Thomas Black avait apporté dans son bagaged’astronome une certaine quantité de verres noircis ; illes distribua à ses compagnons, et chacun put suivre lesprogrès du phénomène sans se brûler les yeux.
Le disque brun de la lune s’avançait peu à peu. Déjàles objets terrestres prenaient une teinte particulière dejaune orangé. L’atmosphère, au zénith, avait changé decouleur. À dix heures un quart, la moitié du disquesolaire était obscurcie. Quelques chiens, errant enliberté, allaient et venaient, montrant une certaineinquiétude et aboyant parfois d’une façon lamentable.Les canards, immobiles sur les bords du lac, jetaientleur cri du soir et cherchaient une place favorable pourdormir. Les mères appelaient leurs petits, qui seréfugiaient sous leurs ailes. Pour tous ces animaux, lanuit allait venir, et c’était l’heure du sommeil.
À onze heures, les deux tiers du soleil étaientcouverts. Les objets avaient pris une teinte de rougevineux. Une demi-obscurité régnait alors, et elle devaitêtre à peu près complète pendant les quatre minutes quedurerait l’occultation totale. Mais déjà quelquesplanètes, Mercure, Vénus, apparaissaient, ainsi quecertaines constellations, la Chèvre, le Taureau, et Orion.Les ténèbres s’accroissaient de minute en minute.
Thomas Black, l’œil à l’oculaire de sa lunette,immobile, silencieux, suivait les progrès du
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