des glaces. Chaque jour, Kalumah allait reconnaîtrel’état de l’icefield, et rien qu’au bruit des icebergs quise fracassaient au loin, la jeune indigène devinait lesprogrès de la décomposition. Jamais, aussi, pied plussûr que le sien ne s’était aventuré sur les glaçons.D’instinct, elle sentait lorsque la glace, « pourrie par-dessous », n’offrait plus qu’un point d’appui tropfragile, et elle cheminait sans une seule hésitation àtravers l’icefield troué de crevasses.

Du 20 au 30 mars, le dégel fit de rapides progrès.Les pluies furent abondantes et activèrent la dissolutiondes glaces. On pouvait espérer qu’avant peu l’icefieldse diviserait, et peut-être quinze jours ne se passeraient-ils pas sans que le lieutenant Hobson, profitant des eauxlibres, pût lancer son navire à travers les glaces. Cen’était point un homme à hésiter, quand il pouvaitredouter, d’ailleurs, que l’île fût entraînée au nord, pourpeu que le courant du Kamtchatka l’emportât sur lecourant de Behring.

« Mais, répétait souvent Kalumah, cela n’est pas àcraindre. La débâcle ne remonte pas, elle descend, et ledanger est là ! » disait-elle, en montrant le sud, oùs’étendait l’immense mer du Pacifique.

La jeune Esquimaude était absolument affirmative.Le lieutenant Hobson connaissait son opinion bienarrêtée sur ce point, et il se rassurait, car il ne

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