La langue est un lien identitaire interne au sein d’un peuple. Peut-être le plus fort de tous et parfois un vecteur d’influence extérieure. L’extension d’une langue à l’échelle internationale permet de mesurer le rayonnement du pays d’origine. Quelques rares langues sont utilisées en dehors de leur pays d’origine.
Du XVIIe siècle au début du XXe, le français a été la langue des élites internationales de la culture et de la diplomatie. Il a ainsi pu rester la langue dominante au XIXe siècle, alors que la France avait déjà cédé la place de puissance dominante à la Grande-Bretagne. Le traité de Versailles (1919) clôturant la Première Guerre mondiale fut le premier grand document diplomatique à être rédigé à la fois en anglais et en français. Cela peut être considéré comme un passage de témoin entre les deux langues. Le succès de la langue anglaise tient à ce qu’elle est à la fois alors celle d’une des principales puissances européennes, la Grande-Bretagne, et de la puissance mondiale montante, les États-Unis.
Une des 6 000 langues meurt
chaque semaine
L’utilisation d’une langue est le reflet d’un héritage historique, notamment celui des empires coloniaux : Afrique francophone et anglophone ou lusophone, Amérique latine lusophone ou hispanophone. C’est également le produit de l’attractivité et de la puissance d’un pays. L’anglo-américain est aujourd’hui devenu la langue universelle grâce à sa base coloniale importante (Afrique anglophone, Australie, Nouvelle-Zélande, Canada, États-Unis) au statut de puissance dominante des États-Unis et plus encore au phénomène de globalisation qui a accentué l’avantage comparatif de l’anglo-américain, désormais utilisé comme langue véhiculaire entre personnes ayant chacune une langue natale différente y compris à l’intérieur d’un même État. L’anglais – ou plutôt sa forme globalisée et simplifiée, le globish, très différente de l’anglais littéraire – est devenu, sans contestation possible, la langue internationale des médias, des affaires et de la culture mondialisée. C’est pour le moment la langue de la globalisation. Mais que se passera-t-il sous l’influence de la Chine ?
Afin de mesurer le rayonnement linguistique, il faut prendre non seulement en compte le nombre de locuteurs de la langue, mais surtout son implantation en dehors du pays d’origine et son utilisation par ceux pour qui elle n’est pas la langue maternelle. Le chinois est certainement la langue la plus parlée au monde, mais elle n’est pas la langue dominante et elle n’a pas encore un véritable statut international. Malgré sa perte de statut de langue dominante des élites, le français est resté l’une des deux grandes langues de culture et de communication internationale, étant langue officielle dans une trentaine de pays et ayant conservé une place forte dans le domaine diplomatique et se redressant depuis quelques années. L’anglais est la langue officielle ou co-officielle dans 60 pays, il y a six langues officielles à l’ONU (l’anglais, l’arabe, le chinois, l’espagnol, le français et le russe), reflet aussi du nombre de locuteurs. Selon l’UNESCO, il y a environ 6 000 langues existantes, mais en moyenne il en disparaît une chaque semaine. La bataille entre nivellement et diversité linguistique va durer longtemps.