Poésie d’Amérique, les athlètes cosmiques, 1943.

Huile sur toile, 116,8 x 78,7 cm.

Teatro-Museo Dalí, Figueres.

 

 

Au début de 1935, Dalí dispensa des conférences à Hartford et au Museum of Modern Art à New York et ce fut au cours de ces causeries qu’il déclara le plus clairement que « la seule différence entre moi et un fou, est que moi, je ne suis pas fou ». Avant que Dalí ne s’embarque pour l’Europe, Caresse Crosby organisa un bal masqué, le « Bal onirique », dans un restaurant huppé de New York. Parmi les éléments qui constituaient son costume, Dalí portait une paire de seins allumés logés dans un soutien-gorge. Cependant, pour une fois, les autres invités semblaient l’avoir surpassé dans la surréalité. Gala faillit déclencher un scandale en portant sur la tête une poupée représentant un cadavre de bébé, qui était peut-être une allusion au bébé Lindbergh, kidnappé et assassiné quelques mois auparavant. Accusés de provocation, les Dalí se défendirent, mais plus tard ils confessèrent à des intimes que cela avait bien été leur intention.

Pendant l’été de 1935, Dalí publia aussi un essai, La Conquête de l’irrationnel, dans lequel il définit son esthétique :

Toute mon ambition sur le plan pictural consiste à matérialiser avec la plus impérialiste rage de précision les images de l’irrationalité concrète... L’important est ce que l’on veut communiquer : le sujet concret irrationnel. Les moyens d’expression picturale sont mis au service de ce sujet. L’illusionnisme de l’art imitatif le plus abjectement arriviste et irrésistible, les trucs habiles du trompe-l’œil paralysant, l’académisme le plus analytiquement narratif et discrédité, peuvent devenir des hiérarchies sublimes de la pensée à l’approche des nouvelles exactitudes de l’irrationalité concrète [...].

Cependant, Dalí préférait exclure de cette vigoureuse prise de position la possibilité que l’académisme visuel se substituât au besoin de trouver quelque chose de nouveau à dire.

Lorca passant par Barcelone en septembre 1935, Dalí rencontra le poète pour la dernière fois. Le peintre avait écrit à Lorca pour lui proposer de travailler ensemble à l’écriture d’un opéra qui réunirait Louis II de Bavière et Léopold von Sacher-Masoch. Mais le poète ne répondit pas à cette proposition. Bien que Lorca fût très heureux de revoir Dalí (les deux hommes ne s’étaient pas revus depuis 1937), il était troublé par le mariage du peintre. Il confia plus tard à un ami que Dalí détestait les seins et les vulves, était terrorisé par les maladies vénériennes, était impuissant et « obsessionnel anal et ne pourrait jamais trouver de satisfaction sexuelle avec une femme ».

Pendant son voyage en Espagne, Dalí était accompagné par un important collectionneur anglais, Edward James, qui prétendait descendre du roi Édouard VII. Il s’était constitué une superbe collection d’art surréaliste après avoir hérité d’une fortune considérable. Dalí avait accepté de vendre ses œuvres les plus importantes à James et cet accord dura jusqu’en 1939.