allait en eau. Les aspérités d’un sol fait de roches deformation primitive se trahissaient par des chocsmultipliés qui secouaient les traîneaux, et, parcontrecoup, les voyageurs. Les chiens, par la rudesse dutirage, étaient forcés de s’en tenir à l’allure du petit trot,et on eût pu sans danger, maintenant, remettre lesguides à la main imprudente du caporal Joliffe. Ni sescris ni les excitations du fouet n’auraient pu imprimeraux attelages surmenés une vitesse plus grande.

Il arriva donc que, de temps en temps, les voyageursdiminuèrent la charge des chiens en faisant une partiede la route à pied. Ce mode de locomotion convenait,d’ailleurs, aux chasseurs du détachement, qui s’élevaitinsensiblement vers les territoires plus giboyeux del’Amérique anglaise. Mrs. Paulina Barnett et sa fidèleMagde suivaient ces chasses avec un intérêt marqué.Thomas Black affectait, au contraire, de sedésintéresser absolument de tout exercice cynégétique.Il n’était pas venu jusqu’en ces contrées lointaines dansle but de chasser le vison ou l’hermine, maisuniquement pour observer la lune, à ce moment précisoù elle couvrirait de son disque le disque du soleil.Aussi, quand l’astre des nuits paraissait au-dessus del’horizon, l’impatient astronome le dévorait-il des yeux.Ce qui provoquait le lieutenant à lui dire :

« Hein ! monsieur Black ! si, par impossible, la lune

78