Cet ouvrage porte sur la relation maître-disciple et sur les processus de transmission qui l’accompagnent. Nous proposons d’interroger « le mystère de la chose1 » dans une visée transdisciplinaire. Si différents types de relations maître-disciple sont ici abordés suivant un cadre contextuel précis – chaque contributeur l’inscrivant dans un temps (de l’antiquité au monde contemporain), dans un lieu (Chine, Inde, Occident), et donc dans une culture précise –, ce volume tente d’analyser dans le même temps, et plus fondamentalement, ce lien par-delà de telles frontières culturelles et historiques2. L’ambition de cette entreprise collective est de saisir les logiques de pensée qui animent un tel rapport.
Au regard des huit articles proposés, la transmission de maître à disciple apparaît intrinsèquement « incarnée », renvoyant à la corporéité et à l’élaboration des individus – maîtres comme disciples – inscrits dans les différents processus observables. Elle est également envisagée comme le médium même de la pensée, ce par quoi elle s’engendre, générant ainsi le mouvement de la pensée inscrite à la fois dans la destruction et dans la reconstruction. Et dans ce schème transmissionnel qui se traduit par un « sens se mouvant » et par là même « un sens se faisant », l’écart de soi à l’autre s’avère indispensable.
1. . L’expression est de George Steiner qui se réfère précisément ici aux « merveilles de la transmission ». Cf. Maîtres et disciples. Paris, Éditions Gallimard, Folio essais, 2003, p. 11.
2. . Cette réflexion interdisciplinaire, entre ethnologues, historiens et philosophes, fut amorcée en juin 2010, lors d’une journée d’études organisée à Villejuif, au Centre d’études himalayennes. Référence sera faite à la communication d’alors de Patrice Loraux dans l’introduction.