Le cœur battant la chamade, Maddie acquiesça.
— Les employés de mon père m’ont ramené de force à la maison, puis sont allés l’informer de mes turpitudes. Je n’ai jamais vu mon père aussi furieux. Il m’a fait sortir dans la cour et a ordonné à ses hommes de me maintenir à terre pendant qu’il me donnait le fouet.
Pétrifiée, Maddie le fixait avec intensité. Elle revoyait son visage pâle quand il l’avait retrouvée, le lendemain. Il devait souffrir le martyre, et pourtant il était revenu… Peut-être ne pensait-il pas les mots cruels qu’il lui avait assenés ? Peut-être ne les avaient-ils proférés que dans un ultime sursaut d’autodéfense ?
— Avec le recul, je peux le comprendre, poursuivit Nic d’une voix atone. Apprendre que son fils a une liaison avec la fille de son ex-maîtresse n’a en effet rien de réjouissant.
Horrifiée des conséquences que leur escapade amoureuse avait causées, Maddie fut secouée d’irrépressibles frissons.
— N’aie pas l’air aussi choqué, dit-il en voyant l’expression qui s’affichait sur son visage. Je pensais que tu apprécierais d’apprendre les dégâts que tu avais causés. N’était-ce pas ce que tu souhaitais ? Mettre un peu de piment dans ta vie ?
Submergée par l’émotion, Maddie eut soudain un haut-le-cœur. Une seconde après, elle se ruait vers la salle de bains, secouée par une forte nausée et atteignit les toilettes juste à temps. Elle devinait Nic derrière elle, sûre qu’il l’avait suivie sans même avoir besoin de se retourner.
— S’il te plaît, laisse-moi tranquille.
— Non. Je veux t’aider…
Sans lui laisser le temps de protester, il l’aida à se relever et lui appliqua une serviette mouillée sur le front. Puis, il lui tendit une brosse à dents et du dentifrice. Quand elle eut terminé, il lui prit la main et l’entraîna de nouveau dans la chambre. Libérant sa main d’un geste vif, Maddie s’assit sur le bord du lit, tandis qu’il l’observait d’un air pensif.
— Tu es une véritable énigme, Maddie, dit-il enfin avec calme. Il y a quelques années, tu t’es amusée à mes dépens pour tromper ton ennui et maintenant que je te révèle les conséquences de tes actes, cela te rend physiquement malade.
— Je n’ai jamais cherché à m’amuser à tes dépens ni à t’humilier, riposta-t-elle avec véhémence. Quand tu m’as suivie la première fois, j’étais à la fois terrifiée et grisée. Je te désirais, c’est vrai, mais jamais je ne t’aurais séduit par jeu. Cette semaine… a été très importante pour moi.
Nic lui saisit le bras d’une main ferme et la fit se relever.
— N’essaye pas de réécrire l’histoire, Maddie, siffla-t-il entre ses dents. Je n’étais qu’un simple divertissement pour toi.
Maddie secoua la tête.
— Non, c’est faux, murmura-t-elle. Je voulais te revoir.
Une fois de plus, elle tenta de chasser le nœud qui lui serrait la gorge. Puis, elle décida de lui dire au moins une partie de la vérité. Inspirant profondément, elle se lança.
— Quand on m’a ramenée à la maison ce jour-là, ma mère m’attendait. Elle était furibonde. Nous nous sommes bien sûr disputées, et c’est là qu’elle m’a parlé de sa liaison avec ton père. Mon père a surpris notre conversation et…
Bouleversée par ces souvenirs pénibles, elle s’interrompit quelques instants avant de poursuivre.
— Le lendemain quand je t’ai vu, je n’ai pas pu me résoudre à te parler de cette liaison sordide, j’avais trop honte. De plus, j’avais peur de ce qui se passerait si on nous découvrait ensemble. Il fallait que tu partes. C’est pour cela que je t’ai dit des choses horribles, mais je n’en pensais pas un mot…
Maddie se sentit soudain très vulnérable. Elle venait de mettre son cœur à nu — au moins en partie. Elle détourna le regard de crainte qu’il s’aperçoive qu’elle ne disait pas l’entière vérité.
Nic s’empara de son menton, l’obligeant à relever le visage et à croiser son regard incandescent.
— Jusqu’à ce que ton père vienne nous voir et nous informe de cette liaison, je croyais que ta mère et toi étiez parties à la hâte parce que tu voulais me fuir.
Maddie secoua la tête, effondrée de la façon dont Nic avait interprété les événements. A moins qu’il ne fût déjà au courant du terrible secret qu’elle portait ?
— Qu’a-t-il dit à tes parents, exactement ?
Impatient, Nic se passa une main dans ses cheveux.
— Il voulait parler à ma mère. Après tout, mon père était déjà au courant de la situation, dit-il avec un sourire amer. Quand je suis rentré, je l’ai trouvée au bord de l’hystérie, vociférant contre ta mère et mon père. J’ai dû appeler le médecin qui lui a prescrit un sédatif. Quelques jours plus tard, après avoir laissé un mot à mon père lui expliquant son geste, elle s’est suicidée en prenant une dose mortelle de médicaments. La haine entre nos deux familles a alors pris une nouvelle dimension, et la rage qui rongeait mon père a finalement eu raison de lui. Il a succombé à une crise cardiaque quelques années plus tard…
Avec un pincement au cœur, Maddie comprit que son père n’avait pas tout raconté. A moins que, incapable de faire face à l’atroce vérité, la mère de Nic n’ait emporté son secret dans la tombe. Bouleversée, elle posa la main sur le bras de Nic.
— Je suis sincèrement désolée, murmura-t-elle.
— Ma mère n’a jamais été une personne équilibrée. Elle souffrait sans doute de troubles bipolaires, mais cela n’a jamais été diagnostiqué. Il ne fallait pas grand-chose pour qu’elle bascule dans l’hystérie.
— Cela n’a pas dû être facile pour toi de grandir avec une mère… souffrante.
Il émit un rire bref.
— C’est vrai ! Entre un père qui essayait désespérément d’endurcir son fils chétif et une mère sujette aux crises de larmes, ce n’était pas drôle tous les jours…
En l’entendant faire référence à son corps malingre, une soudaine bouffée de compassion la saisit.
— Et pourtant tu as surmonté cet obstacle et donné tort à ton père par la même occasion, dit-elle avec fierté.
— Il ne m’a pas respecté davantage pour autant, dit-il d’une voix amère, tandis qu’une ombre traversait son regard. En fait, il en était même agacé car il ne pouvait plus me battre comme plâtre quand bon lui semblait.
Maddie sentit les larmes lui monter aux yeux. Jamais elle n’aurait imaginé que son père le brutalisait ainsi.
Nic dut ressentir son émoi car en deux enjambées il la rejoignit et l’étreignit dans ses bras puissants.
— Je crois qu’il est temps d’oublier le passé. Nous avons des choses plus intéressantes à faire ce soir…
Sans lui laisser le temps de répondre, il captura ses lèvres. Les larmes coulaient sur ses joues, mais Nic n’en avait cure, résolu qu’il était à l’attirer dans un monde merveilleux où les mots n’avaient plus de sens. Dans un frisson de plaisir, Maddie capitula, nouant ses bras autour de son cou et se noyant dans le baiser qu’il lui dispensait. Sous les doigts experts de Nic, ses sanglots se transformèrent rapidement en gémissements sourds…
* * *
Le lendemain matin, il fallut quelques instants à Maddie pour émerger des brumes du sommeil. Elle s’étira, le corps encore douloureux de l’intensité de leurs ébats. Soudain parfaitement réveillée, elle jeta un regard autour d’elle. Elle ne se trouvait plus dans la chambre de Nic, mais dans celle où l’avait conduite Geraldo.
Aussitôt, un sentiment de vulnérabilité la submergea à l’idée que Nic l’avait ramenée dans sa chambre une fois ses pulsions satisfaites. Comme s’il ne supportait plus sa présence auprès de lui. Sans doute regrettait-il de s’être confié à elle, ou lui en voulait-il d’avoir ravivé des souvenirs pénibles ? A la seule pensée de ce qu’il avait enduré à cause d’elle, elle eut de nouveau envie de pleurer.
Soudain, un coup frappé à la porte la fit sursauter. Paniquée à l’idée que ce pouvait être Nic, elle marmonna quelques mots inintelligibles. Mais ce n’était que la jeune fille qui l’avait guidée vers la salle à manger, la veille. Un profond soulagement l’envahit quand elle la vit entrer, portant un plateau garni de mets alléchants qu’elle déposa sur la table située près de la fenêtre.
Gênée par sa nudité, Maddie se redressa sur son séant, tout en gardant le drap serré sur elle.
— J’ai un message pour vous de la part de M. de Rojas, annonça la jeune fille d’une voix timide. Il souhaite vous voir chez vous cet après-midi.
Le contrat.
Evidemment ! Comment avait-elle pu oublier ?
L’estomac noué, Maddie remercia la jeune fille et se leva dès qu’elle fut sortie. S’enveloppant dans une serviette, elle s’approcha de la fenêtre et laissa son regard errer au loin. Elle jouissait d’une vue spectaculaire sur le versant est du vignoble de Nic derrière lequel se profilait les neiges éternelles de la cordillère des Andes.
Soudain, elle l’aperçut, marchant à grands pas entre deux rangées de vignes. Elle s’écarta aussitôt de la fenêtre de peur d’être vue. A cet instant, il leva la tête dans sa direction, et Maddie s’accroupit, le cœur battant à se rompre. Elle demeura ainsi durant de longues minutes, l’humiliation s’ajoutant à sa souffrance. Dire qu’il n’avait même pas eu le courage de venir lui annoncer lui-même que tout était fini ! Il avait enfin obtenu ce qu’il voulait : la voir rejetée et humiliée comme lui l’avait été lui-même des années auparavant. S’il avait jamais éprouvé autre chose qu’une attirance physique pour elle, ce sentiment n’existait plus depuis longtemps.
* * *
Nic leva les yeux vers la chambre de Maddie, s’imaginant la voir derrière la fenêtre. Elle dormait quand il l’avait quittée, sa peau pâle et lumineuse encore tiède de leurs ébats passionnés. Terrassé par un désir soudain, il mordit rageusement dans une grappe de raisin, sous le regard étonné d’Eduardo, le maître de chai.
— Il nous faut patienter encore quelques jours avant de cueillir ces raisins, dit-il d’un ton sec. On en reparlera…
Eduardo acquiesça d’un signe de tête et s’en alla. Dès qu’il fut parti, Nic poussa un soupir de soulagement. Il avait besoin d’être seul pour réfléchir. Jamais aucune femme ne lui avait fait un tel effet ; le seul contact de sa peau contre la sienne enflammait ses sens. Il était insatiable, et ce constat l’excitait et le terrifiait à la fois.
Dès l’instant où Maddie s’était levée de table la veille et avait commencé à ôter les bijoux, les événements s’étaient précipités. Quand il avait enfin compris où elle voulait se rendre, il était trop tard. Le passé avait rattrapé le présent. Et pourtant, malgré la panique qui menaçait de le submerger, il savait au plus profond de lui-même qu’elle avait eu raison de l’amener là où tout avait commencé. Et quand il avait découvert qu’elle était vierge…
En proie à une profonde émotion, il ne se rendit compte qu’il écrasait les raisins qu’il tenait dans sa main qu’à l’instant où il sentit le liquide poisseux couler entre ses doigts. Baissant les yeux, il vit que sa main tremblait.
Coucher avec Maddie n’aurait dû être qu’un agréable passe-temps, mais ce n’avait pas été le cas. La simple attirance physique qu’il croyait éprouver pour elle s’était muée en une passion dévastatrice lui prouvant, si besoin était, à quel point elle était dangereuse et avec quelle facilité elle pouvait lui faire baisser sa garde.
L’espace d’un instant, il fut saisi de panique, une émotion qui lui était d’habitude totalement étrangère. Puis, il se souvint du contrat que Maddie et lui avaient signé et poussa un soupir de soulagement. Ce contrat délimiterait ses relations avec la jeune femme et lui permettrait de garder ses distances.
* * *
L’esprit échauffé, Maddie s’efforçait désespérément de ne plus penser aux événements qui s’étaient déroulés la veille. Désœuvrée, elle tournait en rond. La maison semblait vide sans la présence chaleureuse de Hernan et de Maria. Quelques instants plus tôt, Hernan lui avait annoncé au téléphone que l’état de santé de Maria nécessitait une opération. Inquiète, elle lui avait conseillé de rester auprès de sa femme aussi longtemps qu’il l’estimait nécessaire.
De plus en plus agitée et peu pressée de voir arriver Nic avec le contrat, elle décida d’entreprendre l’inventaire des caves, une tâche certes éprouvante, mais nécessaire. L’idée que son exploitation allait enfin recevoir les fonds nécessaires à sa survie ne l’excitait plus autant qu’auparavant. Après la nuit extraordinaire qu’elle venait de passer dans les bras de Nic, tout lui paraissait désormais fade et sans intérêt.
Déterminée à chasser Nic de ses pensées, elle se concentra sur son travail. Aussi surprenant que cela puisse paraître, elle fut bientôt totalement absorbée par sa tâche et ne vit pas le temps passer quand, soudain, une voix irritée la tira de ses réflexions.
— Maddie ! Où es-tu, bon sang !
L’espace d’un instant, elle eut envie de se cacher au milieu des barils comme elle le faisait avec son frère quand ils étaient enfants, mais elle lutta contre ce désir et se redressa, prête à affronter Nic.
— Je suis à la cave ! cria-t-elle.
Elle l’entendit arriver avant même de le voir et, déjà, un frisson naissait le long de sa nuque. Quand il apparut enfin, elle ne put s’empêcher d’embrasser du regard sa silhouette au port élégant. Vêtu d’un jean, d’une chemise à la coupe fluide et les cheveux en bataille, il était si séduisant qu’elle ressentit aussitôt une onde de chaleur traverser son corps.
Inconscient de son émoi, Nic s’avança vers elle d’un pas rageur.
— Comment diable est-on supposé te trouver ? Pourquoi n’as-tu pas ton portable sur toi ?
Il se rapprocha encore et darda sur elle un regard étincelant de fureur. Au bord des larmes, elle s’efforça de n’en rien montrer.
— Eh bien, comme tu peux voir, je suis ici.
— Je t’ai cherchée partout et je ne t’ai pas trouvée, insista-t-il. Si quelque chose t’arrivait… Bref, il faut que je sache où tu te trouves. A chaque instant.
A ces mots, Maddie sentit son cœur bondir dans sa poitrine.
— Ne fais pas semblant d’être concerné par ma sécurité, dit-elle d’un ton sec. Disons plutôt que tu n’as pas le temps de te chercher un associé et que je remplis ce rôle à la perfection. As-tu apporté le contrat ?
Nic blêmit, mais répondit d’une voix calme :
— Oui. Je l’ai déposé dans le bureau de ton père.
Nic laissa Maddie le précéder dans la maison et profita de ce bref répit pour rassembler ses esprits. La peur panique qu’il avait ressentie en ne trouvant pas Maddie à son arrivée était indescriptible. Il l’imaginait déjà, allongée quelque part, blessée et dans l’incapacité d’appeler à l’aide. Vu l’état de vétusté des équipements agricoles, ce scénario n’avait rien de farfelu.
Quand ils pénétrèrent enfin dans le bureau du père de Maddie, il avait toutefois repris contenance. Il la regarda s’asseoir et saisir le contrat. Après l’avoir parcouru, elle le dévisagea de ce regard distant qu’il abhorrait. Son sang ne fit qu’un tour, et il dut lutter pour ne pas se laisser aller à la prendre là, tout de suite. Il voulait la voir abandonnée dans ses bras, criant de plaisir sous ses doigts experts…
— Hernan ne sera pas rentré avant quelques jours. Je verrai ça avec lui dès son retour.
Elle avait beau afficher ce sang-froid arrogant, la rougeur qui lui montait aux joues et le battement affolé de son pouls, visible au creux de sa gorge, la trahissait. Elle n’était pas aussi sereine qu’il y paraissait.
— J’ai eu des nouvelles de Maria ce matin, dit Nic, se forçant à revenir au présent. Le chirurgien m’a dit qu’il s’agissait d’une opération de routine et qu’il n’envisageait pas de complications.
— J’en suis heureuse, mais je préfère attendre le retour d’Hernan pour signer le contrat. Je ne veux pas le déranger avec ça maintenant.
Un profond sentiment de soulagement envahit Nic. Sans le savoir, elle lui accordait un sursis.
— C’est parfait, lâcha-t-il. Mais, tant que le contrat n’est pas signé, ceci ne l’est pas non plus.
Le sourire qui s’afficha sur son visage contenait une telle promesse de volupté que Maddie sentit une flamme de désir lécher tout son être.
— Quoi donc ? s’enquit-elle d’une voix étranglée.
Contournant la table qui les séparait, Nic la saisit par le bras et l’obligea à se lever.
— Ceci.
Sans transition il l’attira vers lui. Maddie tenta de le repousser en le frappant de ses poings, mais ce fut peine perdue. Il dévorait déjà son cou de baisers passionnés.
— Nic, non…, gémit-elle.
Ignorant ses protestations, il la souleva dans ses bras.
— Où est ta chambre ?
Maddie hésitait, tiraillée entre son cœur et sa raison.
— Là-haut, deuxième porte à droite, finit-elle par répondre, maudissant sa faiblesse.
Quand ils pénétrèrent dans la chambre meublée de façon spartiate, le temps sembla s’arrêter. Plus rien n’avait d’importance hormis leur passion dévorante.
Animé d’une soudaine frénésie, Nic entreprit de défaire les boutons de son chemisier, tandis qu’elle faisait de même avec sa chemise. Puis, il tendit la main et tira sur le ruban qui retenait ses cheveux, les faisant cascader sur ses épaules. Glissant ses doigts dans la soie odorante de sa chevelure, il l’obligea à le regarder.
— Nous n’en avons pas encore terminé, tous les deux…
Puis, il inclina la tête et l’embrassa avec passion. Après avoir dégrafé l’attache de son soutien-gorge, il le laissa tomber au sol, avant de cueillir ses seins au creux de ses paumes et de titiller ses mamelons d’un geste expert. Quand il posa la bouche sur son sein, elle se cambra un peu plus à chacun de ses coups de langue.
Lorsqu’il la déposa sur le lit et dégrafa son jean, elle souleva les hanches pour lui faciliter la tâche. Il ôta sa culotte, et elle se retrouva nue devant lui. Mais elle était si excitée qu’elle n’en avait cure et attendit avec impatience qu’il se débarrasse à son tour de ses vêtements.
Sans plus attendre, il s’allongea à côté d’elle et quand d’une main il écarta ses cuisses pour caresser l’endroit où palpitait son désir, toute pensée cohérente la quitta. Le temps que Nic enfile un préservatif et la pénètre d’un mouvement puissant, elle savait qu’elle devait profiter de chaque instant passé avec lui. Elle ferait face aux conséquences plus tard…
* * *
Longtemps après, quand Maddie se réveilla enfin, il faisait nuit dehors. Seule dans le grand lit, elle frissonna en pensant avec quelle facilité Nic l’avait entraînée jusqu’ici. Comment avait-elle pu se laisser aller ainsi ? se fustigea-t-elle. Cela n’avait jamais fait partie de son plan. Il était prévu qu’elle passe une nuit avec lui, puis qu’elle signe le contrat… sauf qu’elle ne l’avait pas signé, se souvint-elle brusquement, envahie malgré elle d’un profond soulagement. Ils avaient donc un petit sursis…
Un léger bruit dans la cuisine la tira de ses réflexions et la fit sursauter. Elle se leva et s’habilla à la hâte, lissant ses cheveux du mieux qu’elle le put. Descendant l’escalier sur la pointe des pieds, elle entendit quelqu’un siffloter dans la cuisine. Arrivée sur le seuil, elle se figea, interdite. Le jean taille basse dégrafé et la chemise ouverte, Nic faisait adroitement sauter des crêpes dans une poêle. Levant les yeux, il l’aperçut debout sur le seuil de la porte.
— Préfères-tu tes crêpes fourrées au chocolat ou aux fraises ?
Stupéfaite, Maddie entra dans la cuisine.
— Où as-tu trouvé tout ça ? demanda-t-elle en indiquant d’un geste la nourriture.
— Je suis sorti faire des courses.
Maddie le dévisagea d’un air effaré.
— Quelle heure est-il ? J’ai dormi combien de temps ?
— Il est 21 heures, répondit Nic en consultant sa montre. Tu as bien dormi quatre heures.
— Tu aurais dû me réveiller, lui reprocha-t-elle, détournant le regard pour qu’il ne voie pas à quel point sa présence la rendait heureuse.
— Tu avais l’air si sereine que je n’ai pas osé.
En vérité, les cernes mauves qui ourlaient ses yeux trahissaient sa fatigue, et il avait préféré la laisser dormir, malgré son envie insatiable d’elle. Il était alors descendu dans la cuisine pour préparer quelque chose à manger, mais à la vue des placards vides, il était parti faire des courses — chose qu’il n’avait pas faite depuis des années. Pendant qu’il remplissait son coffre, il s’était soudain senti le cœur plus léger. Tant que le contrat n’était pas signé, ils pouvaient poursuivre leur liaison… A n’en pas douter, il se lasserait vite de Maddie et pourrait enfin aller de l’avant. Mais contre toute attente, son désir d’elle allait croissant. Enivré par le léger parfum qui flottait jusqu’à ses narines, il dut lutter pour ne pas succomber une nouvelle fois à la passion.
Assise sur un tabouret, Maddie regarda Nic œuvrer. Une pile de crêpes emplissait déjà une assiette.
— Combien de personnes viennent dîner ? demanda-t-elle.
Levant les yeux, il darda sur elle un regard si perçant qu’elle frissonna imperceptiblement.
— J’en ai fait des tonnes quand je travaillais en France dans les vignobles. Nous faisions la cuisine à tour de rôle… C’était à l’époque où je suivais les cours pour passer le concours de Master of Wine.
— Quelle performance, tout de même ! Ton père a dû être fier de toi…
— Il ne m’a pas paru impressionné. Il est mort peu de temps après.
En entendant Nic parler ainsi, Maddie eut le cœur serré.
— Alors, as-tu enfin pris ta décision ?
Levant les yeux, elle vit que Nic brandissait d’une main un pot de pâte à tartiner et de l’autre de la crème fraîche. Aussitôt, la vision érotique de Nic badigeonnant ses seins de pâte à tartiner lui vint à l’esprit, et elle s’empourpra.
— Je prendrai des fraises et de la crème, balbutia-t-elle.
Nic lui adressa un petit sourire entendu, mais ne dit rien.
* * *
Nic ferma un instant les yeux dans l’espoir d’occulter de son esprit les pensées lascives qui l’habitaient. Il venait pourtant tout juste de quitter Maddie après une nuit particulièrement animée, mais le simple fait de penser à elle faisait naître en lui un désir intense.
Trois jours s’étaient écoulés depuis qu’elle s’était donnée à lui pour la première fois et leur passion n’avait fait que croître, songea-t-il en frappant le volant d’une main rageuse. En dépit de tous ses efforts, elle l’obnubilait, s’insinuait dans son cœur et son esprit comme jamais aucune femme avant elle.
Les mots qu’elle avait prononcés le matin même résonnaient encore dans sa tête…
* * *
— Que sommes-nous en train de faire, Nic ?
Il s’était approché du lit et avait capturé son visage entre ses mains, avant de l’embrasser à perdre haleine.
— L’amour… en attendant de signer le contrat.
A ces mots, elle s’était raidie et, tirant avec fermeté sur les draps, avait forcé Nic à se relever.
— Et ensuite tout sera fini ?
Baissant les yeux sur le visage ovale levé sur lui, il avait vu le reflet de sa propre jeunesse dans ses prunelles sombres. Il s’était aussitôt refermé sur lui-même, peu enclin à revisiter ces moments douloureux où elle s’était jouée de lui.
— Il ne peut pas en être autrement…
Le visage blême, Maddie l’avait fixé droit dans les yeux.
— Je voulais m’assurer qu’il n’y avait aucune confusion.
Soudain furieux devant son air détaché, il l’avait embrassée avec passion jusqu’à ce qu’elle pousse des petits gémissements rauques… puis l’avait écartée.
— Je reviendrai plus tard. Nous avons encore de nombreux détails à régler.
— Je ne serai pas là cet après-midi, annonça Maddie, une lueur de défi dans le regard. Je vais à l’hôpital voir Maria.
— Très bien. Je viendrai te chercher, et nous irons ensemble — après avoir discuté affaires.
Nic était parfaitement conscient que leur temps était compté. Ce n’était maintenant qu’une question de jours avant qu’Hernan ne revienne… et que Maddie signe le contrat. Et la trêve qui s’était instaurée entre eux prendrait fin. Parce que les souvenirs et les sentiments liés à Madalena Vasquez étaient trop intenses pour permettre autre chose.