côté du rivage dont il était déjà séparé par unequarantaine de pieds ; comme une bête effarée, il fit encourant le tour de l’îlot, laboura le sol de ses griffes, fitvoler autour de lui la neige et le sable, et revint près ducorps inanimé.
Puis, à l’extrême stupéfaction des deux femmes,l’animal, saisissant ce corps par ses vêtements, lesouleva de sa gueule, gagna le bord du glaçon quifaisait face au rivage de l’île, et se précipita à la mer.
En quelques brasses, l’ours, robuste nageur commele sont tous ses congénères des régions arctiques, eutatteint le rivage de l’île. Un vigoureux effort lui permitde prendre pied sur le sol, et, là, il déposa le corps qu’ilavait emporté.
En ce moment, Mrs. Paulina Barnett ne put secontenir, et sans songer au danger de se trouver face àface avec le redoutable carnassier, elle échappa à lamain de Madge et s’élança vers le rivage.
L’ours, la voyant, se redressa sur ses pattes dederrière et vint droit à elle. Toutefois, à dix pas, ils’arrêta, il secoua son énorme tête ; puis, comme s’il eûtperdu sa férocité naturelle sous l’influence de cetteterreur qui semblait avoir métamorphosé toute la faunede l’île, il se retourna, poussa un grognement sourd, ets’en alla tranquillement vers l’intérieur, sans mêmeregarder derrière lui.
481