Depuis que je suis dans ce voyage spirituel, tout s’effondre. Je n’éprouve plus d’intérêt pour rien. J’ai l’impression d’être devenue très paresseuse. Je ne peux honorer aucun de mes rendez-vous. Je ne peux m’engager à rien, je ne peux rien faire. Des pensées viennent bien à propos du futur, comme par exemple : comment vais-je faire pour subvenir à mes besoins sans chercher du travail ? Je ne suis pas certaine que ce qui se déroule ici soit vrai, et que ce ne soit pas encore un jeu du mental qui cherche à s’échapper.
Vous êtes un cas rare. Vous êtes enceinte de votre Soi, enceinte de vous-même. Vous êtes en train de donner naissance à « vous-même », pour ainsi dire. Il vient un moment où tous les intérêts tombent. Certains paniquent lorsque ça arrive. Ils ont peur d’être considérés comme inintéressants. Mais en fait, ça vous est égal. Dans cette phase de la découverte du Soi, des pensées comme celles que vous avez déjà mentionnées peuvent faire irruption du plus profond du mental pour vous faire peur. Elles essayeront de jeter l’ombre du doute sur votre évolution spirituelle.
Ce que vous partagez me parle beaucoup. J’ai aussi fait l’expérience de l’effondrement des choses. J’étais enseignant dans une université de mon quartier en plein Londres. Quand un baiser intérieur m’a éveillé à cette découverte du Soi, mon cœur m’a dicté de renoncer à mon travail. Mon voyage m’a enseigné que dans ce dépouillement jusqu’à l’Être pur, des expériences dont on n’aurait jamais imaginé qu’elles aient quelque chose à voir avec nous, peuvent apparaître en nous, et ce qu’on ressent au moment où elles se répandent est très fort.
Dans mon cas, même si je n’ai jamais eu d’intérêt pour l’argent – et c’est encore le cas aujourd’hui – tout m’a quitté au point que pendant un certain temps je n’ai plus rien eu du tout. Mon dernier penny était dépensé, et plus un sou ne rentrait, mais je savais au fond du cœur que ça faisait aussi partie d’une période de purification. Les expériences qui venaient faisaient partie intégrante d’un cycle de nettoyage pour enlever les taches qui restaient dans l’Être.
Certains disent, « Je n’ai rien », mais ils ont cinq cents livres à la banque – c’est leur « rien » –, mais dans mon cas je n’avais vraiment rien ! Je regardais dans toutes mes poches ; je faisais le tour de mes vieux habits pour voir si je ne pouvais pas trouver un peu de monnaie ou quoi que ce soit ! Il n’y avait plus rien à manger, et mon estomac commençait à gargouiller. Alors je me tournai vers Dieu : « C’est le moment, c’est le moment… Où es-tu ? »
Parfois des doutes se manifestaient pour mettre au défi cette immense confiance en Dieu, Dieu que je considère comme synonyme de l’Existence. Ces doutes suggéraient que Dieu m’avait abandonné. Mais ce qui l’emportait sur ces doutes, c’était un sentiment que quelque chose se révélait : « Je (Dieu ou l’Existence) prends soin de toi ».
Je me souviens d’une visite de mon frère, un jour. Il s’est assis et il a sorti une liasse de billets qu’il a commencé à compter. Il était là à compter des billets devant moi alors que je n’avais pas un sou. Alors une pensée m’est venue : « Si seulement je pouvais avoir une livre, ce serait bien. » Mais je savais intérieurement qu’il ne fallait pas que je la lui demande. C’était le mental qui le voulait. C’est le mental qui a peur de manquer d’argent et qui trouve toutes sortes de justifications pour en demander. Je lui avais donné de l’argent dans le passé, et ça aurait été pour lui le moment parfait pour honorer sa dette. Mais quelque chose s’est même senti honteux à l’idée de demander quoi que ce soit, ce qui m’a aidé à me réfréner. Tout en suivant cet appel d’en haut, le mental ne cessait d’argumenter : « Mais c’est un signe de Dieu. Il te dit de demander à ton frère ! Regarde tout l’argent qu’il a ! C’est ta chance. Saisis-la ! »
Mais je vous le dis, ce n’est pas ça. Ça ne vient pas comme ça, sous cette forme. Il faut être très silencieux pour être capable d’écouter et de distinguer la voix de Dieu de celle du bruit du mental. Cet Amant invisible qui est en vous est si proche ; il dévoile maintenant tous les tours auxquels vous vous êtes habitué et identifié. Voyez comme vous êtes devenu habile, et à quel point vous l’avez été. Toutes les petites astuces, toutes les stratégies et l’autorité qui avaient été déguisées en spontanéité sont maintenant révélées pour ce qu’elles sont. Oui, en fait, même ce que vous appeliez spontané était encore contraint.
Tout est porté au grand jour. Vous en venez à voir que « quelque chose » a peur de toucher le fond. Si vous ne laissez pas les premières peurs qui montent vous inciter à suivre les conseils du mental familier, une immense sensation d’Espace et de Liberté vous sera révélée. Ce n’est pas ce à quoi vous vous seriez attendu. Vous pensiez que la situation allait être désespérée.…
Quelqu’un comme vous est vraiment béni. Toutes vos petites techniques et stratégies pour exister et toute votre jugeote ont été passées au peigne fin. Maintenant, vous êtes à nouveau comme un petit enfant assis sur les genoux de Dieu. Laissez faire. Rumi a dit à ce sujet quelque chose de très beau : « Celui qui m’a amené ici doit me ramener à la maison. »
Un voyage unique se déroule en chacun de nous. Le mental craint de goûter à l’inconfort et il va essayer de placer des obstacles sur votre chemin. Il va essayer de vous tromper avec ses astuces. Il va vous confronter à la philosophie. Mais vous venez au feu les mains jointes et un cœur ferme qui ne laissera pas de place aux négociations. De même que vous n’apportez pas votre menu au restaurant, vous arrivez dans la vie de cette façon : que ce qui vient advienne. De cette façon, on laisse derrière tout ce qui n’est pas vrai, et l’Infini se dévoile dans Sa magnifique splendeur.
Je suis très heureux pour vous. Je connais tous les recoins de ce qui arrive lorsque l’Être régurgite tous les mensonges. Donc, c’est très, très bien. Tout devient possible lorsqu’on ne peut plus se reposer sur ses propres capacités. Quand tout soutien vous aura abandonné, vous aurez de grandes surprises. Ne pensez pas que vous connaissez le chemin de votre propre délivrance.
Lorsque la Vie est assez bonne pour tout vous enlever, l’abondance sous toutes ses formes peut se manifester ! Alors vous n’êtes plus dépendante. Vous avez cessé d’être une mendiante. Même l’abondance ne signifie plus rien pour vous. Tel est le chemin de Celui qui est libre.