XXII
… Qu’ils égorgent dans les ambulances

On lisait dans le Siècle :

 

« Au nombre des victimes innocentes de nos discordes civiles, nous avons la douleur d’ajouter le nom d’un jeune homme de vingt-sept ans, M. Faneau, docteur en médecine.

Le docteur Faneau s’était engagé, dès le début de la guerre, dans les ambulances internationales. Pendant tout le siège de Paris, il n’a cessé de soigner les blessés avec zèle et dévouement.

Après la révolution du 18 Mars, il resta à Paris et reprit son service dans les ambulances.

« Le 25 mai dernier, il était de garde au grand séminaire de Saint-Sulpice, où les fédérés avaient établi une ambulance.

Lorsque l’armée se fut emparée du carrefour de la Croix-Rouge, elle s’avança jusqu’à la place.

Une compagnie de ligne vint à la place du grand séminaire, où flottait le drapeau de Genève.

L’officier qui la commandait demanda à parler au chef de l’ambulance. Le docteur Faneau, qui en remplissait les fonctions, se présenta.

Y a-t-il ici des fédérés ? lui demanda l’officier.

Je n’ai que des blessés, répondit M. Faneau ; ce sont des fédérés, mais ils sont à mon ambulance depuis déjà quelques jours.

Au moment où il achevait cette phrase, un coup de feu partit d’une des fenêtres du premier étage et frappa un soldat.

Ce coup de feu était tiré par un des fédérés blessés, qui s’était traîné de son lit jusqu’à la fenêtre.

Aussitôt, l’officier, exaspéré, se jeta sur le docteur Faneau, en lui criant : « Vous mentez, vous nous avez tendu un piège ; vous êtes l’ami de ces coquins, vous allez être fusillé. »

Le docteur Faneau comprit que ce serait en vain qu’il essaierait de se justifier ; aussi il n’opposa aucune résistance au peloton d’exécution.

Quelques minutes après, l’infortuné jeune homme tombait, frappé de dix balles.

Nous avons connu le docteur Faneau, et nous pouvons affirmer que, bien loin de sympathiser avec les membres de la Commune, il déplorait leurs funestes égarements et attendait avec impatience le rétablissement de l’ordre. »