Il était dix heures alors. Les dernières lueurscrépusculaires commençaient à s’évanouir ; elless’effaçaient comme si elles eussent été noyées dans labrume ou éteintes par le vent et la pluie. Cependant, unecertaine lumière, très diffuse, se sentait encore. Lelieutenant battit le briquet, consulta sa boussole, enpromenant un morceau d’amadou à sa surface, puis,hermétiquement serré dans sa capote, son capuchon nelaissant passage qu’à ses rayons visuels, il s’élança,suivi du sergent, sur cet espace, largement découvert,qu’aucun obstacle ne protégeait plus.

Au premier moment, tous deux furent violemmentjetés à terre, mais, se relevant aussitôt, se cramponnantl’un à l’autre, et courbés comme de vieux bonshommes,ils prirent un pas accéléré, moitié trot, moitié amble.

Cette tempête était magnifique dans son horreur !De grands lambeaux de brumes tout déloquetés, devéritables haillons tissus d’air et d’eau, balayaient lesol. Le sable et la terre volaient comme une mitraille, etau sel qui s’attachait à leurs lèvres, le lieutenant Hobsonet son compagnon reconnurent que l’eau de la mer,distante de deux à trois milles au moins, arrivait jusqu’àeux en nappes pulvérisées.

Pendant de certaines accalmies, bien courtes et bienrares, ils s’arrêtaient et respiraient. Le lieutenantvérifiait alors la direction du mieux qu’il pouvait en

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