Je ne trouve pas précisément de défenses et de prohibitions dans la lettre de l'Evangile. Mais il s'agit de contempler Dieu du regard le plus clair possible et j'éprouve que chaque objet de cette terre, que je convoite, se fait opaque, par cela même que je la convoite, et que le monde entier perd aussitôt sa transparence, ou que mon regard perd sa clarté de sorte que Dieu cesse d'être sensible à mon âme, et qu'abandonnant le Créateur pour la créature mon âme cesse de vivre dans l'éternité et perd possession du royaume de Dieu.
Je reviens à vous, Seigneur Christ, comme à Dieu dont vous êtes la forme vivante. Je suis las de mentir à mon cœur. C'est vous que je retrouve partout, alors que je croyais vous fuir, ami divin de mon enfance. Je crois bien qu'il n'y a plus que vous dont mon cœur exigeant se contente. Le démon seul en moi nie que votre enseignement soit parfait, et que je puisse renoncer à tout, fors à vous, puisque, dans le renoncement à tout, je vous retrouve.
Seuil de la vraie jeunesse,
Porche du paradis,
Mon âme est étourdie...
Seigneur ! augmentez mon ivresse.
Aplanissez l'espace
Qui sépare de Vous
Mon âme en sa disgrâce
Qui se souvient de Vous...
Seigneur ! aggravez mon extase.
Sable aride où s'imprime
La trace du pied nu,
Mon poème ingénu
N'élude pas la rime.
Ivre d'insouciance
Et d'oubli du passé,
Sur des flots cadencés
Mon âme se balance.
Quand rit l'arbuste riche
De ses premières fleurs,
Dans le vieux chêne en pleurs
Un peuple d'oiseaux niche.
Agitez les feuillages,
Rires, rythmes divins !
J'ai goûté d'un breuvage
Plus puissant que le vin.
Ô trop claire lumière
Transperce mes paupières !
Ta vérité, Seigneur,
M'a blessé jusqu'au cœur.