CONCLUSION

MODERNITÉS
DE LA RÉVOCATION
DE L’ÉDIT DE NANTES

Nul doute que la révocation de l’édit de Nantes ne soit parmi les événements les plus décisifs de notre histoire, événement qui fit longtemps sentir ses effets au sens strict du terme. Aujourd’hui son influence est souvent sous-estimée, à la différence du XIXe siècle. Sa dimension européenne, sinon mondiale, lui donne une résonance particulière.

Cependant, des événements qui ont fait l’histoire de France, la révocation de l’édit de Nantes est celui qui, paradoxalement, au sens classique du terme en a le moins les caractères. Il suffit de le comparer avec l’autre événement qui concerne les huguenots, la Saint-Barthélemy. Nulle imprévisibilité, nulle surprise pour les contemporains, les deux journées qui scellent le sort de la communauté protestante, les 17 et 18 octobre 1685, sont des journées parfaitement ordinaires à Fontainebleau. La portée de l’édit de révocation, c’est aussi son renouvellement, de génération en génération, avec quelques textes emblématiques forts, les Déclarations de mars 1715 et, pire, celle de 1724 ; même sans paradoxe aucun, l’édit de 1787, qui accorde de l’état-civil aux protestants mais leur refuse la liberté de culte, et se garde bien d’abolir la législation contre eux, montre comment cette décision est une véritable « loi fondamentale » de la monarchie française, qu’aucun des successeurs de Louis XIV n’a osé révoquer.

C’est donc un phénomène de longue durée qui tire son importance de cette durée. Est-ce un hasard si aujourd’hui, pour les huguenots, l’icône de la résistance de leurs ancêtres est la prisonnière de Louis XV, Marie Durand, enfermée près de trente-huit ans à la Tour de Constance d’Aigues-Mortes ?

Pour certains, il faudrait même remonter le temps : c’est l’interprétation de Louis XIV, celle qui figure dans le préambule de son Édit ; en révoquant l’édit de Nantes, le roi affirme avoir réalisé le souhait de son grand-père, qui aurait espéré d’après le texte même de 1598 la disparition de l’« hérésie ». Curieusement, Michelet, seul des libéraux à ne pas louer la décision d’Henri IV, partage la position du Grand Roi, voyant la fin du protestantisme français dès le compromis de 1598. Certains historiens modernes ne sont pas loin de partager ce point de vue, non sans quelques raisons, tant le système mis en place avait la capacité de réduire la religion minoritaire, surtout avec la force du groupe de pression constituée par les catholiques dévots. Pourtant nous devons conserver à la Révocation sa réalité, non pas suite logique et programmée d’une évolution inéluctable, mais rupture et fin d’une époque. La preuve en est dans la paix d’Alès et l’édit de grâce de Nîmes qui donne au régime de l’édit de Nantes un nouveau souffle. Ce terme volontairement provocateur est à peine exagéré. La chute du parti huguenot et l’écrasement des forces militaires laissaient présager la fin du protestantisme. Or celui-ci, au contraire, connaît une période relativement heureuse avec une ouverture de temples, un redressement démographique et une vitalité certaine. 1629, 1685, plus d’un demi-siècle sépare les deux édits qui avec le recul sont en complète contradiction. Louis XIII et Richelieu souhaitaient la conversion des huguenots mais en remettaient le soin à Dieu ; en attendant, le cardinal ministre n’hésitait pas à en faire des collaborateurs précieux. Louis XIV, au moins après 1679, a décidé de les faire disparaître.

Sur la réalisation ponctuelle de la Révocation, c’est un bon exemple où une tactique réussie s’accompagne d’une erreur stratégique qui compromet l’objectif d’une unité religieuse du royaume. Le contraste est total entre les mois qui précèdent la décision et ceux qui la suivent. Tout semble réussir au pouvoir royal avant le 17 octobre 1685 : conversions massives, même dans les bastions protestants les plus solides, le Bas-Languedoc et les Cévennes, échecs des tentatives de résistance, découragements des huguenots. L’apogée du règne se situe à la veille de la Révocation. Il suffit, entre autres, de relire les mémoires d’un adversaire, Gilbert Burnet, le futur évêque anglican de Salisbury, qui a relevé la situation délicate dans laquelle se trouvait le calvinisme européen1. Les difficultés pour le Grand Roi s’accumulent après ; conversions plus lentes là où on pouvait le moins s’y attendre, comme en Normandie ou même dans le Berry au protestantisme si faible, noyaux de résistance imprévus chez certains nobles, apparition très rapide de cultes interdits, forte émigration. Certes, cette opposition entre les deux périodes est trop schématique, un observateur très attentif aurait pu voir les signes avant-coureurs de ces difficultés dans la fuite de communautés entières au Poitou comme en Cévennes, dans l’ambiguïté des abjurations, dans les premiers courants migratoires dès 1681 en Poitou. Mais il fallait une perspicacité très fine. C’est précisément cette victoire trop facile qui a donné une confiance excessive à tous les niveaux d’autorité et conduit aux erreurs qui ont suivi. Il est facile d’en relever au moins deux : d’une part, contredire immédiatement l’édit de Fontainebleau dans son dernier article si fondamental sur le maintien de la dévotion privée, d’autre part, ne pas chercher à ménager la sensibilité et la culture des nouveaux convertis, en les forçant à la négation complète de leur passé et de leur éducation par les confessions et les communions immédiatement imposées sous la menace des dragons, sans parler de l’extrême-onction forcée avec la terrible sanction symbolique du cadavre traîné dans la poussière et jeté à la voierie. L’extrême violence et le ressentiment ont alors été créés.

La bonne articulation entre le centre et la périphérie, Versailles et les intendants si efficaces dans la période préliminaire de 1681 à 1685, se dérègle ensuite. Les intendants les plus zélés ne comprennent plus le « relâchement » de la Cour, la division s’installe entre modérés et violents et ne cesse plus. Les situations deviennent de plus en plus diverses, selon les régions et les époques, sans parler des politiques contradictoires : on lutte avec acharnement contre l’émigration clandestine, mais on expulse périodiquement les plus opiniâtres. On poursuit implacablement les assemblées clandestines et on exécute les prédicants, mais on négocie parfois le départ de ces derniers. On met en sommeil les mesures les plus spectaculaires comme les cadavres traînés sur la claie, qui scandalisent même certains catholiques, mais on ne veut pas le dire. Ce dérèglement et l’éclatement des contradictions ont pu être précisément datés à travers les instructions de Versailles au dernier trimestre 1686, un an à peine après l’édit de Fontainebleau, et la monarchie d’Ancien Régime sera incapable d’en sortir.

Ajoutons-y le contexte international, fondamental. La préparation de l’édit de Fontainebleau s’est déroulée dans la suite de la trêve de Ratisbonne et l’arrivée d’un souverain catholique en Angleterre, en d’autres termes elle est directement liée à la domination européenne incontestable du Grand Roi. Cette trêve joue de deux façons dans la motivation royale : après le triomphe militaire, le triomphe spirituel, plus grand encore, mais, aussi, elle fournit l’instrument efficace de conversion, l’armée. Foucault l’a parfaitement compris dans la reprise des dragonnades en utilisant les troupes initialement prévues pour une campagne militaire contre les Espagnols qui a tourné court. L’application du même édit de Fontainebleau se situe dans le contexte de la création de la Ligue d’Augsbourg, de son développement, puis de la chute de Jacques II et du déclenchement de la guerre. Les troupes qui avaient joué un si grand rôle dans la chute du protestantisme français n’ont plus la même disponibilité ; d’autres urgences apparaissent. Le Grand dessein n’a pas eu l’écho que Louis le Grand espérait dans le monde catholique ; celui-ci a perdu les princes allemands protestants sans gagner pour autant les catholiques, même la modeste République de Gênes n’appuie pas la politique antiprotestante du Grand Roi. Tout au long du régime de la Révocation, la répression est en rapport avec la paix, la chance relative des protestants, ce sont les nombreuses guerres que les souverains entretiennent, aussi bien du temps de Louis XIV que de son successeur.

Le refus de revenir sur l’erreur commise, bien au-delà de la mort de Louis XIV et pendant tout le XVIIIe siècle, au temps des Lumières et de l’exaltation de la tolérance nous renvoie à l’histoire culturelle et politique française. Depuis longtemps les autorités, aussi bien à Versailles que dans l’ensemble du royaume, ne se faisaient pas d’illusions sur la réussite de l’entreprise ; la prise de conscience est précoce, à peine quelques mois après la décision. En 1716, le Régent hésite à revenir en arrière et pourtant, neuf ans plus tard, l’édit de Fontainebleau est renouvelé et aggravé en 1724. Les raisons de cette obstination sont multiples. L’Ancien Régime, cela a souvent été dit, répugne à abolir, il préfère ajouter une décision contraire que retrancher, au risque de la confusion ; paradoxalement, la Révocation est la grande exception à cette règle, puisque quand il a ajouté, il a renchéri, quitte ensuite à ne pas appliquer, mais sans jamais le dire ! La raison principale est le poids énorme du Grand Roi dans la mémoire du XVIIIe siècle, son « fantôme » pour reprendre l’image saisissante de Rabaut Saint-Étienne, et pas seulement chez ses deux successeurs et leurs collaborateurs. Le parti philosophique entraîné par Voltaire est tout aussi respectueux du fantôme et il met beaucoup de temps à s’émouvoir, beaucoup plus préoccupé de défendre ses alliés jansénistes. En fait, la réputation des huguenots n’est pas positive, le prophétisme leur a porté tort et même les cultes clandestins sont mal compris. L’affaire Calas et la lutte de Voltaire pour la tolérance suscitent bien un intérêt, mais pas jusqu’au point d’arrêter définitivement toute persécution et de libérer rapidement les dernières victimes, plus de dix ans pour les galériens, sans parler du malheureux pasteur de Meaux arrêté et mort en prison en 1771, ce qui n’émeut guère.

Ajoutons-y une autre responsabilité, celle d’une dynastie, les Phélypeaux-La Vrillière. Le grand-père Balthazar avait apposé sa signature au bas de l’acte de révocation, sans avoir cependant joué un rôle majeur ; son fils Louis II avait participé à la rédaction et la signature de la Déclaration de 1724, mais il semble si peu croire en son texte qu’il accorde le droit à l’intendant de Caen de l’interpréter comme il veut ; le plus intolérant est le petit-fils, Louis de Saint-Florentin, en charge de la fonction pendant un demi-siècle et qui s’est toujours refusé au moindre accommodement. Terrible poids d’une mémoire familiale sur la politique d’un royaume.

Cette longue durée entraîne de multiples conséquences. L’expression de culture de l’intolérance peut paraître excessive, pourtant cette législation de longue durée, menace permanente pour chaque huguenot, a contribué à exacerber des tensions que le régime de l’édit de Nantes était en train d’apaiser. Le cas extrême est le théâtre de la guerre des Camisards, les Cévennes et le Bas-Languedoc, où les violences réciproques laisseront des traces durables, ravivées au temps de la Révolution et des crises du XIXe siècle jusqu’au milieu du XXe siècle. Mais dans des régions sans affrontement violent, le climat de clandestinité et l’appel des autorités à la dénonciation, même intermittent, créaient un climat défavorable à la coexistence. À l’intérieur des familles huguenotes, l’obligation de conversion a entraîné des clivages irréversibles entre ceux qui se sont réellement intégrés à leur nouvelle religion, qui était une nouvelle communauté, et les « obstinés ». Selon un mécanisme psychologique bien connu, les nouveaux convertis réels sont devenus des catholiques zélés, à la pointe du combat antiprotestant. Et nous n’évoquerons pas, plus triviales, les attitudes de nouveaux convertis qui rachètent à bas prix les biens des opiniâtres, parfois leurs anciens voisins de banc au temple. Eux et leur descendance ont joué un rôle non négligeable dans cette aggravation des tensions, la tolérance a eu bien du mal à se frayer un chemin et, dans certains lieux, elle n’a pas progressé mais régressé.

Faut-il aussi longuement insister sur le tort fait au catholicisme français, sur l’image détestable des communions ou des mariages sacrilèges ? Une part de l’indifférence religieuse, aussi bien d’un côté que de l’autre, trouve ici sa source, plusieurs prélats et clercs hostiles à ces contraintes l’avaient pressenti : contredire même la théologie catholique et confier la gestion des consciences aux administrateurs du roi ne pouvaient qu’ébranler les croyances. Plus largement, la laïcité à la française trouve une de ses racines. Beaucoup de penseurs du XVIIIe siècle défendant la tolérance civile évoquent, au moins à titre d’hypothèse, un État laissant la liberté à toutes les confessions sous la seule condition de respecter la loi, mais n’en privilégiant aucune ; un siècle plus tard, Jules Simon, précurseur, n’hésite pas à proposer une séparation de l’État et des Églises à partir de l’étude de la Révocation.

On mesure à quel point cet épisode modèle notre monde contemporain, dans la mesure même où il révèle deux modernités contradictoires, en germe au début du XVIe siècle, mais qui s’épanouissent un siècle plus tard, d’une part la soumission du religieux au politique et à l’État — un État qui peut aller jusqu’à un large contrôle de la société —, d’autre part le renforcement de ces consciences individuelles, transcendant les clivages sociaux et capables de s’opposer aux institutions. La première modernité assure le succès à court terme de la Révocation pendant l’automne 1685, la seconde, son échec dans la durée : ce qui était le privilège d’une élite socioculturelle est devenu l’apanage de tous, la résistance est aussi bien partagée par les notables gentilshommes et riches marchands que par les artisans ou les paysans, même si elle prend des formes différentes. Les femmes y apparaissent au premier plan.

Ce n’est pas un hasard si la modernité de cet épisode s’exprime aussi sous une autre forme, par la guerre de communication que se livrent Louis XIV et huguenots : sur ce point-là, le Grand Roi a perdu la bataille face à des forces inférieures. Cette défaite appelle aussi une explication : ici apparaît clairement la supériorité d’une communication dispersée en de multiples centres et sous les formes les plus variées, organisée dans un réseau d’une grande efficacité, par rapport à une communication centralisée et étroitement contrôlée. Ce n’est pas un hasard non plus si des huguenots du sud de la France, les Camisards, inventent la guérilla moderne. Plus largement, la résistance huguenote est la première d’une longue série de minorités culturelles et religieuses qui ont pu se maintenir. En France, un siècle plus tard, c’est au tour des Vendéens d’en donner l’exemple. Louis XIV et ses conseillers n’avaient pas assez pris au sérieux le sacerdoce universel, proclamé par les réformateurs du XVIe siècle, mais ils n’étaient pas les seuls ; la plupart des pasteurs du Refuge ne voyant le salut de leurs anciens fidèles que dans l’émigration, n’y croyaient pas davantage et se méfièrent presque autant de ces Églises clandestines encadrées par de modestes laïcs, non formés par les académies de Saumur ou de Sedan.

Faut-il aller plus loin, dans cette analyse de la modernité de l’État et, à la suite d’Edgar Quinet, voir dans la politique de la Révocation une préfiguration de la Terreur et en actualisant le vocabulaire, parler d’un pré-totalitarisme, un État qui asservit les consciences et uniformise les diversités culturelles ? La question mérite au moins d’être posée et les arguments en faveur d’une thèse de cet ordre ont un poids réel : la dernière décision de Louis XIV en mars 1715 qui fait de tout protestant un nouveau converti, même quand il ne l’a jamais été, en dit long sur la démesure royale, même au regard des principes de l’époque.

Cependant, la monarchie de Louis XIV n’a ni les moyens, ni la volonté d’aller trop loin, comme le montrent ses hésitations précoces, une année seulement après la Révocation ; ses hésitations la conduisent à de nombreuses incohérences relevées tout au long du règne, incohérences qu’elle a léguées à ses successeurs et que ceux-ci ont aggravées. Ici, on sera surtout sensible aux faiblesses d’un État, pour ne pas dire son inefficacité, incapable de comprendre la situation et plus encore de reconnaître ses erreurs et de savoir s’adapter à une situation nouvelle. C’est l’incapacité à se réformer qui est mise en valeur par l’histoire d’une révocation jamais révoquée au temps de la monarchie, alors que la plupart des responsables étaient pourtant convaincus depuis longtemps de la nocivité et de l’inefficacité de cet édit.

Au-delà de la France, 1685 est une date européenne, sinon mondiale. Elle initie le transfert de suprématie qui progressivement va passer de la France au Royaume-Uni et plus largement au monde anglo-saxon et, accessoirement, elle contribue à l’émergence d’une nouvelle puissance, la Prusse. Ce transfert de suprématie s’accompagne d’un transfert de modèle de gouvernement, déclin de la monarchie absolue au profit d’une monarchie constitutionnelle. La Révocation devient pour nombre de journalistes polémistes, huguenots réfugiés en Hollande, l’exemple de la décision néfaste d’un pouvoir sans contrôle. La Saint-Barthélemy, comme l’a bien montré Arlette Jouanna2, avait conforté l’idéal d’une monarchie absolue au détriment d’une monarchie tempérée. La Révocation a l’effet exactement inverse. Un cycle se termine, avec un paradoxe : l’édit de Nantes a été une des premières victoires de l’absolutisme, c’est grâce à celui-ci qu’Henri IV a pu imposer aux catholiques la présence des Églises réformées, les protestants devenus partisans inconditionnels de l’absolutisme l’avaient bien compris, Bayle le premier. Ce même absolutisme conduit près d’un siècle plus tard à la fin de la dualité religieuse, non pas comme une revanche catholique, mais comme le triomphe de la religion du roi. Cependant, ce triomphe fragilise le modèle politique. Le doute s’installe sur la gouvernance de la monarchie absolue et la critique part souvent de huguenots du Refuge autrefois partisans convaincus de cet absolutisme. Pour beaucoup d’entre eux, Pierre Du Bosc le premier, la légitimité est passée de Louis XIV à Guillaume d’Orange. La France, qui avec la coexistence même imparfaite de deux religions pouvait paraître initier un nouveau modèle, régresse. Le symbole le plus frappant de cette régression, c’est John Locke qui à partir de son enquête sur le sort des protestants en France écrit quelques mois après l’édit de Fontainebleau sa Lettre sur la tolérance.

Ainsi rarement une décision de persécution n’a été, à moyen et long terme, aussi favorable à ses victimes, au-delà d’immenses souffrances, sans parler d’un énorme traumatisme, et aussi défavorable au persécuteur qui a vu tous ses espoirs déçus. 1685, c’est le début d’un déclin, le triomphe néfaste d’une forme de culture, unité-uniformité, dont la longévité excède largement le temps de la Révocation et qui a laissé des traces jusqu’à nos jours, ne permettant pas toujours d’appréhender la complexité de notre monde. 1685, c’est, de l’autre côté, la réussite d’une diaspora huguenote bien au-delà de l’Europe, la constitution de réseaux dont la contribution au siècle des Lumières, souvent méconnue, n’en fut pas moins efficace, sans parler de l’élaboration active de la notion de liberté de conscience. En France même s’est constituée une minorité, certes beaucoup plus réduite, mais qui n’a cessé de jouer un rôle plus actif encore dans la société française jusqu’à nos jours, dans tous les domaines, politique, économique, social et culturel. Et je n’évoquerai pas la force de cette mémoire qui a conduit les protestants français à accueillir les juifs persécutés pendant la Seconde Guerre mondiale, au Chambon-sur-Lignon, à Dieulefit, dans les Cévennes et bien d’autres terres huguenotes.