. Je me suis masturbée devant le miroir pour voir justement si c’était un jet ! (Rires.) Donc, non. Mais je crois que je n’ai pas bien réussi toute seule devant le miroir, je sais pas, je devais pas être… Du coup j’ai regardé, voilà, c’est ça aussi : j’ai regardé sur YouPorn, parce qu’il y en a. Donc, dans certains cas c’est des jets. Dans d’autres non.
Ah ouais.
Oui, tu te retiens quand même, et parfois ça marche pas. C’est un peu frustrant. Mais c’est étonnant : avec un homme et pas les autres. C’est pas que ça m’inquiète, mais ça m’interroge. Avec le père de mes enfants, jamais. Donc en vingt ans, non.
Je pense qu’il ne prenait pas assez son temps.
* * *
Que c’est bizarre. Que c’est un drôle de… non, j’ai l’impression que je suis questionnée par le questionnement des autres, je ne sais pas comment te dire… Je suis questionnée sur mon sexe, ou sur le sexe d’une femme, par l’intérêt que les autres, et en particulier les hommes, ont pour le sexe de la femme. Je trouve qu’on parle beaucoup du corps de la femme, du sexe de la femme…
Pas dans ces termes-là, je suis d’accord. On en parle comme d’un trou. Mais ce qui m’interroge, c’est que ce soit si peu naturel de dire « vulve », « vagin »… Nous, on a trois filles : dix, quatorze et seize ans. L’autre fois, j’ai dit « chatte ». « Ah, mais j’aime pas ce mot ! » « Tu préfères “vagin” ? “foufoune” ? “vulve” ? “lèvres” ? » « Ahhh, mais arrête ! » Mais si on leur dit « bite », c’est pareil, donc ça va, ça m’a un peu rassurée. C’est important qu’on dise le mot, qu’on dise « vagin », qu’on dise « clitoris », qu’on dise « vulve »… Il m’est déjà arrivé de dire à la grande : « Tu sais comment il est fait, ton sexe ? » « Ouais, c’est dégueulasse. » « Mais non, c’est agréable ! Non, mais je rigole pas. » Elles sont un peu gênées, mais voilà, qu’elles n’aient pas honte d’avoir envie un jour. La petite, elle écoute toujours un peu. Un jour, je lui dis : « Tu veux que je te montre, tu veux que je fasse un dessin ? » « Ah non, ah non non non ! » Alors je l’ai fait quand même. « Mais non, mais arrête ! j’ai pas envie ! » Je n’ai pas insisté. (Rires.)
Je ne sais pas si c’est l’objet, mais j’ai toujours pensé que je pourrais tomber amoureuse d’une femme, oui. La désirer elle et son corps, ça va avec. Après, je sais pas. J’ai déjà parlé de ça avec des copines, et elles ont fait : « Ah non, une vulve… » Non, enfin ça ne me dérange pas. Quand je me suis séparée, les filles disaient : « Toi maman, on sait pas ; bon, papa, lui, il se mettra avec une fille, mais toi, le problème c’est qu’on sait pas si tu vas te mettre avec une femme ou un homme. » (Rires.) Alors que je n’ai jamais été avec une femme ! Mais je trouvais ça bien, j’aimais bien l’idée que ce soit possible pour elles.
Elles ont une tante qui est homo, du côté de leur père. C’est quelque chose dont j’ai parlé. Et puis elles m’avaient offert à Noël la série The L Word. Donc j’ai regardé ça, elles ont vu que je regardais ça, elles trouvaient ça un peu étrange. Elles ont peut-être eu peur que je tombe lesbienne, je ne sais pas. Mais quand elles m’ont dit que « non mais toi, on sait pas si tu vas te mettre avec un homme ou une femme », j’ai entendu : « Ça m’emmerderait d’avoir deux mamans. Une, ça suffit ! » (Rires.)