La Pologne

Bien souvent tragique, l’histoire de la Pologne permet de comprendre les conceptions et les préoccupations actuelles des Polonais. Constamment soumise aux influences et aux appétits de ses voisins, notamment allemand et russe, la Pologne a souvent vu sa souveraineté contestée, voire même niée. Elle a été rayée de la carte à la fin du XVIIIe siècle, recréée sous la forme du Duché de Varsovie par Napoléon Ier, puis de nouveau supprimée à l’issue du Congrès de Vienne et partagée entre la Russie, l’Autriche et la Prusse. Récréée par le Traité de Versailles en 1919, elle fut occupée par l’Allemagne nazie au cours de la Seconde Guerre mondiale, puis placée sous domination soviétique jusqu’à la fin de la guerre froide. La Pologne a jusqu’à aujourd’hui des relations compliquées avec l’Allemagne malgré la reconnaissance par cette dernière des crimes nazis, et la renonciation explicite, par l’Allemagne réunifiée, aux territoires allemands au-delà de la ligne Oder-Neisse attribués à la Pologne en 1945. Elle continue à craindre toute tentative d’influence ou de domination russe, énergétique ou autre. L’histoire fait qu’elle n’a confiance ni dans les traités ni dans les garanties des institutions internationales. Elle voit donc dans la protection américaine le seul moyen de mettre en échec les appétits russes, et aussi une façon de contrebalancer les influences allemande et française. Alors que la France et l’Angleterre s’étaient portées à son secours contre le nazisme et que les Français, au cours de la guerre froide, ont toujours appelé au dépassement de la division de l’Europe en blocs, les Polonais ont le sentiment de n’avoir dû leur salut contre le nazisme et le communisme qu’aux seuls États-Unis.

La Pologne a peu confiance
dans les traités et dans les institutions internationales

La très grande religiosité des deux sociétés et la présence d’une forte communauté polonaise bien organisée aux États-Unis aident à consolider ce lien. Cet héritage historique a conduit la Pologne à suivre sans réserve la politique de l’administration Bush et la guerre en Irak. Son adhésion à l’OTAN, facilitée par la volonté américaine d’élargir le plus possible l’alliance après la chute de l’URSS, et soutenue par le « lobby » polonais des États-Unis, comparée aux longues et irritantes négociations d’adhésion à l’Union européenne, est venue conforter ce sentiment d’une plus grande amitié et ouverture des États-Unis à l’égard de la Pologne que celle de l’Europe, bien que le développement économique de la Pologne soit principalement dû à son intégration européenne. L’extrême sensibilité de la Pologne pour tout ce qui relève de sa souveraineté et ses positions jugées rétrogrades sur les questions sociales, en ont fait au début un partenaire européen difficile. Néanmoins, les sentiments pro-américains de l’opinion avaient un peu diminué, suite aux résultats catastrophiques de la guerre d’Irak, mais ont remonté avec la crise ukrainienne. La Pologne, tout en restant un partenaire difficile et très méfiant envers la Russie (sentiment aggravé par la crise en Ukraine), devrait assumer de plus en plus sa situation de grand pays de l’Union européenne et y trouve un moyen nouveau de développer son influence. Cette évolution se manifeste en 2014 par le choix de Donald Tusk, Premier ministre polonais, comme président du Conseil européen.