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3. La Vieille Eglise d’Aker, 1881.

Huile sur toile, 16 x 21 cm.

Musée Munch, Oslo.

 

 

Sa lutte était une vision insoutenable. L’impuissance d’Edvard et son chagrin seront canalisés des années plus tard dans un tableau sur lequel il reviendra avec obsession : le merveilleux Enfant malade, dont la première version fut exécutée en 1885-1886. (Il y en aura en tout six, peintes à environ dix ans d’intervalle). Sur ce grand tableau, de presque 1,20 mètre de côté, il a toute sa vie lutté pour exprimer ce qu’il a ressenti de façon si intense du fait de la mort de sa soeur. Lors de sa dernière maladie elle réclamait régulièrement de l’aide, un soulagement de la douleur – que ni Edvard ni son père médecin ne pouvaient lui apporter. Cette incapacité se transformera en un sentiment de culpabilité, parce qu’il avait survécu et pas elle. Ses tentatives de prendre sa place à elle sur le tableau étaient vouées à l’échec, tout comme il n’avait pas pu la remplacer sur son lit de mort. Jusqu’à la fin de sa vie il fut incapable de résoudre ce problème. Il inondera cette image de sa culpabilité, presque insupportablement poignante. Le visage de la jeune fille est déjà un fantôme, presque désincarné alors qu’en silence elle aspire à la vie. Avec ses nombreux niveaux de signification et son évocation de l’état d’âme de l’artiste, on peut dire qu’il s’agit là d’une des premières œuvres expressionnistes. Il l’a lui-même qualifiée de « percée décisive » dans son style, et le collectionneur et critique Jens Thiis, plus tard biographe de Munch, l’a appelé « la première scène monumentale dans notre art norvégien »[1]