Deux Figures, 1936
Gouache sur papier journal noir, 21,3 x 33,7 cm.
Musée von der Heydt, Wuppertal.
Parce que le papier journal noir utilisé pour ce dessin possédait une surface légèrement huileuse, il a quelque peu résisté à l’eau utilisée pour liquéfier et pour servir de support à la peinture rouge et blanche. En conséquence, la peinture s’est craquelée et a coulé comme en grandes traînées. Il en résulte une image qui jouit des nuances de la photographie radiographique, tout en disant également quelque chose de surréaliste sur le corps humain. C’est particulièrement le cas des têtes, car elles ressemblent à des buissons faits de sang.
Les personnages sont-ils masculins ou féminins ? Les espaces sombres sur leurs seins dénotent-ils des seins ou des poumons ? Il n’y a aucune façon de le savoir. Notre seule certitude consiste en ce que Dalí a atteint ici une profonde conscience primale du corps humain, créant ainsi un de ses tableaux les plus expressifs et picturaux dans le processus.
Dans cette belle peinture de paysage toutefois assez simple et non surréaliste, Dalí a assorti la vaste plaine de l’Empordà près de Figueres avec une image sélectionnée dans un journal scientifique, sous la forme d’un l’homme, debout, son pied posé sur une roche, à gauche. Dalí a pris ce personnage d’une illustration de magazine montrant un homme – qui pourrait bien être le médecin autrichien Victor Eisenmenger (1864-1932) – faisant fonctionner une machine de massage du cœur avec son pied. Avec un associationnisme typiquement en roue libre, Dalí a connecté dans un essai de 1934 Les Nouvelles Couleurs du sex-appeal spectral cet homme avec un pharmacien de Figueres de sa jeunesse, qu’il a alors lié au fils mathématicien du pharmacien, qu’il a par la suite associé à travers le nom de la rue dans laquelle le mathématicien avait vécu au nom d’un physicien catalan et inventeur du premier sous-marin du monde fonctionnant au combustible, Narcisco Monturiol (1819-1885). Cependant à croire la légende, Dalí nous montre simplement le pharmacien de Figueres, un certain M. Deulofeu.