Le lendemain dès 9 heures, Rebecca a retrouvé toute son énergie malgré la courte nuit passée à échafauder avec Tom des plans d’avenir. Il est arrivé chez elle vers 3 heures du matin, traînant deux valises et un sac à bout de bras. Il a volontairement passé sous silence l’humiliation ressentie lorsque sa femme l’a jeté dehors sans ménagement, et préféré raconter sa propre version très édulcorée, mais le résultat est là : il est libre, dégagé de ce mariage, et heureux de pouvoir enfin vivre comme il l’entend. Le plus dur est fait.
Rebecca et Tom ont parlé très longuement et pour la première fois envisagé un avenir. Un avenir à deux tout simplement. Pendant des mois, elle a lutté en refusant de s’investir dans cette relation, mais au fil des semaines, la réalité l’a rattrapée. Tom est peut-être finalement l’homme idéal. Tout est si évident et naturel avec lui. Elle est manifestement très loin du coup de foudre ressenti avec son mari, mais elle va bientôt avoir 50 ans, et le temps du prince charmant est révolu. Un homme gentil, attentionné, drôle, sexuellement compatible, qui comprend son boulot et ses horaires, coche tout de même pas mal de cases. Les papillons dans le ventre quand le téléphone sonne, les heures passées à regarder son armoire et à essayer tous ses vêtements, c’est bien pour les midinettes. Aujourd’hui, elle a juste besoin de quelqu’un à ses côtés, d’un vrai mec qui sache ce qu’il veut faire de sa vie. Rebecca l’a trouvé. Elle en est convaincue.
Elle termine de boire son troisième café lorsque le groupe se retrouve enfin au complet.
« Panne de réveil ? » demande-t-elle à ses lieutenants avec un sourire ironique.
Ils connaissent tous par cœur leur commandant et préfèrent répliquer par le silence et la concentration plutôt que de bafouiller une réponse embarrassée qui les mènerait dans une impasse.
« Bien, alors Élise Cavour a été mise en examen et transférée devant le juge. Affaire malheureusement classée, mais je peux vous assurer que je garde Nicollini dans mon viseur. Je suis certaine qu’il commettra une erreur un jour ou l’autre. On va pouvoir se dégager du temps pour traquer notre “tueur au marteau”. On a la preuve que Besson ne peut pas être l’auteur de tous ces meurtres. On repart donc de zéro. Richard, tu nous fais un briefing. »
Ce dernier se lève, son cahier dans la main droite, un stylo dans la gauche. Un dossier est étalé devant lui sur son bureau.
« Tout d’abord concernant Besson, nous avons trouvé le lien qui l’unit à sa victime Capucine Danvier. Besson harcelait bon nombre d’assistantes dans son cabinet de courtage. Plusieurs plaintes ont été déposées pour violence et tentative d’agression sexuelle, toutes classées sans suite. Besson était le genre de type à user de la “promotion canapé”. Mais un jour, il a été plus loin et a violé l’une de ses stagiaires nommée Brigitte Cablat. La jeune fille a été virée peu de temps après, puis est tombée en dépression pour finir par se suicider. Capucine Danvier était la meilleure amie de Brigitte. Elle n’a pas supporté son décès et a voulu la venger en dénonçant Besson. Mais avant, elle a certainement souhaité s’expliquer avec lui, ce qui lui a coûté vraisemblablement la vie. Je n’arrive pas à comprendre comment à l’époque on a pu ne pas fouiller de ce côté-là.
– Cela ne sert à rien de revenir là-dessus, Richard », ajoute Cyril, plutôt contrarié par l’allusion appuyée de son lieutenant sur sa bavure passée.
Cyril Bonaventure n’apprécie que très moyennement d’être désavoué en public, qui plus est par un subalterne.
« Il faut avancer. On a fait une connerie, c’est tout. »
Cyril ne parvient toujours pas à encaisser l’erreur commise. Depuis son intégration au 36, il avait été irréprochable à deux exceptions près. Au tout début de sa carrière, un violeur avait été remis en liberté pour vice de procédure. Il avait agressé deux jours plus tard une jeune femme dans un parking. Concernant le cas Besson, la faute était plus collégiale, mais la conséquence identique. Un psychopathe encore dans la nature et deux homicides qui auraient pu être évités.
« Concernant la découverte du dernier corps, Marilyne Azoulay, la signature est toujours la même. La victime a été installée en position fœtale, phalanges écrasées, dans le 12e, au fond d’une petite allée du bois de Vincennes. Nous pouvons noter toutefois qu’il devient plus prudent. Comme il tient à conserver son plan : un cadavre par arrondissement et que les patrouilles se multiplient, il s’est éloigné des rues passantes et privilégie désormais les coins sombres.
– Le même rituel pour les chaussures ?
– Toujours pareil. J’ai relu le rapport du psy de Besson. Il énonce sans le moindre doute que son patient est un sociopathe. Notre tueur lui est un psychopathe. À l’époque, l’expert en criminologie que Cyril avait contacté avait déclaré : “Les psychopathes naissent psychopathes, les sociopathes le deviennent.” Les sociopathes sont généralement moins stables émotionnellement et très impulsifs. Ils manquent de patience et sont moins organisés. Ils raffolent de la publicité. C’est pour cette raison qu’ils commettent plus souvent des erreurs qui conduisent à leur arrestation. C’est le cas de Besson. Les psychopathes quant à eux ne cherchent pas à faire parler d’eux. Ils planifient leur crime dans les moindres détails. Le profil de ce type d’homme est une absence absolue d’empathie, un narcissisme violent, un besoin de tromper et de manipuler, une incapacité à ressentir de la culpabilité, de la crainte ou quelque remords que ce soit. Il souffre d’un désordre psychique généralisé. Ce mec est un danger public, une bombe à retardement. »
Richard marque une pause et fixe Rebecca droit dans les yeux.
« Et je me permets de rajouter au nom de toute l’équipe que s’il est l’auteur des appels que tu reçois, Rebecca, il ne faut pas prendre cette menace à la légère.
– Je ne prends rien à la légère, Richard, mais si je commence à me préoccuper de tous les tarés qui existent sur cette terre, je n’ai pas fini de me faire des nœuds au cerveau.
– Rebecca, je suis d’accord avec Richard, ajoute Cyril. C’est tout de même la première fois que tu te retrouves harcelée de la sorte. »
Cyril Bonaventure montre un regard soucieux, presque en colère.
« Que veux-tu que je fasse ? J’ai tracé les appels. Ils viennent tous d’un téléphone prépayé. J’ai envoyé les lettres au labo pour les empreintes. Il n’y en a aucune. La seule réponse à donner, c’est de trouver ce malade et de l’arrêter. Alors maintenant, questions : comment parvient-il à neutraliser ses victimes sans se faire remarquer ? Comment arrive-t-il à les transporter ? À mon avis, nous avons affaire à un homme suffisamment costaud pour porter les corps et très discret pour n’éveiller aucun soupçon. Enfin, il aime le risque pour se permettre de les kidnapper, de les torturer, puis de les déposer dans une rue de Paris. Richard, tu as été à l’autopsie. On a du nouveau ?
– Je pense que oui. Le toubib a révélé deux éléments passés inaperçus lors de l’examen d’Antoinette Desgardin. Tout d’abord une trace de piqûre au niveau du cou, puis des microparticules de sciure de bois sous les doigts.
– Comment a-t-il pu ne pas voir cette piqûre ?
– Elle était très difficile à déceler, car la marque était recouverte par le tatouage du croissant de lune. Il a donc demandé des analyses complémentaires et vient de m’envoyer les résultats. On a retrouvé une infime quantité de curare dans son sang.
– Du curare ? Mais comment a-t-il pu se procurer un pareil poison ?
– J’ai fait des recherches. »
Cyril Bonaventure scrute avec envie et fierté son lieutenant. Il l’a bien formé. Richard est devenu un bon procédurier : pointilleux, curieux, méticuleux, organisé.
« Alors, un petit rappel sur l’origine. Le curare est un poison issu d’une liane de la forêt tropicale amazonienne. Son nom vient du mot ourari qui signifie “la mort qui tue tout bas”. Il était utilisé par les chasseurs amérindiens pour paralyser les gibiers, mais jamais les hommes. Le curare permet un relâchement musculaire complet. Il agit uniquement sur les muscles striés squelettiques donc, épargne le cœur.
– La victime est consciente ?
– Tout à fait. Il n’a aucune action sédative. Il bloque les récepteurs et empêche par conséquent les muscles de se contracter.
– Qui a accès à ce type de poison ?
– Les anesthésistes sont les seuls médecins autorisés à administrer le curare par voie intraveineuse. »
Rebecca se passe les deux mains dans les cheveux en inspirant longuement.
« On a une bonne idée désormais de son mode opératoire. Il s’approche d’une femme, lui injecte le poison à l’aide d’une seringue. Cette dernière est consciente, mais n’est plus libre de ses mouvements. Il l’emmène dans sa voiture.
– Et là, je pense qu’il lui attache les poignets sur une sorte de planche en bois. »
Richard reprend sa démonstration.
« Le légiste a validé le fait que de tout petits poils avaient été arrachés au niveau des poignets certainement à l’aide d’un scotch. Il pose les mains de la victime et il frappe.
– C’est pour cela que l’on a retrouvé des traces d’écorces dans les chairs…
– Exact. Mais cette fois-ci, le choc a dû être extrêmement brutal, car le toubib n’avait pas remarqué ces éléments sur les doigts de Mme Desgardin. On a vérifié sur les rapports d’autopsie des dix premières victimes, idem.
– Il commence à perdre le contrôle de la situation. Sa violence redouble d’intensité. Il va commettre une erreur. Richard, tu conclus ?
– Une fois sa torture terminée, il étouffe ses victimes certainement à l’aide d’un sac en plastique et dispose le corps toujours dans la même posture, dans un endroit repéré préalablement. En revanche, je n’ai pas d’explication sur les chaussures. Pourquoi les enlève-t-il et pourquoi les mettre dans cette position ?
– J’ai réfléchi un peu à la signification, ajoute Cyril. Enlever ses chaussures est un acte d’humilité, par exemple à l’entrée d’un lieu de culte. Il y a aussi au Japon notamment la notion “d’intérieur-sacré” et “d’extérieur-souillé”. On retire toujours ses chaussures par respect et pour éviter de salir le “sacré”. »
Cyril stoppe sa démonstration, constatant l’incompréhension dans le regard de ses collègues. Ces recherches ne vont pas dans la bonne direction.
« Je sais que tu adores apprendre des trucs et nous les restituer, mais là je ne vois vraiment pas le rapport, lance Rebecca. Quelqu’un a une autre idée lumineuse à nous soumettre ? Si vous pouviez nous éviter les articles de Wikipédia…
– J’ai quelques notions de psycho, dit Mélina. Freud a identifié la chaussure comme un symbole sexuel et le pied comme symbole phallique. Le pied se glisse dans la chaussure, donc la chaussure est un symbole du sexe féminin. Cette signature signifie peut-être pour notre homme le désir de retirer toute féminité à ses victimes, de les réduire à l’état d’objet. »
Rebecca hoche la tête, pensive.
« Possible. Poursuis dans cette voie-là. Ce type est un grand malade. Maintenant, il faut savoir pourquoi il a disparu des écrans radars pendant aussi longtemps. »
Mélina toussote pour s’éclaircir la voix et reprend la parole. Elle a décidé de marquer son territoire.
« Je n’ai rien trouvé sur les incarcérations qui pourraient correspondre au profil de notre gars. En revanche, j’ai peut-être découvert un truc. Le 7 mars 2009, soit deux jours après son dernier homicide, il y a eu un drame autour du stade de France. Un petit groupe de supporteurs du club de foot de Lille en sortant du match ont été percutés par une rame de RER. Bilan : deux morts, un gamin de 10 ans et un adolescent de 18 ans et onze blessés.
– Qu’est-ce qui te fait penser que notre homme pourrait être l’un d’eux ?
– Rien de sûr évidemment, mais j’ai fait des recherches sur les blessés. Certains l’ont été très grièvement, d’autres sont restés paralysés de longs mois. J’ai retrouvé la trace de dix d’entre eux. Le dernier avait donné une fausse identité et a totalement disparu dans la nature depuis. C’est bizarre quand même non ?
– Effectivement. On n’a même pas de photos ?
– Rien du tout.
– Bon boulot, Mélina. Je suis fière de toi. »
La fin de journée passe beaucoup trop vite. Entre les coups de téléphone, les rapports et les interrogatoires, il est déjà presque 20 heures. Rebecca lève les yeux de ses dossiers et ordonne à ses collègues de rentrer chez eux. Ils ont besoin de repos. Le rendez-vous est fixé au lendemain 8 heures. Mélina tourne en rond depuis quelques minutes lorsqu’elle se rapproche discrètement de son commandant.
« Rebecca ? demande-t-elle d’une voix extrêmement faible.
– Oui ? Que se passe-t-il ? Tu as un souci ?
– Je peux te parler deux minutes, mais si cela pouvait rester entre nous, cela m’arrangerait. »
Rebecca acquiesce. Les deux femmes échangent durant quelques minutes sous l’œil observateur du capitaine Bonaventure. Puis il voit Mélina quitter le bureau, la mine réjouie. Cyril se dirige alors vers son commandant, préoccupé.
« Elle voulait quoi la miss Ponzio ? Une prime pour service rendu ?
– Mais j’ai devant moi un mec vexé de ne pas avoir trouvé le symbole de la chaussure ? remarque-t-elle en souriant.
– N’importe quoi… Les chaussures, c’est un truc de filles de toute façon !
– Eh bien ce que vient de me demander Mélina ne te regarde pas ! C’est justement un truc de filles », répond Rebecca, amusée.
Cyril hausse les épaules en bougonnant.
« Je te raccompagne ? »
Elle le fixe droit dans les yeux.
« Je suis une grande fille. Tu ne vas pas me pister à la culotte comme ça jusqu’à la fin de l’enquête.
– Je suis inquiet pour toi.
– Ça va aller. Je rentre et je m’enferme. J’ai deux sécurités, un interphone avec caméra et une porte blindée. Je pense que je suis suffisamment protégée. Et je n’ouvre jamais aux inconnus ! »
Cyril observe Rebecca quitter le bureau, avec une impression étrange, inexplicable. Il ne peut se défaire, depuis quelques jours, d’un sentiment de malaise grandissant.
Ce soir, les rues sont désertes. Aucune circulation. Rebecca met moins d’une demi-heure pour parvenir à son domicile et se garer. Elle tourne la clé dans la serrure un rien amusée. Son capitaine la materne et cela la réconforte. Cette équipe est vraiment l’une de ses plus belles réussites.
Elle demeure un instant immobile, mais la réalité la rattrape. Sa montre affiche 21 heures. Son frigo est vide. Elle est seule. Un repas japonais s’impose, composé de sashimis, de gyozas, d’une salade d’algues et d’une bière. Quinze secondes sur son application préférée et trente minutes plus tard, la sonnerie retentit. Affamée, elle ne regarde ni la caméra du visiophone ni par le judas et ouvre sa porte avec un large sourire. Un homme casqué et vêtu de noir se retourne brutalement et lui tend un sac.
« Bon appétit.
– Merci », répond-elle en récupérant sa commande.
En voyant le coursier reprendre l’ascenseur, Rebecca l’interpelle :
« Attendez, une petite minute. »
Elle se dépêche d’aller chercher une pièce dans son porte-monnaie et lui donne son pourboire.
« Merci, madame. Excellente soirée. »
Rebecca referme sa porte à double tour et se dirige vers son canapé. Elle s’affale de tout son long, allume la télévision, décapsule sa bouteille de bière et en boit une grosse gorgée d’un seul trait. Cette journée a été éreintante. Elle laisse défiler les images sans vraiment les regarder lorsque son portable sonne. La photo de Tom s’affiche sur l’écran.
« Salut.
– Salut.
– Je ne t’ai pas vue aujourd’hui. Ça va ?
– Épuisée. La journée a été très longue.
– Qu’est-ce que tu fais ?
– Je viens de commander du japonais et je mate la télé.
– Tu regardes quoi ?
– Rien, répond-elle en souriant. Tout est nul.
– Je peux passer ? »
Rebecca ferme les yeux.
« Pas ce soir, désolée, car je suis vraiment morte de fatigue. Tu dors à quel endroit ? Tu n’en as pas profité pour retourner chez ta femme au moins ? »
Elle imagine son sourire à l’autre bout du fil.
« J’ai pris une chambre d’hôtel à côté de la Crim’. Ce n’est pas le grand luxe, mais ça ira pour l’instant.
– Tu regrettes notre décision de ne pas avoir emménagé tout de suite ensemble ?
– Non, pas du tout. Tu as raison. Je dois me retrouver seul un moment. Je pense avoir besoin d’une coupure, une toute petite coupure, car je ne vais pas supporter très longtemps la vie dans une chambre d’hôtel.
– C’est l’histoire de quelques semaines. Pour être sûrs de nous. On se voit demain soir ?
– O.K.
– Et si tu es très gentil, tu pourras même rester dormir à la maison.
– Votre Altesse est trop bonne, répond-il en riant. On se voit demain alors. Je crois que je vais aller me coucher. Je n’ai pas grand-chose à faire d’autre.
– Ne me culpabilise pas, cela ne marchera pas. »
Tom raccroche en souriant. Rebecca scrute son portable. Il n’a pas beaucoup insisté… Elle secoue la tête. Tu ne sais vraiment pas ce que tu veux, ma pauvre fille. Soudain un nouveau bip raisonne. Un SMS. Elle appuie sur le bouton pour ouvrir le message.
En parcourant les mots, elle reconnaît la chanson de Julien Clerc, Fais-moi une place.
Elle se surprend à la chantonner en souriant.
« … Je t’aime. »
Une larme jaillit sans prévenir au coin de son œil qu’elle laisse couler le long de sa joue. C’est la première fois qu’il lui fait une telle déclaration. Pourquoi lui avoir dit de rester dans sa chambre d’hôtel ?
Elle s’apprête alors à répondre à son SMS lorsqu’elle perçoit un bruit derrière la porte. Ce dernier est si faible qu’elle a failli ne pas l’entendre.
Elle se précipite pour aller ouvrir. Tom est là, dehors. Il ne l’a pas écoutée et il a eu bien raison. À cet instant, tout devient limpide. Elle l’aime et Tom doit venir emménager avec elle, dans cet appartement, immédiatement. À 50 ans, ils n’ont plus de temps à perdre en tergiversations. Ils sont amoureux, ils vont vivre ensemble, un point c’est tout. Au diable les râleurs et les biens pensants.
En entrebâillant la porte, Rebecca a un moment de stupeur. Instinctivement, elle recule d’un pas et pose sa main à la ceinture par automatisme. Vide. Elle sait parfaitement qu’en rentrant chaque soir son premier réflexe est d’aller mettre son pistolet en sécurité dans un tiroir de sa chambre.
Elle se déplace lentement, figée, une arme pointée sur elle. Il est trop tard pour réagir.
« Les lettres… c’était… ? demande-t-elle d’une voix étranglée.
– Naturellement ! »
Elle doit gagner du temps, parlementer, mais son rythme cardiaque s’affole. Surtout ne pas perdre son sang-froid. Elle se force à respirer pour se calmer. En vain. Se retrouver face à un criminel, elle en a l’habitude, mais là…
« Qu’est-ce que… »
Elle n’achève pas sa phrase. Les mots restent bloqués au fond de sa gorge. Incompréhensible et surréaliste sont les deux termes qui lui viennent en tête à cette seconde.
« Qu’est-ce que je vais faire de toi ? C’est ça que tu veux me poser comme question ? Eh bien après réflexion, te torturer me semble une excellente idée, dans un premier temps, bien entendu. »
Rebecca mesure à cet instant à quel point elle a eu tort de se croire indestructible. Et cette erreur, elle va la payer cash.