L’Internationale en correctionnelle

La police put entrevoir alors que l’Internationale n’était pas le propulseur, comme elle le croyait bêtement depuis la manifestation de Mentana. Elle avait ordonné des poursuites dont la nue des Gravilliers profita pour déployer son drapeau jusque-là inconnu des foules. Le procureur impérial fut charmant pour ces travailleurs honorables ; oh certes ! qui – malheureusement ! – formaient : une association non autorisée.

L’instigateur ; Tolain, fit la défense collective : « Depuis 1862, notre mot d’ordre est que les travailleurs ne doivent chercher leur affranchissement que par eux-mêmes… Nous n’avions qu’un seul moyen de sortir de la fausse situation que nous fait la loi, c’est de la violer pour avertir qu’elle est mauvaise ; mais nous ne l’avons pas violée, car la police, le gouvernement, la magistrature a tout pu ou tout su tolérer. » Le président, aussi exquis que le procureur, infligea aux prévenus cent francs d’amende et déclara dissoute l’Association internationale établie à Paris. Un nouveau bureau est aussitôt constitué : Malon, Landrin, Combault, Varlin, un relieur qui avait réuni dix mille francs en quelques jours pour les grévistes de Genève. Nouvelles poursuites. Varlin présente la défense ; cette fois, le ton a monté : « Une classe qui a été l’opprimée de toutes les époques et de tous les règnes, la classe du travail, prétend apporter un élément de régénération… Un vent de liberté absolue peut seul épurer cette atmosphère chargée d’iniquités… Lorsqu’une classe a perdu la supériorité morale qui la fait prédominante, elle doit s’effacer si elle ne veut pas être cruelle, parce que la cruauté est la seule ressource des pouvoirs qui tombent. » Trois mois de prison ; tel est le jugement ; « pour avoir affirmé l’existence, la vitalité et l’action de l’Association internationale en intervenant dans la grève récente des ouvriers de Genève, soit moralement, soit en encourageant la lutte entre patrons et ouvriers », et dissolution encore du bureau de Paris.

Il n’en fut pas moins représenté en septembre, à Bruxelles, au troisième congrès de l’Internationale qui invita tous les travailleurs à s’opposer à une guerre entre la France et l’Allemagne. La majorité vota malgré Tolain, la propriété collective ; le gouvernement impérial en joua pour effrayer des républicains qui l’inquiétaient sérieusement.