De toute la soirée, Werner n’avait pas réussi à contacter son deuxième agent. Beata était rentrée et s’était endormie aussitôt. Elle avait vu Charles et Christa monter dans les chambres. Elle avait vu les lumières s’allumer. Puis s’éteindre. Elle avait encore attendu un quart d’heure pour être certaine que Charles n’avait pas l’intention de ressortir, et elle était retournée à la villa.
Werner avait pigé en dix minutes qu’il était question du texte de Kafka, en dépit de la partie manquante. Lui aussi avait compris que le message se référait à la bible de Gutenberg. Et, un peu avant Charles, un soupçon avait germé dans son esprit, tel un parasite planté dans sa cervelle. La bible devait être cachée dans la cave à vins du grand-père de Charles. Peut-être juste derrière le fameux mur. En revanche, il ne voyait pas de quelle pierre il s’agissait. La clé et la porte, comme l’acier, ne figuraient pas sur la moitié de message qu’il avait en sa possession, alors il ne pouvait deviner leur existence. Il pensa qu’il pourrait demander à la fausse assistante d’explorer le mur, mais se ravisa, craignant que la femme ne découvre la bible et aille trouver Martin ou fasse une autre bêtise. Elle était une bonne exécutante, cruelle, sans un brin de compassion, et elle obéissait à tous ses ordres. Mais quand il s’agissait de prendre une initiative, elle se plantait. Il ne voulait pas prendre un tel risque.
Il vit Beata enfouie dans une multitude d’oreillers et noyée sous les édredons dont la couleur évoquait le mascarpone et il eut sommeil. Dans un peu plus de vingt-quatre heures il serait le témoin d’un événement auquel il s’était préparé durant sa vie entière. Mais avant, il allait avoir une dure journée.