LETTRE D’AMBIEN II
À STAGRUK :

 

 

J’ai vu votre Directive. Avec le tour qu’ont pris les événements, et les révolutions qui couvent un peu partout dans notre Empire, les Quatre n’avaient pas d’autre choix que de prendre de telles mesures – je le comprends parfaitement. J’ai reçu vos aimables messages s’enquérant de ma santé. Oui, merci, je vais bien, et je n’ai besoin de rien. Bien sûr, participer activement à la marche des mondes me manque cruellement. Les vieilles habitudes ont la vie dure ! En attendant, c’est pour moi une consolation – mais cela n’a rien de neuf, vous le savez ! – de vous recevoir tous séparément. Cela me procure un immense plaisir. Je me réjouis de voir mon expérience mise à profit, ne fût-ce que de cette façon indirecte. Que vous m’assuriez tous de votre soutien personnel me donne matière à réflexion, tout comme le fait que vous sembliez comprendre les raisons qui m’ont poussée à diffuser à grande échelle mon manuscrit, même sous une forme passablement archaïque. Je suis d’accord avec vous : les faits désagréables à entendre, il convient de les faire connaître d’une façon mesurée, et souvent équivoque – n’ai-je pas été la première à exposer ce point de vue ? Et je me dis aussi que notre bonne entente risque fort de s’avérer utile lorsque – et il y a de plus en plus de chances que cela arrive, vous en conviendrez certainement – nous nous retrouverons tous ensemble en « exil disciplinaire » sur la Planète 13, un monde fort plaisant mais passablement ennuyeux.