icefield se forma peu à peu par l’agrégation des glaçonsépars et se souda au littoral. Mais cet icefieldocéanique, ce n’était plus le miroir uni du lac.L’agitation des flots avait altéré sa pureté. Çà et làondulaient de longues pièces solidifiées, imparfaitementréunies par leurs bords, quelques-unes de ces glacesflottantes connues sous la dénomination de « drift-ices », et, en maint endroit, des protubérances, desextumescences souvent très accusées, produites par lapression, et que les baleiniers appellent des« hummocks ».

En quelques jours, l’aspect du cap Bathurst et de sesenvirons fut entièrement changé. Mrs. Paulina Barnett,dans un perpétuel ravissement, assistait à ce spectaclenouveau pour elle ! De quelles souffrances, de quellefatigues son âme de voyageuse n’eût-elle pas payé lacontemplation de telles choses ! Rien de sublimecomme cet envahissement de la saison hivernale, decette prise de possession des régions hyperboréennespar le froid de l’hiver ! Aucun des points de vue, aucundes sites que Mrs. Paulina Barnett avait observésjusqu’alors, n’était reconnaissable. La contrée semétamorphosait. Un pays nouveau naissait, pour ainsidire, devant ses regards, pays empreint d’une tristessegrandiose. Les détails disparaissaient, et la neige nelaissait plus au paysage que ses grandes lignes, à peineestompées dans les brumes. C’était un décor qui

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